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Le rapport du Sénat (7) : les propos des sénateurs André et Mahéas

15 février 2007

Extraits du site du Sénat, le 05.02.07 : Le rapport sur le nouveau pacte de solidarité pour les quartiers

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M. Alex TÜRK, président.- Merci. Comme nous avons prévu de terminer nos travaux à 16 h 30, il nous reste une heure pour le débat. Je suggère donc que chacun puisse poser des questions pour que le débat puisse s’engager.

M. Pierre ANDRÉ, rapporteur.- Monsieur le Président, nous n’avons entendu que des interventions brillantes et intéressantes, mais elles ne correspondent pas à ce que j’attendais en tant que rapporteur. Nous avons assisté à un discours interne à l’éducation nationale, mais notre problème est de savoir ce qui s’est passé dans les banlieues, ce qui s’est encore passé hier et ce qui risque de se passer demain.

Depuis vingt ans, nous avons eu l’éducation prioritaire, la réussite éducative, l’ambition éducative, les ZEP et je peux dire que, parfois, nous ne vous comprenons pas quand vous parlez de certaines choses à votre niveau. Lorsque, en tant que maire, comme beaucoup d’élus qui sont présents ici - je suis pour ma part maire d’une ville de 70 000 habitants - , on entend ce que j’ai entendu à Vénissieux, à Strasbourg ou dans d’autres villes, on n’est pas étonné de la grande coupure qui existe entre l’éducation nationale et nous-mêmes qui sommes aux postes de commande pour faire en sorte que les choses se passent bien dans nos villes, nos départements ou notre pays.

Il est bien de dire qu’il faut faire appel aux partenaires extérieurs. Quel beau discours vous avez là ! Mais quelle est la réalité lorsque nous sommes sur le terrain ? En ce qui concerne les rapports qu’on nous apporte, c’est bien souvent l’inspecteur d’académie qui vient nous dire qu’il va fermer une école dans tel ou tel secteur, qu’il n’a pas d’enseignants pour les manifestations patriotiques ou qu’il faut appliquer les normes qui sont fixées continuellement, notamment le fait qu’il ne faut pas plus de vingt enfants dans un bus pour aller à la piscine ou telles autres choses qui coûtent des fortunes aux communes.

Quand j’ai commencé ma carrière professionnelle, pour recruter une bonne secrétaire qui sache écrire le français, on prenait une fille qui avait un CAP. Désormais, il faut au minimum un BTS, sachant que, même dans ce cas, on n’a pas forcément le même niveau. J’ai bien entendu M. Bac, qui, de par ses antécédents professionnels, a une démarche plus proche du terrain, mais, comme mes collègues auront l’occasion de le dire, pour tous les contrats éducatifs et autres que nous voulons mettre en place, il n’est pas facile de mettre autour d’une table les élus, l’Etat et l’éducation nationale. Certes, celle-ci fait partie de l’Etat, mais quand on constate combien les relations entre les préfets, les sous-préfets et l’éducation nationale sont difficiles, on se demande si on appartient au même monde.

J’ajoute que, lorsqu’on veut travailler sur des activités extraprofessionnelles ou extra-scolaires, il faut, en plus, - ô scandale ! - mettre la DDJS dans le coup. Vous avez parlé des financements pluriannuels tout à l’heure, mais il faudrait maintenant des financements au minimum triennaux pour que nous commencions à avoir une réponse dans un délai de deux ans sur les actions que nous voulons monter dans nos communes. Je ne suis peut-être pas gentil avec vous, mais je ne suis pas là pour l’être.

M. Bernard SAINT-GIRONS.- Nous non plus...

M. Pierre ANDRÉ, rapporteur.- Je suis là pour comprendre et nous sommes là pour essayer d’apporter des réponses.

M. Alex TÜRK, président.- Voilà une entrée en matière vivante. Je passe la parole à M. Mahéas.

M. Jacques MAHÉAS.- Je suis un élu de Seine-Saint-Denis, maire de Neuilly-sur-Marne. Nous sommes d’ailleurs ici plusieurs élus de Seine-Saint-Denis. C’est dire, monsieur le Recteur, que nous sommes partie prenante à cet égard. Nous pensons que l’éducation est en effet au coeur de la citoyenneté et, par là même, absolument nécessaire pour l’équilibre de notre société.

