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"Eviter la haine et permettre à l’école d’évoluer", tribune en trois parties de Pascal Bouchard (Tout Educ) dans les Cahiers pédagogiques. Un plaidoyer pour "un établissement public de bassin"

24 décembre 2014

Éviter la haine et permettre à l’école d’évoluer (III)
Pascal Bouchard

«  Pourquoi tant de haine ?  » demandait récemment Philippe Watrelot. C’est la question à laquelle Pascal Bouchard, responsable de ToutEduc, essaie de répondre depuis trente ans qu’il fait du journalisme éducation, après avoir été enseignant.

EXTRAITS
Partie 2 :
[...] aucun ministre ne prendra le risque politique de revenir sur la coupure école/collège. Il n’y a qu’une seule solution, constituer des «  établissements publics de bassin  ». Cet échelon administratif intermédiaire entre l’établissement et le rectorat réunirait les deux à trois lycées d’enseignement général et technologique d’un même secteur géographique (ou desservis par les mêmes transports en commun), les lycées professionnels du secteur, les collèges et les écoles primaires. Cela n’empêcherait en rien chacun de vivre sa vie, un lycée professionnel pourrait très bien, par exemple, être partie prenante d’un campus des métiers. Cet établissement public de bassin jouerait le rôle de Bruxelles pour les Etats membres, celui de la subsidiarité. Son Conseil d’administration réunirait les représentants de tous les établissements partenaires, et son président serait choisi parmi les proviseurs, principaux et IEN… Dans l’idéal, le recteur choisirait parmi trois noms proposés par le conseil d’administration.

Outre que l’établissement public de bassin aurait les moyens d’une réelle gestion des ressources humaines et de la carte scolaire, et qu’il pourrait suivre les destins scolaires de la petite enfance à l’âge adulte, il pourrait aussi lancer des appels à projets, ou recevoir les projets des personnels. Ceux-ci pourraient être détachés dans un autre établissement que celui où ils sont affectés. Un prof de maths de Camus pourrait compléter une équipe du collège Sartre…

Seuls seraient concernés des enseignants volontaires. Et partant du principe que «  les expériences réussissent toujours  », elles réussiraient. J-P Brighelli pourrait réunir quelques amis convaincus de la pertinence du cours magistral, il aurait la satisfaction de triompher, tandis qu’une équipe «  institutionnelle  » triompherait de l’autre côté de la rue… Mais tous auraient eu l’obligation d’expliquer ce qu’ils veulent faire, avec quels élèves, avec quels objectifs, et avec quelles conséquences sur le système. L’administration qui aurait entériné le projet aurait évalué les moyens nécessaire à sa mise en oeuvre, et donnerait les informations relatives au devenir des élèves. Certains projets pourraient lier efficacement les divers niveaux d’enseignement, ou réunir les élèves des trois voies du lycée sans que nul n’y soit contraint, sans que les statuts soient remis en cause.

Mais un tel projet suppose un dialogue de l’établissement public de bassin avec son environnement social. Celui-ci peut lui adresser des demandes. Par exemple, si le taux d’abstention des jeunes aux élections est particulièrement élevé, lui suggérer de mettre l’accent sur l’éducation à la citoyenneté. Il doit également être informé des initiatives qui seront lancées, en comprendre le sens, et, si elles modifient les conditions de recrutement des élèves par exemple, donner son avis. Il serait évidemment absurde de provoquer autant de référendums locaux. La démocratie ne peut être que représentative, mais elle ne peut se résumer aux élus, sauf à subordonner l’Ecole aux jeux politiciens. Je ne vois qu’une seule solution, des «  conseils économiques et sociaux  » de bassin. N’étant pas là pour défendre une position partisane, ses membres seraient susceptibles de voir leurs positions évoluer, selon les principes de la rationalité communicationnelle chère à Habermas ; pour le dire plus simplement, de la discussion jaillirait la lumière.

Les enseignants ne travailleraient pas pour autant sous les regards du conseil économique et social de bassin. Ceux qui voudraient ne s’engager dans aucun projet continueraient de le faire, et ceux qui seraient engagés n’auraient de comptes à rendre que de leurs objectifs et des moyens mis en oeuvre. Mais si les résultats sont au rendez-vous, s’ils sont plus heureux dans l’exercice de leur métier, si se vérifie ce que répètent depuis des décennies les partisans de l’Ecole nouvelle comme les héritiers de Freinet et de Oury, d’autres équipes se constitueraient et enfin l’innovation ferait tache d’huile. Quant aux conseils économiques et sociaux de bassin, libre à eux de s’emparer d’autres sujets qu’éducatifs, d’inventer une nouvelle forme de démocratie participative, où les corps intermédiaires restent proches de leurs mandants.

Car l’école ne réussira la démocratisation des savoirs que dans une société démocratique.

 

Partie 3
[...] La création d’un échelon administratif au niveau du bassin me semble être la seule réponse possible. Elle ne coute pas cher en termes de moyens ni de textes réglementaires. Cet établissement public de bassin  rassemble écoles, collèges et lycée et il fait ce que chacun ne peut pas faire à son échelle et ce que le rectorat, trop distant, ne peut pas faire avec suffisamment de finesse : gestion des flux d’élèves, gestion des élèves les plus difficiles, gestion différenciée des moyens, gestion des ressources humaines, gestion de l’innovation. l’établissement public de bassin  peut lancer des appels à projets ou recevoir, examiner et valider les projets d’équipes qui se constituent par affinités. Ce sont ces projets qui feront évoluer, par cercles concentriques, les pratiques, sans rien imposer, donc sans provoquer de réactions. [...]

Extrait de cahiers-pedgogiques.com du 18.12.14 : Éviter la haine et permettre à l’école d’évoluer (III)

La première partie de la tribune (09.09.14)

La deuxième partie de la tribune (10.09.14)

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