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Bien-être des élèves : selon un rapport de recherche du Cren (Etude BE-Scol 2, Université de Nantes), les relations scolaires restent un problème ; entretien du Café pédagogique avec Agnès Florin, co-auteure du rapport. Le sentiment de bien-être dépend davantage du contexte familial que de la catégorie sociale

3 juin 2016

BE-Scol2 : Evaluation du bien-être perçu des élèves : étude longitudinale à l’école élémentaire et au collège.
Recherche complémentaire
Philippe GUIMARD, Fabien BACRO, Séverine FERRIERE, Agnès FLORIN, Tiphaine GAUDONVILLE
Université de Nantes
CREN (EA 2661)

EXTRAITS

[p. 4]
[...] L’étude pour la DEPP, l’Acsé et le Défenseur des Droits a été réalisée en 2013-2014 auprès d’un échantillon représentatif de 1002 élèves d’école primaire et de collège. Les résultats de ce travail ont permis de valider un outil d’évaluation multidimensionnel de bien-être, de mettre en évidence des différences interindividuelles de bien-être (effet du sexe, de l’âge, des trajectoires de difficulté des élèves, etc.), de montrer des liens significatifs entre certaines caractéristiques des établissements (public/privé/appartenance à une ZEP) et le bien-être des élèves ; d) de repérer au sein de certains établissements des objectifs en faveur du bien-être et des actions concrètes susceptibles d’améliorer la qualité de vie. Elle a également donné lieu à la publication d’un article dans la revue Education &
Formation (Guimard et al., 2015). [...]

[p. 5]
2.1. Participants
Cette étude longitudinale de deux années (T1 et T2) porte sur un échantillon de 557 élèves (301 filles et 256 garçons) scolarisés à l’école primaire et au collège, issus d‘un échantillon de départ de 1002 élèves2. Parmi ces 557 élèves, 203 élèves sont scolarisés dans des écoles primaires et 354 en collèges. Ils sont âgés en moyenne de 11,12 ans (ET : 1, 65) et scolarisés dans 8 écoles (E) et 12 collèges (C) de Nantes et de sa région. 66,2% des élèves appartiennent à des établissements publics (E : 66,5% ; C : 66,1%), 13,3% à des établissements publics situés en ZEP (E : 22,2% ; C : 8,2%) et 20,5% à des établissements privés (E : 25,7% ; C : 11,3%). Cette répartition (cf tableaux 1 et 2 ci-dessous) est globalement assez proche de la répartition nationale (Public : 60% ; Public ZEP : 20% ; Privé : 20%)
pour l’ensemble de l’échantillon.

[p. 33]
On note que l’effet de la strate apparaît uniquement sur deux modules complémentaires : le sentiment d’appartenance et la satisfaction à l’égard de la restauration scolaire et des toilettes. Dans les deux cas, les appréciations des élèves du privé sont plus négatives que celles des élèves des établissements publics ZEP et hors ZEP. S’agissant du mode de vie familiale, on observe que les enfants vivant avec leurs deux parents ont, comparativement aux autres enfants, une appréciation plus positive de leur qualité de vie globale et de la restauration scolaire. Leur SEP est également plus élevé que celui des autres enfants.

[p. 38]
3.4.4.1 Relations avec les performances scolaires évaluées en T2
Les résultats du tableau 28 ne montrent aucun lien entre le type d’établissement et les performances académiques. De même, les différences selon le sexe n’apparaissent qu’en français, les résultats des filles étant meilleurs que ceux des garçons. Pour tous les autres indicateurs (strate, mode de vie familiale et parcours scolaire), les différences sont très significatives. Ainsi, s’agissant de la strate, les élèves scolarisés en ZEP ont de moins bonnes performances que ceux issus d’établissements publics et privés. Les enfants vivant avec leurs deux parents ont également des performances supérieures à celles des enfants bénéficiant d’un autre mode de vie familiale. Enfin, les élèves ayant redoublé ou ayant bénéficié d’un suivi en RASED ou d’une aide personnalisée ont des performances globales, en français et en mathématiques significativement inférieures à ceux qui n’en ont pas bénéficié.

