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Alain Juppé sur les enseignants en éducation prioritaire : "créer les conditions pour que les enseignants en aient envie, une bonne équipe pédagogique, des moyens accrus, une meilleure rémunération". Revue de presse de son ouvrage

25 août 2015

Sur l’éducation prioritaire
Troisième acte : la parution, ce 26 août, du livre d’Alain Juppé : « Mes chemins pour l’école » ( JC Lattès, 306 pages). Il ne s’agit plus formellement de passer en force et d’en imposer d’en haut. Alain Juppé « souhaite que l’on expérimente sur la base du volontariat avant de généraliser les changements s’ils s’avèrent efficaces. On ne va pas imposer le même schéma dans tous les établissements » . C’est ainsi, par exemple, que la revalorisation proposée d’augmenter de 10% le salaire des enseignants du premier degré apparaît conditionnée par une présence accrue (et éventuellement diversifiée) des professeurs des écoles dans leurs établissements.

Pour ce qui concerne les enseignants affectés aux réseaux d’éducation prioritaire, il faut selon Alain Juppé « créer les conditions pour que les enseignants en aient envie, une bonne équipe pédagogique, des moyens accrus, une meilleure rémunération. Il faut arriver à rebattre les cartes ; mais, là aussi, sur la base du volontariat ».

Extrait de blogs.mediapart.fr/claude-lelièvre du 24.08.15 : La longue marche éducative d’Alain Juppé

 

 

Des poncifs, quelques propositions ineptes, un blanc-seing à la politique actuelle : le livre sur l’éducation n’a guère convaincu Jean-Paul Brighelli.

C’est un gros livre. Mais une fois que vous en avez éliminé les annexes, les contributions d’experts (le linguiste Alain Bentolila, le psychiatre Boris Cyrulnik, et le physicien Yves Quéré, l’immortel fondateur de « La main à la pâte »), et une longue interview d’Alain Juppé lui-même par un autre de ces spécialistes autoproclamés — Jérôme Saltet — qui abondent aujourd’hui, il ne reste de Mes chemins pour l’école qu’une petite centaine de pages imprimées gros — Alain Juppé se soucie explicitement de l’avis des grands-parents, volontiers presbytes. [...]

Extrait de lepoint.fr du 27.08.15 : Jean-Paul Brighelli : Juppé, de l’eau tiède pour sauver l’école

 

Alain Juppé publie "Mes chemins pour l’école", et il prévient, "ce livre n’est pas un programme de gouvernement", mais une invitation "à débattre". Candidat à l’élection présidentielle de 2017, il ne croit pas "à une grand soir de l’éducation", même si "le fait de refuser la rupture ne signifie pas l’immobilisme", et si, pour le maire de Bordeaux, "une profonde adaptation s’impose et vite". Il présente donc "les grands axes de réflexion qu’ (il) aimerai(t) partager avec les Français" avant de les traduire "quand le temps viendra", en "actions concrètes". Ce livre correspond donc à la conclusion d’un premier temps de son action, celui de la concertation avec les parents, les enseignants et les experts, via un blog. Puis des comités locaux, mis en place à l’occasion de la primaire, feront remonter au candidat les réactions à ses propositions. Alain Juppé préparera ensuite, "en compagnie de la personne appelée à être ministre de l’Education nationale, trois ou quatre textes qui pourront amorcer le changement du système".

Voici un certain nombre de ces "réflexions".

LA REFORME.

A. Juppé a le sentiment "qu’il y a un consensus sur ce qui ne va pas mais aussi, toutes proportions gardées, sur ce qu’il faudrait faire".

"La réforme de l’éducation nationale est une entreprise qui prendra beaucoup de temps (...) Il faut qu’elle soit préparée, comprise et engagée avec et par ceux qui en sont les acteurs, c’est à dire les enseignants et les parents."

LES FINALITES.

"Je souhaite m’imposer un objectif ambitieux (...) : que 100 % de nos enfants maîtrisent effectivement le socle commun à la fin du collège."

"L’Education est nationale, c’est à dire qu’elle doit transmettre et inculquer à nos enfants le sentiment national que symbolisent l’hymne et le drapeau."

"L’école n’a pas le monopole du savoir : sa mission essentielle est de former le jugement, l’esprit critique - la façon d’apprendre à apprendre, si j’ose dire.

"L’école devrait se montrer plus bienveillante, sans aucun laxisme."

LA PEDAGOGIE

"La principale critique (adressée par les parents à la réforme des rythmes scolaires) est la fatigue des enfants, notamment les plus petits (...) La seconde est l’inutilité ou la vacuité de certaines activités péri-éducatives", notamment en maternelle où elles n’ont "aucun sens".

"Je ne souhaite pas ici promouvoir (une méthode d’enseignement) plus que l’autre (...) Il revient aux enseignants et à leurs formateurs de construire leurs propres méthodes."

"Le débat entre la méthode syllabique et la méthode globale devrait être clos depuis longtemps ! Les sciences cognitives ont tranché : l’approche syllabique est plus efficace."

