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L’accompagnement : quels enjeux ? , par Bernard Bier. Intervention lors des Rencontres nationales sur l’accompagnement organisées par le GFEN les 5 et 6 avril 2008

31 juillet 2008

GFEN. Rencontres nationales sur l’accompagnement.
5-6 avril 2008

L’accompagnement : quels enjeux ?

Bernard Bier

chargé d’études à l’INJEP,
membre du CA de l’OZP

NDLR : Ce texte, reproduit avec l’aimable autorisation du GFEN, est extrait du numéro spécial 129-130 de la revue "Dialogue" qui reproduit l’ensemble des Actes de ces Rencontres nationales.
Lire le sommaire complet des Actes des Rencontres, avec le bon de commande

Mon intervention dans ces rencontres sur l’accompagnement se fait à partir d’une double affiliation, l’une professionnelle et institutionnelle, l’Institut national de la Jeunesse et de l’Education populaire (INJEP) (www.injep.fr), établissement public sous la tutelle du ministère de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative, l’autre associative et militante, l’Observatoire des Zones prioritaires
(OZP) (www.ozp.fr).

Deux lieux d’observation

A l’INJEP, nous sommes conduits à travailler avec une diversité d’acteurs à vocation éducative ou revendiquant d’intervenir dans ce champ (des services de l’Etat - Education nationale, DIV, ministère de la Culture, ministère de la Santé, de la Jeunesse, des Sports et de la Vie associative -, des collectivités, des associations et fédérations d’éducation populaire, mais aussi l’ACSE, la CAF...).
Dans ce cadre, force est de constater l’implication croissante des collectivités territoriales sur les problématiques éducatives, au-delà des seules compétences obligatoires définies dans le cadre des lois de décentralisation. Ce mouvement s’étend de plus en plus aux Etablissements publics de coopération intercommunale (EPCI), telles les communautés de communes ou d’agglomérations. Sur le plan pédagogique, notre champ d’intervention est plutôt celui de l’« éducation non formelle ».

L’OZP regroupe des acteurs éducatifs dans et hors l’éducation nationale. Lieu ressource fondé à l’époque où ni le centre Alain Savary de l’INRP ni les CAREP n’existaient, il se veut aussi espace de réflexion sur les politiques et les pratiques de l’éducation prioritaire, voire force de propositions. De ce lieu, nous ne pouvons que nous interroger quant à l’avenir de l’éducation prioritaire.
Le terme ne semble plus prononcé du côté de la rue de Grenelle, l’approche territoriale semble délaissée et l’exigence de réussite pour tous a laissé place au discours de l’« égalité des chances ». Sur plus de 1 000 ZEP et REP, 253 sont devenus Réseaux Ambition Réussite (RAR). Les autres rebaptisés « Réseaux de Réussite Scolaire » (RRS) semblent aujourd’hui pour la plupart livrés à eux-mêmes. Les collèges devenant têtes de réseau, le primaire et la maternelle sont mis de côté, hors de tout continuum éducatif. Les coordonnateurs de ZEP, acteurs clés des dynamiques territoriales se
retrouvent transformés en « secrétaires de RAR »...

Quant au bilan en demi-teinte des ZEP que fait ici avant moi par Bruno Suchaut, il corrobore ce que nous constatons, à la suite d’un certain nombre de rapports (Moisan-Simon en 1997, et plus récemment Armand-Gille en 2006) et de maints travaux de recherche (Bautier, Bonnery, Chauveau, Goigoux, Rochex, Terrail...) : la Zep n’est pas en soi un gage de réussite. Des vecteurs comme le pilotage, la centration sur les apprentissages, le niveau d’exigence, la présence de professionnels expérimentés... sont autant d’éléments qui interviennent dans la réussite scolaire des élèves.

Or le pilotage est aujourd’hui absent, et les mesures récemment annoncées quant aux nouveaux programmes dans le primaire font craindre le pire... et particulièrement pour les élèves des quartiers populaires qui ont besoin plus encore que d’autres d’excellence pédagogique.

