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Non au fatalisme dans les ZEP de Marseille (rapport de l’IGEN, 2006)

18 décembre 2006

Extrait de « Fenêtres sur cours » n°293 du 11.12.06 : Aix-Marseille : le fatalisme n’a pas cours

L’IGEN a publié un rapport sur l’académie d’Aix-Marseille. Son analyse de la situation suscite la controverse. Un texte mal perçu par les enseignants.

Les équipes pédagogiques de l’académie d’Aix-Marseille se seraient-elles résignées aux mauvais résultats de leurs élèves ? Affirmatif, répond un rapport des inspections générales, qui, tout en évoquant le poids régional des contraintes socioéconomiques, suggère qu’elles « ne sont pas seules en cause dans les résultats plus faibles qu’attendus du système éducatif », et qu’elles « paraissent entraîner une sorte de fatalisme résigné sur le niveau décidément trop faible des élèves ».

Ce n’est pas le constat que fait sur le terrain Antoine Marcangeli, IEN du 1er degré dans les quartiers Nord de Marseille : « Pour travailler dans les ZEP « lourdes » des 13ème et 14ème arrondissements, il ne faut pas être résigné. Ce que je relève, au contraire, c’est que de plus en plus de personnels nommés à titre provisoire, demandent à rester ici ».

Pour Christophe Doré, secrétaire départemental du SNUipp 13, et directeur de l’école élémentaire Jean-Jacques Rousseau (ZEP) à Vitrolles, « les enseignants se battent au quotidien pour la réussite de tous les élèves, pour refuser ce soi-disant fatalisme. Ce rapport tombe à un moment où l’école est déjà attaquée de toute part, et ce n’est pas un hasard : le 1er degré a gagné des postes dans l’académie depuis quelques années, et nous craignons que cette évaluation ne soit un préalable à une diminution des moyens ».

Pascal Jardin, l’un des trois IGEN se défend de vouloir, « réduire les moyens d’une académie déjà peu favorisée. Mais il faut alléger le poids d’une éducation prioritaire qui en façonne une image négative pesant lourdement sur les résultats, alors que certains établissements ne justifient pas leur classement en ZEP. » Et de citer par exemple, les départements alpins, « qui ont peu d’élèves étrangers et défavorisés », ou le Pays de Sault (84) et La Ciotat (13), « qui ont des populations mixtes ». Marseille, « ville marquée par de fortes ségrégations où se concentre l’essentiel des difficultés n’est pas concernée par ce remaniement ».

Sur les 26 réseaux Ambition Réussite de l’Académie, 21 sont dans les Bouches-du-Rhône, et 16 dans le seul bassin Marseille-Littoral Nord. Si l’éducation prioritaire concerne également le Vaucluse (10 REP, dont 2 à Avignon), les Alpes-de-Haute- Provence (5 REP) et les Hautes-Alpes (2 REP), pour Gérard Treve, inspecteur d’académie des Bouches-du-Rhône, « il y a surtout de très forts contrastes et une concentration extrême des difficultés dans les Bouches-du- Rhône, bien plus que dans les banlieues d’Ile-de-France. Une modification de la carte des ZEP ne pourrait être que très marginale ».

Christophe Doré a un autre avis : « La situation socio-économique est le principal facteur explicatif des mauvais résultats. Nous estimons qu’il faudrait encore plus de ZEP : davantage d’écoles maternelles devraient être rattachées à leur collège ambition réussite. Le classement des écoles en REP devrait être pris en compte pour les seuils d’ouverture et de fermeture de classes ».

La FSU qui a analysé le rapport de l’IGEN estime d’ailleurs que, s’appuyant sur des moyennes, le texte ignore l’extrême diversité de territoires de la région alors qu’il faudrait « reconnaître l’ampleur de la progression de la pauvreté et ses conséquences dans la vie scolaire, les effets migratoires, le recul de la scolarisation des plus jeunes, le développement de la précarité dans les établissements scolaires ».

