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Enquête du CREN sur "le bien être des élèves à l’école et au collège" : prise en compte de l’appartenance ou non à l’éducation prioritaire.
Entretien avec Agnès Florin, coauteur du rapport

18 décembre 2015

Le bien-être des élèves à l’école et au collège : validation d’une échelle d’évaluation multidimensionnelle et analyses différentielles
Fabien BACRO, Séverine FERRIERE, Agnès FLORIN,Philippe GUIMARD, Hué NGO (UNVH)
Responsable scientifique : Philippe GUIMARD

Appel à projets 2012
L’égalité des chances à l’école
Rapport terminal de recherche

27 novembre 2014

Quelques extraits significatifs sur la place des établissements ZEP dans l’étude.

[p. 9]
« Le 3ème objectif est d’étudier en quoi certaines caractéristiques des établissements (appartenance ou non à une ZEP) sont susceptibles d’affecter le bien-être des élèves. »

« Lors de la 2nde phase, l’étude a été réalisée sur un échantillon représentatif de 1002 élèves (530 filles et 472 garçons) scolarisés du CE2 à la 4ème de collège, défini en concertation avec la DEPP. 550 élèves sont scolarisés dans des écoles primaires et 452 en collèges. Ils sont âgés en moyenne de 11,12 ans (ET : 1, 65) et scolarisés dans 9 écoles (E) et 7 collèges (C) de Nantes et de sa région. 52,3% des élèves appartiennent à des établissements publics (E : 46,4% ; C : 59,5%), 20,6% à des établissements publics situés en ZEP (E : 25,1% ; C : 15%) et 27,1% à des établissements privés (E : 28,5% ; C : 25,4%). »

[p. 63]
« Pour la strate d’établissement, les résultats varient quelque peu, selon que l’on considère la satisfaction scolaire globale, moins élevée dans les établissements publics que dans les autres (ZEP ou Eclair et privés), ou le sentiment de bien-être. Pour 3 indicateurs de bien-être, les élèves du privé ont des appréciations plus positives : score global, satisfaction à l’égard des enseignants et de la classe. Le sentiment de sécurité et les relations paritaires sont évalués plus négativement dans les établissements ZEP que dans les autres - publics et privés -. La satisfaction par rapport aux activités en classe est plus élevée dans les établissements privés et ZEP que dans les établissements publics. »

[p. 66]
« On peut noter que la participation des établissements aux passations des questionnaires n’a pas
nécessairement conduit les chefs d’établissements à participer aux entretiens. On observe notamment, au niveau collège, une sur-représentation des établissements ZEP (3 sur 7) et une sous-représentation des établissements privés (1 sur 7). S’agissant du primaire, on observe une sur-représentation des écoles privées et publiques ZEP (3 sur 10 dans chacun des cas) et une sous-représentation des écoles publiques non ZEP (4 sur 10). Plus largement, les établissements situés en ZEP ont plus adhéré à cette seconde étape de la recherche que les établissements non ZEP. »

[p. 95-96]
Analyse des points de vue des équipes pédagogiques de deux collèges (focus groups)
« Dans le cas présent, nous avons sollicité deux collèges de ZEP suite aux entretiens réalisés auprès
des chefs d’établissements. Ces collèges ont été choisis parce que leur projet d’établissement vise le bien-être des élèves, qu’il mentionne des outils, des actions et qu’il mobilise l’équipe éducative. […] L’établissement A est situé dans un quartier enclavé de la ville de Nantes, peu attrayant en termes
économiques et sociaux, avec une faible mixité sociale. Le collège est de taille relativement modeste, puisqu’il est fréquenté par 200 élèves environ.
[…] L’établissement B est plus important, avec un peu plus de 500 élèves. Il est également situé en zone d’éducation prioritaire, mais dans une ville en périphérie de Nantes, ce qui lui assure une certaine mixité sociale et des moyens.