[p. 39]
3.4.4.2 Relations avec les dimensions du bien-être scolaire évaluées en T2 (satisfaction scolaire globale, dimensions du bien-être et score global de bien-être) Les résultats du tableau 30 montrent d’une part que les indicateurs de bien-être sont quasiment tous liés au type d’établissement. Ainsi, les écoliers sont globalement plus satisfaits de l’école que les collégiens, et ils sont plus satisfaits que ces derniers de leurs relations avec les enseignants, des relations paritaires, de la classe et des activités. Ils se sentent également plus en sécurité. Par contre les écoliers et les collégiens ne se différencient pas sur la dimension « rapport aux évaluations ». S’agissant de la strate, les différences sont peu nombreuses. Elles concernent essentiellement le sentiment de sécurité, les élèves de ZEP se sentant moins en sécurité que les élèves des autres établissements publics et privés, ainsi que la satisfaction des élèves à l’égard des évaluations et des activités scolaires. Dans ces deux domaines, les élèves du privé ont une satisfaction plus faible que les
élèves du public ZEP et hors ZEP.

[p. 44-45]
3.5.2. Evolutions en fonction de la strate (N=557).
Le tableau 33 présente les résultats des analyses réalisées afin d’apprécier l’évolution des résultats académiques et du bien-être (satisfaction globale et dimensions au questionnaire de bien-être) en fonction de la strate. Dans ces analyses sont concernés 329 élèves scolarisés dans des établissements publics, 124 élèves de public ZEP et 76 élèves du Privé. Pour les résultats scolaires (globaux, en français et en mathématiques), aucun effet session et aucun effet strate n’apparaissent. Par contre, on note une interaction significative sur les résultats en français : dans ce domaine, les élèves de ZEP ont des performances plus faibles en T2 qu’en T1 comparativement aux élèves des deux autres groupes (graphique 10).
Pour la satisfaction scolaire globale et la dimension « relations avec les enseignants », les résultats indiquent (cf graphiques 11 et 12) que les trois groupes ont des appréciations plus faibles en T2 qu’en T1 (effet session) et que les élèves en établissement privé ont globalement de meilleures appréciations que les 2 autres groupes (effet strate). S’agissant du sentiment de sécurité, le degré de satisfaction augmente entre T1 et T2. Toutefois les appréciations des élèves de ZEP sont plus faibles que celles des deux autres groupes. Par ailleurs, la satisfaction à l’égard des évaluations a tendance à augmenter entre T1 et T2 et elle est globalement plus faible chez les élèves du privé. La satisfaction dans le domaine des relations paritaires augmente entre T1 et T2 mais ne varie pas en fonction de la strate. La satisfaction à l’égard de la classe ne varie ni en fonction des sessions ni en fonction de la strate.
Enfin, pour la dimension satisfaction à l’égard des activités (graphique 13), on observe un effet session (le degré de satisfaction décroit) et un effet strate (la satisfaction des élèves de ZEP est globalement inférieure à celle des deux autres groupes). L’interaction session*strate indique que les élèves de ZEP ont un degré de satisfaction qui décroit entre les deux sessions alors que pour les deux autres groupes la satisfaction dans ce domaine a tendance à augmenter.

