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Pisa : La discipline, problème numéro 1 de l’école française (le Café)

4 décembre 2019

Pisa : La discipline, problème numéro 1 de l’école française

Qu’est ce qui fait que dans certains pays les élèves pauvres s’en sortent mieux ? Pour l’OCDE cela tient aussi aux relations entre enseignants et élèves. Or celles ci , en France, sont particulièrement dégradées. Selon l’OCDE, l’indiscipline des élèves bat des records. Et les élèves se plaignent de leur coté d’avoir des enseignants qui ne les soutiennent pas. C’est toute la question du climat de classe qui est mise en évidence par Pisa 2018.

Champions de l’indiscipline

Pisa 2015 l’avait déjà souligné. "La France est l’un des trois pays où les élèves font état des plus grandes préoccupations liées aux problèmes de discipline en classe", dit l’OCDE. "Il n’y a qu’en Argentine et au Brésil où l’indice du climat de discipline est inférieur à la moyenne observée en France". Un élève sur deux déclare qu’il y a du bruit et du désordre dans la plupart ou dans tous les cours (un sur trois, en moyenne dans les pays de l’OCDE). Plus de deux élèves sur cinq déclarent en France que le temps d’apprentissage est réduit en raison du bruit, car les élèves mettent longtemps à commencer à travailler après le début du cours (seulement un sur quatre en moyenne dans les pays de l’OCDE). 18% déclarent que le professeur doit attendre à chaque leçon en France contre 8% dans l’Ocde. C’ets le taux le plus élevé de l’OCDE.

Un phénomène déjà ancien

A vrai dire ce n’est pas la première fois que Pisa établit un lien entre la discipline et la réussite scolaire. Le lien avait déjà été fait dans Pisa 2009. Pisa 2009 montrait que les pays étaient inégaux devant ce problème. En Corée du sud ou en Thaïlande, moins de 10% des élèves rapportaient qu’ils sont gênés par le bruit en classe pour travailler. Moins de 10% déclaraient que leur enseignant doit attendre pour continuer son cours au Japon ou à Shanghai. L’ordre en classe n’était déjà pas une spécialité asiatique. En Europe, au Danemark, au Portugal, au Royaume-Uni ou en Russie, le climat scolaire était déjà particulièrement calme. C’est le cas aussi aux Etats-Unis où seulement 10% des élèves déclaraient être gênés. La France par contre se situait en bas du tableau.

" Les classes et les écoles où il y a davantage de problèmes de discipline sont moins propices aux apprentissages", déclarait déjà l’OCDE, "parce que les enseignants doivent dépenser davantage de temps pour créer un environnement ordonné avant de commencer leur enseignement". Et l’OCDE ajoutait : " l’impact des inégalités sociales sur les performances scolaires peut être atténué par un climat disciplinaire positif à l’école".

Depuis une autre étude, celle de Hana Krskova et de Chris Baumann (Macquarie University) a mis en avant la discipline comme facteur d’amélioration des résultats scolaires. Pour eux le fait que le Japon, la Corée ou la Chine aient de bien meilleurs résultats dans Pisa que l’Australie s’explique par la discipline. Ils concluaient : "Des élèves plus disciplinés obtiennent de meilleurs résultats.. Il faut reconsidérer comment les classes et les écoles sont menées".

La question plus large du climat scolaire

Dans Pisa 2018, l’OCDE aborde la question du climat scolaire dans son ensemble. Et là il y a des points qui ne vont pas plaire aux enseignants.

Les élèves français sont globalement plus heureux et moins harcelés que la moyenne de l’OCDE. Plus de 8 sur 10 déclarent se faire des camarades à l’école.

Mais les relations avec les enseignants sont moins bonnes que dans les autres pays. La France est l’un des pays participant au PISA où les élèves déclarent percevoir le moins le soutien de la part de leurs enseignants ; les seuls pays participant à PISA où la proportion d’élèves ressentant des niveaux de soutien de la part de leurs enseignants plus faibles qu’’en France sont l’Allemagne, l’Autriche, la Croatie, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Pologne et la Slovénie.

En France, seuls 57 % des élèves déclarent que leurs enseignants semblent s’intéresser en général aux progrès de chaque élève (moyenne OCDE : 70 % des élèves). Plus d’un élève en France sur trois déclare dans PISA penser que son professeur n’apporte jamais ou seulement parfois de l’aide supplémentaire en cours lorsque les élèves en ont besoin (moyenne OCDE : un sur quatre). Une proportion presque identique déclare penser que leurs professeurs ne les aident que rarement dans leur apprentissage (moyenne OCDE un sur quatre).

Les élèves déclarent en moyenne moins souvent en France que dans la plupart des pays participant à PISA des retours individualisés sur leur travail de la part des professeurs. Ainsi, moins d’un élève sur quatre (un sur trois, en moyenne dans les pays de l’OCDE) considère que son professeur lui indique ses points forts. Dans la même veine, moins de deux élèves sur cinq en France, alors que près d’un élève sur deux en moyenne dans les pays de l’OCDE, déclarent qu’ils pensent que leur professeur leur indique souvent ou toujours comment améliorer leurs résultats.

Est-ce en lien ? Les élèves français ont moins confiance dans leurs moyens. Les élèves en France expriment un plus faible sentiment d’auto-efficacité et une plus grande peur de l’échec que la moyenne observée dans les pays de l’OCDE. Ils se sentent aussi beaucoup moins intégrés à leur école : 62% disent qu’ils se sentent pas appartenir à leur école (ocde 29%) : c’est le taux le plus élevé de l’Ocde.

Les jeunes français passent beaucoup plus de temps sur internet que leurs camarades et ça augmente. "En France, les élèves déclarent passer 28 heures par semaine sur Internet en dehors de l’école, soit 6 heures de plus que dans le PISA 2015 et 1 heure de plus que la moyenne OCDE (27 heures)", dit l’OCDE.

D’autres études ont déjà souligné ces phénomènes. Ainsi, récemment D Meuret, dans une synthèse réalisée pour la Fcpe montre qu’en plus de mauvaises relations enseignants - élèves il y a aussi peu de place pour les parents dans l’école française.

On sait que l’école française fait largement appel aux punitions. B Moignard a pu montrer par exemple le fort volume des exclusions. E Debarbieux a quantifié les punitions de toutes sortes.

Comment casser ces enchainements ? Cela tient probablement à une culture scolaire qui a séparé dans le second degré instruction et éducation, en les confiant à des corps différents. Parallèlement les établissements sont à peu près privés de personnels spécialisés qui pourraient aider les enseignants.

Enfin, l’enquête Talis (OCDE) l’a bien montré : les enseignants français se déclarent les moins formés pour la gestion de classe. Ils sont très demandeurs de formations pratiques répondant à leurs demandes. Mais ils n’ont pas voix au chapitre en ce domaine.

F Jarraud

Extrait de cafepedagogique.net du 03.12.19

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