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Les assouplissements de la carte scolaire ont déstabilisé certains collèges ECLAIR, et favorisé le privé (DEPP)

6 juin 2013

Les effets de l’assouplissement de la carte scolaire, Éducation & formations n° 83, juin 2013

La revue Éducation & formations consacre ce numéro à l’évaluation de la politique d’assouplissement de la carte scolaire. Il restitue les résultats de différentes recherches de sciences humaines et sociales portant sur les modalités de la mise en œuvre de cette mesure depuis la rentrée scolaire 2007. Plusieurs études se sont intéressées aux stratégies des familles, des établissements, des administrations et des élus locaux. Elles montrent l’impact de la réforme sur leur comportement et en estiment les effets de renforcement de la mixité ou de la ségrégation scolaire.
Ces études ont été menées dans le cadre d’un appel à projets de recherche lancé par la direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance du ministère de l’éducation nationale, en partenariat avec la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité, aujourd’hui partie intégrante du Défenseur des droits.

Sommaire

Présentation, Caroline Simonis-Sueur

Ce numéro thématique de la revue Éducation & formations sur les effets de l’assouplissement de la carte scolaire est consacré à la restitution de résultats de différentes évaluations de la réforme de la carte scolaire mise en place à la rentrée scolaire 2007, menées dans le cadre d’un appel à projets de recherche lancé en novembre 2009 par la direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance du ministère de l’éducation nationale, en partenariat avec la Halde (aujourd’hui partie intégrante du Défenseur des droits).

Cet appel à projets de recherche en direction d’équipes en sciences humaines et sociales sociologie, sciences de l’éducation, économie, démographie, géographie, …) avait comme objectifs d’éclairer les modalités de la mise en œuvre de la politique d’assouplissement de la carte scolaire, d’étudier les stratégies des acteurs (familles, établissements, administrations et élus locaux) et l’impact de cette mesure sur leurs comportements afin d’en estimer les effets de renforcement de la mixité ou de la ségrégation sociale.

Début 2012, l’ensemble des travaux de recherche a été restitué aux commanditaires sous la forme de rapports d’évaluation. Ces évaluations, dont certaines ont été rendues publiques in extenso par leurs auteurs, ont d’ailleurs contribué au débat public courant 2012, notamment à l’occasion de la concertation pour la refondation de l’école ou par les échos qu’elles ont suscités dans la presse nationale. Elles ont également alimenté les réflexions de la mission d’information sur la carte scolaire du Sénat.

Conformément à sa vocation, la revue Éducation & formations entend contribuer, par la valorisation de ces travaux de recherche, a l’évaluation des politiques publiques dans le domaine de l’éducation. Nous avons ainsi fait le choix éditorial, dans ce numéro thématique, de commander a chacune des équipes évaluatrices des contributions qui se voulaient complémentaires, afin d’avoir une vision d’ensemble des effets de cette mesure. Pour compléter le panorama et mettre en perspective ces observations, d‘autres analyses ont été réalisées au sein de la direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance.

Les deux premiers articles (Thaurel-Richard et Murat ; Fack et Grenet), s’interrogent sur les effets de la réforme à l’échelle nationale, à partir d’analyses statistiques et de modélisations économétriques. Ainsi, l’impact de cette reforme semble assez limité macroscopiquement sur les effectifs d’élèves et sur le profil social des collèges publics. Cependant, certains établissements relevant de l’éducation prioritaire ont vu leurs effectifs d’élèves nettement baisser. La composition sociale des établissements du secteur privé, quant à elle, semble avoir vu s’accroître la part des familles très favorisées. Ces articles ouvrent aussi la réflexion sur les répercutions différentielles de la réforme en fonction des territoires et en fonction de l’offre scolaire locale. Rappelons qu’avant 2007, deux tiers des collèges étaient déjà inclus dans une zone de choix. Des équilibres locaux s’étaient mis en place dans certaines agglomérations depuis le courant des années 1980, équilibres ébranlés par l’assouplissement de 2007. Ainsi, des logiques de hiérarchisation sociale des
établissements scolaires s’élaborent localement et les processus ségrégatifs s’accentuent en milieu urbain, comme le développent très justement les troisième et quatrième articles (Ben Ayed et al. ; Oberti et Préteceille).

Parallèlement a l’évaluation des effets de la réforme, sa mise en œuvre a également été interrogée notamment au travers du jeu des acteurs institutionnels (Agulhon et Palma ; Dutercq et Mons ;
Van Zanten et da Costa). En effet, là encore, des équilibres ont été plus ou moins modifiés. Les trois acteurs institutionnels locaux (conseils généraux, inspections académiques et établissements) poursuivent chacun leurs propres objectifs, conduisant ce faisant à une absence de régulation conjointe dans la mise en œuvre de la réforme.
Les conseils généraux tentent de définir une carte scolaire rationnelle sur des critères de mixité sociale, d’équilibre d’effectifs d’élèves, de pérennité à moyen terme de la sectorisation. Cependant, ils doivent négocier avec l’ensemble des acteurs que sont les administrés dont les usagers des établissements scolaires (parents, associations de parents d’élèves), les élus locaux, les personnels de l’éducation nationale.
Les inspections académiques, quant à elles, se retrouvent prises en étau entre la demande sociale et les moyens en postes dont elles disposent, compte tenu des infrastructures existantes. Par ailleurs, elles sont soumises aux injonctions nationales de réformes tout en cherchant à tenir compte des spécificités socioéconomiques et socio‐scolaires de leur territoire.
Enfin, les établissements scolaires tentent de négocier, à la marge, des améliorations de moyens entre les inspections académiques qui régulent les effectifs et les moyens pédagogiques et les conseils généraux qui reconfigurent leur périmètre de recrutement et allouent leurs moyens financiers de fonctionnement.

