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L’accompagnement à la scolarité dans le cadre des Programmes de Réussite Educative (Rencontre OZP, juillet 2006)

18 juillet 2006

-----LES RENCONTRES DE L’OZP-----

Observatoire des zones prioritaires
www.ozp.fr

n° 59 - juillet 2006

L’accompagnement à la scolarité
dans le cadre des Programmes de Réussite Educative

Compte rendu de la réunion publique du 14 juin 2006

On sait l’importance que l’accompagnement à la scolarité peut avoir dans la réussite scolaire des élèves de ZEP quand il est bien mené. La mise en œuvre des programmes de réussite éducative (PRE) en bouleverse l’organisation. Ces changements vont-ils revivifier et développer l’accompagnement à la scolarité ou, au contraire, vont-ils l’étouffer ?

Alain IZZET, administrateur du site www.reussite-educative.net a animé une rencontre de l’OZP avec des coordonnateurs de ZEP ou de réussite éducative ou de l’accompagnement scolaire.

Note : Un incident technique a rendu inaudible l’enregistrement sur bande magnétique de la réunion. Ce compte rendu a été rédigé à partir de brèves notes et de textes fournis par quelques intervenants. Nous prions les autres participants à cette rencontre de bien vouloir excuser la brièveté ou l’absence de leur intervention dans ce compte rendu.

 

En introduction, Alain Bourgarel refait l’historique de l’accompagnement scolaire : avant 1984 existaient les études du soir dans les écoles primaires assurées par les instituteurs et financées par les parents d’élèves. Dans le second degré existaient les « petits cours » assurés par des professeurs et payés par les familles.
En 1984, on crée les « activités éducatives péri-scolaires » (AEPS), proposées par des associations qui peuvent être subventionnées, en particulier par le Fonds d’action sociale pour les immigrés et leurs familles (FAS). Quatre ans plus tard, Dominique Glasman dresse un premier tableau, décevant, de ces activités : on y trouve beaucoup d’occupationnel, de l’école après l’école et généralement en beaucoup moins bien. L’aide aux devoirs semble être le seul objectif.
En 1992, l’adhésion à une « Charte de l’accompagnement scolaire » devient la condition pour recevoir des subventions. Les objectifs culturels et éducatifs y sont primordiaux. Quelques années plus tard, pour élargir vraiment les objectifs, on passe à « l’accompagnement à la scolarité » et, parmi les nombreux dispositifs qui voient le jour à la fin des années 90, on institue les CLAS, contrats locaux d’accompagnement à la scolarité, subventionnés entre autres par les caisses d’allocations familiales.

Intervention d’Alain Izzet

Le site spécialisé sur la Réussite Educative est une initiative lancée par des acteurs de Seine-Saint-Denis (Alain Izzet, coordonnateur du REP, une assistante sociale, une psychologue scolaire et une coordonnatrice de REP) pour documenter les acteurs de terrain et surtout provoquer des échanges entre tous ceux qui travaillent dans ces domaines avec des positions et des statuts très variés.
Objectif : essayer de bien faire fonctionner ce qui se met en place. Échanger sur les interprétations des textes officiels, sur les pratiques des uns et des autres et enfin sur les perspectives d’évolution, au rythme des publications législatives et réglementaires. Tels sont les principaux points qui font l’originalité du site « reussite-educative.net ».

En ce qui concerne l’accompagnement à la scolarité, nous sommes de toute évidence à un tournant.
La seconde Charte de l’accompagnement à la scolarité, signée en 2001, la définissait ainsi : « On désigne par « accompagnement à la scolarité » l’ensemble des actions visant à offrir, aux côtés de l’École, l’appui et les ressources dont les enfants ont besoin pour réussir à l’École, appui qu’ils ne trouvent pas toujours dans leur environnement familial et social.
Ces actions, qui ont lieu en dehors des temps de l’École, sont centrées sur l’aide aux devoirs et les apports culturels nécessaires à la réussite scolaire. [...] L’accompagnement à la scolarité reconnaît le rôle central de l’École. [...] Les actions d’accompagnement à la scolarité reconnues par la Charte et soutenues par les pouvoirs publics sont avant tout destinées à ceux qui ne bénéficient pas des conditions optimales de réussite scolaire. »

Force est de constater que l’accompagnement à la scolarité signifie toujours, bien souvent, une simple aide aux devoirs...

Alain Izzet remarque les fluctuations rapides des positions officielles : ainsi, dans la récente relance des ZEP, il avait été annoncé initialement (en décembre 2005) que, dans les 250 Réseaux Ambition Réussite (RAR), tous les élèves de ZEP-EP1, depuis le CE2 et jusqu’à la 5ème, devraient bénéficier d’études accompagnées. Finalement, l’accompagnement scolaire leur est seulement proposé (voir éventuellement à ce propos l’article publié sur le site.