[…] Nous souhaitions initialement conduire 3 focus groups en prenant en compte les spécificités des établissements (ZEP, non ZEP et privé) que leur projet d’établissement sur le bien-être des élèves soit explicite ou non. Finalement, seuls deux établissements ZEP et ECLAIR ont répondu favorablement à notre demande. Tout comme lors des entretiens, on observe donc une adhésion très forte et un certain dynamisme de la part de ce type d’établissement sur la question du bien-être des élèves. »

Le rapport (147 pages)

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Les élèves français ont besoin d’encouragements

Si les collégiens français se sentent globalement bien dans leur classe, s’ils aiment apprendre, s’ils sont contents de leur professeur, ils tremblent devant les évaluations et même devant les rencontres enseignant - parents. L’enquête sur "le bien être des élèves à l’école et au collège" souligne les points faibles déjà connus du système éducatif français : le manque de soutien des élèves et une gestion des erreurs qui les transforment en fautes. Agnès Florin analyse cette étude.

Que sait-on de ce que ressentent les élèves en France ? Pas grand chose. Jusque là peu d’études, en dehors de la question du harcèlement, ont été menées et c’est vers des enquêtes internationales, comme Pisa, qu’il fallait se tourner. D’où l’intéret du travail de Philippe Guimard, Fabien Bacro, Séverine Ferrière, Agnès Florin, Tiphaine Gaudonville, du CREN, et Hué Thanh Ngo, Université du Vietnam, sur "le bien être des élèves à l’école et au collège", dévoilée dans le dernier numéro d’Education & formations (n°88-89).

85% des élèves contents d’apprendre

Portant sur un millier d’élèves du public et du privé de la région nantaise, moitié école, moitié collège, il apporte des informations nouvelles sur une question souvent minorée en France. Or on sait que " le bien-être des élèves à l’école est une variable importante à considérer, non seulement parce qu’elle est liée à d’autres variables caractérisant leur adaptation sociale, mais également parce qu’elle renvoie à des préoccupations éducatives globales visant le devenir de la personne, son épanouissement, ses relations sociales et sa qualité de vie". Le bien être impacte les résultats scolaires mais aussi l’adaptation sociale. Jusque là on savait juste, à travers Pisa 2012, que les élèves français sont plus nombreux que les autres à considérer l’école comme une perte de temps (ils étaient 7% en 2003 et 11% en 2012) et qu’ils manquent davantage de confiance en eux.

Ce que montre l’étude du Cren, c’est que 85% des collégiens et écoliers sont contents d’apprendre des choses nouvelles à l’école, 78% sont contents de leur professeur, 71% se jugent bien appréciés par leurs camarades, 13% ont peur à l’école ou au collège et 66% ont peur d’avoir de mauvaises notes.

Mais 75% ont peur de la note
Ces moyennes générales cachent trois phénomènes. Le premier c’est la peur des camarades qui reste prégnante à l’école et diminue au collège. 59% des écoliers ont peur de se faire voler des affaires à l’école (48% au collège). 15% des écoliers ont peur à l’école (10% au collège). 28% des écoliers ont peur de se faire taper à l’école (17% des collégiens). Globalement les relations entre jeunes ont bonnes, 74% des écoliers disent avoir "beaucoup de copains", 84% des collégiens. Il reste quand même une petite minorité qui souffre.
Les données sont bien différentes quand il s’agit de la dimension pédagogique. 69% des élèves estiment que les professeurs les aident assez : c’est 77% des écoliers mais seulement 59% des collégiens. Seulement 50% des élèves déclarent que leur enseignant les félicite (43% des collégiens). 69% des collégiens demandent que les professeurs expliquent davantage (48% des écoliers). Si 77% des écoliers déclarent que le professeur sait les intéresser, c’est seulement le cas de 55% des collégiens. 60% d’entre eux déclarent que le professeur a du mal à faire respecter les règles de la classe (contre 27% des écoliers). 68% des collégiens ont peur d’avoir un mot du professeur mis dans le cahier de liaison (61% des écoliers), 64% craignent les échanges entre leur professeur et leurs parents (50% des écoliers) et 75% ont peur d’avoir une mauvaise note (60% des écoliers). 57 % des élèves pensent qu’ils travaillent trop à l’école/au collège. Ils sont 59 % à affirmer qu’ils ont trop de devoirs à faire à la maison et près de 62 % à ne pas apprécier les évaluations.
La nécessité d’une école bienveillante
"Les analyses descriptives montrent que les élèves et les collégiens sont plutôt satisfaits de certains aspects de leur vie scolaire, et notamment des relations paritaires, de leur classe, des relations avec leurs enseignants", notent les auteurs. "Majoritairement, ils se sentent en sécurité, même si ce sentiment est relativement instable, et ils sont contents d’aller à l’école et d’apprendre des choses nouvelles. Mais les évaluations que font les élèves et les collégiens renvoient, pour nombre d’entre elles, aux aspects négatifs du système scolaire français souvent critiqués ou mis en évidence dans les comparaisons internationales : mesures de remédiations aux difficultés scolaires vécues comme stigmatisantes, manque d’encouragements de la part des enseignants, peur des évaluations négatives, sentiment d’insécurité. La fréquence de ces difficultés est suffisamment élevée pour ne pouvoir être imputée aux seules caractéristiques individuelles des enfants : elle interroge la pédagogie, d’autant que le mal-être des élèves a des incidences sur les résultats académiques".
C’est donc clairement sur la nécessité d’une école plus bienveillante que conclut cette étude. "Nos résultats montrent que bien du chemin reste à faire pour que les élèves, en France, soient mieux accompagnés en classe lorsqu’ils rencontrent des difficultés, plutôt qu’être placés dans des dispositifs de remédiation, pour qu’ils bénéficient d’évaluations formatives plutôt que d’évaluations sanctions qui les découragent, et pour qu’on valorise leurs compétences plutôt que de se focaliser sur leurs manques ou leurs erreurs, ce qui a pour effet de dégrader leur estime de soi et leur espérance de réussite, avec des conséquences négatives sur la suite de leur trajectoire scolaire".

