Le centre Alain Savary, le lien entre ressources et recherche, avec les responsables du centre (Rencontre OZP)

2004

-----LES RENCONTRES DE L’OZP-----

(Observatoire des zones prioritaires - www.ozp.fr)

n° 43 - novembre 2003

Le centre Alain Savary

Compte rendu de la réunion publique du 12 novembre 2003

Lors d’une audience au Ministère en 1990, les représentants de l’OZP avaient demandé la création d’un centre de ressources pour les ZEP. L’association se réjouit donc d’accueillir aujourd’hui les responsables du Centre Alain Savary.

Dominique Millet, Martine Kherroubi et Marie-Odile Maire Sandoz ont présenté l’histoire, la situation présente et l’avenir du Centre, puis ont répondu aux questions des participants.

Un peu d’histoire

Le Centre Alain Savary (CAS) a dix ans. Il a été créé par une note adressée aux recteurs en date du 19 mars 1993 (BOEN n°12 du 25/3/1993) sous l’appellation de « Centre de ressources sur les pratiques éducatives et sociales en milieux difficiles ». Il a pris ensuite le nom d’Alain Savary, le ministre de l’Éducation nationale qui a signé le premier texte officiel créant les zones d’éducation prioritaire (circulaire n° 81-238 du 1/7/81, BOEN n° 27 du 9/7/1981). Il est devenu, lors de la relance de 1997, centre national de ressources sur les ZEP et les REP (BOEN n° 40 du 13/11/1997).

Dès 1993, il s’agit d’un centre de ressources, à vocation nationale, dont l’action s’exerce dans le champ de la politique compensatoire et des ZEP, champ qui n’est pas encore, à l’époque, structuré. Il vise à aider les acteurs de terrain à agir de façon réflexive en lien avec une connaissance de l’histoire de la politique de discrimination positive.

Le CAS a été créé au sein de l’INRP (Institut national de recherche pédagogique). Le responsable du centre est nommé par le directeur de l’INRP. Il est aidé d’un comité scientifique, ce qui confère au centre une particularité dans le cadre du fonctionnement de l’INRP.

Aujourd’hui, l’existence du CAS relève d’une victoire sur plusieurs contingences :
 un renouvellement important de son personnel chaque année mais - et c’est là sa force - le centre reste toujours fortement engagé dans la problématique de l’Éducation prioritaire et travaille dans la continuité de ce qui a été fait précédemment ;
 sa position de centre de ressources fonctionnant, avec sa logique propre, au sein d’un institut de recherche ;
 une histoire qu’il s’agit de poursuivre malgré l’installation récente du centre à Lyon.
De plus, le CAS dispose, depuis sa création, de très peu de moyens en personnel. Il fonctionne actuellement avec deux postes sur le pôle ressources, un demi-poste pour la recherche et un demi-poste pour la mise en ligne des données.

Un centre de ressources ancré dans la recherche

Le centre Alain Savary veut ancrer les ressources qu’il diffuse dans les recherches qu’il produit et dans celles conduites par d’autres institutions (universités, OCDE, Union Européenne, etc.). Cette caractéristique constitue une des identités du centre, l’autre trouvant son origine dans sa première dénomination « scolarisation en milieux difficiles », ce qui renvoie à la mise en place d’une politique compensatoire mais aussi aux phénomènes de déscolarisation et aux dispositifs tels que les classes-relais.

Ses publics sont différenciés : des chercheurs en politique compensatoire, des acteurs travaillant dans les « milieux difficiles » (en particulier des collègues formateurs et/ou accompa-gnateurs comme les coordonnateurs de ZEP, les responsables de CAREP, etc.), mais aussi des responsables politiques et des experts.

Sa politique d’édition prend appui sur deux supports : l’édition papier et un site Internet.

 La production sur support papier comprend :
 une collection d’ouvrages (dernière parution : L’école et le défi ethnique. Éducation et intégration, de Françoise Lorcerie, en coédition avec ESF),
 d’un bulletin (X.Y.ZEP) adressé à tous les coordonnateurs et les responsables de ZEP et de REP, après un gros travail de recensement et de mise à jour annuelle des coordonnées de chacun.

