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Cerner la notion de bienveillance éducative face à des élèves de milieu populaire. Reprise par le GFEN d’une intervention de Jacques Bernardin aux Assises de St Etienne-du-Rouvray en novembre 2013

29 octobre 2016

Assises de l’éducation - St Etienne-du-Rouvray
20 novembre 2013 / INSA de Rouen

La bienveillance en éducation
Jacques BERNARDIN
Président du GFEN

Thème apparu lors de la consultation de l’été 2012, « l’école de la bienveillance » est repris depuis, que ce soit dans les propos ministériels comme dans les débats concernant la Refondation de l’école. Celle-ci serait-elle affaire de bons sentiments ?

Comme tous les termes consensuels, la « bienveillance » mérite qu’on s’y arrête afin d’en préciser les contours et les limites. Que l’on soit parent, enseignant, éducateur, animateur ou travailleur social, chacun sait qu’il ne suffit pas de vouloir le bien de l’autre pour le réaliser. Si la malveillance et la négligence ne sont jamais souhaitables, combien d’histoires personnelles ont été contrariées au nom du « c’est pour ton bien ! »... Nos façons de faire étant corrélées aux représentations de l’enfant, de ses potentialités et de ses besoins, l’action éducative gagne à être réfléchie et collectivement discutée pour converger au mieux.

I/ Pourquoi parle-t-on de « bienveillance » à l’heure de la Refondation ?

Des constats inquiétants


1) Des résultats qui se dégradent

- PISA (2000/2009) : en dix ans, on constate un recul des résultats avec un creusement des écarts entre élèves en réussite et élèves fragiles. Ainsi, le pourcentage d’élèves de 15 ans ayant de faibles compétences en français est passé de 15 % à 20 %, en mathématiques de 16,6 % à 22,5 %.

- PIRLS (2001/2011) : pour les élèves de 11 ans, baisse moyenne de 5 points en dix ans (525 > 520), du pourcentage d’élèves en réussite (de 7% à 5 %), affaiblissement des résultats des filles (de 9 points) et sur représentation des élèves français dans le décile des plus faibles (32 % contre 25 % dans l’OCDE).

2) Sur fond d’inégalités qui se creusent

- Selon l’OCDE, l’incidence de l’appartenance sociale sur les résultats est plus forte en France que dans la plupart des autres pays (2009 : 27è rang sur 34 en termes d’équité).
- Les écarts sont accrus en zone d’éducation prioritaire  : en 2012, 28 % des élèves scolarisés dans les établissements ECLAIR ne maîtrisaient pas les compétences de base en français, contre 10 % dans l’éducation non prioritaire.

- Le Bac général 2013 a été obtenu par 68 % des enfants de cadres supérieurs mais par seulement 13 % des enfants d’ouvriers non qualifiés.

Avec une fragilisation des élèves
- PISA 2003 : 45 % des élèves français se sentaient « à leur place » à l’école, contre 81 % des élèves en moyenne dans les pays de l’OCDE ; élèves tendus, stressés pour faire leurs devoirs (53 % en France contre 7 % en Finlande), qui ont peur de la note (75 %).
- Baromètre AFEV 2011 (avis recueillis auprès de 750 élèves de l’élémentaire au collège, de quartiers populaires) : 41 % des élèves disent avoir peur de se tromper (quid du droit à l’erreur dans les classes ??) et 49 % ont le sentiment de ne pas pouvoir y arriver...

La prise de conscience a été partagée lors de la consultation de l’été 2012 :
quant à l’impasse d’une école élitiste et sélective (gâchis social et humain)
quant au rôle néfaste d’une évaluation systématique visant le contrôle de conformité (qui paralyse au lieu d’inciter au progrès) ;
et donc, sur la nécessité de renverser les façons de voir et les manières de faire.

L’ensemble de ces constats a légitimé une autre orientation de la politique éducative (votée le 5 juin à l’Assemblée) : non, la sélection précoce n’est pas la meilleure manière de faire progresser les résultats... ni même d’élargir le vivier des élites ! Il faut viser la réussite de tous. Et pour cela, faire des réformes structurelles :
- désenclaver certains établissements (organiser la mixité sociale et scolaire) ;
- réunifier le cursus (de la maternelle à la fin du collège, une visée commune) ;
- et réhabiliter la formation des enseignants (ouverture des ESPÉ rentrée 2013), car il faut changer la pédagogie : promouvoir d’autres pratiques... dans un autre esprit (sortir de l’élitisme, des discriminations, de la « violence institutionnelle »...).

