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"Vers une société apprenante", rapport Taddéi (mars 2017). Extraits du rapport intégral : expérimentation plutôt qu’innovation, formations sur site, la concertation (REP et REP+), partenariats de territoire...

18 avril 2017

Vers une société apprenante. Rapport sur la recherche et développement de l’éducation tout au long de la vie
Catherine Becchetti-Bizot
Guillaume Houzel
François Taddei

Le rapport intégral (85 p.) : Vers une société apprenante

La synthèse du rapport (10 p.)

 

EXTRAITS DU RAPPORT INTEGRAL

(page 22)

1.5. Adosser les expérimentations à la recherche
À l’échelle de l’Éducation nationale, la base Expérithèque recense plus de 5 000 projets innovants.
Une cinquantaine d’entre eux ont même été primés, mais ceux‐là ne sont pas suffisamment documentés, via des MOOCs et des formations continues par exemple,
pour être mis à disposition d’autres enseignants qui pourraient s’en inspirer pour les adapter à leurs besoins. On sait que l’injonction à innover est devenue courante aujourd’hui, même si elle est vécue par les équipes comme paradoxale, voire dans certains cas culpabilisante.
Les études, comme celles récentes de l’inspection générale ou du Conseil national de
l’innovation pour la réussite éducative (CNIRE) ont montré combien ce terme peut être un piège à bien des égards : les « innovations » ne sont pas toujours très originales, elles sont souvent le fait d’individus isolés plutôt que d’équipes, elles sont insuffisamment documentées et font trop rarement l’objet d’évaluations rigoureuses, ce qui limite dès lors la possibilité d’appropriation par d’autres acteurs et la portée des enseignements qu’on peut en tirer.
C’est pourquoi le terme d’expérimentation nous apparaît largement préférable. Expérimenter, c’est inventer des solutions à des problèmes concrets que les enseignants rencontrent dans leur classe au quotidien [...]

(page. 33)
DONNER L’INITIATIVE AUX ÉQUIPES D’ÉTABLISSEMENT POUR
CONSTRUIRE LA FORMATION QUI REPOND LE MIEUX À LEURS BESOINS
Les formations actuelles sont encore trop souvent conçues sur un modèle descendant, délivrant une parole institutionnelle, de moins en moins adaptée
aux besoins en formation des enseignants, et surtout en décalage croissant avec
les nouvelles modalités qui se développent grâce aux environnements numériques.

Imaginons à l’inverse des personnels réunis dans leur lycée, leur collège ou leur école
pour réfléchir à leur développement professionnel et élaborer ensemble leur formation continue.
Imaginons qu’ils discutent ensemble de la formation la plus pertinente pour surmonter une difficulté commune, mener un projet, améliorer leur
pratique.
Imaginons qu’ils disposent d’un budget pour faire venir un chercheur, se déplacer pour participer à un colloque ou une journée académique ou monter un stage.
Cette inversion est d’autant plus souhaitable que le changement se heurte souvent
aux représentations des enseignants. Pour les faire évoluer, pour conduire le changement, la voie la plus efficace n’est sans doute pas le discours d’autorité ou
même de conviction.
Seule la mise en action permet de lancer des dynamiques d’évolution dans un
cadre sécurisé. Des changements d’abord perçus comme déstabilisants et anxiogènes
apparaissent sous un tout autre jour dès lors que ce sont des collègues qui les
portent, au travers de pratiques partagées, et dès lors que ce changement est accompagné.
En accordant à chaque établissement ou réseau d’écoles un budget pour monter son
propre programme de formation continue, on peut imaginer faire du développement professionnel un enjeu collectif qui redonne l’initiative aux équipes dans les établissements, dans la perspective d’un leadership distribué. Pour compléter ou
enrichir les formations présentielles, la production et la diffusion de cours en
ligne, sur des formats coopératifs (CMooc), voire ouvrant sur des questionnements
de recherche ouverte (MOOR pour massive online open research) paraît particulièrement pertinente.