 Le site Internet du CAS est accessible par la page d’accueil de l’INRP sous l’entrée « Politiques compensatoires » (il est également accessible par le site de l’OZP). Il s’articule autour d’un pôle Recherche, d’un pôle Ressources, d’un axe consacré aux dispositifs et classes-relais, d’un espace « Mémoire des ZEP » et enfin de pages dédiées aux ZEP, aux REP et aux CAREP. Les documents mis à disposition du public sont téléchargeables afin que celui-ci puisse disposer de productions papier utilisables de façon autonome.

Le site Internet permet une diffusion nationale des travaux, mais, comme tout site, il a ses limites. Une question se pose : comment le faire connaître, et surtout comment à travers lui constituer des réseaux interactifs ? La mise en réseau des différents publics du centre, expérimentée avec les acteurs des dispositifs-relais, semble un bon moyen de diffuser les ressources, les productions et des informations.

Une liste recensant tous les CAREP a été constituée. Ceux ci reçoivent une lettre électronique ciblée. De plus, l’expérience a été lancée en 2003 dans deux académies (Reims et Lyon), de l’envoi télématique, six fois par an, d’une lettre aux coordonnateurs - lettre mise par ailleurs en ligne. Cet envoi est actuellement en cours d’évaluation avant qu’il soit procédé à son extension. Il s’agit d’accompagner aussi bien les responsables des CAREP que les coordonnateurs de ZEP/REP en leur fournissant de façon interactive des informations prioritaires à portée nationale (textes nationaux, interventions de chercheurs, signalement d’articles dans une revue) ou en répondant à des interrogations.

L’objectif du CAS est de produire des ressources à partir de l’analyse de la mise en place de la politique compensatoire. Dans ce cadre, il est à l’écoute des interrogations et des attentes de chacun, mais ne peut effectivement répondre à des demandes individuelles précises qu’en terme de ressources. C’est pourquoi il recense actuellement, par grands thèmes (ainsi les caractéristiques de l’apprentissage de la lecture-écriture en ZEP/REP), les intervenants susceptibles de répondre favorablement à des demandes d’intervention ou de formation.

Les recherches

Il est de la vocation du CAS de produire des recherches. Historiquement, il a utilisé une procédure habituelle à l’INRP : les appels à coopération. Le comité scientifique du centre a produit un appel d’offres sur différentes questions posées par la scolarisation en milieux difficiles. Le budget attribué a permis de soutenir six recherches régulées par le comité scientifique du centre et présentées sur le site. Cela implique qu’aucune de ces recherches n’a été menée par le CAS, qui n’avait pas, jusqu’à une date récente, de postes d’enseignants chercheurs.

Pour l’instant, dans le cadre de la redéfinition des missions de l’INRP, le CAS dispose d’une « équipe en projet » qui doit se constituer en ERTé (unité de recherche) regroupant des personnels de l’INRP et des personnes extérieures sur un objet de recherche à la fois scientifique et d’intérêt social.

Actuellement, le CAS mène des opérations de veille scientifique sur les travaux conduits dans les champs de l’exclusion sociale et de l’exclusion scolaire. Le CAS a en particulier publié dans le numéro 140 de la Revue Française de Pédagogie une note de synthèse, les débats d’une table ronde et le résultat d’une recherche conduite dans le cadre de l’appel à coopération. Il a répondu à la commande émanant de l’Observatoire de l’exclusion et de la pauvreté d’une note de synthèse sur le thème « Exclusion sociale, exclusion scolaire ».

Il constitue, à partir du résumé des thèses produit par les chercheurs, un répertoire des recherches achevées ou en cours conduites dans ces champs. Ces recherches sont accessibles par nom d’auteur mais aussi par discipline et par région.

Un annuaire des chercheurs travaillant sur les problématiques ZEP/REP est en cours de réalisation. Il présentera les axes et la localisation géographique de leurs travaux ainsi que leur disponibilité pour une intervention dans le cadre d’une formation et ou d’un stage.
Une bibliographie, sous forme « sèche » ou enrichie de résumés produits par le CAS, est accessible sur le site : elle propose des ouvrages mais aussi des articles de revues à valeur scientifique ou, pour les praticiens, des outils ancrés dans la recherche (enquête, observation, etc.).

