> VI- PÉDAGOGIE (Généralités, Disciplines, Actions locales) > DISCIPLINES (Généralités) > Sport, EPS (Généralités) > Enseigner l’EPS en milieu difficile. Deux entretiens avec Jacques Méard (...)

Voir à gauche les mots-clés liés à cet article

Enseigner l’EPS en milieu difficile. Deux entretiens avec Jacques Méard (Café pédagogique)

26 décembre 2014

Comment l’EPS peut elle aider à la réussite de tous les élèves et particulièrement des élèves les plus en difficulté ? Après avoir été enseignant d’EPS de collège et de lycée professionnel en milieu difficile, puis formateur et enseignant-chercheur en IUFM, Jacques Méard est aujourd’hui professeur à la Haute Ecole Pédagogique de Lausanne. Spécialiste de l’enseignement en milieu difficile, il nous présente ses travaux et sa vision des politiques scolaires actuelles. Ses propositions amènent à réfléchir de façon très concrète à la façon dont l’élève peut attribuer du « sens » à ses apprentissages : le rôle de l’enseignant est déterminant !

Vous avez publié un ouvrage et des articles de référence avec S. Bertone sur « l’élève qui ne veut pas apprendre en EPS ». Pourriez-vous nous les présenter en quelques lignes ?

La question centrale traitée dans ces travaux était celle du « sens » que les élèves donnent au travail scolaire, surtout chez ceux pour qui ce sens n’est pas d’emblée acquis. J’ai d’abord réalisé pendant plusieurs années un travail clinique de repérage d’actions et d’évolution d’actions d’élèves en classe d’EPS en collège et en lycée professionnel.
Cinq types d’actions d’élèves ont été dégagés : les actions anomiques (le non suivi des règles du fait d’une méconnaissance), les actions d’opposition (les refus ostensibles de suivre des règles), les actions hétéronomes (les refus masqués qui se traduisent par de la passivité, des petites déviations), les actions autorégulées (le suivi des règles marqué par un engagement volontaire) et enfin les actions autonomes (les initiatives prises par l’élève et les négociations en collaboration avec l’enseignant en vue d’inventer d’autres règles). Ces diverses actions relèvent donc de mon point de vue du sens attribué aux règles du travail scolaire chez les élèves, depuis la méconnaissance jusqu’à la compréhension et l’adhésion à leurs motifs, en passant par une « connaissance sans compréhension » ou simplement un rejet de leurs motifs.

Le plus intéressant était de mettre en rapport ces types d’actions d’élèves avec les différentes façons de l’enseignant d’énoncer ces règles du travail scolaire en EPS (les consignes, leurs justifications, les formes de contrôle, la manière de les négocier explicitement ou implicitement avec les élèves, les modes de persuasion, les éventuelles menaces associées). De la sorte, en identifiant ce que dit et fait l’un et ce que disent et font les autres, j’ai essayé de comprendre leurs rapports éventuels, de repérer les configurations fréquentes, les dynamiques d’interactions en classe et, à terme, de pointer celles qui orientent la classe vers davantage d’engagement et d’autonomie ou à l’inverse vers des déviations, des transgressions ou des désengagements.

Avec Stefano Bertone, nous avons ensuite prolongé ces analyses en EPS en primaire, dans d’autres disciplines et nous nous sommes enfin penchés sur ces questions à propos d’enseignants qui entrent dans le métier.

Extrait de cafepedagogique.net du 12.12.14 : Enseigner l’EPS en milieu difficile. Entretien avec Jacques Méardi

 

Pour changer l’Ecole faut-il arrêter de légiférer et réglementer ? Spécialiste de l’enseignement de l’EPS en milieu difficile, Jacques Méard, professeur à la Haute école pédagogique de Lausanne, ose cette affirmation. "La rénovation passe davantage par une valorisation et une attention portée à ce qui se fait qu’à une volonté d’édicter des principes présentés comme novateurs et de les généraliser". Nous poursuivons cette semaine l’entretien débuté la semaine dernière avec lui. Ses propositions amènent à réfléchir de façon très concrète à la façon dont l’élève peut attribuer du « sens » à ses apprentissages : le rôle de l’enseignant est déterminant !

D’après vous, l’EPS a-t-elle un rôle particulier dans l’éducation en milieu difficile ?

Du côté des élèves, l’EPS est une discipline qui a un atout considérable. D’une part, elle permet de construire, comme toutes les autres matières, des savoirs qui permettent de comprendre le monde, de se développer comme personne et comme citoyen cultivé, de poursuivre des objectifs à long terme, d’expérimenter et de mesurer les effets d’un travail, les effets de véritables apprentissages (quoi qu’en pensent les non spécialistes, les techniques corporelles, le règlement du rugby et les principes pour gérer sa vie physique sont des savoirs nobles) ; d’autre part, l’EPS est proche de la « vie » en ce sens qu’elle immerge l’enfant et l’adolescent dans des situations de plaisir intense, de sueur, de conflit avec d’autres, d’échanges et de projets partagés.
Ces deux caractéristiques autorisent des expériences d’apprentissages véritables à des jeunes qui supportent mal les heures et les semaines où l’on doit rester assis face au tableau à écouter un enseignant parler. Ils sont confrontés aux questions d’acquisition mais aussi aux problèmes de sécurité pour soi et pour les autres, aux débats, aux regards des autres. Donc, l’EPS est le lieu privilégié pour apprendre des savoirs savants, techniques, des codes sociaux, des normes, une « culture inscrite dans le corps ». [...]

Extrait de cafepedagogique.net du 19.12.14 : Enseigner l’EPS en milieu difficile : Rencontre avec Jacques Méard (2)

Lire le premier article de la série :
L’enseignement de l’EPS en milieu difficile (1). Le premier volet d’une série d’entretiens du Café pédagogique : la pratique du football "fut-sal"

Répondre à cet article