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Rapport de la commission du Sénat sur le métier d’enseignant (juin 2012, 101 p.). Les extraits concernant l’éducation prioritaire

26 septembre 2012

Présenté le 20 juin, le rapport de la mission d’information sur le métier d’enseignant évoque la souffrance des enseignants. Il préconise une réforme de la masterisation et une refondation de l’école basée sur des valeurs démocratiques.

"L’épuisement professionnel et les problèmes de santé graves d’une partie des enseignants sont des symptômes d’une crise du travail enseignant... La souffrance individuelle au travail doit être interprétée plus profondément comme une manifestation d’une déstabilisation structurelle et collective du métier. A côté de situations extrêmes caractérisées et prises en charge par la médecine, il convient d’aborder, sans complaisance et objectivement, ce que Françoise Lantheaume (Université Lyon II) a appelé « la souffrance ordinaire » des enseignants". Cette formule, Brigitte Gonthier-Maurin, sénatrice communiste, rapporteure de la Mission d’information sur le métier d’enseignant, la prend pleinement à son compte.

Extrait de cafepedaggoique.net du 25.09.12 Un rapport parlementaire dénonce la "souffrance ordinaire" des enseignants

 

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Ci-dessous les extraits concernant l’éducation prioritaire

p. 14 L’enjeu crucial est donc de repenser l’enseignement pour s’adresser à des enfants qui ne sont pas dans la connivence avec l’école mais qui n’ont que l’école pour apprendre. Pourtant, selon les analyses développées devant la mission par Stéphane Bonnéry1 (Université Paris 8), c’est encore la seule prise en compte des enfants d’initiés, familiers de la norme scolaire, qui oriente le système éducatif et modèle le métier d’enseignant. La très grande majorité des élèves en échec scolaire n’était pas vouée à l’échec, si l’on met de côté des pathologies rares. C’est bien l’école qui transforme des inégalités sociales de connivence à l’école en inégalités de réussite scolaire.

[…] Enfin, la mission regrette de n’avoir pu se pencher, comme elle le
souhaitait initialement, sur la situation spécifique de l’outre-mer, où l’échec
scolaire demeure nettement plus élevé qu’en métropole.

p. 29 La RGPP dans le premier degré […] Dans le 1er degré, l’inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche (IGAENR) a relevé lors de l’examen de la préparation de la rentrée 2011, que la baisse de la préscolarisation dès deux ans était tellement nette depuis plusieurs années que ce gisement d’économies faciles était presque asséché « à l’exception de quelques départements où cette question est en revanche très sensible ». C’est le cas dans le Nord ou le Finistère où environ 40 % des enfants de deux ans sont encore scolarisés. En revanche, la taille des classes est demeurée le levier le plus massivement employé et beaucoup d’inspecteurs d’académie ont augmenté les seuils « y compris en milieu rural et y compris dans les écoles de l’éducation prioritaire qui ne sont pas sanctuarisées mais traitées comme les autres ».
1 En outre, de grandes tensions devaient perdurer « dans les départements démographiquement dynamiques et ayant un taux d’encadrement faible, pour l’essentiel situés en banlieue parisienne et en Rhône-Alpes. »2 Aucune de ces orientations ne saurait être interprétée comme favorable aux apprentissages des élèves, notamment des plus faibles et des plus modestes, victimes d’une forte ségrégation sociale et scolaire.

La réduction des postes « hors classe » met en lumière certaines contradictions de la politique passée du ministère de l’éducation nationale. La catégorie des emplois hors classe est très hétérogène puisqu’elle comprend les postes de soutien dans les réseaux de réussite scolaire, les professeurs mis à disposition des IUFM, les itinérants de langue régionale, ainsi que les décharges de directeurs d’écoles, de maîtres formateurs, pour l’animation culturelle, pour les TICE, etc.

p. 32 Les Heures Supplémentaires Effectives (HSE) c) Les dispositifs particuliers
Un dispositif d’accompagnement éducatif après les cours existe depuis la rentrée 2007 dans tous les collèges publics et privés sous contrat, ainsi que dans les écoles relevant de l’éducation prioritaire. Les personnels enseignants assurant l’aide aux devoirs et aux leçons au titre de l’accompagnement éducatif sont rémunérés sous forme d’HSE ou de
vacations pour un montant total d’environ 96,2 millions euros pour l’année scolaire 2010-2011, correspondant à 2,6 millions d’HSE.
Depuis la rentrée 2010, dans le cadre de la réforme du lycée, des stages de remise à niveau et des stages passerelles ont été organisés dans les lycées publics et privés pendant les vacances scolaires ou en cours d’année. Ces stages sont assurés dans la plupart des cas par des enseignants volontaires rémunérés en HSE.

p. 33 La prolifération des missions… La succession rapide et tous azimuts des réformes (socle commun, aide personnalisée, ECLAIR, etc.) aboutit à une prolifération difficile à articuler des missions imparties à l’école qui vont de la formation du citoyen à la constitution d’une élite, de la démocratisation à la personnalisation, de la concentration sur les fondamentaux à l’ouverture sur la société et la diversité des savoirs. L’appareil administratif produit en conséquence une multitude de
textes normatifs, de décrets, de circulaires, d’instructions et de discours, qui ne hiérarchisent et ne clarifient pas les priorités mais formulent et empilent des contraintes irréconciliables.

