> II- EDUCATION PRIORITAIRE (Politique. d’) : Types de documents et Pilotage > EDUC. PRIOR. TYPES DE DOCUMENTS > Educ. prior. (Etudes) > Une importante étude sur la ségrégation sociale dans les écoles, collèges (...)

Voir à gauche les mots-clés liés à cet article

Une importante étude sur la ségrégation sociale dans les écoles, collèges et lycées d’Ile-de-France (suite et fin)

4 avril 2008

Extrait d’une étude de l’Institut d’aménagement et d’urbanisme de la région Ile-de-France (IAURIF)


Lire le début de l’extrait choisi pour notre revue de presse


Suite de l’extrait

Les politiques d’éducation prioritaire dans le temps scolaire

(...)

Les « réseaux ambition réussite » :

une réforme de 2006 dont l’avenir est incertain

Les « réseaux ambition réussite » : un cumul de moyens pour les élèves et les territoires en grande difficulté

Début 2006 un troisième plan de relance des ZEP est mis en place par le Ministre Gilles de Robien. Il s’est notamment traduit par une réorganisation de la carte de l’éducation prioritaire, entrée en vigueur à la rentrée 2006 ( voir note 100).

L’objectif est de renforcer les dispositifs d’aide pédagogique mis en place en distinguant plusieurs niveaux d’action en fonction des difficultés rencontrées dans les établissements.

Le dispositif est scindé en trois niveaux :

 Le 1er niveau est celui des écoles et collèges qui accueillent les élèves confrontés aux plus grandes difficultés scolaires et sociales. Il s’agit des collèges « ambition réussite » et de leurs réseaux d’école. Le terme « réseaux ambition réussite » (RAR) englobe les collèges et les écoles du secteur relevant de l’éducation prioritaire (101). Ces établissements disposent de moyens renforcés. Les critères de sélection des collèges « ambition réussite » ont été établis par le Ministère : proportion d’élèves de 6ème issus de PCS défavorisées, proportion d’élèves de 6ème en retard de 2 ans ou plus, faible score à l’évaluation à l’entrée en 6ème, part des parents bénéficiaires du RMI, enfants avec des parents non francophones (102).

 Le 2ème niveau regroupe des établissements caractérisés par une plus grande mixité sociale, avec des moyens maintenus.

 Le 3ème niveau concerne des collèges appelés à sortir du dispositif ZEP dans les trois ans. Les 2ème et 3ème niveaux sont regroupés dans des réseaux dits de réussite scolaire (RRS) (la dénomination REP est abandonnée). A la rentrée 2007, ils ont encore bénéficié, au titre de l’éducation prioritaire, de mesures et de moyens spécifiques.

Le choix est donc de concentrer les moyens sur les situations les plus difficiles et de sortir d’une logique de zonage pour s’intéresser aux parcours scolaires des élèves en ciblant leurs établissements de référence, c’est-à-dire les collèges et écoles « éducation prioritaire » de leur secteur. Afin d’assurer une meilleure égalité des chances, le dispositif vise à apporter une aide significative et personnalisée aux élèves en difficulté, à inscrire leur action dans une dynamique de projet, comme dans tous les territoires de l’éducation prioritaire. L’enjeu est aussi d’encourager l’expérimentation.

A la rentrée 2006, des moyens supplémentaires ont été affectés aux réseaux « ambition réussite » : 1 000 enseignants expérimentés supplémentaires, 3 000 assistants pédagogiques, une infirmière à temps plein dans chaque collège.

Le pilotage a été renforcé à tous les niveaux : un délégué national a été nommé, un inspecteur pédagogique spécialisé dans l’éducation prioritaire a pour mission d’accompagner le projet dans les dix académies qui concentrent les plus grandes difficultés (dont Créteil et Versailles). Le comité exécutif, constitué du principal du collège et de tous les directeurs des écoles maternelles et élémentaires rattachées, ainsi que de l’IEN de la circonscription, est l’instance de pilotage local. C’est lui qui élabore le projet formalisé par un contrat d’objectifs scolaires ou par un contrat ambition réussite. Le coordonnateur est chargé de la préparation des décisions et de leur mise en oeuvre.

Une évaluation régulière, assurée par les inspecteurs, est prévue. Pour la première fois, des objectifs chiffrés sont donnés au niveau national sous forme d’indicateurs et d’éléments d’évaluation ayant vocation à être transmis à l’Observatoire national des ZUS (103) (ONZUS). Chaque collège ambition réussite est reconnu par une spécialité de haut niveau d’ordre culturel, scientifique, linguistique, sportif ou environnemental. D’autre part, « la mise en place systématique d’une équipe de réussite éducative par réseau ambition réussite et, plus largement, par réseau de réussite scolaire lorsque celui-ci se trouve situé sur un territoire relevant d’un CUCS, est un objectif prioritaire »104.

