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"Et si on tuait le mammouth ?... , Soazig Le Nevé et Bernard Toulemonde, L’Aube, avec les 17 propositions. Suite de la revue de presse (06.01.17)

2 janvier 2017

"Et si on tuait le mammouth ? Les clés pour (vraiment) rénover l’Education nationale" Soazig Le Nevé et Bernard Toulemonde, L’Aube, 247 p., 21 €

 

Additif du 06.01.17

Pourquoi essayer la saignée, façon François Fillon, quand on peut carrément "tuer le mammouth" ? Car c’est bien à un assassinat en règle que nous invitent Bernard Toulemonde et Soazig Le Nevé dans un petit livre qui débite le mammouth avec délectation. Les auteurs veulent réduire l’Education nationale à un distributeur de moyens. Les autorités locales, du rectorat aux régions et aux chefs d’établissement s’occuperont du reste sous le stimuli d’une mise en concurrence de toutes les écoles et tous les établissements. Vous l’avez compris : dans le carnage promis par B Toulemonde, le mammouth ne meurt pas seul. Les professeurs et leurs syndicats sont poussés eux aussi dans la tombe, tout comme d’autres catégories, les bacheliers professionnels par exemple. A quelques semaines des élections, le l’ouvrage propose un nouveau programme, technocratique et libéral, pour l’Ecole. 2017, c’est l’heure de la revanche...

[...] Bernard Toulemonde dit souvent qu’il a parcouru tous les métiers de l’éducation nationale. Ce fringuant septuagénaire, agrégé de droit en 1976, a été surveillant d’externat avant de devenir assistant à la faculté de droit puis professeur de droit public. En 1981 il suit Pierre Mauroy à Matignon où il est chargé de l’éducation. De 1982 à 1987 il est nommé directeur des affaires générales au ministère de l’éducation nationale où il suit par exemple le dossier de l’intégration du privé dans un nouveau service public d’éducation. De 1988 à 1992 il est nommé recteur de Montpellier puis de Toulouse avant d’intégrer le cabinet de Jack Lang à l’Education nationale. Il est ensuite inspecteur général puis directeur de l’enseignement scolaire en 1998. Soazig Le Nevé est journaliste à la rédaction d’Acteurs publics.

[...] Le livre de B Toulemonde, si proche au final de celui de JM Blanquer, reflète les vues de la technostructure de l’Education nationale. Le moins d’Etat de B Toulemonde est finalement un plus d’autorité, le niveau d’autorité se déconcentrant de Paris aux régions.

Le livre témoigne de la montée en puissance des technocrates qui supportent de moins en moins l’autorité des politiques et des contre pouvoirs que sont les syndicats et les libertés des enseignants.

Ce modèle est il efficace ? Là où il est allé le plus loin, en Suède, il a abouti à la fois à l’affaissement du système et la baisse des résultats. Installer partout la concurrence en publiant les résultats de la maternelle au lycée ne fera qu’accroitre la ségrégation des établissements et mettre en échec plus tôt les enfants des milieux populaires. Leur sort est d’ailleurs vite réglé par B Toulemonde : pour lui le bac professionnel est un "miroir aux alouettes" et il convient de stopper la promotion vers le supérieur de ces jeunes. Bernard remet tout le monde à sa place...
François Jarraud

Extrait de cafepedagogique.net du 06.01.17 : Bernard Toulemonde : Et si on tuait le mammouth ?

 

Présentation éditeur

Vous avez dit « priorité à la jeunesse » ? « Refondation de l’école » ? Chiche !

Quand l’un des auteurs de ce livre a inventé l’expression « le mammouth » pour désigner l’Éducation nationale, il ne pensait pas que, trente ans après, l’image de l’animal disparu continuerait de coller à un système à bout de souffle. Le mammouth résiste, engraissé par des ministres qui n’osent le réformer en profondeur, par des syndicats majoritaires bureaucrates et par une gestion du meilleur archaïsme. Préhistorique ! L’Éducation nationale a besoin d’un électrochoc : il faut tuer le mammouth. Pour ce faire, les auteurs ont usé d’une arme redoutable : le parler vrai. Ils disent pourquoi rien ne change. Se refusant à la résignation ambiante, ils suggèrent des mesures simples, rapides et efficaces. À l’unique condition que le système ultra-centralisé accepte de lâcher la bride et de faire confiance aux acteurs de terrain, dans les académies, les collectivités, et surtout au sein même des établissements scolaires. Historique !