Enfin, une indispensable mise en perspective internationale (Lefresne) nous démontre notamment, après une présentation des quatre situations-types d’affectation des élèves, que d’une part, la liberté de choix des familles est rarement synonyme d’absence de régulation, et que d’autre part, la combinaison entre stratégies des familles et stratégies des établissements conduit à renforcer la polarisation sociale de ces derniers au détriment de la mixité sociale. Ainsi, la plupart des pays cherchent à développer un équilibre entre liberté de choix des familles, régulation de cette liberté et maintien de la mixité sociale.

Première partie - Évaluations des effets de l’assouplissement de la carte scolaire

- Évolution des caractéristiques des collèges durant la mise en œuvre de l’assouplissement de
la carte scolaire de 2007, Michèle Thaurel-Richard, Fabrice Murat

L’étude de la taille et du profil social des collèges entre 2004 et 2011 peut être un moyen d’approcher l’impact de la politique d’assouplissement de la carte scolaire mise en œuvre en 2007. En effet, du fait des dérogations plus souvent acceptées, certains collèges ont pu perdre des élèves et d’autres en gagner, ces élèves venant sans doute d’un milieu social particulier. Bien sûr, d’autres
paramètres ont changé dans le même temps, influençant les populations accueillies dans les collèges, ce qui incite à une certaine prudence dans l’interprétation. Dans l’ensemble, les évolutions constatées sur les effectifs d’élèves et le profil social des collèges sont assez faibles. Cependant, le secteur privé a vu sa part augmenter, avec un accroissement plus net dans les familles les plus favorisées. Les établissements de l’éducation prioritaire, en particulier en réseau ambition réussite, ont connu une nette baisse de leurs effectifs, toutefois sans modification de leur profil social.

- Le point sur ... Le choix de l’établissement à l’entrée en sixième, Michèle Thaurel-Richard, Fabrice Murat

- Les effets de l’assouplissement de la carte scolaire dans l’éducation prioritaire, Gabrielle Fack, Julien Grenet

Si l’assouplissement de la carte scolaire de 2007 a eu un impact relativement limité à l’échelle nationale, cette réforme a eu des effets significatifs sur les collèges de l’éducation prioritaire. Nos estimations révèlent que l’augmentation du nombre de dérogations accordées pour éviter ces collèges a entraîné une érosion significative des effectifs scolarisés en sixième entre 2006 et 2009, d’au moins 5 % pour les collèges des réseaux de réussite scolaire et d’au moins 9 % pour les collèges « ambition réussite », avec de fortes variations locales. L’examen de la composition sociale de ces établissements ne permet pas de conclure de manière significative sur son évolution.

- Quels impacts de l’assouplissement de la carte scolaire sur la ségrégation sociale au collège ?
Tendances nationales et déclinaisons locales contrastées, Choukri Ben Ayed, Sylvain Broccolichi, Brigitte Monfroy

Comment la politique d’assouplissement de la carte scolaire et ses mises en œuvre locales ont-elles impacté la ségrégation sociale au collège ? La réponse à cette question se construit à partir de connaissances antérieures, de comparaisons statistiques et d’enquêtes de terrain. Quand la fréquence des dérogations accordées à l’entrée en sixième double en France entre 2006 et 2008, les ségrégations s’accentuent nettement aux deux extrémités de la hiérarchie sociale des collèges urbains. Y participe à la fois une fuite accrue et socialement inégale des collèges stigmatisés et l’usage encore plus massif du secteur privé par les familles les mieux dotées socialement, en réaction à l’essor des dérogations. Nous le vérifions encore plus nettement à partir d’enquêtes comparant les politiques locales et l’évolution contrastée des ségrégations scolaires à Lille et à Saint-Étienne sur plus de dix ans : l’amplification durable des scolarisations hors secteur alimente des processus cumulatifs de hiérarchisation et de stigmatisation de collèges aux effets délétères.

- Dérogations et contextes scolaires locaux : comparaison Hauts-de-Seine / Seine-Saint-Denis,
Marco Oberti, Edmond Préteceille

Seconde partie - Réalités institutionnelles de la mise en œuvre de la réforme

- Sectorisation et assouplissement de la carte scolaire. Des actions segmentées et contradictoires, Catherine Agulhon, Joao Palma

- Les principaux de collège face à l’assouplissement de la carte scolaire : un repositionnement
Stratégique, Yves Dutercq, Nathalie Mons

- La gestion de la carte scolaire dans la périphérie parisienne. Enjeux, dynamiques et limites de
la gouvernance éducative locale, Agnès Van Zanten, Sylvie da Costa

- Que nous enseignent les comparaisons internationales en matière de carte scolaire ?,
Florence Lefresne

Télécharger le n° 83 (122 pages)

Extrait de education.gouv.fr :Les effets de l’assouplissemnt de la carte scolaire

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