La LCR et la réforme des ZEP

10 juillet 2006

Extrait du site de la LCR lre 07.07.06 : ZEP au rabais

Le dispositif mis en place à la rentrée scolaire 2006 dans les collèges considérés comme les plus en difficulté cache, sous le label « ambition réussite », des objectifs nettement moins louables : justifier la baisse des moyens attribués à l’Éducation nationale, et mettre en place des laboratoires de l’école néolibérale à laquelle les personnels et les parents d’élèves tentent de résister.

Sarkozy ne s’en cache pas, il veut supprimer les ZEP et déréglementer au maximum, jusqu’à favoriser l’implantation d’établissements privés dans les zones dites sensibles. Le ministre de l’Éducation, Gilles de Robien, poursuit, de manière plus discrète, le même objectif. Au-delà des effets d’annonce, il s’agit bien d’officialiser l’existence d’une école à deux vitesses, par une réduction massive des moyens et la déréglementation tous azimuts en ce qui concerne l’enseignement dispensé et les statuts des personnels.

Rappelons que le nouveau dispositif prévu pour l’éducation prioritaire divise les collèges jusque-là classés en ZEP en trois catégories différentes. Une catégorie, non chiffrée à ce jour, constituée par les EP3, est destinée à perdre son statut ZEP dans les trois ans. Les EP2 ne connaissent aucun changement pour le moment. Les 250 collèges dits EP1, ou « ambition réussite », sont censés être les grands bénéficiaires de la « réforme », dans la mesure où ils concentrent, théoriquement, la plus grande part des moyens.
Cependant, ces moyens se résument, pour l’essentiel, à la création des postes de « super-profs », censés superviser et conseiller leurs collègues et, éventuellement, enseigner. Leur fonction, leur statut et les modalités de leur recrutement sont définis de manière extrêmement floue. Notons d’abord que ces créations de postes (environ 1 000) ne compensent en rien les suppressions de postes massives annoncées par De Robien pour la rentrée. Notons aussi que leur financement est assuré par la suppression d’heures en 5e et 4e, dans tous les établissements de France, EP1 compris !

Le classement en EP1 est, en fait, le plus court chemin vers plus de relégation et d’inégalité : individualisation des parcours autour du socle commun, pré-orientation dès la fin de la 5e, pénétration accrue des desiderata du patronat local, autonomisation et contractualisation des moyens. De même, les personnels, sur des postes définis localement, voient leurs qualifications remises en cause.
Pourtant, dans un premier temps, certains établissements classés EP1 ne se voyaient pas refuser un statut qui semblait leur garantir au moins le maintien de l’existant. Les conditions réelles de la préparation de la rentrée ont révélé qu’il s’agissait là d’une illusion. La difficulté de l’administration à recruter des « super profs » est manifeste, au point qu’il est maintenant question soit de piocher directement parmi les enseignants déjà dans l’établissement, ce qui s’avère difficile vu le peu de volontaires, soit d’y envoyer des néotitulaires, par définition sans expérience !
Plus grave, les établissements classés EP1 n’échappent pas à la diminution massive des moyens pour la rentrée : beaucoup subissent suppressions de classes, de postes, d’options, de dispositifs ou de projets pédagogiques particuliers. En fait d’ambition réussite, c’est plutôt esbroufe et fragilisation supplémentaire. Et le refus du classement EP1 est maintenant nettement majoritaire parmi les collèges concernés en Seine-Saint-Denis, département qui compte le plus d’établissements « ambition réussite ».

Il reste maintenant à convaincre, au-delà du 93, de l’inanité du dispositif et de la nécessité de lutter pour le rejet de la contre-réforme de l’éducation prioritaire. La mobilisation, notamment syndicale, n’a jusqu’ici pas été à la hauteur de l’enjeu. C’est pourtant une revendication centrale dans le mouvement à construire, dès la rentrée, pour la défense du service public de l’Éducation. Elle concerne l’ensemble des personnels, des élèves et de leurs parents, qu’ils soient ou non en ZEP.

Ingrid Hayes

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1 Message

  • Voici un beau florigège d’approximations et un discours militant soit, mais erroné... La LCR aurait voulu reprendre à son compte toutes les bêtises savamment instillées dans les salles des profs par la, déjà très peu crédible, FSU, qu’elle n’aurait pas fait mieux...Et pourtant si, elle fait mieux, puisqu’elle en invente d’autres...

    C’est assez triste de voir tant d’énergie pour creer si peu...Voilà des organisations qui feraient mieux de proposer des alternatives... (Et qu’on ne parle pas ici de baisse des effectifs, cette vieille lune, car on a vu des établissements gravement dysfonctionner avec moins de 15 élèves/classe et d’autres faire réussir leurs élèves avec des seuils supérieurs au national hors zep...). C’est donc bien une question de pédagogie plus que de moyens (ce qui ne veut pas dire que les moyens supplémentaires ne soient pas nécessaires...).

    Ce qui me sidère, c’est que je ne crois pas avoir entendu parler des élèves ni des projets que l’on avait pour eux, à aucun moment, nulle part, ni ici, ni ailleurs...

    Certains refusent le label ambition réussite ? Que se passera t il ? Soit d’autres établissements seront candidats, soit les moyens supplémentaires seront reventilés sur les ambition réussite restants. Et après tout, ne vaut il pas mieux donner des moyens à ceux qui les utiliseront ?

    Quand on regarde le plan de Robien, ce qui représente une avancée, il me semble, c’est que pour la première fois il est dit que le projet pédagogique est au coeur du dispositif et que sa mise en oeuvre passe par la contractualisation. Que les équipes se saississent de cette opportunité et qu’elle avancent leurs projets, ce qu’elle veulent vraiment pour leurs élèves, et comment elles comptent s’y prendre, qu’elles le formalisent et qu’elles en débattent avec les collectivités locales, les parents et l’académie... Cela aura le mérite de mettre chacun devant ses responsabilités.

    Je vois beaucoup de craintes s’exprimer ici ou là : statutaires, portant sur l’organisation ou sur les pratiques pédagogiques, également sur la façon avec laquelle les académies s’emparent du dispositif...Certaines craintes sont fondées, la plupart, il faut bien le reconnaître, ne le sont pas sauf que beaucoup ont intérêt à ce que rien ne bouge, si on excepte les enfants...

    Pour finir, ce discours, dont l’objectif est bien différent de celui affiché, fait injure aux enseignants qui, pour la grande majorité, chaque jour, inventent du possible pour leurs élèves... Ce dont les équipes ont besoin c’est d’être accompagnées, aidées, parce que heureusement elles ne font pas classe en regardant la ligne statutaire d’une organisation syndicale, quelqu’elle soit ou la ligne institutionnelle, quelqu’elle soit, mais bien les élèves qu’ils ont en face d’eux, tels qu’ils sont, chaque matin... et c’est bien pour cela que certains réussissent là où d’autres n’essayent même pas.

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