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Extrait du « Monde » du 14.09.04 : réduire les inégalités scolaires
Dominique Strauss-Kahn présente son projet pour réduire les inégalités scolaires. Alors que le Parti socialiste reste discret sur ses projets en matière d’éducation, Dominique Strauss-Kahn a décidé de se saisir du sujet, dans le cadre de son club A gauche, en Europe. Samedi 11 septembre, il organisait un colloque sur les moyens de réduire les inégalités scolaires.
"Depuis un peu plus d’un an, j’ai le sentiment que la gauche doit nourrir un projet éducatif, explique-t-il. Tout ce qu’on a fait à gauche, depuis la IIIe République, c’est d’essayer de donner la même chose à tout le monde, d’assurer ce que j’appelle l’égalité formelle. Mais le problème, aujourd’hui, c’est de donner différemment, de donner plus aux zones défavorisées. De chercher une égalité réelle." Une manière de prôner plus de discrimination positive à l’école.
S’inspirant du travail de deux chercheurs du CNRS, Eric Maurin et Marc Gurgand, l’ancien ministre insiste sur la nécessité de "changer la société pour changer le système éducatif". Il propose la création d’un service public de la petite enfance qui permette de corriger les inégalités "à la racine" et porte aussi bien sur les questions de logement que de santé. En ce qui concerne l’école proprement dite, M. Strauss-Kahn invite à consacrer plus de moyens aux zones d’éducation prioritaires (ZEP), dont les crédits par élève ne sont supérieurs à ceux des établissements hors ZEP que de moins de 7 %, en s’appuyant sur les travaux de l’économiste Thomas Piketty (Le Monde daté 5-6 septembre). Quitte, pour des raisons budgétaires, à donner un peu moins aux plus favorisés.
Démocratiser le supérieur
Dernier point, l’enseignement supérieur : "L’université française est en train de subir un déclassement considérable dans les comparaisons européennes. Elle est injuste et inefficace. Nous avons démocratisé l’enseignement secondaire mais pas le supérieur", considère-t-il.
Dominique Strauss-Kahn a-t-il grillé la politesse au Parti socialiste, qui tiendra le 2 octobre son premier colloque sur l’éducation et le rôle des acteurs locaux ? "Personne n’est propriétaire du sujet", répond le maire de Sarcelles. "Ce n’est pas une idée très nouvelle de dire que tout se joue au niveau de la petite enfance. Faut-il vraiment un colloque pour ça ?", rétorque François Hollande. Avant d’ajouter : "Il est toujours bon que des idées circulent au sein du PS."
Justement, jusqu’ici, en matière d’éducation, les idées ont eu du mal à circuler rue de Solférino. Mardi 31 août, Yves Durand, secrétaire national chargé de l’éducation, a présenté au bureau national, dans une indifférence quasi générale, un texte sur "le droit à l’excellence pour tous : une exigence démocratique". Le PS s’y engage pourtant à "remplacer les départs à la retraite" des enseignants, qui, d’ici à dix ans, représenteront le tiers des effectifs actuels. "La question, c’est de savoir s’il faut aller plus loin", ajoute M. Durand, qui refuse d’envisager une baisse du nombre d’enseignants alors même que la démographie recule. Depuis dix ans, le nombre d’élèves n’a cessé de baisser - selon le ministère, dans l’enseignement scolaire, il est passé de 10,725 à 10,388 millions de 1994 à 2004 - alors que le nombre d’enseignants a augmenté, dans le même temps, de 726 000 à 754 000.
Pour le reste, le texte adopté par le PS propose plusieurs pistes, autour de la petite enfance, de la continuité scolaire et de l’enseignement supérieur. Il réaffirme également l’objectif de 80 % d’une classe d’âge au niveau du baccalauréat, inscrit dans la loi d’orientation de 1989. M. Durand s’oppose à une orientation avant la fin de la troisième et envisage de porter de 16 à 18 ans l’âge de la scolarité obligatoire. François Hollande préfère parler d’une "exigence de formation - qualification jusqu’à 18 ans" et n’est pas favorable au maintien des jeunes jusqu’à leur majorité "dans les structures actuelles de l’école, avec ce qu’on sait des classes - parking et de l’échec scolaire". Afin d’affiner ses positions, le PS prévoit d’organiser une série de colloques sur l’éducation d’ici au printemps. Il devra pourtant préciser ses intentions avant la fin de l’année, quand le gouvernement présentera son projet de loi d’orientation sur l’école.
Martine Laronche et Virginie Malingre.