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Première synthèse sur les positions politiques concernant la carte scolaire : Nicolas Sakozy, Ségolène Royal, Gilles de Robien...

septembre 2006

Extrait du «  Monde » du 06.09.06 : Haro sur la "carte scolaire", mais sans alternative

Assouplement de la carte scolaire pour Ségolène Royal, suppression pure et simple pour Nicolas Sarkozy : la candidate à l’investiture du PS pour l’élection présidentielle de 2007 et le président de l’UMP veulent en finir avec les règles qui régissent la sectorisation, c’est-à-dire le rattachement d’un élève à un établissement scolaire en fonction de son lieu d’habitation. La première a détaillé, dimanche 3 septembre, ses propositions à Florac, en Lozère (Le Monde du 5 septembre). Le second les avait présentées à l’occasion de la convention pour la France d’après, en février.

« L’idéal » serait de "supprimer la carte scolaire" ou à tout le moins de "desserrer ses contraintes" afin de "mettre en place une forme de choix entre deux ou trois établissements, à condition que les établissements les plus délaissés soient renforcés avec des activités scolaires de haut niveau", considère Ségolène Royal. Nicolas Sarkozy plaide, quant à lui, pour "le libre choix des établissements par les parents". Pour le futur candidat à l’élection présidentielle, cette possibilité "crée de l’émulation entre les établissements".

Lundi 4 septembre, jour de la rentrée des classes, le ministre de l’éducation nationale, Gilles de Robien, est allé dans le même sens, estimant, à l’occasion d’une visite au lycée Hoche de Versailles, que la carte scolaire avait "un petit côté privatif de liberté qu’il faut, le cas échéant, assouplir".

Cette année, une petite brèche a été ouverte. Les élèves issus des 249 collèges classés "Ambition réussite" et obtenant une mention très bien au brevet en troisième pourront accéder au lycée de leur choix.

Instituée en 1963, lors de la création des collèges d’enseignement secondaire (CES), la sectorisation permet de répartir le nombre d’élèves dans les établissements en fonction de leur capacité d’accueil. Elle a aussi comme objectif de promouvoir la mixité sociale. De ce point de vue, l’objectif n’est pas atteint. Nombre de parents, souvent issus de classes aisées ou moyennes, déploient des stratégies d’"évitement" pour ne pas mettre leurs enfants dans leur collège de secteur, qu’ils jugent mal fréquenté, trop violent, ou d’un faible niveau (Le Monde du 3 septembre 2005).

Pour ce faire, les parents demandent des dérogations à l’inspection d’académie invoquant des motifs scolaires (choix d’une langue vivante ou d’une option spécifique, classes à horaires aménagées), familiaux (rapprochement de frères et soeurs, proximité du domicile) ou médicaux. Ils peuvent également inscrire leur enfant dans le privé. Selon une étude publiée en août 2001, trois ans après leur entrée dans le secondaire, 10 % des enfants fréquentaient un établissement public en dehors de leur secteur et 20 % étaient inscrits dans le privé.

Les enseignants sont deux fois plus nombreux que la moyenne à inscrire leur enfant dans un établissement public hors de leur secteur géographique. En revanche, la scolarisation dans un collège privé est plus fréquente chez les enfants de chefs d’entreprise, d’agriculteurs et de cadres.

Les membres de la commission du débat national sur l’avenir de l’école, qui avait servi de base de travail à l’élaboration de la loi Fillon du 23 avril 2005, s’étaient intéressés à la question de la mixité sociale. Leur rapport préconisait, dans les cas d’établissements très problématiques, d’élargir le choix des parents à un vaste secteur géographique. La commission estimait que la mise en oeuvre d’une telle mesure se traduirait vraisemblablement par la fermeture de l’établissement très dégradé.

Pour le reste, le rapport recommandait de concentrer beaucoup plus de moyens sur les établissements en difficulté et de leur conférer une plus grande autonomie, plutôt que d’abroger la carte scolaire.
Pour les différents syndicats de l’éducation nationale, la suppression de la sectorisation apparaît "irréaliste", voire "dangereuse". "Faire ce que préconise Nicolas Sarkozy revient à détruire l’éducation nationale et à mettre en place un système concurrentiel à l’instar de ce que font les Anglais", estime Philippe Guittet, président du SNPDEN, le syndicat majoritaire chez les chefs d’établissement. Selon lui, "il faut supprimer les établissements ghettos, redécouper autrement les secteurs pour renforcer la mixité sociale". L’opposition est la même pour le principal syndicat des enseignants du second degré, le SNES.