Dans cet ouvrage incisif, les auteurs donnent des clés pour rénover un système sclérosé.

Soazig Le Nevé est journaliste à la rédaction d’Acteurs publics.

Bernard Toulemonde, ancien recteur et ancien membre de plusieurs cabinets ministériels, est le père de l’expression « le mammouth » largement popularisée par le ministre Claude Allègre.

Extrait de editionsdelaube.fr : Et si on tuait le mammouth

 

Bernard Toulemonde, ancien recteur et ancien membre de plusieurs cabinets ministériels, a eu le premier l’idée d’appeler "mammouth" l’Education nationale. Aujourd’hui il se propose, avec la journaliste Soazig Le Nevé, de le "tuer". C’est que "tous les ingrédients de l’immobilisme sont là pour que rien ne change : un pouvoir politique, en la personne du ministre, très faible, qui intègre très vite son impuissance à modifier le cours des choses ; des syndicats puissants qui, dans leur majorité, sont arc-boutés sur leurs privilèges hérités du passé et refusent tout changement ; des enseignants qui, pour la plupart, cherchent à bien faire, mais qui sont mal formés, mal gérés, englués dans un système bureaucratique qui fait tout pour les désespérer."

Les auteurs posent donc implicitement deux postulats, les syndicats ne sont pas l’expression de leur base et l’Education nationale forme un système capable d’imposer sa cohérence au pouvoir politique. Ils s’attachent à montrer la continuité dans son être de l’institution, que le ministre soit "rouge, rose, vert ou bleu"..., et sa nature s’explique par son histoire. "En France, l’éducation des jeunes a toujours été une affaire d’Etat face à l’Eglise catholique" et les auteurs citent Napoléon pour qui, "tant qu’on n’apprendra pas, dès l’enfance, s’il faut être républicain ou monarchique, catholique ou irréligieux, l’Etat ne formera pas une Nation". C’est pourquoi "l’école française a été et reste souvent encore au coeur d’un projet politique de cohésion nationale", ce qui rend "difficile tout transfert de pouvoir à d’autres acteurs", qu’il s’agisse des collectivités locales, des administrations déconcentrées, des parents d’élèves ou des établissements scolaires.

Les hussards sont désenchantés
Autre élément du constat, le mammouth est capable de "torpiller", avec la complicité des ministres, ce qui lui déplaît, le socle par exemple, il est "rétif à toute évaluation de son fonctionnement", et il n’a pas forcément pour priorité "l’intérêt de l’élève, de tous les élèves". Les auteurs passent en revue les politiques ministérielles, dont aucune ne trouve grâce à leurs yeux, qu’il s’agisse de l’éducation prioritaire, de la promotion de l’enseignement professionnel, du collège unique, du corps unique d’enseignants de la 6ème à la terminale... Sur l’enseignement privé, ils s’interrogent, l’épiscopat n’est-il pas en train de reprendre la main, de façon qu’il reste marqué par "l’entre-soi social", "en dépit des exhortations de quelques secrétaires généraux de l’enseignement catholique" qui demandent que soit respectée la loi qui interdit de réclamer un certificat de baptême pour l’inscription des élèves. Et pourtant, ces établissements ne manquent pas d’atouts, notamment "sur le plan de la cohérence des équipes éducatives", constituées "autour d’un projet" que les enseignants connaissent.

Dans l’enseignement public, "les hussards noirs de la République d’autrefois sont aujourd’hui singulièrement désenchantés, voire déprimés". Parmi les causes de cette morosité, leur recrutement et leur formation, mais aussi l’impossibilité d’agir. Les novateurs, et ils sont nombreux, "n’arrivent pas à secouer le système qui tend à les tenir en lisère comme s’il craignait la contagion". Les relations au sein de l’institution sont difficiles : "tout se passe comme si l’on était en état de guerre, l’ ’administration’ est sans cesse soupçonnée de vouloir faire des mauvais coups."

Des circulaires que personne ne lit
Celle-ci est pourtant assez peu efficace si on en juge par sa capacité à produire des circulaires que personne ne lit, à commencer par la "circulaire de rentrée", vaste pensum uniquement destiné à adresser des clins d’oeil à tous les lobbys. Quant aux ministres, s’ils veulent durer, comme a réussi à le faire François Bayrou, mieux vaut qu’à l’instar de la reine d’Angleterre, ils "règnent mais ne gouvernent pas", qu’ils commencent par octroyer aux enseignants "un zeste de jours de congés supplémentaires" avant de réduire leurs obligations de service. Les auteurs prennent l’exemple des professeurs d’enseignement pratique (les enseignements en ateliers des lycées professionnels) qui n’ont "ni préparation, ni correction de copies", et qui sont passés en quelques dizaines d’années en 32 à 18h...

