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La création des RAR : exemples dans les académies de Bordeaux et Poitiers

4 septembre 2006

Extrait de « Sud-Ouest » du 04.09.06 : Les ZEP font peau neuve

En ciblant 249 collèges gravement défavorisés, le ministre Gilles de Robien veut stopper la tendance au saupoudrage pervertissant un système qui scolarise désormais un élève sur cinq

Le quartier HLM du Champ-de-Manoeuvre de Soyaux commune industrielle de l’agglomération d’Angoulême est à la fois « zone urbaine sensible » et le lieu d’une opération de « renouvellement urbain » chère au ministre de la Ville, Jean-Louis Borloo. Quant à son collège Romain-Rolland, il figure dans la liste étroite des 249 établissements de France à bénéficier du label Ambition Réussite, qui sert d’étendard (volontariste) à la relance des zones d’éducation prioritaires (ZEP).

« Ici, la moitié des élèves vivent dans un foyer dépourvu de tout revenu salarié, et le taux de boursiers est de 65 % contre 26 % en moyenne en Charente », explique Catherine Lavauzelle, coordonnatrice de la ZEP. Ces indicateurs parmi d’autres disent l’extrême misère sociale du quartier. « Et l’on constate une aggravation depuis trois ans : désormais, il y a plus de familles défavorisées que de catégories socioprofessionnelles intermédiaires », poursuit cette institutrice, qui rappelle que la ZEP de Soyaux ne comprend pas seulement 355 collégiens (dont 100 en sections adaptées) mais aussi les élèves de 7 écoles (4 maternelles et 3 primaires).

« Un tournant »

Sur un pareil terreau, la mission est du genre ingrat et, pour les personnels, tout renfort est le bienvenu afin de nourrir la panoplie de lutte contre l’échec scolaire. « Nous avions déjà obtenu, lors d’autres combats, la présence à Romain-Rolland d’une infirmière à demeure et d’un principal adjoint », rappelle Catherine Lavauzelle : « Cette année, l’élément nouveau est la nomination à temps plein de deux enseignants motivés, qui vont seconder leurs collègues dans d’autres matières et gérer les parcours individualisés des élèves. »

D’autre part, quatre jeunes diplômés se destinant à des carrières éducatives ont été embauchés à raison de dix-sept heures hebdomadaires. Ils seront chargés de l’aide aux devoirs et d’inculquer aux élèves des méthodes de travail. Cette dernière mesure rappelle, en moins ambitieuse, puisque les contrats ne sont que d’un an, la période des « aides-éducateurs » des années 1998-2002. Comme quoi cette réforme des ZEP n’apporte pas que du neuf.

Pourtant, certains veulent y voir un tournant. « Pour la première fois, on assiste à un vrai resserrement du dispositif sur les collèges qui en ont vraiment besoin », relève Louis Bourgarel, de l’Observatoire des zones prioritaires (OZP). Alors qu’aucun syndicat ni parti politique pas même l’UMP, qui demandait le « dépôt de bilan » des ZEP n’a soutenu la réforme actuelle, ce petit observatoire indépendant y voit la première tentative sérieuse de lutter contre un quart de siècle de saupoudrage croissant.

« Instrument formel »

De 362 lors de leur création par le ministre socialiste Alain Savary, en 1981, les ZEP sont vite passées à 500 puis à plus de 900 aujourd’hui. « C’est le chiffre officiel, mais en réalité il y en a 1 120, avec un fort dérapage en 1998 », relève l’OZP. L’objectif initial de « discrimination positive » était-il d’aboutir vingt-cinq ans après à scolariser en ZEP 20 % des écoliers et collégiens de France ? Pour le chercheur Marc Gurgand, auteur d’un rapport sur les ZEP, « cette politique semble avoir renoncé à concentrer les efforts de l’institution scolaire sur les plus démunis ». Il ajoute : « On peut même craindre qu’elle ne constitue de plus en plus un instrument formel de politique sociale, articulé aux politiques de la ville. »

C’est pour désarmer cette critique que Gilles de Robien a annoncé qu’il concentrerait les moyens sur des collèges et des quartiers marqués non seulement par des difficultés scolaires et sociales, mais aussi « par l’absence de mixité sociale ». Le ministre de l’Education y a été encouragé par une étude de l’Insee qui, en septembre 2005, estimait que « la mise en place des ZEP n’a eu aucun effet significatif sur la réussite des élèves ». Le diagnostic ne rend évidemment pas compte des efforts énormes accomplis par tous les acteurs de terrain, mais est venu conforter l’idée qu’il fallait renouveler les ZEP sous peine de les voir succomber à la dilution.

Halte au fatalisme

Pour l’OZP, qui préconise de concentrer l’effort sur les 5 % d’élèves les plus en difficulté, le ciblage sur 249 collèges va dans le bon sens, en précisant qu’à ses yeux l’essentiel n’est sans doute pas une question de moyens : « Ce qu’il faut, ce sont des équipes soudées, qui croient à l’éducabilité des élèves et rejettent le fatalisme », affirme Louis Bourgarel, qui note que « certaines ZEP ont obtenu des résultats supérieurs aux attentes tandis que d’autres ont échoué ».

L’expérience acquise depuis 1981 a conduit le ministère de l’Education à privilégier la stabilité des équipes en les musclant par l’arrivée d’enseignants chevronnés et par l’appel à l’expérimentation pédagogique. Ce choix concerne aussi le gros des collèges placés sur la seconde liste (EP2), qui conserveront les moyens alloués jusqu’ici pour lutter contre l’échec. C’est en cours d’année que les recteurs d’académie trieront entre ceux qui resteront en ZEP et ceux qui quitteront l’éducation prioritaire.

Christophe Lucet

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En savoir plus

Cinq collèges du Sud-Ouest en catégorie EP1

Sur les 33 collèges prioritaires que comptent les académies de Poitiers et de Bordeaux, 6 seulement font partie des 249 établissements archiprioritaires dont la liste (EP1) a été rendue publique par le ministère de l’Education nationale. Il s’agit des collèges Montaigne et Lapierre à Lormont (Gironde), Jean-Monnet à Pau (Pyrénées-Atlantiques), Pierre-Mendès-France à La Rochelle (Charente-Maritime), Romain-Rolland à Soyaux et La Grande-Garenne à Angoulême (Charente).

Les autres collèges prioritaires 16 en Gironde, 1 dans les Landes, 2 en Charente, 2 en Charente-Maritime, 3 en Lot-et-Garonne, et 4 dans les Pyrénées-Atlantiques le restent en attendant d’être classés en cours d’année, soit dans la liste EP2 (maintien des moyens prioritaires actuels), soit dans la liste EP3 (sortie progressive du réseau prioritaire).

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