A partir de la rentrée scolaire 2007, chaque réseau « ambition réussite » doit avoir les moyens de : faire bénéficier les élèves qui en ont besoin d’actions d’aide ou de soutien (programmes personnalisés de réussite éducative (PPRE) ou, pour les collèges, accompagnement éducatif après la classe...) ; ménager une place particulière aux familles (mise à disposition d’une salle, cours d’alphabétisation, organisation de rencontres ou activités associatives, permanences d’associations de parents...) ; s’appuyer sur des partenariats dits de « haut niveau », par exemple avec le Louvre, l’Ecole nationale de Chimie... ; renforcer les actions prévues dans le cadre de conventions signées avec des entreprises, associations, fédérations professionnelles ; s’appuyer sur les étudiants de grandes écoles et universités qui accompagnent les élèves de l’éducation prioritaire dans leurs études au travers de l’opération « 100 000 étudiants pour 100 000 élèves de l’éducation prioritaire » ; s’appuyer sur des « dispositifs relais » renforcés grâce à 300 emplois supplémentaires.

Le devenir de cette politique ambitieuse est-il aujourd’hui assuré ? Compte tenu de l’absence de déclaration du ministère à la rentrée 2007, des incertitudes subsistent, notamment sur le nombre d’établissements concernés à terme (105).

Les réseaux « ambition réussite » en Ile-de-France

A la rentrée 2006, il y avait 249 réseaux ambition réussite dont 206 en France métropolitaine (carte). L’Ile-de-France en comptait 46 : 21 dans l’académie de Créteil (pour un effectif de 12 490 élèves), dont 3 en Seine et Marne, 16 en Seine Saint-Denis et 2 en Val-de-Marne ; 4 dans l’académie de Paris (pour un effectif de 1651 élèves), dont 3 dans le 18ème arrondissement et 1 dans le 19ème arrondissement ; 21 dans l’académie de Versailles (pour un effectif de 10 908 élèves), dont 6 en Essonne, 3 dans les Hauts-de-Seine, 5 dans le Val-d’Oise, 7 dans les Yvelines ; 324 écoles franciliennes sont intégrées dans des réseaux ambition réussite. Une majorité est située dans l’académie de Créteil (144) et de Versailles (147) où elles représentent respectivement 5,7% et
4,5% des effectifs total de l’académie.

La carte montre que les réseaux « ambition réussite » sont situés dans les territoires de la politique de la ville (CUCS). Tous les collèges « ambition réussite » sont situés dans des communes en CUCS et presque tous étaient déjà dans des ZEP106. S’il y a resserrement de la géographie de l’éducation prioritaire sur un nombre plus restreint d’établissements, il y a continuité géographique.

La labellisation des lycées « ambition réussite » (107)

En labellisant des lycées « ambition réussite » dans la continuité du plan de relance de l’éducation prioritaire de 2006, il s’agit d’offrir aux lycéens, qu’ils soient en enseignement général ou professionnel, de nouvelles opportunités de réussite. Cette démarche s’inscrit dans la politique de promotion de l’égalité des chances conduite en faveur des élèves des quartiers en grande difficulté scolaire et sociale.

Tournés vers les filières d’excellence de l’enseignement supérieur, ces établissements apportent un plus dans le domaine du soutien scolaire et de l’accès aux outils numériques. Les enseignants disposent d’heures supplémentaires pour épauler les élèves, les aider à réviser leurs examens et à se préparer à l’enseignement supérieur.

La labellisation s’effectue sur la base de projets portés par les équipes éducatives en réponse à un cahier des charges remis aux recteurs (108).

A la rentrée 2007, 25 lycées étaient labellisés « ambition réussite » en France, alors que 40 étaient initialement prévus. Compte tenu des incertitudes qui pèsent actuellement sur le devenir de l’éducation prioritaire, il n’est pas certain que le dispositif soit étendu.

En Ile-de-France 5 lycées de l’académie de Créteil étaient concernés par ce dispositif, les deux premières conventions (109) ayant été signées le 3 avril 2007 entre le recteur de l’académie de Créteil et les proviseurs des lycées Champlain de Chennevières (Val-de-Marne) et André Malraux de Montereau (Seine et Marne).

Une opacité des moyens affectés à l’éducation prioritaire

Il règne une grande opacité dans les moyens réels affectés aux écoles et établissements classés dans les dispositifs d’éducation prioritaire. De plus en plus, certains dispositifs relèvent des collectivités territoriales (du fait de la décentralisation), d’organismes parapublics comme la CAF... ou d’associations. « L’information est dispersée, il n’y avait pas jusqu’à une date récente de bilan financier global de la politique d’éducation prioritaire » (IGEN, 2006) (110) .

