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Le rapport du Sénat (17) : les autres réponses des personnes auditionnées

27 février 2007

Extraits du site du Sénat, le 05.02.07 : La rapport sur le nouveau pacte de solidarité pour les quartiers

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M. Nicolas RENARD.- Je suis principal d’un gros collège dans les Hauts-de-Seine, fort agité dans le passé et très médiatisé. A l’heure actuelle, vers 19 h 15 ou 19 h 30, nous sommes obligés de faire un appel au micro pour permettre aux derniers enseignants qui travaillent encore avec quelques parents de sortir afin qu’on ne les enferme pas le soir. Vendredi dernier, je suis sorti à 19 h 30 et j’avais sur le trottoir quatre collègues qui arrivaient chargés de sacs parce qu’ils organisaient le 31e repas avec des parents dans le quartier. Cela veut dire que ces enseignants sont venus trente fois au collège, le soir, pour organiser des repas dans un local associatif, afin que les choses soient relativement neutres et les relations gratuites avec les parents.

Je ne vais pas en rajouter : le but n’est pas de vous faire pleurer. Ce que je dis là concerne un grand nombre d’établissements et, grâce aux contacts que nous avons à l’Observatoire des Zones Prioritaires (OZP), où nous voyons beaucoup de monde, nous savons que ce ne sont pas du tout des cas isolés. Ce n’est peut-être pas généralisé, mais nous essayons de faire ce que nous pouvons et je rejoins tout à fait ce que disait le recteur Boissinot tout à l’heure : entre l’image globale de l’Education nationale aujourd’hui et celle que l’on a dans le quartier, il y a un écart absolument énorme sur lequel il est intéressant de s’interroger.

Mme Raymonde LE TEXIER.- C’est la même chose pour les élus ! Nous sommes tous bons à jeter aux chiens, sauf dans notre ville, pour nos électeurs qui nous apprécient !... (Rires.)

M. Nicolas RENARD.- Le deuxième point que j’aborderai concerne la notion d’adversaire. Pour ma part, je ne parlerai pas d’adversaires mais de points de résistance. Je commencerai par citer l’échec scolaire. Certes, nous avons parlé un peu des événements, mais on l’a fait sans aborder la question directement. Comme je l’ai dit tout à l’heure, l’une des premières causes, à mes yeux, même si elle est lointaine, c’est le problème d’un certain nombre de parcours d’échec dans le domaine scolaire. Cela dit, je ne pense pas que nous soyons le seul pays au monde aujourd’hui à rencontrer des difficultés dans ce domaine et il ne faut pas non plus s’autoflageller parce que le défi est énorme et que nous les conditions sociales et culturelles que nous connaissons font que ce problème se pose dans beaucoup de pays, et en particulier chez nous.

Sur cette question, je pense que l’on doit s’interroger véritablement, parce que la question est énorme et que l’éducation nationale a probablement, dans ce domaine, de grandes lourdeurs qui tiennent à l’institution, à des syndicats et à un ensemble de choses. Certes, c’est un sujet complexe et lourd. Cela dit, on sent un certain nombre de tentatives, mais j’évoquais tout à l’heure la difficulté d’accompagner les dispositifs que nous mettons en place : nous sentons un certain nombre de tentatives qui vont probablement dans le bon sens, mais il est vrai que nous avons probablement du mal à les accompagner.

Enfin, il ne faut quand même pas nous charger de tous les maux de la terre en pensant en particulier aux événements de l’automne. Nous essayons souvent de faire ce que nous pouvons, mais nous nous heurtons à des difficultés qui nous dépassent complètement. Pour parler simplement des problèmes de mixité sociale ou de carte scolaire, nous n’avons, hélas, pas complètement la maîtrise sur cette question.

