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B* Apprendre à apprendre – permettre aux élèves de donner du sens aux apprentissages par des situations problèmes à l’école ECLAIR Rodolphe Reuss 2 de Strasbourg (Journées de l’innovation 2014)

9 janvier 2014

Apprendre à apprendre – permettre aux élèves de donner du sens aux apprentissages par des situations problèmes
Expérimentation art.34

Ecole Elémentaire Rodolphe Reuss 2
60 allée Reuss, 67100 Strasbourg
Site Innovations
Auteur : Mme Koudou Catherine
Mél : ce.0670397T@ac-strasbourg.fr

Le projet s’adresse à tous les élèves de l’école. Le choix pédagogique de la situation problème a été fait après un état des lieux qui montre que les élèves en difficulté scolaire adoptent une attitude passive et attentiste face aux apprentissages et que les bons élèves ne sont pas suffisamment stimulés et se contentent d’un travail à minima. Le travail à partir de situations problèmes vise donc un changement au niveau de l’attitude des élèves. Nous souhaitons que chacun puisse développer un rapport différent à l’apprentissage, notamment face à la difficulté de la tâche, face aux notions d’effort et d’erreur.

L’estime de soi nécessaire pour évoluer vers une posture moins attentiste est un objectif essentiel de ce choix pédagogique : en franchissant avec ses pairs des obstacles pour parvenir à réaliser une tâche, nous émettons l’hypothèse que les élèves peuvent apporter un regard nouveau sur leur travail scolaire.
La situation problème s’inscrit également dans la transversalité : elle peut être intégrée à toutes les disciplines et elle met en jeu toutes les compétences du socle. Elle peut enfin se décliner selon différents niveaux de difficultés, cela peut permettre aux bons élèves de donner le maximum d’eux-mêmes.

Plus-value de l’action
Pour une grande majorité de nos élèves, l’échec scolaire vient du fait que l’école reste un lieu de trop grandes exigences, de pression et de stress souvent insupportables, et ils ressentent parfois violemment l’écart qu’il y a entre le monde familial et du quartier et le monde de l’école. L’expérimentation doit apporter de l’apaisement, doit proposer un lieu et un moment où l’enfant sort de la pression scolaire et des exigences de résultats pour devenir un véritable acteur de la construction de son savoir.
Nous sommes actuellement dans la troisième année d’expérimentation et nous constatons à chaque fois que les moments de décloisonnement sont des moments privilégiés. Ce sont ces moments d’apprentissage, où les enfants sont volontaires et présents à ce qu’ils font, que nous aimerions d’abord amplifier et bien sûr communiquer aux autres écoles en tant que réussite.

Nombre d’élèves et niveaux concernés
Cycle 2 et cycle 3

A l’origine
L’école élémentaire REUSS 2 accueille des élèves sur un quartier qui se paupérise de plus en plus. Malgré les efforts entrepris par la Ville de Strasbourg pour réhabiliter le quartier, la population peine à suivre les changements et les mentalités n’évoluent que lentement. La principale difficulté de nos élèves est la maîtrise de la langue. Les structures syntaxiques sont très pauvres, le vocabulaire est déficitaire et l’imagination limitée parce qu’elle n’a pas les supports adéquats pour s’exprimer. Pour la plupart des enfants qui entrent au CP, les repères de temps et d’espace sont très flous, or ces repères sont indispensables pour entrer sereinement dans la lecture et l’écriture.
Le choix pédagogique de la situation problème est étayé par l’ensemble des éléments qui caractérisent cette démarche active :
• elle s’inscrit en rupture avec le fonctionnement habituellement frontal de la classe, qui induit souvent une attitude passive chez l’élève,
• l’entrée dans la tâche induit un questionnement, une reformulation, et donc une appropriation personnelle
• l’élève raisonne en suivant une démarche : essai, observation, traitement de l’erreur, approche de la solution,
• l’interaction entre les élèves permet une prise de conscience des apprentissages en cours
• présentation en fin de séance d’une réalisation ou d’une production.

Objectifs poursuivis
S’approprier les savoirs par une démarche active et dynamique.

Description
L’objectif du projet est de travailler en situations problèmes, au cycle 2 et au cycle 3, en groupes de niveaux.
- Pour le cycle 2 : un moment dans la semaine de travail en groupes de niveaux. Les élèves de CP et de CE1 n’ont pas été mélangés. A chaque période nouveau domaine d’apprentissage : lecture, maths (tangram), sciences, jeu théâtral (marionnettes), sport et jeux d’extérieur.
- Pour le cycle 3 : deux moments dans la semaine de travail en groupes de niveaux. Sur toute l’année, un moment de décloisonnement a été consacré aux maths, l’autre moment de décloisonnement a été consacré à des domaines d’apprentissage qui ont changé à chaque période.