[p. 74]
4.3.1. Les relations entre les scores aux nouvelles épreuves (qualité de vie globale, modules complémentaires et sentiment d’efficacité personnelle) et les performances académiques, la satisfaction scolaire et les 6 dimensions du bien-être scolaire proposés en T2
[...]
- les élèves du privé ont un sentiment d’appartenance et une satisfaction à l’égard de la restauration scolaire et des toilettes plus faibles que les élèves du public -ZEP et hors ZEP- ; [...]
- pour les autres variables considérées ici, les différences de performances scolaires sont très significatives et confirment des résultats déjà largement connus, ce qui n’a d’autre intérêt que de renseigner sur la représentativité de notre population. Ainsi, les élèves scolarisés en ZEP ont de moins bonnes performances que ceux issus d’établissements publics et privés hors ZEP. Les enfants vivant avec leurs deux parents ont des performances supérieures à celles des enfants bénéficiant d’un autre mode de vie familiale. [...]
- des liens entre les indicateurs de bien-être et le type d’établissement : les écoliers sont plus satisfaits de leur établissement, de leurs relations avec les enseignants, des relations paritaires, de la classe et des activités que les collégiens et ils se sentent également plus en sécurité que ces derniers. Quelques liens sont trouvés avec la strate : les élèves de ZEP se sentent moins en sécurité que ceux des autres établissements (publics et privés) et les élèves du privé sont moins satisfaits des évaluations et des activités scolaires que ceux des autres groupes

[p.76]
[...] L’évolution des performances académiques entre T1 et T2 est indépendante du type d’établissement. Pour la strate, on note une interaction significative sur les résultats en français. Dans ce domaine, les élèves de ZEP ont des performances plus faibles en T2 qu’en T1 comparativement aux élèves des deux autres groupes. [...]

[...]
Pour le rapport des élèves à l’évaluation, la diminution est plus forte chez les écoliers que chez les collégiens, les deux groupes obtenant en T2 des niveaux de satisfaction équivalents. Les élèves en établissement privé sont globalement plus satisfaits et éprouvent une plus grande satisfaction scolaire globale et de
leurs relations avec les enseignants que les 2 autres groupes (public ZEP et hors ZEP). En revanche, leur satisfaction à l’égard des évaluations est plus faible. Les élèves de ZEP se sentent moins en sécurité que les autres élèves et leur satisfaction à l’égard des activités décroit entre les deux sessions, alors que pour les deux autres groupes la satisfaction dans ce domaine a tendance à augmenter. [...]

Le nouveau rapport de l’étude BE-Scol 2 (102 pages)

 

Bien-être des élèves : Les relations scolaires restent un problème

Que sait-on du bien-être perçu par les élèves à l’école ? Qu’est ce qui l’influence ? Quelles conséquences a-t-il ? Un rapport de recherche du Cren (Etude BE-Scol 2, Université de Nantes) apporte un nouvel éclairage sur ces questions. Original, il s’agit d’une étude longitudinale qui suit sur plusieurs années un millier d’élèves du primaire et du collège, ainsi que des enseignants et personnels de direction, sur plusieurs années.
Agnès Florin, co auteure du rapport avec Philippe Guimard, Fabien Bacro, Séverine Ferrière et Tiphaine Gaudon ville, fait le point sur les apports de cette recherche.

Propos recueillis par François Jarraud

De quoi se plaignent les élèves ?

Les élèves se plaignent davantage au collège qu’à l ’école primaire. C’est liée à l’âge. Mais pas seulement : on voit une nette dégradation lors de l’entrée en 6ème.

Et le premier motif de plainte concerne la scolarité. Ils estiment avoir trop de travail (55% des écoliers et 60% des collégiens) et notamment trop de devoirs à la maison (49% des écoliers et 73% des collégiens). Ils aimeraient que les professeurs expliquent davantage (48 et 69%) et la moitié estime ne pas être assez félicitée.

Le point le plus difficile concerne les évaluations. 66% ont peur d’avoir une mauvaise note (75% au collège). 55% des élèves ont peur quand un enseignant écrit dans le carnet de correspondance. 52% ont peur de voir l’enseignant parler avec leur parent. Au fil des années ça ne s’améliore pas. En positif, les élèves citent la classe, la relation avec les autres élèves, le sentiment de sécurité.

Ce qu’on voie aussi c’est que la qualité de vie à l’école est liée au sentiment d’efficacité de l’élève et par là à son niveau scolaire.

A t-on un effet lié au type d’établissement ou à la catégorie sociale de l’élève ?