Cela dit, une chose m’a frappé : vous avez pratiquement tous parlé du collège. Ma première question sera donc simple : est-ce vraiment le maillon faible ? Deuxièmement, que fait-on dans nos établissements pour évoluer vers une éducation citoyenne qui ferait que l’on respecte vraiment les autres et nos institutions et que l’on ne tombe pas dans des violences urbaines comme celles qui ont été commises par des jeunes de collège ? Je vous signale que, dans ma ville, c’étaient des jeunes de collège et c’est la même chose à Montreuil ou chez M. Dallier. On en parle depuis 30 ou 40 ans et on ne voit toujours pas venir véritablement cette éducation citoyenne dans nos programmes.

Certes, les classes des écoles primaires et maternelles se déplacent en mairie et viennent nous interroger, mais personnellement, en trente ans de mandat de maire, je n’ai quasiment jamais vu de classes de collège venir demander comment fonctionnent une mairie, interroger les élus, etc.

J’en viens à ma troisième question. Je lis dans les statistiques de l’ANPE que l’on manque d’informaticiens, de cadres techniciens du BTP, de techniciens en électricité et en électronique, de techniciens de l’industrie de process, d’ouvriers qualifiés du bâtiment et des travaux publics, d’ouvriers qualifiés travaillant dans le formage du métal, d’ouvriers qualifiés du bois et de professionnels de l’action sociale, culturelle et sportive. C’est vraiment terrible ! D’un côté, nous connaissons un chômage extraordinaire et, d’un autre côté, nous avons un manque d’adaptation aux formations.

Je sais bien que la première chose, pour l’éducation, est de développer l’intelligence et d’apprendre à apprendre, mais, au niveau le plus bas, où nous avons 150 000 jeunes d’une classe d’âge qui quittent l’école sans formation, n’est-il pas possible de mieux s’adapter à la réalité économique du pays ? Je précise que j’ai été moi-même dans l’éducation puisque j’ai été principal de collège. Je me souviens que l’on a arrêté de former des corsetières en 1981 et je suis d’accord sur ce point, mais, pour d’autres métiers, nous sommes exactement dans le même cas.

Je vais vous poser une question qui va vous paraître bizarre : quels sont vos adversaires éducatifs ? Nous avons besoin de le savoir. Est-ce la grande pauvreté ? Est-ce la télévision ? Est-ce la rue, les jeux vidéo, les familles monoparentales ? Pouvez-vous les uns et les autres compléter tout cela ? M. Renard nous a dit qu’il y avait maintenant une ouverture vers l’extérieur. J’aimerais bien, comme le dit notre rapporteur, qu’une telle ouverture existe, mais je peux vous citer l’exemple de Neuilly-sur-Marne, qui passe d’un quartier en restructuration urbaine à un quartier en zone franche. Cela veut dire que les choses ne se sont pas améliorées, bien au contraire.

En même temps, dans les deux collèges en zone d’éducation prioritaire, on supprime des heures de cours pour les mettre en « réseaux ambition réussite ». Il n’y a donc pas du tout de coordination. D’un côté, un ministère dit que c’est une zone franche et, d’un autre côté, le ministère de l’éducation nationale dit que, bien que l’autre ministère ait trouvé que cela va de moins en moins bien, on va faire un transfert aux mille postes des « réseaux ambition réussite ».

Enfin, malgré le retour en arrière actuel du ministère de l’éducation nationale, je voudrais savoir si, très franchement, vous faites, comme moi, un bilan extrêmement positif de ce qu’ont été les emplois jeunes, même s’ils n’ont pas toujours été admis par les enseignants au démarrage. J’ai eu 52 emplois jeunes dans les écoles primaires et maternelles de ma ville, j’en ai eu pratiquement autant dans les collèges et je peux dire que non seulement ils étaient positifs pour ces jeunes, mais qu’en outre, ils ont permis, dans bien des cas, de ramener un certain calme et de faire de l’éducation citoyenne.

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