Trois ressources ou points d’appui
- 1. La ressource la plus importante est certainement l’inventivité et la créativité des enseignants qui mènent le projet. Nous entamons notre troisième année du projet et l’équipe enseignante est toujours aussi enthousiaste.
- 2. Une deuxième ressource, c’est la disponibilité des personnels non enseignants : assistants pédagogiques, AVS, directrice, maître E. Ceci montre que le projet expérimental est vraiment une affaire d’école et que tout le monde est concerné.
- 3. Une troisième ressource, c’est la liberté totale que nous avons pour mener ce projet, tant dans les contenus que dans les formes. Nous pouvons vraiment expérimenter des choses nouvelles et vraiment associer le travail à des aspects plus ludiques (course de voitures, spectacle de tableaux vivants...)

Difficultés rencontrées
- 1. Difficulté d’adaptation des élèves aux nouvelles formes de travail. Le décloisonnement au cycle 2 étant moins fréquent (une fois par semaine pour les CP et les CE1) et moins diversifié (essentiellement langage oral et lecture), les élèves, lorsqu’ils arrivent aux CE2, sont surpris par cette nouvelle de forme de travail. On leur demande un travail en groupe, avec une réflexion autonome à partager avec les pairs, ce qui met du temps à se mettre en place et à être efficace.
- 2. Préparation chronophage : pour mettre en place les situations problèmes, il faut :
• une rencontre entre enseignants pour la conception,
• définir des objectifs précis et des compétences, - préparer les séquences, - partager les documents,
• préparer les évaluations,
• partager les notes et les remarques,
• porter les notes et les remarques dans le livret scolaire.
Ce temps est nécessaire pour chaque période. Là où nous avons moins pris le temps, c’est au niveau de la confrontation des pratiques. Il aurait peut-être fallu plus de mises en commun à chaud, tout de suite après les séquences, pour mener des réflexions sur les pratiques qui fonctionnent, en améliorer ou en abandonner d’autres.
- 3. La gestion des groupes d’élèves faibles et très faibles. Il faudra certainement travailler complètement à part avec ces groupes-là, leur proposer des contenus et des évaluations spécifiques.

Moyens mobilisés
Moyens internes à l’école.

Partenariat et contenu du partenariat
Au cours de la deuxième année d’expérimentation, nous avons sollicité une professeure de mathématiques de l’IUFM, qui a accompagné les enseignants de cycle 3 lors de leurs réunions de travail. Elle a présenté des notions mathématiques qu’il est intéressant de travailler sous forme de situation problème.

Modalités du suivi et de l’évaluation de l’action
Les différents travaux ont été évalués et ont donné lieu à une remarque dans le livret scolaire.
- Pour le cycle 2, il n’y a eu que deux périodes d’évaluation.
- Pour le cycle 3, ce sont les situations problèmes mathématiques qui ont été le plus évaluées (mi- période et fin de période). Pour les situations problèmes dans les autres domaines d’apprentissage, nous avons évalué suivant les compétences du socle commun - pilier 6 et 7 :
• respect de soi et respect des autres ;
• sens de la responsabilité par rapport aux autres ;
• s’appuyer sur des méthodes de travail ;
• identifier un problème et mettre au point une démarche de résolution ;
• identifier, expliquer et rectifier une erreur ;
• mettre à l’essai plusieurs solutions ;
• développer la persévérance.
Nous avons souvent été plus dans une pédagogie de projet où le but final était plus important (construction des voitures et organisation d’une course, réalisation de tableaux vivants) que le processus pour parvenir au but final.
Pour l’année prochaine, il faudra réfléchir sur les points suivants :
• mettre les élèves plus en situation de recherche ;
• être dans une situation de recherche implique qu’il faut trouver une démarche de résolution, donc laisser les élèves trouver cette démarche et la mettre en œuvre. Si l’enseignant donne tout et apporte tout (matériel pour la construction des voitures et la réalisation des tableaux vivants), cette démarche est faussée et il n’y a pas une réelle appropriation des savoirs.