Mais l’IGEN Pascal Jardin n’en démord pas : « les mauvais résultats ne sont pas juste une question de moyens, mais aussi de pratiques pédagogiques. Dans les ZEP de Marseille, on accorde trop d’importance aux activités, à l’ouverture de l’élève par le biais d’intervenants extérieurs, plutôt qu’à un apprentissage exigeant. Il faut se recentrer sur ce dernier, par le biais d’un accompagnement de proximité fort, s’appuyant sur des indicateurs et des tableaux de bord qui font pour l’instant défaut ».

Un constat sévère, selon Antoine Marcangeli : « L’époque où les associations intervenaient à tout va dans l’école est révolue ». L’IEN indique par ailleurs que la question du pilotage des équipes est en voie de résolution. « Nous avons désormais un projet de performance académique, qui se décline dans chaque circonscription : il fixe des objectifs ambitieux et s’appuie sur des indicateurs de pilotage précis. Nous avons donc bien intégré l’obligation de résultats, puisque nous visons 100 % d’enfants sachant lire à la fin du CE1 ».
Parmi les instruments de cette ambition renouvelée, il y a « les contrats ambition réussite, qui permettent à des professeurs de collèges référents d’intervenir en primaire 3 heures par semaine et par classe, pour renforcer la liaison école collège. Mais pour nous, la vraie révolution, depuis 2 ans, ce sont les PARE ». Les projets d’amélioration des résultats d’une école, basés sur le volontariat des enseignants, se traduisent, « par la création de postes de maîtres surnuméraires dans 45 écoles rattachées à un collège ambition réussite des Bouches-du-Rhône ». Une démarche qui semble déjà porter ses fruits, si l’on en croit Antoine Marcangeli : « En un an, sur ma circonscription, nous avons réduit de 2 points notre écart par rapport aux évaluations nationales. C’est grâce à la mobilisation des enseignants, qui sont tous volontaires pour des projets PARE. La preuve qu’ils ne sont pas fatalistes ».

William Bolle


Le rapport

Un extrait du rapport :

(...)

Des ressources humaines relativement plus âgées que la moyenne nationale, mais avec une tendance au rajeunissement

Dans le premier degré, comme dans le second degré, les enseignants sont relativement plus âgés que la moyenne nationale. En 2004, les moins de 30 ans représentaient 14,8 % contre 16 % en moyenne nationale dans le premier degré et les 50 ans et plus 24,2 % contre 22,6. Pour les professeurs du secondaire, ces pourcentages étaient, toujours pour la même année, de 9,7 % contre 12,7 % pour les moins de 30 ans et de 38,9 % contre 34,4 pour les plus de 50 ans.

Toutefois, l’analyse de la pyramide des âges met en évidence l’existence d’un rajeunissement de la population. En effet, la courbe de cette pyramide présente une distribution bi-modale à deux pics, l’un pour les 30-39 ans et l’autre pour les 50-59 ans96.
Il convient cependant de noter que les enseignants les plus jeunes sont sur-représentés dans les ZEP : près d’un enseignant sur 4 a moins de 30 ans (26,2 % en école et 23,5 % en collège). Ces pourcentages sont respectivement de 10,3 % et 11,3 % dans les écoles et collèges hors ZEP. La proportion d’enseignants en poste depuis 2 ans ou moins est de 41,3 % dans les écoles en ZEP contre 36,5 % dans les écoles hors ZEP. Pour les collèges, ces chiffres sont respectivement de 33,8 % et 29,9 %.

La rotation importante constatée dans ces établissements ne permet pas la constitution d’équipes solides. Lorsque le professeur débutant est formé et motivé pour être affecté dans un établissement en REP/ZEP, qu’il reçoit en plus une aide de la part de ses collègues plus chevronnés, le bilan est souvent très positif.
On retrouve d’ailleurs ces professeurs comme animateurs dans les dispositifs « Ecole ouverte, aide aux devoirs, collèges - quartiers... ».
En revanche, d’autres qui n’ont pas choisi cette affectation ou qu’ils l’ont souhaitée par simple stratégie de carrière rencontrent de grandes difficultés. Enfin, certains, plus anciens ont une vision pessimiste, voire fataliste du métier ne favorisant pas une implication positive de leurs jeunes collègues.

(...)

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