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Cités éducatives : le Cnoe (Comité national d’orientation et d’évaluation) fait un premier bilan d’étape, avec 22 recommandations portant notamment sur le co-pilotage local (ToutEduc)

20 août 2021

Cités éducatives, 1er bilan d’étape : de l’enthousiasme sur le terrain, mais une démarche encore fragile, très perturbée par la crise sanitaire (rapport CNOE)

“Quand on regarde les axes réellement investis en ce début d’existence, on note que les thématiques relatives à la sécurisation des parcours, aux relations avec les familles, au numérique et à la culture sont les plus prégnantes dans les plans d’actions des Cités éducatives. Les thématiques les moins investies sont : le renouvellement urbain (12 Cités), l’égalité filles-garçons (30 Cités)“, commente le Comité National d’orientation et d’évaluation (CNOE) dans son premier bilan d’étape portant sur les 80 cités éducatives lancées en 2019.

Selon sa présidente Sylvie Charrière, ce projet, qui s’est depuis démultiplié pour atteindre un objectif de 200 cités éducatives d’ici à 2022, consiste à “s’appuyer sur la richesse associative, économique, humaine du territoire pour construire des alliances éducatives entre des mondes qui parfois s’ignorent." Elle estime en effet qu’ “au moment où de nombreuses études (INSEE, OCDE) montrent que l’ascenseur social est grippé, il est essentiel de trouver des pistes pour améliorer l’égalité des chances. Le premier levier essentiel est évidemment l’école. L’éducation prioritaire a cette ambition, néanmoins cette politique publique installée depuis 1981 ne semble pas, à elle seule, parvenir à ses fins.“ Ainsi, le rapport expose la démarche des cités éducatives : un programme national d’appui aux dynamiques locales de coopération éducative dans les quartiers à faible mixité sociale, et dans ses recommandations il précise qu’ “elle n’est pas un dispositif de plus, elle est avant tout une démarche originale.“

Ce premier bilan fournit donc un aperçu où “80% des Cités (63 sur 79) ont indiqué un retard dans le déploiement de leur programme d’actions. Ce retard est principalement lié au contexte de crise sanitaire. Certaines Cités évoquent également le versement tardif des crédits ou encore le manque de ressources humaines opérationnelles pour mettre en œuvre le plan.“

“Il faut également souligner qu’un nombre important d’actions n’a pu être engagé du fait des confinements (en particulier les actions de formations inter-acteurs et certaines actions culturelles)“, explique le rapport du CNOE, ce que ToutEduc a également constaté au contact d’acteurs de la cité éducative Portes du XXème à Paris, certaines actions impliquant des parents d’élèves n’ayant pu être réalisées au cours de l’année 2021 en raison de la crise sanitaire. Revenant sur la pandémie, le bilan du Comité d’évaluation signale que “le modèle de fonctionnement des Cités éducatives a montré sa pertinence en situation de crise, il a pu montrer qu’il n’est pas un dispositif de plus mais un facilitateur de mobilisation collective. Il reste à le conforter, en prolongeant, par temps calme, les habitudes collaboratives, la considération des acteurs, et leur mobilisation.“

Il recommande de porter une attention particulière à la gouvernance locale “qui doit être équilibrée, horizontale, en phase avec le terrain, et disposer d’une marge d’autonomie“, mais également à “l’école hors l’école, que la crise a rendue nécessaire par les collaborations entre acteurs“ et qui “doit être un acquis pour la suite, autour notamment du numérique éducatif, du mentorat, et du couple enseignants/parents à conforter, ainsi que du rôle du tissu associatif“. De plus, “comme l’a montré par exemple l’enjeu de l’aide alimentaire“, est importante la prise en charge globale des enfants et des familles en difficulté, à organiser avec l’ensemble des acteurs sanitaires et sociaux.

Enfin, le CNOE souhaite que “le champ des pratiques culturelles, particulièrement disparate selon les familles, doit faire l’objet d’un effort redoublé, notamment pendant la période des vacances et à la rentrée, afin d’ouvrir plus largement l’horizon des enfants et des jeunes des quartiers concernés.“

Au-delà de l’effort d’équipement informatique et numérique, le CNOE considère qu’ “il est absolument essentiel de travailler sur l’usage pédagogique des outils et applications numériques en multipliant les collaborations entre enseignants et intervenants extra-scolaires, et parents. Il est tout aussi essentiel de poursuivre et intensifier les travaux engagés autour des attendus des enseignants. La structuration de tiers-lieux peut aussi aider à la réduction de la fracture numérique. Les activités, les pratiques culturelles et artistiques devront être ‘relancées‘ dès que la situation sanitaire le permettra. Enfin les séjours éducatifs, les activités de loisirs et de vacances, appuyés sur les mouvements d’éducation populaires doivent pouvoir continuer.“