"Nos méthodes d’éducation gagneraient à donner plus d’importance à l’expression orale et au travail en groupe (...) Nous devons nous convertir aux intelligences multiples (...) On a du mal à concevoir qu’il puisse exister plusieurs manières différentes d’apprendre."

"Ne négligeons pas les pratiques artistiques et culturelles (...) Nous avons en France des milliers d’artistes, de musiciens, d’acteurs, de restaurateurs, d’archéologues, qui ne demandent qu’à faire partager leur passion. Que l’école ne craigne pas d’aller à leur rencontre !"

"Je suis plutôt séduit par (l’interdisciplinarité) (...) On pourrait donner aux professeurs de collège une formation multidisciplinaire."

"Des expériences de classes sans notes (...) ont fourni des résultats qui ne sont en rien négatifs"

LA LUTTE CONTRE L’ECHEC PRECOCE

"Je préconise le recrutement de locuteurs étudiants dans les crèches (...), la réduction du nombre d’élèves par classe en maternelle et en CP, et, pour les élèves les plus en difficulté, la création de petits groupes spécifiques. Il conviendra aussi d’offrir une formation particulière pour les professeurs qui enseignent en maternelle."

"J’entends aussi mettre en place une évaluation plus régulière des élèves, qui concernera notamment les années précédant l’entrée en 6e. Je ne suis pas favorable au rétablissement d’un examen d’entrée au collège. Mais il me paraît nécessaire, quelques mois avant que les enfants n’y entrent, de procéder à une évaluation qui permette de ménager un véritable sas de remédiation."

LES STRUCTURES

Les écoles primaires auraient le choix entre trois possibilités, "conserver le mode actuel de gestion (...), basculer en EPLE du premier degré ou rejoindre l’école du socle" et être rattachées à un collège.

"Il faut redonner de la responsabilité à ceux qui font vivre les établissements - à commencer par le ’chef d’équipe’ à la tête de chaque établissement (...) Je compte proposer aux établissements qui se porteront volontaires la mise en place d’une Conseil éducatif d’établissement" qui accompagnerait le chef d’établissement.

"Le collège commun - je préfère cette expression à celle de collège unique -, fréquenté par tous les jeunes Français, me paraît être une réalité incontournable. A mon sens, l’abroger serait ouvrir la voie à un système ségrégatif (...) Le collège est trop uniforme pour prendre en charge les élèves fragiles (...) La gestion souple de la dotation horaire globale (DHG) c’est à dire globalisée et annualisée est, je crois, la bonne réponse pour mettre fin à un collège qui ne sait pas remédier à ces difficulté (...) Je ne souhaite pas imposer d’un haut (mon projet), mais laisser au conseil d’administration et au conseil éducatif d’établissement le choix entre une gestion classique et une gestion libre et responsable."

"On pourrait envisager une revalorisation de 15 à 20 % pour les enseignants du premier degré par l’augmentation des primes. Ce coût important, évalué entre 1,1 et 1,5 milliard d’euros, pourrait être financé par redéploiement au sein du budget de l’Education nationale (...) Nous devons rechercher des marges de manoeuvre dans le secondaire, par exemple en simplifiant ou en allégeant le système des options."

LES ENSEIGNANTS

"La passion pour la discipline est importante, mais ce qui rend généralement un enseignant heureux, c’est de voir un enfant s’épanouir."

La consultation des enseignants "rend surtout un jugement unanime sur la formation initiale des enseignants (...) Je n’imaginais pas recueillir sur ce sujet un cri d’alarme aussi retentissant, qui me conduit à en faire une priorité."

"J’ai compris l’importance stratégique de la formation initiale de nos professeurs, sous ses deux aspects, connaissance de la discipline (en général bien assurée), mais aussi aptitude à transmettre cette connaissance (...), ce que l’on appelle pédagogie."

"Mes Chemins pour l’Ecole", A. Juppé, JC Lattès, 306 p., 12 €

Extrait de touteduc.fr du 23.08.15 : Ceci n’est pas un programme pour la réforme de l’Education nationale

 

Les enseignants sont à prendre. C’est ce que semble penser Alain Juppé qui fait de l’éducation son premier thème de campagne et qui met en avant des augmentations de salaire. Un article dans Le Parisien, la publication très prochaine d’un livre sur l’Ecole, marquent le lancement de sa campagne. Alain Juppé veut se positionner au centre comme un réformateur modéré et pragmatique. Mais que veut il réellement faire de l’école ?

Dans un entretien accordé au Parisien, Alain Juppé annonce la sortie de son premier livre de campagne qui est consacré à l’éducation. C’est par cette question qu’il entame sa campagne pour les primaires des Républicains et, au-delà, pour les présidentielles. En accordant cette place à l’éducation, il se positionne d’emblée au niveau présidentiel. C’est l’éducation qui a été le fer de lance de F. Hollande en 2012. Or, si l’on en croit le sondage Figaro Opinion Way paru cet été, c’est aussi le grand échec de son quinquennat. Les enseignants fuient le parti présidentiel et sa politique scolaire. Cet électorat est à prendre. D’où peut-être la première proposition du candidat Juppé : augmenter de 10% le salaire des enseignants du premier degré... Mais cette proposition porte sa part d’ambiguïtés : il veut augmenter les enseignants tout en maintenant le budget de l’Education nationale en milliards constants, c’est à dire en le diminuant en coût réel...