Contrairement à ce que pensent beaucoup d’enseignants et de parents, les sélections précoces, les regroupements par niveaux homogènes ne rendent pas le système éducatif plus performant, pas plus que la qualité d’un enseignant se mesure à la quantité de devoirs donnés. La notation et le redoublement, censés aider les élèves à progresser, en fait les accablent. Pour le ministre : « En réalité, tout ceci participe de cette production de l’échec, de cette institutionnalisation de la compétition et de la souffrance de beaucoup de nos enfants, sans améliorer les performances. Des évolutions sont possibles, qui permettront de construire une école de la confiance, de l’estime de soi et à osons le mot à de la bienveillance. La refondation de notre école doit concerner les structures, mais aussi les esprits et les pédagogies »[1].

Parler d’ « école bienveillante », ce n’est donc pas substituer la morale aux moyens, mais :
- repenser l’organisation du système (pour que chacun y trouve et s’y sente à sa place) ;
- poser un principe régulateur pour l’action des acteurs, les interactions éducatives.

II/ Cerner la notion de « bienveillance »
Selon le dictionnaire, la bienveillance est définie comme : « disposition favorable envers quelqu’un (en général ressenti comme inférieur par l’âge ou le rang social) ». Ce qui, interprété, peut faire pencher du côté de la compassion ou de la complaisance. Arrêtons-nous un instant sur ces possibilités de glissements et leurs conséquences sur les conduites éducatives.

*La compassion se définit comme « sentiment de pitié qui nous rend sensible aux maux d’autrui (apitoiement) ». Essayons d’en décliner les incidences :

- penser « il est trop petit pour... » peut amener l’adulte à faire et à penser à la place de l’enfant (pour lui... et non avec lui), à le déresponsabiliser, à le maintenir sous tutelle ;

- se situer dans une logique du « Oh, le pauvre ! » conduit à renforcer les aides et remédiations, au risque d’enferrer la dépendance de l’enfant/élève à l’égard des adultes et, par ailleurs, de singulariser son statut par rapport au « droit commun » (phénomène d’étiquetage pouvant être stigmatisant, alors même qu’on souhaite l’éviter !).

Autrement dit, la compassion est une assignation symbolique au déclassement... qui n’interroge pas les logiques sociales dont il relève, ni les pratiques éducatives qui le perpétuent.

*La complaisance est, selon le dictionnaire, une « disposition à se conformer aux goûts, à acquiescer aux désirs d’autrui... pour lui plaire ». Classique quête de l’humain d’être aimé ou peur de ne plus l’être pouvant amener l’adulte à certaines facilités. Quels en sont les risques ?

- se conformer aux goûts : cela conduit à enfermer dans le connu, les habitudes. Or, comment savoir si on aime... avant même d’avoir goûté ? L’école a pour but d’élargir l’éducation reçue dans la famille, de permettre à chacun de sortir du champ clos de ses origines, de s’émanciper des places assignées (exemple de l’enfant affecté de qualificatifs plus ou moins heureux par ses proches : paresseux, lent, maladroit...). Elle ouvre à de nouvelles activités et à un autre mode d’approche du réel (sollicitation de l’imaginaire et de la raison : mise à distance, réflexivité, exercice du débat critique), ce qui permet d’élargir et de « former le goût ».

- Acquiescer aux désirs : si c’est trop systématique, cela peut confiner l’enfant dans le fantasme de toute puissance du bébé qui, grâce à ses pleurs, met le monde à ses pieds. Risque de conforter un comportement capricieux et immature, porte ouverte à des comportements ultérieurs conflictuels face aux inévitables frustrations du réel, qui ne cesse de barrer la satisfaction immédiate de mes désirs et pulsions.