Mais des travaux récents ont été engagés sur ces questions par l’Education nationale. Un rapport de l’IGEN d’octobre 2006 synthétise les estimations de trois directions du Ministère (DESCO, DEP,
DAF) concernant les surcoûts de l’éducation prioritaire. Environ un milliard d’euros serait attribué chaque année à l’éducation prioritaire.

Pour les critères propres à l’Education nationale, le classement conduit en moyenne à une baisse du nombre d’élèves de 2 en moyenne par classe et à une augmentation des crédits de fonctionnement qui serait de 10 à 15% par rapport à celui des élèves hors ZEP.

Des résultats contrastés pour les évaluations

La politique de ZEP et de REP a été évaluée à plusieurs reprises. Les résultats des évaluations sont contrastés, voir contradictoires. L’évaluation menée par l’INSEE pour la période 1982 à 1990 souligne les limites de la politique d’éducation prioritaire. Elle fait apparaître les trois effets suivants (112) :

 la masse des dépenses supplémentaires engagées dans les établissements classés en ZEP est loin d’être négligeable au niveau global. Mais elle est principalement constituée de primes aux enseignants, les moyens affectés aux élèves sont faibles (quelques heures d’enseignement complémentaires) ;

 le classement en ZEP s’accompagne d’une baisse du nombre d’élèves et d’une accentuation de l’homogénéité sociale ;

 la mise en place des ZEP n’a eu aucun effet significatif sur la réussite des élèves, mesurée par l’obtention d’un diplôme, l’accès en quatrième, en seconde, et l’obtention du baccalauréat113.

Le rapport Moisan-Simon de 1997 est particulièrement intéressant et propose, parallèlement à d’autres études, un bilan plus positif (114). Le rapport souligne la grande hétérogénéité des ZEP en matière de performances scolaires et la nécessité d’intégrer des critères qualitatifs fins, par exemple les modes d’organisation et les compétences des enseignants, les capacités de management des chefs d’établissements.

Comme le note un observateur sur le site de l’Observatoire des ZEP, « pour l’essentiel on ne peut que reprendre les conclusions du rapport Moisan-Simon, qui datent de 1997 : il y a des ZEP qui réussissent et ce ne sont pas des exceptions. Les conditions de cette réussite ont été clairement identifiées : c’est le volet qualitatif de l’éducation prioritaire » (115).

------------------

Notes :

 (101) Pour l’ensemble de l’éducation prioritaire le collège devient « l’unité de référence du réseau qu’il crée avec les écoles élémentaires et maternelles d’où proviennent ses élèves ».

 (102) Ces critères ont permis à dix-huit collèges ne se trouvant pas en éducation prioritaire d’entrer dans le dispositif.

 (103) Les indicateurs sont issus de la base de données IcoTEP (indicateurs communs pour un tableau de bord de l’éducation nationale). Une convention entre la Direction de l’Evaluation et de la Prospective et la DIV a été signée.

 (104) Circulaire n°2007-004 du 11/12/2006

 (105) La lettre de l’Education du 17 septembre 2007 signale que le chiffre de 350 réseaux ambition réussite circule actuellement dans les syndicats, éditions le Monde, N°568.

 (106) Quelques collèges classés « ambition réussite » n’étaient pas en ZEP, par exemple Etampes (91) ou Gonesse (95).

 (107) Note de service, 29/03/07, Ministère de l’Education nationale.

 (108) Publié 5 avril 2007 au bulletin officiel de l’Education nationale.

 (109) Ces conventions concrétisent l’annonce faite le 16 janvier 2007 lors du séminaire « ambition réussite » en Sorbonne.

 (110) Armand A., Gille B., La contribution de l’éducation prioritaire à l’égalité des chances des élèves, Ministère de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, rapport à Monsieur le Ministre de l’Education nationale, de l’Enseignement supérieur, de la recherche, n°2006-076, octobre 2006.

 (111) Dom compris.

 (113) Bénabou R., Kramarz F., Prost C., Zones d’éducation prioritaire : quels moyens pour quels résultats ? Une évaluation sur la période 1982-1992, Economie et Statistique, n°380, 2005, pp- 3-34. L’intégralité de l’étude est consultable sur le site de l’INSEE

 (114) Voir aussi : Education et formations, L’éducation prioritaire, Ministère de l’Education nationale, n°61, octobredécembre 2001.

 (115) Voir l’ article

------------------

Cette étude est en ligne. Elle comprend de nombreuses cartes et graphiques. Pour acheter l’édition sur papier, s’adresser à l’IAURIF pour un achat en ligne et aller 15, rue Falguière à Paris XVème, mais en téléphonant avant au 01 53 85 53 85

Répondre à cet article