Des mutations à prendre en compte
De ce double point de vue d’observateur des politiques éducatives et des pratiques pédagogiques, j’esquisserai quelques constats :

 En ce qui concerne les partenariats entre acteurs éducatifs, force est de constater qu’ils ne se sont pas faits jusque là dans la parité. Ils ont certes été suscités à l’origine par l’institution scolaire (et à ce titre, l’éducation prioritaire a été un laboratoire pour l’évolution des politiques publiques d’éducation), mais il s’agit d’un partenariat « quand cela va mal » (Glasman), au service de l’Ecole, « assujetti » (Lorcerie). Ce qui explique en partie la cacophonie et les confusions que nous avons tous pu observer ici ou là dans l’éducation prioritaire ou l’accompagnement scolaire, les brouillages quant aux places et rôles de chacun, les résistances de part et d’autre à entrer dans ce partenariat, qui n’est en aucune mesure coopération. Ces difficultés ne viennent pas tant du partenariat, que d’un partenariat mal pensé, qui ne s’est pas construit dans la clarté des objectifs partagés, la discussion et la clarification des rôles, le conflit nécessaire (le consensus à tout prix que l’on observe dans maints comités de pilotage est le meilleur moyen de ne rien faire !).
Pour dépasser les inévitables blocages liés aux cultures différentes et aux « patriotismes » institutionnels, il s’agit de construire de la (re)connaissance mutuelle, de la confiance... Toutes démarches rendues difficiles par le turn over et le burn out de maints professionnels, les injonctions contradictoires des institutions à mettre en place des dynamiques de territoire, à être à la fois dans des logiques d’innovations, de responsabilités et dans l’application de circulaires successives fréquentes, parfois contradictoires quand elles ne sont pas aberrantes d’un point de vue scientifique/pédagogique. Les oukases récents du ministère de l’Education nationale sur l’apprentissage de la lecture ou les nouveaux programmes annoncés pour la primaire en sont un signe.

 Le paysage éducatif change : implication de multiples acteurs dans la chose éducative, lois de décentralisation et investissement du champ par de nouvelles institutions qui interviennent par des financements (bâti et son entretien, personnels TOS), mais aussi par la mobilisation d’autres acteurs éducatifs (bénévoles ou professionnels, animateurs, intervenants sportifs ou culturels,...), la création de matériaux pédagogiques, la participation à l’élaboration de projets...


Ces phénomènes obligent à sortir de l’approche d’un Service public d’éducation qui serait réduit à l’Etat-Education nationale, et nous oblige à repenser (et à construire) ce que serait le Service public d’éducation du 21ème siècle.

 Le partage des temps des enfants et des jeunes entre l’école, la vie familiale, les activités du champ non formel (activités sportives, culturelles et socioculturelles), le contact (seul ou en groupe) avec les médias et les TIC, les sociabilités entre pairs... questionnent la place de l’école et des savoirs scolaires. Il ne s’agit en aucune sorte de dénier à celle-ci toute son importance, son rôle irremplaçable de structuration et d’organisation des connaissances et d’entrée dans des apprentissages spécifiques.

Mais cela oblige à réfléchir à l’articulation des temps, des normes, des cadresd’expérience, mais aussi à ce qui s’y joue en termes d’apprentissages complémentaires ou contradictoires, autrement dit à penser la cohérence éducative.
D’où la nécessité d’interroger les terminologies qui persistent à s’inscrire dans un découpage en termes de « scolaire », « périscolaire », « extrascolaire » : cette centration sur l’école, héritage d’une histoire nationale, entraîne bien des confusions chez les acteurs qui n’en sont pas et peut expliquer en partie des dérives d’un soutien ou d’un accompagnement scolaire improvisé. Mieux vaudrait parler en termes d’ « éducation formelle », « non formelle », « informelle », chacune ayant sa
place, sa légitimité, appelant des situations, des contenus, des pratiques spécifiques.
Une telle approche implique alors le respect du territoire et des compétences de chacun - dont on sait qu’elles sont une des clés d’une coopération réussie. Mais aussi une réflexion autour d’objectifs communs, à, partir de diagnostics et de projets partagés.
En outre sortir du « scolaro-centrisme » nous aide à ne pas occulter les questions de l’environnement social, économique, urbanistique..., donc à ne pas nous enfermer dans la seule approche individualisante qui décontextualise les parcours des individus. Réfléchir à l’« éducation informelle » (éducation non intentionnelle à partir des expériences de vie) par exemple oblige à interpeller aussi le politique, l’urbaniste, l’aménageur, l’entreprise... sur la qualité de l’espace qu’ils offrent aux
populations : il n’est en effet pas indifférent de naître sur un territoire qui garantit la mixité sociale, générationnelle..., qui offre des équipements culturels et sportifs de qualité, et des professionnels ad hoc pour les accompagner... A ce titre, les « ghettos » de pauvres valent bien les « ghettos de riches (les « gated communities » qui commencent à se multiplier en France !) en ce qu’ils sont générateurs d’un appauvrissement anthropologique et cognitif !