Par ailleurs, il est souligné que “la plupart des actions concernent majoritairement le public d’âge scolaire (de 3 à 16 ans). Les Cités sont conscientes de l’effort de réflexion nécessaire sur les publics âgés de 16 à 25 ans et sur la petite enfance.“ Le comité relève de même que “très peu de Cités ont bâti un groupe de travail thématique embarquant des acteurs essentiels : la région (en charge de l’orientation et de la formation), le monde économique (chambres de commerce, clubs d’entreprises,...), la DIRECCTE, les missions locales, les missions de lutte contre le décrochage scolaire, les éducateurs spécialisés, les proviseurs de lycées, les directeurs de CFA,... Cela est, sans aucun doute, lié au positionnement du chef de file au niveau collège et, même si le maire (ou un de ses adjoints) est président de la mission locale, là encore, il est rare que tous ces acteurs soient réunis pour aborder ensemble des thématiques allant du stage de 3ème, au raccrochage des jeunes du collège, à la carte des formations, à la mise en œuvre de l’obligation de formation des 16-18 ans,...“

Dans ses conclusions, le CNOE dit se réjouir “de ce que la démarche de cités éducatives, ait mobilisé, mis en mouvement, autant d’acteurs et de l’enthousiasme constaté sur le terrain“, mais constate que “la démarche est encore fragile“. Le comité explique que cette démarche se veut expérimentale et que “la jeune histoire des 80 premières Cités doit permettre de préciser les critères nécessaires à la définition d’un cahier des charges de labellisation“. Il conclut en exprimant son espoir que “l’expérimentation en cours permette une modélisation des ‘méthodes et des actions inspirantes‘, spécifiques à des territoires urbains fortement ségrégués.“

Extrait de touteduc.fr du 19.08.21

Le rapport (49 p.)