p. 36 L’exemple de la réforme de la voie professionnelle (et de celle de l’éducation prioritaire) Le nouveau mode de gestion de l’éducation nationale, initié par la rénovation du lycée professionnel, se retrouve en particulier dans l’évolution de la politique d’éducation prioritaire. Ainsi, l’expérimentation CLAIR (Collèges et lycées pour l’innovation, l’ambition et la réussite), qui devait initialement rester restreinte et soumise à une évaluation rigoureuse, est d’une année sur l’autre étendue aux écoles, puis généralisée brutalement à tous les établissements pour reconfigurer de facto les réseaux ambition réussite aux mépris des objections de la communauté éducative. Retrait de l’échelon central, faiblesse de l’évaluation, autonomie des établissements sans cadrage national solide sont devenus les maîtres-mots.

p. 38 […] En mettant en segment conjointement l’enseignement professionnel,et l’éducation prioritaire, segments très fragiles du système scolaire, la politique menée dans les dernières années pénalise surtout les enfants de milieu populaire qui sont concentrés dans ces établissements. Parallèlement, l’enseignement supérieur et le lycée général, qui s’adressent à des élèves plus favorisés ont connu une préservation de leurs ressources. La contrainte budgétaire s’est donc mécaniquement traduite par des arbitrages au détriment des plus faibles. Ce sont ceux-là même qu’on stigmatisait parallèlement au nom de la lutte contre la violence scolaire et le décrochage.

p.51 Un accompagnement insuffisant de enseignants-stagiaires Par ailleurs, la Cour des comptes a relevé dans son dernier rapport
public annuel que la proportion d’enseignants-stagiaires affectés en éducation prioritaire était dans le 1er degré plus élevée que celle des titulaires dans huit académies (Aix-Marseille, Amiens, Besançon, Caen, Guyane, Martinique et Montpellier).

p.55 (4) L’accompagnement des jeunes enseignants après leur titularisation Votre rapporteure s’est également inquiétée de ce qui advenait des enseignants-stagiaires titularisés. Les moyens humains étant contraints, il est en effet prévisible que l’accompagnement lors de la deuxième année d’exercice soit moins fort que pendant l’année de stage. En outre, même s’ils ont pu être préservés en tant que stagiaire par une affectation dans un poste plus facile, les contraintes du mouvement rendent inévitables leur affectation, à partir de la deuxième année, là où les besoins sont les plus pressants et dans des postes plus difficiles, en éducation prioritaire notamment.

p.60 Critiquer l’idéologie élitiste de la méritocratie et affirmer le principe de « tous capables » La notion de mérite fait actuellement l’objet d’un engouement excessif dans l’univers scolaire. Si l’école fonctionnait réellement sur la base du mérite, quelle qu’en soit la définition, alors aucune corrélation solide entre réussite scolaire et origine sociale ne pourrait être mise en évidence. C’est pourtant le cas, si bien qu’il faut en conclure que la méritocratie est surtout un instrument rhétorique pour présenter l’élitisme sous un jour plus acceptable dans une société démocratique.
Certaines réformes du précédent gouvernement étaient destinées à
réserver des dispositifs comme les internats d’excellence aux « élèves
méritants ». Le dévoiement de la logique méritocratique finit par justifier les inégalités scolaires en figeant et en naturalisant les potentiels d’apprentissage de chaque enfant et en faisant de l’échec scolaire la sanction inévitable d’une supposée incapacité personnelle de l’élève.
Votre rapporteure estime qu’il faut déraciner ce préjugé qui nourrit le
fatalisme en rappelant que l’efficacité pédagogique, particulièrement à l’égard des enfants de milieux populaires, est un facteur identifié d’amélioration des résultats scolaires des élèves, quel que soit leur mérite individuel.

p.67 Mettre en place des dispositifs de prérecrutement Le prérecrutement ne doit pas être assimilé à un numerus clausus dans la mesure où les étudiants qui n’auraient pas été prérecrutés garderaient la possibilité de suivre les masters enseignement et de présenter les concours.
Il vise plutôt à sécuriser les parcours d’étudiants, notamment issus de milieux modestes, qui s’orientent très tôt vers la carrière professorale.

p.71 Favoriser l’émergence de collectifs enseignants… Un large consensus règne pour favoriser l’émergence de collectifs enseignants stables et innovants dans les établissements. Pourtant, l’autonomie des établissements, cheval de bataille du précédent gouvernement, se résume
en pratique au dessaisissement des enseignants via le renforcement de
l’autorité du chef d’établissement notamment dans les établissements ECLAIR et l’alourdissement des instructions émanant du ministère. Les logiques administratives l’emportent sur les logiques pédagogiques. Les groupes de travail d’enseignants suivis par le CNAM ont eux, au contraire, le mérite de renforcer les liens horizontaux entre collègues en donnant corps et intérêt à la notion d’équipe pédagogique autonome

EXAMEN EN COMMISSION

p.80 M. Jacques Legendre [UMP] […] L’affectation des jeunes enseignants là où les besoins sont pressants en zone d’éducation prioritaire (ZEP), est inévitable, écrit Mme la rapporteure. Je ne suis pas d’accord : il faut y attirer les professeurs confirmés, via des incitations suffisantes. Nous faisons des propositions à ce sujet.

LES CONTRIBUTIONS DES GROUPES PARLEMENTAIRES

p. 96 La contribution du groupe UMP du Sénat […] Il faut reconnaître la spécificité du métier d’enseignant en ZEP. Aussi serait-il souhaitable, comme l’a proposé la mission commune d’information sur l’organisation territoriale du système scolaire1, d’empêcher l’affectation d’enseignants néo-titulaires en ZEP.

 

Voir aussi sur le même rapport Rapport d’information au Sénat sur le métier d’enseignant (avec des extraits sur l’éducation prioritaire)

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