Les ressources

Les ressources ont des destinataires variés : acteurs de terrain, formateurs, chercheurs mais aussi décideurs hexagonaux et étrangers.

Ces ressources, nombreuses, sont constituées de documents de nature très différente :
 la documentation officielle ;
 des bibliographies raisonnées ;
 des textes de réflexion ;
 des témoignages justifiés et des productions de CAREP ;
 des réponses à des demandes ayant un impact au plan national ou pouvant concerner un réseau d’acteurs ;
 des échanges entre acteurs et chercheurs.

La facilité d’accès, l’actualisation, la cohérence, la scientificité, l’adaptation à une demande font d’une production une ressource. L’ambition du centre est, par la mise à disposition de ressources, de familiariser les acteurs de terrain avec la recherche.

Ainsi, par exemple, le dossier d’X.Y.ZEP est rédigé à chaque fois dans cette optique de façon à ce qu’il soit, outre la publication du résultat d’une recherche, un outil de formation pour les acteurs de terrain*.

Il est nécessaire d’avoir un dialogue permanent avec les utilisateurs et une dynamique de diffusion ciblée.
Le risque inhérent à la constitution de ressources est la dispersion. L’objectif du CAS est de construire des productions pérennes en réponse aux questions : « qu’est-ce qui constitue une aide ? », « qu’est-ce qui fait progresser ? ».

Qui dit production de ressources dit formation, en direction principalement des formateurs. Il existe un réseau entre les IUFM et l’INRP qu’il convient d’actualiser.

Une convention entre l’Agence nationale de lutte contre l’illettrisme et l’INRP a été signée. L’agence pense que, dans la formation initiale et continue des enseignants, une attention particulière doit être portée à la prévention de la lutte contre l’illettrisme. Le CAS a donc demandé à un certain nombre d’IUFM partenaires de faire, dans un premier temps, un état des lieux permettant de déboucher sur des modalités pratiques de mise en place.

Le CAS a pour vocation de donner la priorité à des demandes institutionnelles (DESCO, pays étrangers). Il capitalise les modèles de formation (les stratégies mises en oeuvre, les différentes modalités) et en évalue les impacts.
Au plan international, le CAS a des contacts avec le réseau documentaire européen Eurydice. Il développera, autant que possible, une perspective comparatiste.

En conclusion

À la suite de cette présentation, le débat a porté sur la nature de l’éducation prioritaire et l’avenir de la recherche en éducation prioritaire.

La nature de l’éducation prioritaire

Les termes utilisés sont tributaires des époques et des modèles politiques. Très vite, ils deviennent stigmatisants. ZEP et REP appartiennent au registre institutionnel. La volonté du CAS est de ne pas se limiter à l’institutionnel ; cependant, s’il étend sa réflexion aux « milieux difficiles », il se trouve alors confronté à une absence de définition claire et à la connotation particulière du terme « difficiles »

La création des ZEP est la conséquence de l’analyse du mauvais fonctionnement de l’Éducation nationale dans certains territoires. Ce n’est qu’en 1998 que les ZEP sont devenus le produit du social. Il s’agit de se référer à l’histoire du dispositif pour comprendre son évolution.
L’avenir de la recherche en Éducation prioritaire
Dans ce domaine, le CAS a un rôle d’animation et non de pilotage. Il est cependant impossible, pour l’instant, de parler de réseau au niveau national.
Une analyse des ZEP en terme de « plus value » apportée au territoire serait intéressante à conduire : elle donnerait une autre image et un nouveau souffle à ce dernier.

(Compte rendu rédigé par Claude Vollkringer)

[ Note de l’OZP : Le bulletin X.Y.ZEP, tout à fait original, présente de grandes qualités. Par des articles courts et des rubriques brèves, il présente des résultats de recherches d’un grand intérêt pour les acteurs de ZEP et REP : ceux-ci y trouvent un écho immédiat à leurs préoccupations professionnelles. Son existence, pas toujours suffisamment connue, est capitale pour combattre le fatalisme ambiant devant l’échec scolaire. L’OZP, pour sa part, souhaite la plus grande extension possible dans la diffusion de cet excellent bulletin].

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