M. Arnold BAC.- Je tiens à excuser Anne-Marie Houillon, qui a dû prendre un train pour rentrer en province où une autre réunion l’attend. Je souhaite tout simplement reprendre le sous-titre suivant d’un ouvrage : « Pour que la République démocratique, laïque et sociale tienne ses promesses », en faisant référence à la Constitution de notre République qui parle de « République laïque, démocratique et sociale ». Il faut simplement qu’elle soit vécue comme une réalité et comme quelque chose de palpable pour des couches de la population qui ne la vivent pas comme telle.

Ce que j’ai entendu dans le deuxième tour des prises de parole montre que ce qui se passe sur le terrain est tout à fait prometteur. Le problème, c’est que, trop souvent, nous entendons dire qu’à tel ou tel endroit, il se passe des choses extraordinaires alors que, par ailleurs, ce n’est pas forcément aussi formidable. La question qui se pose pour nous tous (et je vous y inclus, mesdames et messieurs), porte sur la manière de parvenir aujourd’hui à ce que des collèges comme celui qui a été décrit par mon voisin puissent être extrêmement répandus. Il a dit que ce n’était pas un cas rare et il a raison, mais on ne peut pas dire aujourd’hui que ce type de fonctionnement soit la règle générale. Or on sait bien que ce type de fonctionnement et de lien avec les familles et les jeunes est la façon de permettre que les situations bloquées aujourd’hui se débloquent.

Le problème est donc de trouver les conditions pour le permettre. Je pense que ces conditions relèvent d’un débat et je souhaiterais que ce débat soit au coeur des prochaines échéances électorales, c’est-à-dire qu’on ne parle plus de l’école uniquement en termes de sécurité ou de violence, même si ces problèmes sont une réalité qu’il faut traiter, mais en termes d’espoir, d’avenir et de propositions pour permettre à cette école de tenir ses promesses au même titre que la République. C’est aussi le défi majeur qui nous est lancé.

L’école a su répondre à des défis majeurs au cours de son histoire et, aujourd’hui, elle est confrontée à des défis qui sont ceux de notre période. Je pense qu’elle peut y parvenir si nous arrivons à fédérer toutes les forces, comme je le disais tout à l’heure dans mon propos. Encore une fois, je pense que cette question est au cœur de notre débat, au-delà du travail de cette mission, pour faire en sorte que nous n’ayons pas une caricature de débat, ce qui est trop souvent le cas lorsqu’on parle d’école.

Je pense à des débats ― je ne les nommerai pas ― qui ont lieu sur les médias télévisés et qui, souvent, pour des raisons que je ne vais pas détailler, contraignent à la caricature alors qu’aujourd’hui, s’il y a une question qui ne doit pas être caricaturée, c’est bien celle de l’éducation et de l’école dans notre pays ainsi que celle de la citoyenneté et de l’emploi, c’est-à-dire ce à quoi elle doit préparer.

M. Alex TÜRK, président.- Je tiens à vous remercier particulièrement parce que vous avez parlé d’un deuxième tour et que vous avez bien voulu, après un premier tour qui ne nous a pas ménagés, apporter des réponses telles que vous les ressentiez à un moment donné. Vous avez dit, monsieur le Recteur, qu’il fallait vous pardonner de vous être enflammé, mais nous sommes ravis que nos interlocuteurs s’enflamment et essaient de faire ressortir ce qu’ils ressentent véritablement.

M. Jacques MAHÉAS.- J’interviens encore une fois pour qu’il n’y ait pas d’équivoque. Nous avons posé des questions qui sont peut-être parfois abruptes, mais, comme je le dis toujours aux enseignants, c’est quand même vous qui réussissez le mieux avec nos élèves. C’est dans cet état d’esprit d’amélioration qu’il faut entrevoir cet échange. Je ne voudrais donc pas que vous partiez avec un moral à zéro et en poussant de grands cris. Notre groupe, qui a une sensibilité particulière, est très exigeant et veut que notre éducation nationale réussisse pleinement. Ceci explique peut-être cela.

M. Alex TÜRK, président.- Cette sensibilité particulière et néanmoins partagée par tous nous amène à considérer que c’est notre devoir de vous poser des questions et vous avez pensé que c’était le vôtre d’y répondre de la même manière.

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