Les psychologues insistent sur l’importance du « non » de l’adulte, structurant, qui permet à l’enfant de se situer dans le monde physique et social (pour savoir ce qui est dangereux, souhaitable ou convenu comme comportement dans telle situation). Eduquer, c’est faire éprouver à l’enfant la nécessité de règles pour vivre en commun (faute de quoi on est « hors jeu » - en sport comme face aux autres apprentissages, qui ont leurs propres normes - au risque d’être disqualifié). Et l’éducation a moins pour but d’assouvir des désirs que de créer des besoins (culturels, intellectuels) : envie de connaître de nouvelles choses, plaisir de comprendre l’ordre du monde, de gagner en autonomie, de développer ses pouvoirs de penser et d’agir.

La complaisance apparaît finalement comme une assignation à résidence qui n’aide pas l’enfant à « s’en sortir », à grandir.

III/ Comment la bienveillance éducative peut-elle s’exprimer ?

Famille, école, centre de loisirs, club sportif, activité associative, centre social... L’enfant est à la croisée de divers milieux éducatifs qui sont autant d’espaces pour se construire. Dans chacun de ces espaces, qui ont leur singularité et leurs propres modes de fonctionnement, la bienveillance éducative peut s’exprimer au niveau de la relation mais aussi des activités.

Au niveau de la relation : l’attachement, l’empathie, les attentes...
*L’attachement : c’est la relation privilégiée qui se tisse avec la mère, source directe de survie, lors de la prime enfance. Ce rapport d’attachement primaire semble être le prototype de tous les liens affectifs et sociaux ultérieurs. Quelles sont les fonctions de cette relation ?

Cet attachement fournit des certitudes affectives : rassurant, il induit un sentiment de sécurité indispensable pour explorer le monde. Cette figure d’attachement est également un point de repère pour le développement cognitif, permet les premières formes de connaissance, base du développement ultérieur. A contrario, le sevrage prématuré fait craindre l’abandon, avec des risques de retard émotionnel et intellectuel (ex. enfants hospitalisés). Selon Boris Cyrulnik, neuropsychiatre, l’attachement c’est nécessaire à la survie : un enfant sans attachement arrête tous ses développements, y compris biologiques (cas des enfants retrouvés dans les orphelinats de Roumanie). Heureusement, les choses peuvent évoluer : placés dans des familles, ces enfants ont beaucoup changé. Les travaux en neurosciences sur la plasticité cérébrale ont ainsi montré que l’affectivité participe au développement biologique et intellectuel[2].

La figure représentative de l’attachement peut être aussi le père ou un enfant plus grand offrant des caractéristiques de présence affectivement chaleureuse et rassurante. Avec la fréquentation d’autres espaces éducatifs, les figures d’attachement peuvent s’élargir en dehors de la famille : qui n’a pas en tête quelques personnes ayant compté dans sa vie ?...

*L’empathie : c’est « la capacité de ressentir les émotions, les sentiments, les expériences d’une autre personne ou de se mettre à sa place ». On pense à l’attention de la mère à l’égard de son bébé, qui ne cesser de chercher à le comprendre, de se placer de son point de vue et d’interpréter ses besoins vitaux (d’affection, de nourriture, de sommeil, de confort corporel...).

Dans la relation éducative, cette attitude nécessite un effort de compréhension intellectuelle qui exclut cependant toute confusion entre soi et l’autre, tout mouvement affectif personnel ainsi que tout jugement moral. En effet, l’empathie n’implique pas de partager les sentiments ou les émotions de l’autre, ni de prendre position par rapport à elle. C’est ressentir de l’intérieur ce que provoque cette situation pour l’autre, s’efforcer de comprendre le cheminement intellectuel et la logique des erreurs des enfants / élèves, sans jugement.

*Les attentes : c’est la question du regard porté sur l’autre, ses possibilités. Cet « effet Pygmalion » a fait l’objet de nombreuses recherches en psychologie sociale. Les attentes des parents comptent pour l’enfant. S’entendre dire « il est bon en maths, il ira loin » ou « il est tombé sur la tête quand il était petit » n’est pas sans incidence, contribuant à la confiance en soi ou à fragiliser, véritables « paroles destin ». Mais ce phénomène passe aussi par du non-dit et vaut dans toute relation humaine, quels que soient les espaces éducatifs.