 Ces trois points nous conduisent à sortir, pour dépasser les difficultés mentionnées supra, d’une approche centrée sur des institutions ou une institution monopolistique, pour mettre l’enfant et le territoire au centre, dans un projet de territoire concerté, mobilisant l’ensemble des acteurs concernés. Cette prise en compte de la globalité d’un « territoire apprenant » est au coeur de la réflexion des villes éducatrices et de
son réseau national et international. Dans cette nouvelle configuration, est-il encore pertinent que le pilotage territorial de ce Service public d’éducation relève de l’une des institutions, l’Education nationale ?

Deux précisions pour éliminer les malentendus : cette nouvelle donne pose bien sûr la question de la « gouvernance » éducative territoriale d’une part, et d’autre part de l’articulation du local et du national, celle de la place de l’Etat dans sa fonction régulatrice (tant dans l’exigence de démocratie éducative que de définition d’une culture commune), ce qui relève de la verticalité et de l’horizontalité.... En outre, mettre l’enfant au centre n’exclut pas que, dans certains espaces, cet enfant ait à
apprendre à se construire comme « élève », à entrer dans la « forme scolaire ». Cela participe de ses apprentissages multiples, et de l’entrée dans une nécessaire mobilité cognitive.

Ces constats posés, il semble pertinent de revenir sur certains points qui ont traversé ces journées, sans nécessairement être développés.

L’individualisation :où est le problème ?

De quoi parle-t-on ? De politiques publiques qui à l’action globale et concertée sur un territoire préfèrent le suivi individuel des enfants et des familles ? Qui renverraient chacun à ses propres ressources ? D’une approche pédagogique qui consisterait en un face à face pédagogique enseignant-précepteur/élève (à la manière de ce qui fait dans certaines officines marchandes qui se développent sur le marché de l’angoisse
des parents) ?

Certes le dispositif de « réussite éducative » naît dans un contexte idéologique inquiétant où se conjuguent l’apologie du libéralisme économique et la montée d’un discours sécuritaire, chacun étant renvoyé à la responsabilité de sa réussite ou de son échec. Cette logique participe à l’invalidation des enfants comme des familles.

Néanmoins on ne peut réduire la référence à une approche éducative plus individualisée à ces seuls éléments de contexte. Elle s’inscrit aussi dans une évolution plus générale de nos sociétés, où se recompose le rapport entre l’individuel et le collectif, l’un n’étant pas nécessairement exclusif de l’autre (Ion, de Singly,
Corcuff). Et dans les faits, on peut observer « sur le terrain », à propos de ce dispositif comme de nombreux autres qui se succèdent à un rythme accéléré - et tout indique que cela devrait continuer -, une capacité des acteurs à s’en saisir (ou ne pas se saisir) en mobilisant l’intelligence des partenariats déjà engagés (quand tel est le cas), en les inscrivant dans la continuité des démarches déjà engagées et des dispositifs existants, en leur donnant sens. Dans nombre de cas, l’intervention dans la « réussite éducative », pensée en terme de logique de parcours, conjugue accompagnement individuel et actions collectives, et s’insère sans contradiction dans une dynamique de politique et de projet éducatif de territoire, à l’instar des ZEP ou des PEL.

Sur le plan pédagogique, il importe d’être prudent. On n’apprend pas seul, et les valeurs que nous pouvons défendre quant aux objectifs de l’éducation nous conduisent à défendre une approche fondée sur le collectif. Néanmoins l’on n’apprend pas tous au même rythme, sous la même forme, les trajectoires sont différenciées... Et les porteurs des pédagogies actives, de « l’éducation nouvelle » savent que l’objectif est moins le face-à-face d’un enseignant /éducateur qui transmet à l’enfant ou l’élève que la mise au travail de chacun dans le groupe, qu’il s’agisse du groupe classe, du travail en groupe restreint, voire d’un suivi plus individualisé à certains moments.
Nous savons aussi que certaines formes dévoyées de la pédagogie frontale mettent moins l’enseignant face à des « sujets apprenants » qu’à
un groupe classe indifférencié qui n’est de facto qu’un individu-classe : dans ce contexte, les apprentissages ne peuvent qu’être limités.