Après ce diagnostic, particulièrement sévère, les auteurs font 17 préconisations, dont l’interdiction des "circulaires ministérielles, sauf une, celle fixant les objectifs annuels de résultats des élèves", le profilage des postes vacants et la mise en place d’entretiens d’embauche pour les enseignants "dans tous les établissements qui le souhaitent", le "doublement de la rémunération des enseignants volontaires sur les postes les plus difficiles", le remplacement des épreuves académiques des concours de recrutement pas des épreuves professionnelles et un entretien d’embauche, la reprise du recrutement des professeurs de collège, le remplacement, à titre expérimental, du rectorat par "un établissement public régional d’enseignement réunissant les collectivités locales et l’Etat", une association des lycées avec les premiers cycles universitaires...

Extrait de touteduc.fr du 19.12.16 : Tout est prêt pour dégraisser le mammouth

 

Les deux auteurs - eux - livrent en conclusion « 17 idées pour tuer le mammouth en 2017 ». Comme ces idées sont loin d’être en l’air (et certaines plutôt dans l’air du temps, à tort ou à raison), il est sans doute bon de les découvrir in extenso.

Les décisions immédiates :

1- Interdiction des circulaires ministérielles, sauf une : celle fixant les objectifs annuels de résultats des élèves

2-Profilage des postes vacants et entretiens d’embauche avec les candidats dans tous les établissements qui le souhaitent

3- Doublement de la rémunération des enseignants volontaires sur les postes difficiles, dans le cadre d’un contrat de travail

4- Remplacement des épreuves académiques des concours de recrutement par des épreuves professionnelles et un entretien

5- Extension du bénéfice de l’entretien professionnel annuel aux enseignants ; mise en place d’une évaluation de la valeur professionnelle ; suppression de l’avancement et des mutations au barème d’ancienneté au profit d’une reconnaissance des efforts de qualité dans le travail et de formation continue.

6- Publication de la masse salariale de chaque établissement scolaire (on va avoir des surprises !) en attendant d’allouer les dotations en euros et non plus en heures d’enseignement.

Les décisions immédiates à effets différés ou étalés

7- Fermeture de la direction ministérielle chargée (soi-disant) de la gestion des ressources humaines

8- Régionalisation du recrutement des enseignants du second degré, dans le cadre des régions académiques

9-Transfert total , aux régions qui le souhaitent, des formations professionnelles et agricoles, de l’orientation scolaire et de la carte des formations des lycées ; transfert de la santé scolaire aux départements

10- Création d’un statut des écoles primaires, à disposition des communes et des intercommunalités

11-Reprise du recrutement des professeurs de collège

12- Définition du service des nouveaux enseignants du second degré en heures de présence dans leur établissement ; lancement d’un plan de création de salles de travail et de bureaux en lien avec les régions et les départements

13- Evaluation systématique des établissements scolaires et publication de leurs résultats

Les décisions d’expérimentation

14- Un établissement public régional d’enseignement réunissant les collectivités locales et l’Etat (une Agence régionale de l’enseignement)

15- Une nouvelle gouvernance des lycées et collèges (inspirée de celle des hôpitaux)

16- Un établissement unique réunissant le collège et les écoles de secteur (une école du socle)

17- Une association des lycées avec les premiers cycles universitaires, de bac-3 à bac +3 ( un collège universitaire)

Extrait de blogs.mediapart.fr du 02.01.17 : [Et si on tuait le mammouth ? https://blogs.mediapart.fr/claude-lelievre/blog/020117/et-si-tuait-le-mammouth ?]utm_source=twitter&utm_medium=social&utm_campaign=Sharing&xtor=CS3-67]

Note du QZ : Nous avons mis en italiques certaines propositions qui peuvent être rapprochées de certains dispositifs ou pratiques existant actuellement en éducation prioritaire : allocation proportionnelle des moyens aux établissements, profilage de postes, pondération...
La proposition 16 reviendrait à généraliser à l’ensemble du système éducatif l’organisation en réseaux écoles-collège de l’éducation prioritaire.

 

Voir aussi du 06.01.07
"Et si on tuait le mammouth ?", Bernard Toulemonde et l’éducation prioritaire (extraits du livre et entretiens)

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