[...] EXTRAIT
Les 22 recommandations

1. La démarche de cité éducative part de la volonté de tous les acteurs d’un territoire de bâtir ensemble un véritable écosystème coopératif local visant l’émancipation et l’insertion de tous les jeunes.
2. La Cité éducative n’est pas un dispositif de plus, elle est avant tout une démarche originale.
L’affectation prioritaire d’un budget à l’ingénierie est de ce fait un choix nécessaire et ambitieux pour la conforter.
3. À la fin de l’expérimentation, il conviendra de stabiliser le cahier des charges qui définira les critères de labellisation sur le modèle du contrat des Campus des métiers et de la qualification par exemple.
4. Les compétences croisées en matière de politique jeunesse (communes, départements, régions, agglomérations) doivent pousser les Cités éducatives, dont l’intervention concerne la population des 0 à 25 ans, à organiser la mise en cohérence de ces différents niveaux d’interventions en veillant à associer l’ensemble de ces différentes collectivités et ainsi éviter le travail en silo.
5. Dans les faits, le pilotage politique/stratégique des cités éducatives est assuré par les troïkas. Elles se sont souvent dotées d’un chef de projet opérationnel. Le choix qui sera fait du profil du chef de projet opérationnel est important car il doit, à la fois, bien connaître le territoire ainsi que les deux cultures : éducation nationale et politique de la ville.
6. En prévision du prochain rapport du CNOE, une étude devrait faire le point sur la situation des chefs de file Éducation nationale et des chefs de projet opérationnel. Quelles décharges ? Quels profils ? Quelles reconnaissances en termes de carrière ? Quelles formations ?
7. Sur le moyen terme, il sera important de disposer d’une analyse précise des flux provenant de l’État ou des collectivités contribuant au financement des politiques éducatives dans les territoires des Cités éducatives au cours de l’application de la convention tri-annuelle afin de vérifier que les financements spécifiques liés aux programmes constituent bien un abondement des crédits de droit commun et non des effets d’aubaine ou de substitution.
8. Il sera nécessaire d’inscrire dans le cahier des charges des programmes d’action futurs les processus d’enrôlement des acteurs, usagers et publics.
9. Les programmes d’action doivent être avant tout conçu comme des cadres de référence dont il est nécessaire de prévoir une approche souple et adaptative pour tenir compte des évolutions du contexte, des opportunités nouvelles,…
10. En ce qui concerne l’évaluation, pour de nombreuses Cités éducatives, il est nécessaire d’apporter un appui. Cela pourrait se faire sous la forme d’échanges sur la structuration de la démarche d’évaluation, sur la définition d’une stratégie, des axes, et sur les propositions d’accompagnement par des tiers (bureaux d’études, équipes de recherche…).
11. Dans la perspective d’un accroissement du nombre de Cités à 126 puis une évolution à un effectif global de 200, doivent être reconsidérés, à la fois l’effectif de l’équipe de la coordination nationale, mais aussi son organisation et éventuellement celle de ses relais territoriaux.
12. Il serait souhaitable que ces indicateurs APAE / Cités éducatives soient plus facilement accessibles par les chefs de files. Il faudra aussi veiller à ce que chaque comité de pilotage des Cités éducatives puisse en disposer plus aisément. De plus, certaines cités englobent parfois plusieurs collèges et/ou sont à cheval sur 2 communes, il faudrait pouvoir prendre en considération ces spécificités.
13. Dans la perspective d’une montée en puissance du nombre de Cités éducatives dans les différentes régions/métropoles, il faudra définir les modalités d’un accompagnement territorial adapté favorisant le développement en synergie des dynamiques locales.
14. Le lancement du travail des groupes pilotes thématiques a été rendu délicat en raison du deuxième confinement. Les feuilles de route données par les pilotes de ces groupes doivent être précisées : rythme des réunions, objectifs, travail autour des indicateurs, évaluation des actions.
Les apports du travail des groupes pilotes devront faire l’objet de points d’étapes dans les rapports du CNOE afin de valoriser notamment les actions qui ont fait leurs preuves.
15. L’articulation entre niveau départemental et local doit être travaillée et précisée : il faudra établir une évaluation qualitative entre les modes de pilotage très départementalisés et ceux qui ont laissé de l’autonomie au niveau local (notamment à travers l’étude de la façon dont s’effectue ce pilotage par les services de l’État dans le département du Nord et celui du Val d’Oise).
16. Une attention particulière doit être portée aux cités ultramarines pour limiter les effets de leur isolement.
17. Il serait souhaitable que les co-pilotes de la Cité éducative soient désignés sur le principe du volontariat, accompagnés en termes de formation, et qu’à l’issue de leur mission, après une certaine stabilité, une reconnaissance professionnelle soit possible en terme de carrière. Une validation des compétences acquises pourrait permettre des passerelles vers de nouvelles mobilités interprofessionnelles.
18. Les efforts en cours pour associer les acteurs et les usagers doivent être poursuivis et intensifiés dans toutes les Cités éducatives, en allant au-delà des acteurs habituels et au-delà de l’utile mais insuffisante communication : l’association des acteurs et usagers aux décisions, à l’évaluation permettra l’émergence d’une réelle culture commune et d’un écosystème solidaire, à travers notamment la mise en place d’observatoires partenariaux et participatifs.
19. Comme le préconise l’Institut national de la Jeunesse et de l’éducation populaire (INJEP) dans son rapport plusieurs éléments devraient être mieux pris en compte dans les démarches évaluatives :
 La clarification des objectifs et des attentes en matière d’évaluation (ex-ante, avant/après, in itinere et finale : privilégier l’avant/après plutôt que les mesures d’impact).
 Un accent mis sur les spécificités stratégiques de la Cité.
 L’adéquation de la stratégie d’évaluation au regard des ambitions, des moyens et des niveaux d’avancement des Cités éducatives.
 L’évaluation des effets sur le système et l’ensemble de ses membres avec l’appui d’experts. Le recours à l’usage de nouveaux outils qualitatifs plus empruntés au domaine de la sociologie,
entretiens, focus group, suivis de cohorte, observations de terrain, sociogrammes, pourrait aussi être utilement encouragé.
 Il sera nécessaire d’avoir une attention plus particulière pour les Cités les plus petites en taille.
Cette démarche doit intégrer une dimension d’auto-évaluation et doit être co-construite avec l’ensemble des acteurs.
20. Les premières « Revue de Projet » ont souvent pris la forme de bilans ou de contrôle de gestion. Il est nécessaire de privilégier une démarche d’analyse réflexive, en proposant un examen de la mise en œuvre des objectifs stratégiques, des contraintes ou obstacles rencontrés et donc des réorientations, des choix, des évolutions proposées par les cités. Un accompagnement ad hoc de la préparation des prochaines revues de projet par la coordination nationale sera indispensable, ce qui facilitera la distinction de cette revue de projet du nécessaire contrôle de gestion des fonds alloués.
21. Dans l’année 2021 une enquête qualitative devrait être menée sur les différents modèles d’opérateurs financiers (GIP, Caisse des écoles, préfecture, collectivité) et sur leur articulation.
22. La coordination nationale, sur la base d’informations émanant des Cités éducatives, devra fournir au CNOE des éléments de bilan financier pour 2021. Ce bilan portera a minima sur les crédits engagés (147) et sur les fonds collège (230). Il devra faire apparaître les actions, ou axes les plus investis.

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Commentaire du Cnoe sur la recommandation n° 17
La présence, nouvelle, de l’Éducation nationale dans une politique éducative territorialisée est un fait majeur. Si les deux autres parties prenantes (villes et préfectures) ont des habitudes anciennes de travail en commun. Il faudra un peu de temps pour que le monde de l’Éducation nationale s’imprègne de la culture politique de la ville.
L’articulation de cultures institutionnelles plutôt verticales et séquentielles et de la nécessaire culture horizontale, en réseau, doit rester un point de vigilance. Dans ce cadre l’articulation des niveaux départementaux et locaux de gestion doit impérativement être mise à plat : quels rôles pour chacun ? Dans quelles limites ? Et pour quoi faire ?
La coordination nationale doit poursuivre et intensifier ses modalités d’accompagnement des acteurs : par exemple en recensant des informations sur eux (profils, lettre de mission, positionnement) de façon à aider les Cités à s’outiller.
Dans l’écosystème Cités éducatives, la collaboration, la coopération, la co-construction, la co-évaluation ne peut se limiter à la Troïka ou au comité de pilotage. Elle nécessite l’implication de l’ensemble des acteurs, usagers et publics

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