Sa principale proposition fait l’unanimité. "La priorité, c’est de mettre le paquet sur le début du cursus scolaire, c’est-à-dire l’école maternelle et l’école élémentaire. De l’avis des psys, c’est là que tout se joue, notamment l’illettrisme. Aujourd’hui, on fait proportionnellement plus pour le lycée que pour le primaire. Cela doit changer". Somme toute, ce que dit Alain Juppé c’est ce que dit l’OCDE. Si l’on oublie l’allusion aux psys pour justifier cette orientation, c’est aussi le message de la Refondation. C’est ce qui a justifié les nouveaux rythmes scolaires, la réforme de la formation des enseignants, le nouveau socle commun et les nouveaux programmes. Alain Juppé promet d’ailleurs de ne pas y toucher. Il veut aussi une meilleure formation des enseignants, ce qui le distingue de Nicolas Sarkozy qui l’avait supprimé.

La limite du consensus est pourtant vite atteinte dans les creux de ces propositions. Comment faire pour augmenter et le nombre et le salaire des enseignants du primaire tout en stabilisant la masse salariale de l’Education nationale ? " Il y a une marge de manœuvre dans l’enseignement secondaire. On peut donc réaffecter des postes d’enseignants vers le primaire", répond le candidat Juppé. Là aussi la proposition peut s’appuyer sur des analyses sérieuses. Mais ce que ne dit pas Juppé c’est où se cachent ces marges de manoeuvre.

Parce que ce que propose Juppé c’est ce que Sarkozy a déjà fait. De 2007 à 2012, le nombre d’enseignants a été stabilisé au premier degré (322 000 en 2007, 323 000 en 2012) et a décliné au second degré (389 000 en 2007, 357 000 en 2012). Sous Sarkozy, les marges de manoeuvres ont été trouvées d’abord dans les lycées professionnels (63 000 PLP en 2007, 56 000 en 2012, passage des formations de 4 à 3 ans), dans les séries technologiques puis au collège. Le nombre d’agrégés a peu baissé. Car pas question de toucher aux classes préparatoires par exemple... Les "marges de manoeuvre" que vise Alain Juppé les prendra-t-il dans les filières élitistes ? S’attaquera-t-il au modèle du bac général français qui prolonge au lycée un vaste choix de disciplines ? Ou continuera-t-il à rogner dans les filières populaires ? Il se garde bien de le dire...

Finalement les propositions d’Alain Juppé contournent la principale caractéristique du système éducatif français : les inégalités sociales à l’Ecole. Le problème de l’Ecole française c’est d’abord l’éclatement de l’école républicaine avec la ghettoisation accélérée de certains établissements. La question n’est pas tant la réforme de tout le système que les solutions à apporter aux 20% d’établissements et d’écoles les plus en difficulté et à la sortie de 140 000 jeunes d’origine modeste sans diplôme. Les propositions consensuelles permettent de ne pas poser le seul problème qui vaille. Alain Juppé affirme bien voir les "disparités" dans l’Ecole et ne pas vouloir supprimer la carte scolaire. Mais est-il prêt à les réduire ?

On retiendra un enseignement de la publication du livre d’Alain Juppé : l’éducation devient la chose de la droite. Longtemps chasse réservée de la gauche, la droite se positionne maintenant ouvertement sur ce terrain. Les complexes qu’elle pouvait avoir vis à vis d’un milieu perçu alors comme un fief de gauche ont disparu. La droite est là.
François Jarraud

Extrait de cafepedagogique.net du 24.08.15 : Alain Juppé : L’éducation dans la stratégie de conquête du pouvoir de la droite

 

[...] L’autonomie conduirait les enseignants à choisir leur chef d’établissement parmi trois propositions du recteur. Ce chef d’établissement serait épaulé par une équipe dirigeante d’enseignants qui gérerait la dotation horaire. Chacun de ses membres serait rémunéré ou verrait ses heures de travail réduites. Conscient des résistances, Alain Juppé propose de laisser aux établissements le choix de l’autonomie ou de la formule actuelle. Et mise sur la diffusion des « bonnes pratiques ». L’ensemble de la réforme coûterait 4,5 milliards d’euros tout au plus, financés par un rééquilibrage des recrutements d’enseignants du secondaire vers le primaire.

Extrait de lesechos.fr du 26.08.15 : Une révolution explosive pour l’école

 

Voir aussi
Alain Juppé (interview) : "mettre le paquet sur le primaire, augmenter le salaire des professeurs des écoles, développer l’autonomie des établissements...

 

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