Ainsi, les prédictions subjectives de l’enseignant sur ses élèves, positives ou négatives, influent de façon inconsciente sur son comportement, sur la nature des activités proposées (plus ou moins diversifiées et complexes) et sur sa façon de les conduire : niveau de sollicitation différent (type d’interrogation ; temps accordé à l’exploration, la recherche) ; réactions inégales aux propositions des élèves (retours plus ou moins précis et adaptés au contenu). Ces attentes s’expriment aussi au niveau du climat socio-affectif (attention, soutien verbal et non verbal, encouragements). Perçues par les élèves, ces attentes et ce traitement différencié influent en retour sur leur comportement et leurs performances objectives. C’est pourquoi on parle de prophéties auto-réalisatrices.

Tous capables ! Affirmons-nous au GFEN, comme défi au sentiment de fatalité. L’affirmation de la « capacité de tous les élèves à apprendre et progresser » est désormais inscrite dans la loi d’orientation. Reste à le mettre en acte au quotidien. L’éducateur, c’est celui qui attend le mieux de chacun, qui pousse à l’audace, à croire en ses capacités insoupçonnées. Belle illustration par Marcel Pagnol dans Le temps des amours (Roman Poche, 1988, p. 76) : « Dès que les professeurs commencèrent à le traiter en bon élève, il le devint véritablement : pour que les gens méritent notre confiance, il faut commencer par la leur donner ».

Les élèves fragiles ont une faible estime d’eux-mêmes (d’autant plus quand ils n’ont eu que des renvois à leurs erreurs et échecs plus qu’à leurs déplacements et progrès), ils ont intériorisé leur échec (passant du « j’ai eu zéro » au « je suis zéro »... glissement de l’appréciation du résultat au jugement personnel, du cognitif à l’identitaire). Majoritairement de milieux populaires, ces élèves ont souvent intégré le « sens de leur place » dans la société (qu’est-il légitime d’espérer pour des gens comme nous ?), sont victimes d’une autolimitation des possibles quant à leur avenir.

Croire en l’autre, c’est lui signifier que demain n’est pas écrit d’avance, que l’avenir lui appartient... s’il en décide ainsi ; c’est rendre chacun maître de son destin. Pour Henri Wallon, « Un regard qui scrute pour trouver la marque du manque impose à l’enfant un statut péjoré. Un regard qui ne cherche en l’enfant qu’un devenir instaure une dynamique de rencontre ». Mais ce regard positif sur l’enfant ne serait qu’une chimère s’il ne s’éprouvait pas dans la réalité des faits : c’est dire le rôle clé des pratiques à même de l’incarner, d’en témoigner, de l’étayer...

Au niveau des activités : quelle traduction de la « bienveillance » ?
Le débat sur la nouvelle organisation scolaire est une opportunité pour légitimer la pluralité des espaces éducatifs, spécifier leur place et rôles respectifs... et mettre leurs efforts en synergie. En guise de contribution au débat, déplions ce qu’on sait propice au développement :

*la richesse des situations vécues. Si la diversité des domaines d’activités investis est gage d’ouverture au monde, de développement de la curiosité et de la créativité, leur qualité dépend de leur ambition. Les projets, ce qu’on appelle au GFEN les situations défis sont autant d’occasions de multiplier les expériences de maîtrise, réussites qui sont sources de gratifications et de fierté. A contrario, habituer à des succès faciles, à des résultats immédiats ne renforce pas mais fragilise pour l’avenir, amène l’enfant à désinvestir trop rapidement ce qui « résiste ».

Autrement dit, pour « s’en sortir », il faut aller voir ailleurs, se laisser surprendre, oser autre chose. Et pour croire en soi, il faut dépasser ses limites, surmonter des obstacles, réussir ce qu’on estimait jusqu’alors impossible : expérience fondatrice qui peut faire bifurquer une vie.

*Le mode d’implication. Les travaux menés sur le rapport au savoir confirment les observations. Souvent, les élèves fragiles évitent ou font vite...mais mal (comme « pressés d’en finir ») ou sont passifs, dans l’attente que l’on fasse à leur place et leur fournisse la réponse. Ils imaginent qu’apprendre consiste essentiellement à « être sage », « bien écouter », dans un souci de « bien travailler » avec peu de repères sur ce que cela signifie. D’autres ont mieux saisi l’importance d’un engagement personnel, des essais et des reprises pour progresser[3].

