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Terra Nova propose d’investir dans la petite enfance en s’inspirant de recherches et pratiques internationales et en donnant la priorité aux publics et quartiers populaires

1er juin 2017

Investissons dans la petite enfance – L’égalité des chances se joue avant la maternelle

Ce rapport de Terra Nova ambitionne de renouveler la politique de la petite enfance. Elle doit viser autant l’égalité des chances que l’appui aux parents qui travaillent ; elle doit être envisagée autant du point de vue du développement de l’enfant que de celui des parents ; on doit y parler autant d’éducation que de modes de garde. Ce travail défend un objectif principal : orienter la politique de la petite enfance vers les enfants et les parents qui en ont le plus besoin – en donnant la priorité au développement des crèches dans les quartiers populaires et les territoires ruraux, en imposant la transparence dans l’attribution des places, en améliorant la qualité pédagogique dans les crèches et en développant fortement le soutien aux parents.

Par Florent de Bodman, Clément de Chaisemartin, Romain Dugravier, Marc Gurgand,

Synthèse

[...]
- Une vision, un objectif et une méthode pour renouveler la politique de la petite enfance

Une vision : la politique de la petite enfance doit viser autant l’égalité des chances que l’appui aux parents qui travaillent ; elle doit être envisagée autant du point de vue du développement de l’enfant que de celui des parents ; on doit y parler autant d’éducation que de modes de garde.

Un objectif principal : orienter cette politique vers les enfants et les parents qui en ont le plus besoin – en donnant la priorité au développement des crèches dans les quartiers populaires et les territoires ruraux, en imposant la transparence dans l’attribution des places, en améliorant la qualité pédagogique dans les crèches et en développant fortement le soutien aux parents.

Une méthode : celle du dialogue entre praticiens de terrain et chercheurs – pour promouvoir les pratiques les plus efficaces validées par les évaluations scientifiques, et pour apporter une inspiration internationale et innovante à nos services publics de la petite enfance. Ce rapport recense ainsi les principaux résultats scientifiques utiles pour les praticiens.

La France compte parmi les pays les mieux armés pour atteindre ces objectifs, mais nous pourrions faire tellement mieux ! Nous avons la chance de disposer d’un nombre de crèches important, qui croît grâce à un sensible effort financier national et qui est peu coûteux pour les familles modestes. Pourtant, ces établissements accueillent encore très peu de jeunes enfants issus de milieux défavorisés, alors que ce sont eux qui tireraient le plus grand bénéfice de crèches à haute qualité éducative. Si un enfant est né dans une famille pauvre, il a en effet 5% de chances d’être accueilli en crèche ; pour les enfants de familles aisées, ce chiffre est 4,5 fois plus élevé[2] !

L’État tente depuis longtemps d’augmenter le taux d’enfants de familles pauvres dans les crèches : le Gouvernement avait fixé en 2012 l’objectif d’atteindre une proportion de 10% d’enfants défavorisés en crèche. La clé reste cependant la mobilisation des élus locaux, qui doivent rendre plus transparentes et équitables les procédures d’attribution des places. La croissance du nombre total de crèches en France est un atout majeur pour atteindre ces objectifs : il ne s’agit pas d’évincer les profils qui bénéficient déjà des crèches, et notamment les couples bi-actifs, mais de profiter des nouvelles places pour inclure davantage de familles modestes. Les crèches répondent à un besoin important pour toutes les familles ; mais pour les enfants pauvres, elles peuvent changer le cours d’une vie.

Surtout, l’essentiel reste d’améliorer la qualité éducative de nos services publics de la petite enfance. Les crèches ont concentré historiquement leurs efforts sur la santé et la sécurité, puis sur le développement psychomoteur et la socialisation des enfants. Or, l’éducation commence avant l’école : la petite enfance doit être conçue comme un moment à part entière de l’éducation – peut-être même l’un des plus importants. La politique nationale d’accueil du jeune enfant doit faire de la qualité pédagogique un objectif aussi important que la fonction de garde des enfants. Il en va de même pour l’offre de soutien et de conseils aux parents, proposée dans les associations spécialisées, les lieux d’accueil enfant-parent ou les PMI[3] : elle reste souvent trop artisanale et de qualité hétérogène, ou bien elle se concentre essentiellement sur les enjeux liés à la santé de l’enfant (sommeil, alimentation, vaccins). Il est temps de reconnaître que l’accompagnement des parents de jeunes enfants est un objectif légitime et porteur de grands bénéfices sociaux – à condition d’être proposé de façon bienveillante et non prescriptive, de construire dans la durée la confiance des parents y compris les plus précaires, et d’utiliser les dispositifs les plus efficaces éclairés par la recherche scientifique. Les professionnels de la petite enfance sont nombreux à être engagés en faveur de l’innovation pédagogique en crèche ou en PMI : aux responsables nationaux de reconnaître l’importance cruciale de ces efforts et de leur en donner les moyens. La qualité éducative dès la petite enfance doit devenir un chantier national si nous voulons offrir une réelle égalité des chances à tous nos enfants.

