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Trente ans après sa création, quel est le bilan du bac professionnel pour les élèves les plus fragiles ?

21 août 2015

En 2015, près d’un tiers des candidats au bac sont issus de la voie professionnelle contre à peine 20% il y a seulement 5 ans. Une croissance qui bouscule le monde de l’enseignement supérieur. Fabienne Maillard, professeure en sciences de l’éducation à Lille 3, et Vincent Troger, chercheur au centre de recherche en éducation de Nantes (Cren), dressent un bilan en demi-teinte de ces évolutions, à l’occasion du trentième anniversaire du bac professionnel.

[...] Lors de la généralisation du bac professionnel en trois ans, les enseignants ont pointé les risques d’une telle réforme pour les élèves les plus fragiles. Ces craintes se sont-elles vérifiées ?

FM. Nous n’avons pas de statistiques précises sur le pourcentage d’élèves de la filière professionnelle qui quittent le lycée en cours de route. Selon la DEPP, ils seraient un sur dix à décrocher au lycée, mais combien partent en apprentissage ou dans des formations offertes par d’autres ministères ? À en croire les professeurs rencontrés lors de mes enquêtes, ils seraient plus nombreux qu’avant à ne pas atteindre le bac. Difficile à vérifier ! Ce qui est sûr, c’est que le bac pro en trois ans n’offre plus d’échappatoire aux élèves qui ne souhaitent pas aller jusqu’au bout, comme c’était le cas avec le BEP. Aujourd’hui, à force de le banaliser, le bac est la norme minimale pour accéder à l’emploi qualifié.

VT. Et ceux qui ne l’ont pas se trouvent marginalisés avec des diplômes (CAP, BEP) qui ne valent plus rien. Clairement, cette réforme fragilise encore plus les élèves les plus fragiles.

[...] Que faudrait-il faire justement pour que cette filière soit réellement mieux considérée ?

FM. Le ministère de l’Éducation nationale est extrêmement ambivalent à l’égard de la voie professionnelle. Il la mobilise à chaque fois qu’il entreprend un programme de démocratisation de l’accès à un niveau d’études ou à un diplôme. Mais, en réalité, il s’agit d’une démocratisation ségrégative.
Pour que la voie professionnelle soit considérée comme égale aux autres, il faudrait changer la norme scolaire, la hiérarchie des disciplines. Tant que nous considérerons que les jeunes qui ont des compétences plutôt pratiques sont seulement de "mauvais élèves”, rien ne changera.
Au niveau des études supérieures, il faudrait mettre en place des parcours adaptés. Les STS le font bien pour les étudiants qui se réorientent suite à un échec à l’université en fin de premier semestre par exemple, pourquoi ne le font-elles pas pour les bacs pro ? On parle de passerelles, mais en réalité elles n’existent pas ou peu.

VT. Il faudrait également “modulariser” les parcours au lycée pro. Cela permettrait aux élèves qui le souhaitent d’interrompre momentanément leurs études et de les reprendre plus tard sans avoir tout perdu. Un bon moyen de limiter les dégâts pour ceux qui échouent.

Extrait de letudiant.fr du 15.06. 2015 : Le bac pro face au cap difficile de la trentaine

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