Il commente le récent rapport des Inspections générales de l’Education Nationale : L’accompagnement à la scolarité, pour une politique coordonnée et équitable. ( Rapport -n°2006-010 MAI 2006, disponible sur le site de la Documentation française).

Les traditionnelles études du soir sont régulièrement oubliées dans les débats sur l’accompagnement (voir par exemple l’Avis n° 15 du HCéé : Le travail des élèves pour l’école, en dehors de l’école).
D’après la circulaire de 1913 et celles qui ont suivi, les études avaient d’abord une fonction culturelle : il s’agissait de mettre les élèves en contact avec des ressources culturelles et éducatives qu’ils ne trouvaient pas chez eux. Même lorsqu’elles étaient assurées par des enseignants, ces études ne devaient aucunement prolonger la journée de classe mais au contraire devaient être l’occasion pour les enfants de bénéficier d’un réel enrichissement culturel et éducatif.
Le rapport des Inspections générales aborde donc cette question des contenus en préconisant une « reprise en main », appuyée sur les TICE, de l’accompagnement scolaire par l’École.

Parallèlement, une autre évolution est en cours, plus structurelle et financière : jusqu’à présent, les CLAS étaient financés en tant que dispositifs ouverts (presque) à tous tandis que la globalisation du diagnostic local de l’offre éducative, dans le cadre de l’élaboration des CUCS (à partir de janvier 2007) au sein d’un champ « réussite éducative », peut laisser entrevoir que l’accompagnement scolaire serait dorénavant limité aux enfants pris en charge par le PRE.

Débat

Une question traverse les premiers débats : Comment va s’opérer l’intégration des CLAS dans les PRE ? Les PRE sont institués dans un contexte idéologique se référant constamment à l’individualisation, opposée au traitement collectif et territorial. Comment concilier les financements assez généreux des programmes de Réussite Educative (PRE), qui ne visent qu’un public très restreint d’élèves en grande difficulté mais donnent droit à un suivi et soutien plus important, avec les activités des CLAS, ouvertes à tous et soutenues jusqu’ici par les municipalités ? Faut-il mettre à part les élèves bénéficiant des PRE ?

Alain Izzet conteste la constitution de groupes d’enfants en difficulté opérée par les PRE. Dans l’accompagnement, il est plus facile d’utiliser l’hétérogénéité comme un atout. Aucun des intervenants ne met à part les élèves bénéficiant du PRE. Le ciblage des élèves en difficulté dans le cadre des PRE doit consister à donner une priorité à ces enfants dans le bénéfice d’actions de soutien, qu’elles soient ouvertes à tous ou non...

Pour presque tous les participants, l’opposition, souvent évoquée à ce propos entre individualisation (qu’il ne faut pas confondre avec individualisme, souligne un participant) et activités collectives serait un faux problème : le suivi individuel n’implique pas un travail individuel. Combiner les financements est plus délicat, mais on trouve des solutions diverses.
A Aubervilliers par exemple, dans le cadre d’un projet local fédérant sur des objectifs et un travail communs Auber-vacances (association municipale), l’AFEV et une multitude d’associations locales, le PRE retient des places dans les activités des associations subventionnées et y envoie des enfants bénéficiant du PRE, sans que rien ne permette de les étiqueter. Ils bénéficient par ailleurs d’un suivi personnalisé, justifiant le financement par le PRE.

Il apparaît cependant que, si on souhaite éviter de trop séparer les publics, la dualité des financements structure souvent l’organisation des groupes de travail ou comités de gestion chargés des différents dispositifs : le PRE se traduit alors parfois par la création de dispositifs spéciaux pour les élèves en grande difficulté scolaire comme les ateliers dirigés à Gennevilliers. Est-ce une situation transitoire ? Si elle devait se perpétuer, le contenu des actions en serait influencé.

Bernard Bier (INJEP) récuse lui aussi l’opposition individuel/collectif. L’important est de voir comment entre le scolaire et le périscolaire on est capable de moduler des espaces/temps éducatifs à géométrie variable, adaptés à des suivis personnalisés. Le danger lui semble plutôt de voir les approches sécuritaires-comportementalistes prendre le dessus sur les approches éducatives.
Eviter cette dérive implique des démarches concertées, où chaque professionnel ou bénévole intervient dans son champ de compétences, avec ses compétences inscrites dans le droit commun éducatif, en restant dans le droit commun éducatif et en prenant soin de ne pas enfermer les enfants et jeunes dans des groupes de niveau homogènes ou identifiés comme ayant tel ou tel type de difficultés.