Le débat ici est donc moins entre collectif et individuel qu’entre approches
comportementalistes ou mécanistes et pédagogie de la mise en activité. Et cette pédagogie appelle à varier les configurations, dans certains cas à casser le groupe classe, parfois à travailler dans des logiques de tutorat - y compris des plus jeunes par leurs aînés, ce qui peut, sous certaines conditions, avoir des effets bénéfiques en termes d’apprentissage (cf. la « pédagogie mutuelle »). Bref à mettre en oeuvre une « pédagogie différenciée » dans un cadre de référence commun.
Question bien connue des pédagogues que nous sommes, dans et hors l’école, et qui appelle un travail de clarification auprès de ceux qui interviennent dans le soutien ou l’accompagnement scolaire, professionnels ou bénévoles, afin d’éviter les effets pervers des bonnes intentions éducatives. Dire ceci ne signifie en aucune mesure que les professionnels et bénévoles extérieurs à l’école (à commencer par les
parents) ne peuvent intervenir dans le soutien scolaire, cela signifie qu’ils ne peuvent le faire n’importe comment. D’où l’importance des échanges et de la clarification. Par ailleurs, l’accompagnement à la scolarité ne saurait se réduire au soutien scolaire.

L’accompagnement, pour quoi faire ?
Il nous faut revenir sur la question de l’accompagnement à la scolarité. Tel que défini par la charte (1992, réactualisée en 2001), il ne consistait nullement à faire l’école après l’école, mais au-delà de l’aide aux devoirs, à ouvrir d’autres champs aux bénéficiaires de l’accompagnement - avec le postulat que cette action serait bénéfique aux apprentissages scolaires.

L’idée du transfert des apprentissages, du bénéfice que les élèves retireraient nécessairement des apprentissages hors temps scolaire et qui se réinvestiraient positivement dans le champ scolaire, est d’ailleurs pour le moins sujet à caution. Des travaux (Tardif, Chapelle) nous montrent qu’il n’y a nulle automaticité : pour que le transfert d’apprentissage se fasse, des dispositifs pédagogiques ad hoc doivent être mis en place de part et d’autre. Par ailleurs soulignent Thin et Millet, dans une toute autre approche, même les activités de remédiation (cf. ateliers-relais) ne sont pas nécessairement mobilisables à l’école, parce qu’elles ne s’inscrivent pas dans la « forme scolaire » et que c’est sur la disposition à y entrer qu’il faut travailler si l’on vise la réussite scolaire.

Des travaux de recherche montrent que l’accompagnement n’a en moyenne que peu d’effets sur les résultats scolaires, ou un effet périphérique (estime de soi, amélioration comportementale), quand ce n’est pas parfois nolens volens un effet négatif en termes d’apprentissages scolaires. D’où l’incitation à la plus extrême prudence : s’agit-il de se substituer aux enseignants, avec les compétences qui sont les leurs, sur leur terrain ? Ou bien de permettre d’autres apprentissages dans le champ culturel ou socio-culturel par exemple, mais aussi dans celui des compétences sociales, relationnelles ou communicationnelles, qui participent du développement humain, qui aident à grandir, qui permettent le « développement d’espaces de disponibilité cognitive »... Ce champ fut longtemps celui que privilégiaient les associations d’éducation populaire, dans une logique d’accès de tous à la culture commune. Longtemps certaines furent porteuses d’une forte réflexion pédagogique. C’était là leur coeur de métier. C’est en ce sens qu’elles pourraient agir, sur ce créneau qu’elles pourraient former professionnels et bénévoles.

Il s’agit donc pour les associations moins d’être « complémentaires de l’école », préoccupées de rentrer dans tous les dispositifs de politique publique (on comprend certes les raisons économiques qui peuvent les y pousser !), cédant à la tentation de faire du soutien scolaire, que de développer d’autres pédagogies, dans le champ qui est le leur, de se faire co-actrices de l’éducation de tous, en s’inscrivant de manière volontariste dans les quartiers populaires. Cet enjeu de la démocratie dans le champ des loisirs, de la culture et de l’éducation non formelle, me semble bien faiblement posé aujourd’hui, la centration se faisant sur la seule réussite scolaire, alors que vula place que cet espace/temps des loisirs occupe dans la vie de chacun il est pourtant aujourd’hui un lieu majeur de reproduction et d’amplification des inégalités.