Education & formations n°88-89

Extrait de cafepedagogique.net du 14.12.15 : Les élèves français ont besoin d’encouragements

 

Agnès Florin : "L’éducation doit intégrer l’épanouissement des élèves"

Professeure de psychologie, co auteure de l’étude sur le bien être des écoliers et collégiens, Agnès Florin revient sur les principaux résultats de cette première recherche pionnière. Pour elle, " il faut promouvoir l’école bienveillante".

[…]
La surprise de cette étude c’est que les filles se sentent moins bien à l’école que les garçons. Comment l’expliquer.

C’est un point à creuser. D’autant qu’on sait aussi que les enseignants ont une attitude plus positive avec les filles que les garçons. Il faut regarder les différentes dimensions. Chez elles ce sont surtout les points de sécurité qui posent problème et ça renvoie aux phénomènes de harcèlement. Et les filles sont plus matures donc globalement plus critiques que les garçons.

Pour vous c’est le moment de mettre en place l’école bienveillante ?

Il n’est pas facile d’en parler actuellement où l’opinion prime sur les arguments. Mais oui il faut promouvoir l’école bienveillante pour mettre fin au modèle de l’école du 19ème siècle et au gâchis qu’il produit. C’est un modèle qui a pour objectif de sélectionner pas de promouvoir et qui laisse de côté nombre d’enfants.

L’école bienveillante ce n’est pas l’école gentille. C’est une école qui veille sur l’enfant et son développement. Ca passe par l’acquisition de savoirs mais ne se limite pas aux connaissances disciplinaires. L’école bienveillante est une école qui promeut et qui ne dévalorise pas. Promouvoir des réussites partielles c’est encourager l’enfant. Apprendre est toujours difficile. Pour trouver le goût d’apprendre et de s’investir il faut des encouragements. Ce sont des processus psychologiques bien connus. Ca veut dire que le statut de l’erreur doit être revu dans notre enseignement. L’école bienveillante peut être exigeante mais elle veille sur tous.

Une mesure qui pourrait être prise rapidement ?

Qu’on laisse les établissements se soucier de ces questions et expérimenter en fonction des situations qu’ils rencontrent. C’est le travail collectif au niveau des équipes éducatives qui compte.

Extrait de cafepedagogique.net du 14.12.15 : Agnès Florin : "L’éducation doit intégrer l’épanouissement des élèves"

 

Voir aussi vousnousils.fr du 15.12.15 : Du chemin reste à faire vers l’école bienvaillante

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