(page 49)
4.2. Au sein des établissements
 FAVORISER LES CONCERTATIONS POUR CONSTRUIRE UNE CULTURE
COMMUNE
L’intérêt d’échanges formels ou informels réguliers semble faire consensus.
Les personnels d’une crèche savent constituer ensemble une équipe. Les
enseignants d’un collège trouvent intérêt à discuter entre pairs comme avec
des tiers, sans craindre une atteinte à leur liberté pédagogique. Les universitaire sont
un sens développé de leur communauté professionnelle.
Ces coopérations à l’échelle d’un établissement sont pourtant insuffisantes. Au niveau
scolaire, l’addition de réunions institutionnelles consomme le temps disponible, alors
qu’il est limité.
Au sein d’un réseau d’éducation prioritaire (REP et REP+), par exemple, une même question générale devra être abordée en conseil pédagogique, en conseil de REP, ou en conseil école/collège voire en conseil d’éducation à la santé et à la citoyenneté.
En outre, les dispositions du décret pris en août 2014 relatif aux obligations de
service des personnels des établissements secondaires sont encore mal connues
et exploitées, alors qu’elles soulignent que leur mission comprend le travail
en équipe et la relation avec les parents d’élèves. La manière dont sont conçus certains projets d’établissement illustre le piège improductif dans lequel il est
si facile de tomber.
Bien conçu, il exprimera un nombre limité de principes d’actions, fédérant et motivant
les acteurs, qui trouveront à les appliquer chacun dans son champ professionnel. Il sera une inspiration pour mieux travailler ensemble. Il permettra d’expliciter, au
bénéfice de tous, quelques règles de vie commune, et d’instaurer un climat de
confiance.
Mais dans la pratique trop souvent, cet exercice est prisonnier d’une procédure
administrative, dans un calendrier et sous des formes contraintes, extérieures aux
intentions des personnels de l’établissement et incapables de leur permettre de
prendre en compte l’évolution des besoins et des aspirations.
La promotion d’une culture de confiance, de coopération et d’expérimentation devrait
amener à accorder plus de marges à chaque établissement, pour qu’il définisse à
son niveau la façon d’organiser et de faire vivre la concertation.
Ces aspects sont des clés qui ressortent des comparaisons internationales indiquant que les enseignants français collaborent moins que d’autres, alors que la coopération est souvent le gage d’une amélioration des relations au sein de l’établissement et d’un apaisement du climat scolaire en général. Or, plusieurs études montrent combien la culture de coopération aide à stabiliser les équipes et à faire progresser les élèves.
Les objets d’échanges sont variés : suivi des élèves, enjeux disciplinaires, applications de réformes nationales, découvertes, co‐construction et appropriations d’expérimentations...
L’essentiel est de répondre aux besoins des acteurs, tout en élargissant leur horizon non par des injonctions, mais par le dégagement de temps pour les échanges et la
facilitation de l’accès à des ressources, et en particulier de celles issues de la recherche.

(page 54)
3. À l’échelle du territoire
Une circulaire du 20 mars 2013 définit les projets éducatifs territoriaux (PEDT) comme permettant aux collectivités territoriales volontaires de proposer à chaque enfant un parcours éducatif cohérent et de qualité avant, pendant et après l’école, organisant ainsi, dans le respect des compétences de chacun, la complémentarité
des temps éducatifs.
Ils sont un outil de collaboration locale qui peut rassembler, à l’initiative de la collectivité territoriale, l’ensemble des acteurs intervenant dans le domaine de l’éducation : les administrations de l’État concernées, les autres collectivités territoriales éventuellement impliquées, ainsi que des associations de jeunesse et d’éducation populaire, ou d’autres associations et institutions à vocation sportive, culturelle, artistique ou scientifique notamment, et des représentants de parents d’élèves.
Malgré l’intérêt de cette démarche, la mise en œuvre s’avère souvent très administrative dans la réalité. De nombreux PEDT sont centrés sur des enjeux d’organisation et d’emplois du temps. Leur évaluation, pourtant préconisée, encouragée est modeste, sinon absente : le bilan ne porte que sur le fonctionnement
du dispositif et non sur ses effets sur les enfants qui en bénéficient.
L’Éducation nationale connaît bien d’autres partenariats avec les acteurs du territoire. La loi Nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) a encore encouragé
l’idée d’une co‐construction, que la politique ministérielle récente a soutenue résolument.
Les échanges sur la formation professionnelle avec les conseils régionaux, la création de campus des métiers, la signature de conventions “ruralités” dans plusieurs départements, les discussions sur l’ajustement des cartes scolaires autour des enjeux
de mixité sociales... tous ces processus illustrent l’ambition de bien inscrire les établissements scolaires dans leur environnement. Comment réussir à passer un cap
pour le scolaire et plus généralement pour les apprentissages et la formation ?

 

Entretien d’Olivier Rollot avec François Taddéi

Extrait de orientation.blog.lemonde.fr du 12.06.17 : Comment construire une « société apprenante » : les réponses de François Taddei

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