Effets constatés
- Sur les acquis des élèves : Le travail sur des situations problèmes motive la réflexion et le raisonnement. C’est plus à ce niveau que les progrès sont visibles, pour certains élèves, qu’au niveau des acquis, dont on verra une amélioration à plus long terme. Les nouvelles façons de travailler qui sont proposées demandent à être bien intégrées avant qu’on puisse parler de progrès ou d’amélioration. Elles impliquent aussi que l’élève n’est pas forcément dans le groupe de son enseignant et qu’il y a donc aussi un nouveau rapport aux adultes à mettre en place et à faire fonctionner. Les effets sont visibles pour les élèves faibles et très faibles. Le fait d’être séparés des autres les oblige à participer, à changer leur attitude face au travail. Et ceci est possible, parce qu’ils ne sont plus éclipsés par les meilleurs. Dans leur groupe, ils sortent de leur rôle de faibles et, sachant qu’ils ont droit à l’essai et à l’erreur, ils s’approprient le travail à faire de manière tout à fait positive. Il y a eu dans ces groupes des progrès remarquables au niveau des acquisitions, mais aussi des savoir-faire et des savoir-être. Pour les bons élèves, l’émulation, qui ne fonctionne pas toujours dans le groupe classe, a joué pleinement et leur a permis de progresser. Notons que les périodes de décloisonnement sont des moments privilégiés, et nous pensons atteindre là l’objectif qui suppose une démarche active et dynamique pour s’approprier les savoirs. Cependant, nous n’avons encore pas constaté de réels changements lorsque les élèves sont à nouveau en classe. Ils reprennent encore trop facilement leurs anciennes habitudes et se plaisent encore trop dans le rôle de l’élève passif et nonchalant.
- Sur les pratiques des enseignants : Il est indéniable que la mutualisation des compétences, des savoir-faire et des recherches pédagogiques s’est démultipliée au sein de l’équipe enseignante. Les enseignants ne réfléchissent plus uniquement en termes de classe unique - la leur - mais aussi en termes de groupes qu’ils animent et il faut qu’ils s’intéressent aussi au fonctionnement des autres groupes puisque des élèves de leur classe y sont. C’est vraiment une pédagogie hors des quatre murs qui donne une meilleure vue d’ensemble, au sein du cycle notamment. Le changement de regard sur les élèves a été d’une importance capitale. Le mélange des classes et des niveaux et la participation de personnels autres qu’enseignants a été très profitable aux élèves
- Sur le leadership et les relations professionnelles : D’une façon plus générale, l’expérimentation apporte une véritable cohésion au sein de l’équipe des enseignants et les relations professionnelles s’en trouvent renforcées.
- Sur l’école / l’établissement : Le projet expérimental ne tient pas encore une place prépondérante au sein de l’école. Il s’est simplement surajouté à toutes les contraintes et les obligations quasi impossibles à bouger : les périodes d’évaluations (nationales, départementales ou autres) restent importantes, des difficultés de tout ordre liées à l’espace (équipement technique et matériel vétuste et inadapté du bâtiment), au temps (le montage du projet, sa mise en œuvre et son évaluation ont été de gros mangeurs de temps), à l’attitude des parents (vision consumériste de l’école), sont trop importantes pour être réglées avec un projet expérimental, aussi ambitieux soit-il. L’expérimentation agit de manière bénéfique sur la cohésion de l’équipe et la cohérence des actions qui sont menées par ailleurs (projet fresque mené par une classe de CE2, projet classe orchestre mené par la classe de CE2-CM1). L’expérimentation soude les élèves entre eux car ils sont obligés de composer avec les autres, de donner un avis, parfois d’imposer une idée ou une manière de faire. Au niveau des parents, nous ne voyons que peu de répercussions. L’expérimentation est régulièrement présentée en conseil d’école, mais ceci suscite peu leur curiosité.
- Plus généralement, sur l’environnement : Le projet n’a pas eu d’impact remarquable sur l’environnement de l’école, nous n’avons associé aucun partenaire au projet pour le moment. Est-ce qu’il a eu un impact sur l’environnement immédiat de l’élève ? Fréquente-t-il plus les lieux culturels comme la médiathèque par exemple ? Profite-t-il davantage des clubs sportifs qui fonctionnent sur le quartier le mercredi et pendant les vacances ? Les parents font-ils plus la démarche d’accompagner leur enfant dans ce genre d’endroit ? Une évolution du projet serait d’associer à chaque période une personne extérieure (universitaire ou association de quartier par exemple) pour ouvrir le projet vers l’extérieur et établir une interaction entre les gens du dedans - les élèves et les enseignants - et les gens du dehors. Cette ouverture vers l’extérieur pourrait renforcer les compétences des piliers 6 et 7 pour les élèves et peut-être permettre à l’école d’avoir un rôle pacificateur, qu’elle n’a pas encore actuellement.

Extrait du site expérithèque : Apprendre à apprendre – permettre aux élèves de donner du sens aux apprentissages par des situations problèmes (MARS 2014)

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