Marc Douaire (SGEN) : Lors de la création des dispositifs ERE en 2003, nous avons été frappés par l’absence de toute coopération entre le ministère de la Cohésion sociale et l’Education Nationale et même par l’hostilité de cette dernière. On pouvait donc craindre le pire. Les témoignages entendus ici sont plutôt rassurants : les acteurs de terrain réintroduisent du collectif et du social dans une démarche individualisée.
La tendance est forte à l’intérieur de l’Education Nationale, tant dans la culture enseignante traditionnelle que dans les choix politiques récents, « d’externaliser » l’éducatif, de le sous-traiter à des instances qui le réduiront parfois au « sécuritaire ». On peut même voir dans la mise en place des PRE une tendance à externaliser aussi le traitement de la difficulté scolaire et de tout ce qui résiste à la pédagogie la plus traditionnelle.

Ces interventions introduisent le débat principal qui se noue autour de la place de l’Accompagnement à la Scolarité (AS) face à l’école. Quelles relations entre les équipes de l’AS et les enseignants ? L’AS est le prolongement de l’école ; est-il indépendant ou prend-il le contre-pied de l’école ?
La culture dominante, celle des élus et des parents, y voit un simple prolongement du travail de classe, une aide aux devoirs. Que l’on fasse « l’école après l’école » ne les choque pas. L’image d’un coup de pouce remettant à flot les enfants trop lents ou qui ont du mal à travailler seuls correspond parfaitement à la demande.
Dans cette perspective, pour qu’une ou deux séances de deux heures par semaine puisse déboucher sur un travail utile, il est nécessaire d’établir une coordination étroite avec les enseignants qui ont ces élèves en charge et de s’assurer de la qualification des intervenants, qui devraient être autant que possible des enseignants.

Pour Karim Mendil, coordinateur de l’accompagnement à la scolarité du PRE à Gennevilliers, c’est par une « pédagogie du détour » que l’on évite « la classe après la classe », mais les apprentissages scolaires restent l’objectif.

Plusieurs intervenants remarquent que la légitimité de l’AS est faible par rapport à l’Education nationale. Il arrive qu’elle ne soit pas reconnue du tout. Ainsi des écoles refuseraient de communiquer des renseignements sur le niveau des élèves ou les résultats des évaluations nationales. D’autres décrivent les démarches entreprises, les réunions mises en place pour faire en sorte que les enseignants s’intéressent à l’AS et au travail qui s’y fait.
A Gennevilliers, précise Karim Médil, l’AS sera présentée dans les réunions de pré-rentrée. Pour plusieurs coordonnateurs, après un travail préparatoire avec les directeurs et l’IEN, ou en collège avec les professeurs principaux de 6ème, il a été possible de travailler dans un esprit différent et les enseignants ont pu exprimer des demandes précises aux intervenants, complémentaires du travail en classe.

Des différentes interventions, il semblerait que se dégage le souhait que soit mis en place un projet global, individualisé et articulant le travail de l’enseignant dans la classe avec l’AS. Mais, tant que l’AS se limitera à faire de la classe après la classe, les deux temps et leurs intervenants respectifs se percevront comme concurrents, ce qui ne favorise pas la collaboration et le travail en complémentarité.
Alain Izzet fait observer que, si l’AS apporte cette dimension culturelle et éducative à l’enfant, l’élève s’en portera mieux... et la collaboration entre enseignants de la classe et intervenants de l’AS s’en trouvera clarifiée.

Pour Marie-Odile Maire Sandoz (Centre Alain Savary), il serait dangereux que l’Ecole gère l’AS, qu’il y ait ressemblance entre le travail en classe et l’AS. C’est en travaillant différemment que l’enfant peut sortir de l’échec.

Bernard Bier s’inquiète d’entendre des propos tels que : « on aura bientôt à aller chercher d’autres intervenants que les enseignants » ou encore : « l’enseignant au centre ». L’éducation ne peut être une compétence relevant d’un seul corps de métier, et la démarche éducative n’a de sens que si l’on met l’enfant au centre du projet éducatif, en mobilisant différents acteurs, professionnels ou non, autour de lui, à commencer par les parents.
Si les enseignants ont des compétences didactiques, il existe aussi d’autres compétences tout aussi utiles mais différentes chez les animateurs. Il s’agit de professionnalités différentes et l’enseignant n’est pas le mieux placé pour juger de la manière d’entrer dans des apprentissages dans le champ de l’animation ou de la manière de faire de l’accompagnement scolaire - qui n’est pas la classe après la classe : les techniques sont autres.
Un des atouts de l’accompagnement scolaire est que l’intervenant est moins prisonnier que le monde scolaire d’un niveau qui est censé devoir être atteint à tel âge, dans telle classe et qui met de facto l’élève en situation d’écart avec la norme, donc d’échec, voire d’humiliation. L’AS peut prendre l’enfant là où il est, en s’appuyant sur les ressources et les compétences acquises, sans les contraintes du programme - sachant bien sûr que l’essentiel est de remettre l’enfant dans une logique de réussite éducative (qui passe aussi mais non exclusivement par la réussite scolaire), de restaurer une image positive de soi, conditions de l’entrée dans les apprentissages.

