Les ZEP dans une déclaration de la FSU

27 janvier 2005

Extrait de « FSU Actualité » du 25.01.05 : déclaration de Gérard Aschieri ; conférence de presse du 12 janvier 2005.

Aujourd’hui F.Fillon fait adopter au Conseil des Ministres son projet de loi d’orientation sur l’école.
Nous devons constater que depuis le rejet de ce projet par le CSE et le CNESER, le ministre n’a en aucune manière essayé d’ouvrir des discussions pour prendre en compte cet avis. En fait c’est le cas depuis le 3 décembre. Il se répand dans les médias avec un discours à peu près constant : le vote du CSE était attendu, il résulterait de la coalition d’avis très divergents ; d’ailleurs il y aurait en France 60 millions d’avis sur l’école ; il n’y aurait pas de projet alternatif, il prendrait donc ses responsabilités en faisant des choix conformes à l’intérêt des jeunes ; et il affirme avec force qu’il ne bougera pas sur les points essentiels et ne cédera pas aux conservatismes. Il fait clairement référence à la méthode qu’il a utilisée pour les retraites. Outre que ce propos marque le refus total du dialogue social de la part du ministre et que l’on peut douter de l’efficacité d’une réforme qui ne tient aucun compte de l’avis des premiers concernés, qu’ils soient personnels, parents ou lycéens, nous voulons dénoncer ici combien son propos est loin de la réalité.
D’abord il est faux de dire que tous les points de vue sont contradictoires : il y a un avis largement partagé : l’idée que le projet de M.Fillon ne permettra pas d’atteindre les objectifs qu’il affiche sur la réduction de l’échec scolaire et l’élévation des qualifications, qui pourtant, sont très majoritairement approuvés.
Il y a aussi des points de convergence que le ministre ignore délibérément : la nécessité de développer le travail en équipe, celui d’améliorer la formation, l’attribution de moyens supplémentaires aux établissements les plus en difficultés, le refus de la sélection précoce, celui de l’imposition de remplacements et bien évidemment l’idée que l’on ne peut pas réformer le système éducatif à moyens constants et a fortiori avec une réduction de ces moyens.
M.Fillon balaye tout cela également d’un revers de main en l’ignorant purement et simplement. Mais il feint d’ignorer l’existence de propositions alternatives et je voudrais à ce propos revenir sur celles de la FSU - vous disposez d’une petite brochure que nous avons fait tirer à 500 000 exemplaires pour alimenter le débat et qui contient ces propositions -.

La première idée est que tout en soulignant les succès du système éducatif nous ne pouvons nous satisfaire de l’échec scolaire et des inégalités au sein du système éducatif. C’est un thème constant de notre démarche ; il faut améliorer le système éducatif à la fois pour assurer une élévation des qualifications de tous et faire en sorte qu’aucun jeune ne sorte sans qualification.
Un bac pour tous doit être l’objectif que se donne une société démocratique avec comme corollaire d’accroitre le nombre de jeunes accédant à un diplôme de l’enseignement supérieur. Cela passe notamment par une scolarité obligatoire portée à 18 ans.
Pour cela nous proposons un ensemble de mesures :

1/ Très tôt, très vite, à tous les niveaux, il faut pouvoir apporter le soutien nécessaire aux élèves en difficulté. Il faut développer la prévention et l’aide en mettant en place des équipes éducatives pluri-professionnelles.

2/ Agir dans les classes et dans leur environnement : pouvoir alterner les formes de travail pédagogique et mieux suivre chaque élève, permettre aux personnels de se concerter ; répondre aux différents besoins avec plus d’enseignants, plus de personnels, réduire les effectifs des classes, développer le travail en équipe, le lien avec les familles...

3/ Favoriser le travail en équipe : Les personnels ne sont pas interchangeables. Les enseignants ont pour mission d’enseigner et d’éduquer en enseignant. Ils ne peuvent tout faire : le travail en équipe (enseignants, CPE, surveillants, assistantes sociales, infirmières, médecins, Co-Psy, administratifs, TOS ...) est indispensable.

4/ Donner une véritable priorité aux écoles, collèges, lycées des secteurs les plus défavorisés en leur donnant les moyens de développer d’urgence cette action de lutte contre l’échec et de travailler en équipe : réduction des effectifs, présence effective de tous les membres des équipes,réduction du temps de présence devant les élèves, formation continue...

5/ Améliorer la formation initiale et continue des personnels en développant la recherche en faisant mieux le lien entre formation universitaire et formation pratique.

6/ Construire une culture commune : il n’est pas question de réduire les apprentissages à un socle minimum mais de donner à tous une culture commune faite de connaissances, de compétences, de technique, de savoirs faire et de valeurs. Celle-ci doit permettre à chaque élève d’approfondir les enseignements artistiques, scientifiques, sportifs, historiques, littéraires... et de s’orienter progressivement après le collège.

7/ Assurer une véritable gratuité en commençant par développer d’urgence l’aide aux études (allocations, bourses) sur critères sociaux.

8/ Améliorer le cadre de vie des écoles et établissements et le temps scolaire ; assurer une meilleure participation des parents et des élèves en définissant clairement la place de chacun et les règles à respecter.

9/ Permettre l’initiative locale , tout en développant une vraie démocratie, en assurant la mixité et la laïcité et en préservant un caractère national fort.

10/ Programmer sur la durée les recrutements.
Ce dernier point me conduit à revenir sur un autre sujet brûlant, celui du budget. Vous avez remarqué que si Monsieur Fillon tient régulièrement les mêmes propos il est un point sur lequel il varie : début décembre il annonçait que son projet de loi coûterait 2 milliards supplémentaires ; ses dernières déclarations n’évoquent plus qu’un chiffrage entre 1 et 2 milliards. Nous avons la conviction qu’il n’a pas les moyens et que l’essentiel des mesures nouvelles sera financé par redéploiement et par exemple les trois heures des CIRE risquent d’être financées par exemple par une redistribution partielle des moyens ZEP, avec le risque que ce soient les plus défavorisés qui soient les plus touchés.

L’argument généralement utilisé pour justifier les coupes claires est celui de la démographie mais ces arguments ne résistent pas à l’examen : la progression importante de l’école en termes de résultats ne s’est pas accompagnée d’une progression analogue en terme de moyens. Et ce type d’argument ignore les ambitions que Monsieur Fillon assigne lui-même au système éducatif : passer par exemple à 50 % de diplômés du supérieur nécessite un investissement important en personnels et en moyens matériels et de fait, les choix budgétaires du gouvernement font peser un doute sérieux sur la réalité de ses ambitions.

Notre crainte - confirmée par les récents propos présidentiels - est que la priorité à l’éducation ne soit pour le gouvernement qu’une figure de rhétorique et soit en réalité sacrifiée sur l’autel de la baisse des impôts.
C’est pourquoi nous en appelons au gouvernement à la fois pour qu’il ouvre enfin une vraie négociation pour aboutir à une loi qui soit en accord avec les besoins de l’école et qu’il revoit d’urgence ses choix budgétaires.
L’Ecole n’a pas besoin de nouveaux conflits, elle a besoin d’un nouvel élan, d’une dynamique. Le gouvernement semble avoir fait le choix inverse et prend la responsabilité d’un passage en force et d’un conflit.

Le 20 janvier, nous serons dans l’action non seulement avec tous les fonctionnaires pour les salaires et le service public mais aussi dans la continuité des actions unitaires pour l’éducation. Si nécessaire, nous irons au-delà mais nous voulons en même temps faire entendre nos propositions et en débattre.

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