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Des blogs de prof de ZEP

12 mars 2007

Extraits du site Homo Numericus, le 11.02.07 : Blog de flic et blog de prof : deux destins

Dans l’administration, écrire un blog peut conduire à des fortunes diverses : publier un livre chez un éditeur connu ou faire l’objet d’une procédure disciplinaire pour manquement au devoir de réserve. Deux blogueurs en font l’expérience ces jours-ci.

L’une est policière.

Elle s’appelle Bénédicte Desforges et vient de sortir son livre, Flic : chronique de la police ordinaire , aux Editions Michalon, écrit à partir de son blog.

L’autre est prof en ZEP.

On ne connaît pas son nom, ni son établissement d’exercice, mais il est poursuivi par son chef d’établissement qui lui reproche d’avoir manqué à son devoir de réserve. Depuis, il a fermé son blog . Une pétition de soutien est en cours de signature.

Les règles en matière de divulgation publique sur un blog d’informations liées à un milieu professionnel, sont loin d’être claires. Tout dépend donc des réactions, très diverses, que les supérieurs hiérarchiques du blogueur peuvent avoir en prenant connaissance de la publication. Ainsi plusieurs blogs, de policiers aussi, ont été fermés en catastrophe et ont valu des ennuis à leurs auteurs. L’Education Nationale semble se distinguer en la matière. On se souvient de l’affaire Garfield qui avait vu un proviseur de lycée manquer être destitué pour avoir raconté son travail quotidien sur un blog.

Au delà de l’évident talent personnel de Bénédicte Desforges, la réussite de « Police, le blog d’un flic » est aussi à mettre en relation avec une administration bien plus ouverte qu’on ne peut le préjuger en matière de communication avec le public par l’intermédiaire des nouvelles technologies. Un petit coup d’oeil au site de recrutement de la Police nationale est instructif et montre comment on peut tirer parti de ces outils de communication pour informer au mieux le public sur la réalité quotidienne d’un métier.

Rien de tel dans l’Education Nationale, apparemment terrifiée à l’idée d’une communication non contrôlée de ses agents avec le public. Les expériences de blogs mis en place et soutenus par l’institution sont extrêmement rares et limitées, preuve supplémentaire du décalage impressionnant entre une société qui a profondément évolué et une institution éducative qui semble toujours vivre sur des modèles du siècle dernier.

Plus profondément, on peut se demander si ces sanctions ne sont pas le signe d’une administration développant le syndrome du bunker ; tout se passe comme s’il ne fallait pas que le public sache ce qui se passe réellement dans les classes et les établissements, comme s’il fallait préserver à tout prix l’apparence d’un mythe auquel plus personne ne croit par ailleurs.

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Extrait du blog de deux profs de ZEP de Seine-Saint-Denis « S’ils n’y avait que les élèves... », le 11.03.07 : Bayrou et les profs, rappelez vous...

Ça faisait longtemps que nous n’avions pas été aussi angoissés un jour de rentrée. La perspective de revoir les élèves n’y est pour rien. Notre souci, c’est les profs !
Nous avons quitté il y a deux semaines un collège plutôt à gauche. On avait bien quelques ultra-minoritaires qui ne jurent que par les classes de niveaux mais, bon an mal an, la grande majorité de nos profs était plutôt de gauche dans leur discours. Bien sûr, on râlait contre l’encadrement militaire, la réforme de la carte scolaire et les autres trouvailles de Ségolène Royal. On était déçu mais tout de même, on arrivait encore à faire la différence entre la Gauche et la Droite.

C’était avant Bayrou !

Cette semaine est sorti un sondage dans Le Monde de l’Education qui donne des indications sur les intentions de vote des enseignants au premier tour de la Présidentielle : 31% iraient à Ségolène Royal mais seulement 48,5% aux différents candidats de la gauche (contre 72% en 2002). Et François Bayrou en récupérerait 27%.

Nous ne sommes pas complètement dupes des sondages et de leur pertinence. Pourtant, ces chiffres nous stressent. Potentiellement, un prof sur quatre pourrait voter Bayrou. Des profs de mon collège, des profs en ZEP, pourraient voter Bayrou ? Ils pourraient voter UDF ? On ne voudrait pas paraître sectaire mais là, on est sur le point d’être traumatisé !

OK, Bayrou se présente contre Sarkozy, mais tout de même... Le cerveau des êtres humains, et donc des profs, n’est pas le même que celui des poissons rouges, sa capacité de mémorisation à long terme dépasse les 30 secondes, non ?

Rappelez vous :

1) Bayrou, c’est le gars qui prétendait réformer la Loi Falloux au profit de l’enseignement privé. Oui, c’était en 1994. Oui, on avait moins de vingt ans... Mais certains d’entre nous ont fait leurs premiers pas de militant en 1984 sur les épaules de leurs parents dans les contre-manifestations à la mobilisation de « l’école libre ». Certains ont fait leur scolarité en Bretagne où la guerre scolaire est encore une réalité. Certains n’ont pas attendu les « signes ostentatoires » pour avoir un véritable attachement à la laïcité dans l’Education... 1905, c’est loin aussi !

2) Etre ministre d’Edouard Balladur de 1993 à 1995, ministre d’Alain Juppé de 1995 à 1997, déléguer en 1999 Christine Boutin pour s’exprimer au nom de son parti à l’Assemblée Nationale lors de la lecture sur le PACS, soutenir Alain Juppé lors des élections municipales de Bordeaux en 2006 n’est pas selon nous la meilleure façon, pour François Bayrou, de se démarquer de... la droite !

3) En 2004, notre collège s’est mobilisé contre la loi Fillon sur la réforme de l’Education, celle qui instaure, entre autres, le socle commun de connaissances et de compétences. Une partie du groupe UDF s’est certes abstenu sur cette loi à l’Assemblée Nationale (l’abstention, quelle grande marque de défiance à ceux dont on voudrait faire croire qu’il s’agit de nos adversaires !), mais la grande majorité des membres du parti de François Bayrou au Sénat l’ont votée.

4 ) Gilles de Robien est le ministre de l’Education qui a fait le plus de mal à l’école et il est toujours membre de l’UDF, le parti dont Bayrou est censé être le chef.
5) En 1998, à l’époque d’Allègre-Royal (notre mémoire n’est pas si sélective que ça), il y a eu en Seine-Saint-Denis une mobilisation massive des enseignants et des parents d’élèves qui a débouché sur la mise en place d’un plan de rattrapage avec, à la clé, la création de plusieurs milliers de postes d’enseignants et l’arrivée de milliers d’emplois-jeunes. Ce plan porte bien son nom : il s’agissait de rattraper le temps perdu entre 1993 et 1997, celui où François Bayrou était aux commandes.

Des profs de notre collège, des profs en ZEP, pourraient donc voter Bayrou ? On ne peut pas le croire. Mais cette rentrée nous angoisse vraiment.

Jérôme et Guillaume

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