Le sentiment unanime est de récuser l’idée que l’AS puisse être « l’école après l’école ».

Alain Izzet : Il faut commencer par comprendre ce qui est le plus nécessaire à l’enfant. Les maîtres G et les RASED sont souvent ceux qui à l’intérieur de l’école ont ce point de vue différent sur les besoins de l’élève. Par exemple, à Epinay, ils ont demandé à l’ERE d’inscrire des élèves à la ludothèque. Cette demande peut sembler peu sérieuse : « Voilà des enfants en échec scolaire et vous voulez les faire jouer ? ». Et pourtant ce détour est nécessaire. La fonction de l’AS peut être de leur apprendre à devenir des élèves.
Le rôle de l’AS, ses rapport avec le PRE et l’école, varient lorsqu’il s’agit d’élèves en grande difficulté.

Marc Douaire : Les maîtres G ou les RASED construisent quelque chose avec des enfants et leur famille parfois depuis la maternelle mais tout s’arrête au collège alors que les problèmes éducatifs deviennent plus aigus ; et voilà maintenant que l’on propose à partir du collège dans le même temps de monter autre chose sans tenir compte de ce qui s’est fait...

L’évaluation

Marc Douaire : La coopération avec les ERE fait-elle bouger les pratiques d’évaluation internes à l’école et le regard porté sur la difficulté scolaire ?

Qui peut évaluer ? Marie-Odile Maire Sandoz (CAS) et d’autres pensent qu’il ne faut pas que ce soit l’EN qui évalue.
A Gennevilliers, une chargée de mission « ressources et évaluation » est recrutée pour construire un référentiel avec l’aide méthodologique d’un cabinet de consultants. Un autre cas de recours à un cabinet est signalé à Amiens.

Bernard Bier : Quels indicateurs va-t-on utiliser pour évaluer l’efficacité de l’AS ? Ne risque-t-on pas de se contenter d’indicateurs quantitatifs et superficiels (liés au comportement), au détriment d’indices témoignant d’une entrée dans les apprentissages - ce qui est plus difficile à juger, de surcroît dans le court terme. Là encore il y a une vraie réflexion concertée à faire sur le projet préalablement à la construction d’indicateurs.

Alain Izzet fait observer que si un réel projet individualisé est élaboré entre enseignants et intervenants AS dans la complémentarité (et non le chevauchement), les actions prévues ont alors chacune un ou des objectif(s) qui sont porteurs de leur propre évaluation.
Qu’il s’agisse de faire pratiquer à l’enfant des activités de calcul mental (jeux de société par exemple) ou de leur apprendre à respecter les règles et les consignes, l’évaluation est possible et relativement aisée à mettre en œuvre. De même, s’il s’agit de familiariser davantage l’enfant avec le livre et la lecture au travers de séances d’animation en littérature ou d’activités de lecture-réalisation (modes d’emploi, recettes de cuisine, etc.), le rapport de l’enfant au livre et à la lecture sera facile à évaluer.

Marie-Odile Maire Sandoz pose la question de la coordination existant entre les ERE et les PPRE.
Alain Bourgarel : Tous ces contrats seront rassemblés dans les contrats urbains de cohésion sociale (CUCS). Après avoir dénoncé l’empilement des dispositifs, « le mille-feuilles », on peut en attendre plus de rationalité. Mais certains craignent que cette rationalisation ne soit aussi l’occasion de faire des économies. Ces économies viendront-elles d’un transfert des anciennes activités municipales vers les PRE ?

Alain Izzet remarque qu’il n’est pas sûr que les municipalités soient entièrement maîtresses du jeu. Les PRE sont pilotés par une structure où siègent au moins cinq fonctionnaires ou représentants de l’État (deux du préfet, trois de l’Éducation nationale), face à un seul représentant de la ville, le maire. S’il est vrai que les uns et les autres placent la collaboration et l’entente au premier rang de leurs priorités, il semble évident qu’un tel ratio de représentants doit permettre à l’État d’infléchir certaines politiques locales parfois déviantes des objectifs nationaux.
D’autres pensent que dans le cadre des échanges de services avec les préfectures, les villes seront maîtresses du jeu.

Compte rendu rédigé par François-Régis Guillaume

Ci-dessous une version PDF à la mise en page plus élaborée.

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