- Une mobilisation nécessaire du Gouvernement pour l’égalité des chances avant l’école

[...] Pour mener ce renouvellement urgent de notre politique de la petite enfance, le Gouvernement pourra s’appuyer sur de nombreuses expériences locales : des projets engagés et innovants, qui sont devenus une source d’inspiration et sont aujourd’hui généralisables. Pour rendre plus équitable l’accès aux crèches, l’exemple de la ville de Lyon peut ainsi être suivi : elle a mis en place un système par points, où les demandes sont classées selon des critères précis et publics qui permettent à chaque famille de connaître ses chances de réussite. Les parents savent ainsi d’emblée qu’ils obtiendront plus de points s’ils déposent leur demande à l’avance, s’ils sont en situation d’isolement ou si leur enfant est porteur d’un handicap, mais moins de points s’ils ont des revenus élevés. Un tel exemple montre que l’ouverture des crèches aux familles vulnérables peut s’effectuer en suivant une procédure consensuelle et réplicable.

Pour améliorer la qualité éducative en crèche, le Gouvernement pourra également s’appuyer sur de nombreuses initiatives locales prometteuses, soucieuses de capitaliser sur les bonnes pratiques afin d’être transposables ailleurs. Outre des projets en voie d’essaimage à grande échelle comme « Ecolo crèche » ou « Parler Bambin »[4], on peut citer le projet de recherche-action « Jeux d’enfants ». Lancé par la ville de Lille puis par un réseau de crèches mutualistes, il a transposé en France les outils pédagogiques de la célèbre étude « Carolina Abecedarian ».
Dans la dizaine de structures impliquées, cette approche permet d’adapter les activités à la situation individuelle de chaque enfant : une série de jeux éducatifs simples leur sont proposés (encourager l’enfant à imiter les actions de l’adulte, jouer avec des balles pour stimuler la motricité fine, verser de l’eau dans des verres pour comprendre le sens des mots « plus » et « moins »), mais toujours en proposant à l’enfant un jeu adapté aux comportements qu’il commence déjà à développer. Cette méthode permet à la fois d’enrichir l’observation des professionnels des crèches et d’encourager un développement complet de l’enfant basé sur la confiance en soi. Son extension à d’autres crèches est en préparation dans différentes villes. Comme ce projet, d’autres recherches-actions encore plus ambitieuses pourraient être suscitées par l’Etat : en expérimentant, en évaluant et en changeant d’échelle, de telles innovations peuvent transformer les crèches en outils cruciaux de lutte contre les inégalités.

Le rapport (56 pages)

Extrait de tnova.fr du 31.05.17 : Investissons dans la petite enfance – L’égalité des chances se joue avant la maternelle

 

[...] Il convient de « rompre avec l’idée que l’État doit seulement financer des modes de garde, en laissant toute latitude aux communes pour la sélection des familles », préviennent les experts.

La mesure phare qu’ils proposent est de « créer 40 000 places supplémentaires de crèches dans les quartiers prioritaires et les territoires ruraux ». Avec la politique de la petite enfance, estiment-ils, le gouvernement aura entre les mains « un des instruments les plus efficaces pour l’égalité des chances et la réussite de tous. »

Extrait de la-croix.com du 31.05.17 : Des pistes pour rendre l’accès aux places en crèche plus juste

 

[...] L’étude est très marquée par l’identité professionnelle de ses auteurs. Nos problèmes c’est les pauvres. L’essai justifie une autre politique de la petite enfance par le développement neuronal et par l’efficacité économique d’une intervention à ce niveau. Il vise à développer " la qualité éducative de nos services publics de la petite enfance" en y implantant des méthodes américaines ou françaises (Parler bambin) qui cibleraient les familles défavorisées. Le texte veut aussi impulser une école des parents pour les parents pauvres. Concernant les crèches, cet essai très technocratique pourrait aussi influer sur la scolarisation des moins de 3 ans.

Extrait de cafepedagogique.net du 01.06.17 : Terra nova appelle à investir dans la petite enfance

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