Dans ce contexte, la circulaire Darcos de juillet 2008 introduit une évolution notable : elle fait passer du dispositif de l’ « accompagnement à la scolarité » (pluri-partenarial, interministériel, mobilisant les associations en dehors de l’école) à l’ « accompagnement éducatif », retour à l’intérieur de l’école, laquelle devient son propre recours et appelle des associations culturelles ou sportives à s’inscrire « à la marge » dans son dispositif. Ainsi, après une phase d’externalisation de la difficulté scolaire (et de certains publics), l’Ecole se veut son propre recours. On pourrait se
féliciter de cette avancée. Elle est plutôt sujet d’inquiétude. Elle témoigne d’un abus de langage : parler d’éducatif en lieu et place de scolarité pouvait constituer un élargissement positif vers une éducation partagée ciblée sur une réussite éducative non réductible à la réussite scolaire. Or il s’agit tout au contraire d’une recentration sur l’école.
De plus ce dispositif ne répond pas aux vraies questions : s’agit-il d’avoir
une action éducative qui prévienne en amont les ruptures ou échecs, ou n’est-on que dans la réparation ? Comment des méthodes pédagogiques qui ont échoué dans la classe pourraient-elles réussir par l’effet seul de leur répétition, même en groupe restreint ? Outre la double peine qui frappe ceux qui cumulent échec et stigmatisation, ces « orphelins de 16h » (!!!) vont se retrouver à certaines heures dans l’école, alors que leurs pairs pourront bénéficier d’activités ludiques, culturelles, sportives... Il n’y a là en aucun cas la dynamique pédagogique qui conduirait à la
réussite de tous, il y a un accroissement inévitable des inégalités.

Des enjeux

Devant les difficultés des institutions éducatives à remplir leur mission de réussite pour tous, une ré-interrogation des choix politiques (à tous les niveaux) quant à l’éducation, ainsi qu’un aggiornamento de l’Ecole s’imposent.

Dans cette perspective, le travail de qualification des acteurs éducatifs (enseignants, éducateurs animateurs) est une urgence, en formation initiale comme continue ; avec la mise en place dont le besoin se fait partout sentir d’une part d’un accompagnement ad hoc, d’autre part de la création des conditions d’un travail coopératif des acteurs éducatifs. L’échelle du territoire de projet semble pertinente pour ce faire. Ici ou là des actions ont lieu en ce sens, pour travailler à la mise en place d’un projet éducatif de qualité pour tous, au travers de formations croisées. On
sait que les obstacles sont nombreux : sociologie des recrutements dans
l’enseignement et l’animation, hétérogénéité des cursus de formation, des
qualifications et des statuts des différents professionnels, cultures institutionnelles...

Ce travail implique la durée, la construction de la confiance, la reconnaissance de tous, y compris des familles que la multiplication des professionnels peut contribuer à délégitimer, à l’instar des représentations « défectologiques » si répandues chez les professionnels de l’éducation et du travail social.

Une appropriation collective et une co-construction d’outils d’évaluation portant sur les acquisitions et processus éducatifs pourraient être un levier, à condition de sortir des évaluations lourdes, technocratiques et centrés sur les seuls indicateurs de performance.

Il nous faut en fait construire l’« éducation dans la communauté », dont parlait John Dewey, une des références de l’« éducation nouvelle », laquelle est trop souvent réduite à l’éducation dans l’école. Autrement dit, articuler « forme scolaire » et « forme éducative ».
Cela impose aussi de sortir d’une alternative peu satisfaisante : d’un côté celle de la logique d’égalité des chances » qui voudrait dégager une élite « méritante » des quartiers populaires en laissant les autres où ils sont, et de l’autre celle de l’abaissement du niveau d’exigence pédagogique pour les jeunes « en difficulté » (dont la recherche nous montre qu’elle est contre-productive et dessert les publics
qu’elle prétend aider). Ce que nous devons aujourd’hui défendre et construire, c’est, pourrions-nous dire en parodiant Antoine Vitez, un service public d’éducation et des pédagogies « élitaires pour tous ».

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