Bernard Kuntz, président du Snalc, un syndicat d’enseignant classé à droite, n’est pas plus favorable à une telle suppression. "Je n’ai toujours pas compris comment Nicolas Sarkozy allait pouvoir mettre en oeuvre une telle réforme et réussir à éviter que tous les parents en centre-ville se ruent sur les mêmes établissements, explique-t-il. C’est la porte ouverte à des situations ubuesques. Dans l’état actuel du système éducatif, il me semble que c’est une réforme impossible à mener." Selon lui, les propositions du président de l’UMP nécessiteraient "une réforme en profondeur du système éducatif, en développant par exemple des filières d’excellence dans les classes de banlieue pour réduire l’évitement scolaire".

La Fédération des conseils de parents d’élèves (FCPE), marquée à gauche, est farouchement opposée à la mesure. Son président, Faride Hamana, estime qu’il "est dangereux de bâtir des propositions à partir de la frange des parents qui trichent". "Il faut arrêter de faire croire que la suppression de la carte scolaire est une demande partagée par tous les parents, estime-t-il. Cela correspond à une vision très parisienne des choses." Anne Kerkhove, son homologue de la PEEP, plus proche de la droite, n’est pas contre un assouplissement de la carte scolaire, mais avec prudence : "Avoir plusieurs choix ? Pourquoi pas, mais il faudra ensuite trouver les moyens de gérer les voeux des parents."

Martine Laronche et Catherine Rollot

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Extrait du « Monde » du 06.09.06 : M. Darcos : "Il faut la remplacer par des solutions adaptées aux besoins locaux"

Nicolas Sarkozy, lors de la convention UMP sur l’éducation qui s’est tenue le 22 février, s’est prononcé pour la suppression de la carte scolaire. En tant que secrétaire général de l’UMP et ancien ministre délégué à l’enseignement scolaire, ne pensez-vous pas que cette réforme va encore accentuer le consumérisme scolaire ?

Nous savons tous que le système de la carte scolaire ne fonctionne plus. Conçue comme un outil de mixité sociale lors de sa création, elle produit aujourd’hui les conditions de la ségrégation sociale.

Il n’y a de sectorisation que pour ceux qui ne savent pas comment on peut la contourner. Les stratégies d’évitement se raffinent d’année en année. L’achat immobilier, le choix des options, ou l’inscription dans un établissement privé par exemple sont des moyens qui ne peuvent être déployés que par les familles aisées ou diplômées.
Supprimer la carte scolaire implique une réflexion sur la façon de mieux réguler la cohorte des flux scolaires. Parmi les pistes envisageables, on peut imaginer dans les grands lycées parisiens un système de quotas par exemple, qui imposerait à ces grands établissements de prendre une part d’élèves en difficulté ou issus de milieux défavorisés, un peu à l’exemple de ce que l’Institut d’études politiques de Paris (IEP) a mis en place avec ses conventions éducation prioritaire.

Une autre piste pourrait consister à essayer de faire venir dans certains établissements les enseignants les plus chevronnés afin de rendre ceux-ci plus attractifs. On peut aussi réfléchir à ce que cette redistribution des flux scolaires se fasse sous l’autorité accrue des autorités locales.

Il faut remplacer la carte scolaire par une multitude de solutions adaptées aux besoins locaux. Car le problème de l’évitement ne se pose pas de la même façon dans une petite ville ou à Paris. A Périgueux, ville où je suis maire, la carte scolaire n’est pas un problème. Je pourrais même m’en passer car les demandes s’autorégulent. Ce n’est pas le cas dans les grandes villes.

Aujourd’hui, la carte scolaire n’offre pas de seconde chance aux parents, soit ils doivent la contourner, soit si ça ne marche pas ils partent vers des établissements privés. Il faut casser de façon radicale cette illusion de règle générale.

Propos recueillis par Catherine Rollot

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