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Décrochage : les leçons des expériences européennes (Eurydice)

2 décembre 2014

Décrochage : les leçons des expériences européennes (Eurydice)

Les décrocheurs, en anglais les ELET (early leaving from education and training), coûtent extrêmement cher à la société, indépendamment des conséquences pour eux-mêmes. C’est la conclusion d’un rapport que vient de publier Eurydice (la Commission européenne) sur les politiques mises en œuvre dans 43 pays ou régions pour lutter contre le décrochage. Elle établit aussi, à l’inverse, qu’un niveau de formation élevé a des conséquences positives pour la personne comme pour la collectivité, en termes d’emploi, de salaire, de santé, de baisse de la criminalité, de cohésion sociale, de dépenses sociales, de productivité, de croissance... Ce rapport rappelle que ces jeunes sont souvent socialement défavorisés et qu’on ne peut envisager la question du point de vue scolaire sans prendre en compte les politiques économiques, de chômage, de santé, de lutte contre la pauvreté, d’intégration des immigrés, etc.

Il rappelle aussi que les Etats européens se sont engagés à réduire à moins de 10 % le pourcentage de leurs ELET, un objectif qu’ont atteint la moitié des pays tandis que d’autres, comme l’Espagne, ont fait des progrès significatifs. Mais il s’inquiète de voir que la plupart des pays ont leur propre définition du décrochage et leur système statistique, ce qui ne facilité pas les comparaisons européennes. Et comme les signaux d’alerte ne sont pas non plus convenablement pris en compte, les données ne permettent pas non plus, au niveau local, d’intervenir préventivement. C’est notamment le cas en France, à Malte et en Ecosse, qui produisent régulièrement des données sur les élèves après qu’ils ont quitté le système de formation initiale, mais pas sur l’absentéisme ou sur les facteurs prédictifs.

Des politiques inclusives, inscrites dans la durée

Statistiquement, les jeunes issus de milieux sociaux défavorisés décrochent plus souvent que les autres. Et les garçons sont d’autant plus à risque que le milieu est défavorisé. C’est pourquoi il est si important de s’intéresser aux familles, d’éviter la ségrégation sociale dans les établissements scolaires, la sélection précoce... et, à l’inverse, de favoriser l’accueil de la petite enfance, d’aménager la transition entre le premier et le second degré, entre le collège et le lycée, entre l’école et l’emploi, d’individualiser les parcours... Finalement, seuls six pays (ou régions), la Belgique flamande, la Bulgarie, l’Espagne, Malte, les Pays-Bas et l’Autriche, ont adopté (à la date de rédaction du rapport, ndlr), une stratégie inclusive (le terme anglais "comprehensive" désigne plus précisément l’absence de toute forme de sélection).

Des pays comme la République tchèque, la Pologne, la Slovénie et la Slovaquie ont des politiques inscrites dans la durée, ce qui explique qu’ils connaissent des taux de décrochage faibles. Mais bien peu de pays ont mis récemment en place des politiques de limitation des redoublements ou pour promouvoir la mixité sociale dans les établissements, deux moyens importants de lutte contre le décrochage. Moins d’un tiers des pays ont inscrit cette question dans les programmes de formation, initiale et continue, des enseignants. De même, les élèves des écoles primaires de 16 pays, dont la France, n’ont pas d’éducation à l’orientation. Le rapport recommande que l’orientation figure dans les curricula de tous les élèves, et non pas seulement de ceux qui sont, ou qui risquent d’être, en difficulté.

La formation des enseignants

L’accent a souvent été mis sur la "seconde chance", mais il faudrait aussi s’intéresser à la prévention, notamment lorsque les absences non justifiées. D’où l’importance de la formation des enseignants à reconnaître les élèves à risque. Et nous manquons de données pour dire ce qu’il conviendrait de faire dans ce domaine. Le rapport met ainsi en exergue le rôle de l’enseignement professionnel puisque les pays dont le système de formation professionnelle est plus faible ont un taux plus élevé de décrocheurs. Cette voie peut aussi jouer un rôle dans la personnalisation des parcours et dans le raccrochage, et elle ne bénéficie pas toujours de la considération qu’elle mérite alors qu’elle accueille bon nombre de jeunes issus de milieux défavorisés.

La réduction du décrochage suppose aussi une bonne coopération "horizontale" entre tous les acteurs concernés et "verticale", entre les niveaux national, régional, local et les établissements eux-mêmes. Mais seuls les Pays-Bas, la communauté flamande de Belgique, l’Espagne et Malte ont instauré des coopérations formelles. Encore faut-il que les différents acteurs travaillent effectivement ensemble, ce qui suppose beaucoup de temps et d’efforts pour que chacune des parties prenantes connaisse les autres et leur culture professionnelle. La "garantie jeunes" peut d’ailleurs servir d’exemple pour le renforcement de la coopération entre les services concernés.

Le redoublement, la prolongation de l’obligation scolaire, l’autonomie des établissements

L’approche par compétences est aussi une autre caractéristiques des politiques de lutte contre le décrochage. Il s’agit de mettre l’accent sur ce que les élèves savent faire plutôt que sur le nombre d’heures qui ont consacrées à leur formation.

Il est clair qu’il y a des marges de progrès, qu’il s’agisse notamment des taux de redoublement, de la prolongation de l’obligation scolaire, mais aussi de l’autonomie des établissements, y compris pour le recrutement de leurs enseignants et la possibilité de choisir dans les programmes optionnels. Quant aux élèves, ils devraient pouvoir choisir les disciplines qui les intéressent.

Le rapport "Tackling Early Leaving from Education and Training in Europe" sur le site de la Commission

Extrait de touteduc.fr du 23.11.2014 : Décrochage : les leçons des expériences européennes (Eurydice)

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