Chaque instance éducative participe de ces façons de voir/concevoir l’apprentissage et peut contribuer à les faire évoluer. Quels repères pourrait-on se donner pour modifier ces postures ? D’abord, les inciter à s’investir personnellement, à prendre des initiatives, à chercher, à tenter... et à recommencer, à ne pas se décourager, à être persévérant. Pour y aider, plusieurs éléments contribuent à sécuriser l’espace de l’activité :

- le cadre de travail : clarifier ce qu’on va faire et pourquoi (structuré, structurant) ;
- le droit à l’erreur reconnu et légitimé : dédramatisation, parallèle avec d’autres apprentissages, analyse rétrospective (on apprend de l’analyse des erreurs) ;

- l’interdit de moquerie : « petits meurtres » psychiques, qui peuvent durablement blesser. A contrario, inciter le groupe à comprendre le pourquoi de tel propos ou erreur (s’efforcer d’entrer dans la logique de l’autre est formateur) ;

Face à l’impasse, l’échange entre pairs est un recours à la solitude désespérante. Le groupe est à la fois ressource et stimulation à aller plus loin. De la diversité des avis naît la nécessité de s’expliquer, d’argumenter, de chercher à convaincre, de prouver ce qu’on avance et donc aussi de « bouger » soi-même : abandonner son opinion première, aménager ou enrichir son point de vue, dans tous les cas, accroître sa maîtrise...

*La capacité de prise de distance. Faire à même bien à ne suffit pas. Encore faut-il faire un retour sur expérience pour en « tirer leçon ». Recul réflexif sur l’objet de l’activité et sur le cheminement suivi (obstacles, résistances, aides et appuis) pour passer du réussir au comprendre (faire spécifique de la prise de conscience), condition pour transférer d’une situation à l’autre, voire d’un domaine à l’autre.

Faire le point de là où on se situe dans la maîtrise des choses, c’est le rôle de l’évaluation. Mais au contraire d’un contrôle qui sanctionne et classe de façon hiérarchisée, une évaluation qui à comme son étymologie l’indique - « donne valeur » aux déplacements, permette à l’enfant de se situer dans une dynamique évolutive... et ainsi de pouvoir lui-même projeter l’objectif futur. Développer la capacité d’auto évaluation, c’est accroître l’autonomie.

Conclusion
La bienveillance éducative peut ainsi être entendue comme accueil et attentes positives à l’égard de l’enfant, incitation à oser, stimulation à faire et réaliser... mais aussi à réfléchir. Elle se distingue de la compassion et de la complaisance, mais aussi du laxisme (« tendance excessive à la conciliation ») : l’indulgence systématique, l’évitement de la confrontation maintient dans l’illusion narcissique de la toute puissance et prépare des lendemains qui déchantent.

A contrario, au niveau du comportement social comme de l’apprentissage de notions et concepts, le conflit d’idées est source de développement, il oblige à entendre les autres, à réfléchir, à reconsidérer son point de vue. D’où cette proposition de conjuguer bienveillance et exigence, comme marque de respect. Autrement dit, il s’agit moins d’être « gentil » avec l’enfant qu’« en toute bienveillance » :
- de déranger les routines et impensés, d’inquiéter les certitudes ;
- de s’affranchir du déjà-là, de faire penser plus loin ;
- de pousser chacun au-delà de lui-même... pour l’« élever », au plein sens du terme.

[1] V. Peillon, Refondons l’école. Pour l’avenir de nos enfants. Seuil, février 2013, p. 42.

[2] Pour B. Cyrulnik, « le savoir n’est transmissible qu’à l’intérieur d’un cadre affectif qui passe avant tout par la parole. (...) Cette parole humaine a un pouvoir de stimulation de l’affection et joue un rôle dans les performances abstraites ». Sur la base de ses travaux cliniques sur la résilience, il poursuit : « dire bonjour dans un couloir ou échanger deux phrases peut paraître banal. Pour l’enfant maltraité, c’est un évènement extraordinaire ».

[3] Pour une synthèse, cf. Jacques Bernardin (2013), Le rapport à l’école des élèves de milieux populaires, De Boeck.

Extrait de gfen.asso.fr du : http://www.gfen.asso.fr/fr/bienveil...

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