On a surtout un lien avec le milieu familial : avoir ses deux parents est préférable. On constate aussi que les élèves du privé ressentent une meilleure qualité de vie mais sont moins satisfaits de leurs activités scolaires et des évaluations. Ils sont aussi moins satisfaits de la restauration et des toilettes.

Observe-t-on une différence entre filles et garçons ?

Il y a peu de différences. Mais les filles sont plus satisfaites de leur scolarité et des relations avec les enseignants. Mais elles se sentent moins en sécurité et sont moins contentes des évaluations.

Que nous apprend l’étude sur les chefs d’établissement et les enseignants ?

On voit que dans le discours des principaux, le bien-être revient souvent mais qu’ils ont du mal à le décrire. Par contre il n’apparait pas dans les projets d’établissement. On le voit davantage sous l’angle d’actions de prévention (contre le harcèlement par exemple) que dans la vie quotidienne. Pour que ça marche, il faut un responsable, une implication de l’équipe éducative et du temps dégagé pour cela.

Le rapport aboutit-il à des préconisations ?

On a l’impression que la question du bien être des élèves commence à être prise en compte dans les textes officiels ce qui est nouveau. Evidemment il y a un écart entre les textes et la réalité sur le terrain. Mais il y a des établissements où les enseignants se préoccupent beaucoup de cette question. Mais ce n’est pas encore le cas partout du fait d’une dichotomie ancienne entre l’enfant et l’élève.

Si on devait recommander quelque chose ce serait de considérer l’élève de façon plus globale. C’est prévu dans les programmes de maternelle. Ce serait bien que ça gagne les autres niveaux.

L’école est là pour accompagner le développement de l’enfant. Cela comporte le développement de son autonomie. Or la moitié des élèves se plaignent qu’on ne leur demande jamais leur avis. Une recommandation ce serait d’utiliser vraiment l’heure de vie de classe et que les élèves puissent choisir une partie des enseignements. Même tout petits, on voit que les enfants aiment prendre des responsabilités et qu’ils ont besoin d’être regardés comme responsables.

L’étude n’aboutit donc pas à des recommandations que sur le collège ?

Non. Au collège, les enfants ont davantage d’autonomie cognitive, sociale et affective. Et si on leur refuse d’être responsable c’est plus insupportable pour eux. Mais c’est ancré dès le primaire selon leur niveau. Par exemple, les enfants qui font du tutorat en maternelle dans des classes à niveaux différents ils aident les plus petits. Mais les plus petits leur apprennent aussi beaucoup en développant des compétences nouvelles d’attention à l’autre, de formulation etc.

Pour beaucoup d’élèves la vraie vie se réfugie hors de l’école ?

C’est le cas par exemple quand il s’agit du vivre ensemble. C’est pourtant une compétence absolument nécessaire dans la vie sociale et professionnelle. Voilà une compétence qui n’est pourtant pas travaillée à l’école.

Quels sont les freins à une amélioration du bien-être à l’école ?

Le premier c’est le manque d’ouverture sur l’international. Quand on regarde les pays qui ont de bons résultats dans les enquêtes internationales (PIRLS, PISA) ce sont des pays qui ont développé l’auto-évaluation, le bien-être des élèves. Contrairement à ce que certains pensent, haut niveau et bien-être sont liés. Dans notre étude le lien n’est pas directe entre efficacité scolaire et qualité de vie. Il passe par le sentiment d’efficacité comme je l’ai indiqué plus haut. Quand la confiance s’améliore , les performances suivent c’est quelque chose de bien établi.

Dans la plupart des pays on encourage systématiquement les élèves. Nous sommes encore sur l’idée que l’élève est un adulte inachevé. Or un adulte est inachevé toute sa vie ! Avec cette idée on ne donne pas à l’élève la possibilité d’être reconnu comme responsable.

Extrait de cafepedagogique.net du 02.06.16 : Bien-être des élèves : Les relations scolaires restent un problème

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