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Réforme de la sectorisation, « stratégie de rebond » possible pour les RAR, selon le recteur de Créteil

11 juin 2007

Extrait de « Libération » du 09.06.07 : Un zeste de social dans la carte scolaire

Avant sa suppression, le ministre l’assouplit pour les boursiers. Un test critiqué par les syndicats.

« Dans des classes de collège à 28-30, je ne vois pas où trouver de la place. Par contre, dans celles à 27, on pourrait monter à 28. » Le recteur de l’académie de Paris, Maurice Quenet, a déjà fait le tour des établissements susceptibles d’accueillir de nouveaux élèves dans le cadre de l’assouplissement de la carte scolaire. « Mais on ne peut pas pousser les murs. » Il en a toutefois trouvé trois, très recherchés, qui pourraient même ouvrir une classe supplémentaire : Charlemagne (IVe arrondissement), Victor-Duruy (VIIe) et Janson-de-Sailly (XVIe).

Les responsables académiques travaillent d’arrache- pied pour mettre en oeuvre la décision du ministre de l’Education : doubler le nombre de dérogations ¬ de 10 à 20 % ¬ sur toute la France. Dès la rentrée, 20 % des élèves étudieront dans des collèges et des lycées hors de leur secteur. Le but est de montrer qu’en assouplissant la carte scolaire, on fait plaisir aux parents qui apprécient de choisir l’école de leurs enfants, mais aussi on donne leur chance à tous, au lieu de creuser les inégalités.

Mention

Pour ces dérogations, deux critères ont été introduits : être un « boursier social » ¬ dont les parents ont de faibles revenus ¬ ou un « boursier au mérite » ¬ qui a décroché une mention au brevet. Jusqu’ici, les critères étaient un peu partout les mêmes : rapprochement de la fratrie, proximité du domicile de garde, un handicap, une langue rare, etc. « Mais comment refuser à une jeune fille, peut-être une future Rachida Dati, qui travaille très bien, une dérogation pour un meilleur établissement ? Ce n’est pas juste », s’est exclamé Xavier Darcos en présentant le projet. C’est ici que la situation se complique. Pour les demandes de dérogation en sixième - elles seront très nombreuses à Paris, car le lycée y est désectorisé - comment repérer un « boursier social » ? Les bourses ne se calculent qu’en début de sixième. « Il faudrait que l’on demande des feuilles d’imposition, suggère le recteur Quenet. Mais à Paris, notre marge de manoeuvre sera réduite : quelques centaines de dérogations en plus. » « Au moins gagne-t-on en clarté et en légitimité », ajoute-t-il, allusion à tous ceux qui contournent avec des fausses adresses.

Tout le monde semble parier sur le départ de bons élèves d’établissements défavorisés. « Ce sera l’occasion d’une stratégie de rebond pour nos collèges ambition réussite », se félicite Jean-Michel Blanquer, recteur de l’académie de Créteil (Val-de-Marne) qui en compte un grand nombre. « Pour rendre ces établissements attirants, on va mettre des options rares, des parcours pour élèves surdoués, des spécialités sportives, des partenariats avec de grandes entreprises. Le taux d’encadrement va en plus s’améliorer. » Le ministre a promis que même s’ils perdaient des élèves, les moyens seraient maintenus. Dans le Val-de-Marne, l’inspecteur d’académie Didier Jouault estime à 6,5 % les collégiens hors de leur secteur. Mais faute de place, ce sera difficile de doubler : « On augmentera sans doute le nombre d’élèves par classe, peut-être en créera-t-on une à Vincennes. »

En province, on est plus serein. L’inspecteur d’académie de la Côte-d’Or, François Cauvez, ne prévoit guère de problèmes : le département connaissant une baisse démographique, 70 % à 75 % des dérogations sont déjà satisfaites. Il y aura sans doute une pression sur le grand lycée de Dijon qui a des classes prépas, avec des demandes venues de la deuxième et troisième ceinture. Mais, dit-il, « on pourrait doubler les dérogations sans fermer ni ouvrir une classe ».

Appels

Les parents d’élèves semblent un peu perdus. Convaincus qu’il y a désormais libre choix, certains appellent les établissements qui les renvoient sur les académies. Celles-ci ont installé des accueils téléphoniques. A Paris, on compte une centaine d’appels par jour, une vingtaine à Créteil. Mais il est encore trop tôt pour connaître leurs profils. Si l’on tient compte des critères sociaux, les classes aisées, habituées du contournement, devraient être écartées.

« Pourquoi cette précipitation ? Cela ressemble fort à un affichage politique », s’interroge Philippe Guittet, responsable du principal syndicat des chefs d’établissement, SNPDEN, « il fallait améliorer la carte scolaire et nous avions fait des propositions. » Secrétaire général de la principale fédération de parents d’élèves, la FCPE, Faride Hamana a aussi de sérieux doutes : « Je crains qu’ils veuillent remplir les cases disponibles pour montrer que l’assouplissement, ça marche, et que tout cela soit bien opaque. »

Véronique Soulé

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