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Le rapport 2023 de l’Observatoire des inégalités : - Le concept de "pauvreté scolaire" - A niveau social égal, les enfants d’immigrés réussissent mieux au bac (dossier)

9 juin 2023

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La publication du Rapport sur les inégalités en France constitue un moment fort pour l’Observatoire des inégalités, dont le travail a commencé il y a tout juste 20 ans. Tous les deux ans, ce document a vocation à mettre sur la table du débat les données les plus récentes sur les inégalités, des revenus à l’école, en passant par le travail ou encore les modes de vie. Nous rassemblons dans ce rapport plus de 100 tableaux ou graphiques expliqués pour comprendre la société française, sans chercher à noircir le tableau, ni à l’enjoliver.

Le contexte de 2023 est paradoxal. D’un côté, l’amélioration de l’emploi, amorcée dès 2015, porte ses fruits. Le taux de chômage a nettement diminué. Certes, ce résultat est en partie lié à un bond de l’apprentissage et à la création d’emplois de mauvaise qualité. Pour partie seulement : l’amélioration générale est réelle. La question de fond est de savoir si elle va durer ou si, comme toujours depuis 1980, cette phase positive sera suivie d’un retournement qui nous fera revenir en arrière. De l’autre, la hausse des prix frappe de plein fouet les ménages modestes, en particulier ceux qui vivent dans des logements énergivores et ceux dont les déplacements imposent l’utilisation d’une voiture. Le retour de l’inflation réactive la bataille des revenus. Le risque de déclassement est majeur pour les salariés dont la fiche de paie ne suit pas l’envolée des prix.

Les revendications autour du pouvoir d’achat cachent de multiples sources de tensions. Comme le montre notre dossier spécial, les inégalités entre groupes sociaux demeurent béantes. L’école française favorise à outrance les enfants de diplômés, qui accaparent les places dans les bonnes filières. Au travail, les cadres commandent, les ouvriers et les employés exécutent dans des conditions de pénibilité parfois extrêmes. L’amélioration actuelle de l’emploi ne doit pas masquer la précarité persistante de millions de salariés qui vivent au jour le jour ou avec un horizon de vie très court. Ouvriers et employés, absents du Parlement, sont aussi largement invisibles dans les médias. Les catégories populaires ont le sentiment d’être écartées d’un progrès qui bénéficie à une « France d’en haut » qui jouit pleinement de la société de consommation et qui, par ses revenus et ses diplômes, maitrise le cours de sa vie.

Combien de temps tiendra-t-on ainsi ? L’accumulation des rancœurs est grande. La surdité du pouvoir aux demandes sociales, depuis des années, alimente la polarisation d’un débat qui semble se résumer à des invectives télévisées et sur les réseaux sociaux. Oubliées il y a 20 ans, les inégalités sont à la mode. Avec beaucoup d’hypocrisie du côté des plus favorisés qui refusent la remise en cause de leurs privilèges. Pour avancer, il faut partir de constats factuels, comme le fait ce Rapport sur les inégalités en France, puis se réunir autour d’une table pour élaborer des compromis sociaux entre des opinions divergentes. Encore faudrait-il que les classes dirigeantes françaises le souhaitent. Pour l’heure, elles préfèrent jouer avec le feu électoral.

Louis Maurin

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Extrait de inegalites.fr du 08.06.23

Voir aussi
L’essentiel sur les inégalités de revenus
Quelle est l’amplitude des écarts de revenus et de patrimoine en France ? Comment évoluent les inégalités monétaires et la pauvreté ? L’essentiel du chapitre « Revenus » du Rapport sur les inégalités en France, édition 2023, de l’Observatoire des inégalités.

Extrait de inegalites.fr du 08.06.23

 

Observatoire des inégalités : « La pauvreté scolaire »

Selon le dernier rapport de l’observatoire des inégalités « Rapport sur les inégalités en France », les disparités dans le niveau de diplôme de la population restent très marquées. 25 % des personnes de plus de 25 ans n’ont aucun diplôme ou possèdent seulement le brevet des collèges. Les diplômés de niveau bac + 3 ou plus représentent seulement 22 % de la population. Ces chiffres, qui mettent en lumière des inégalités persistantes dans l’accès à l’éducation et les opportunités qui en découlent, sont étroitement liés à l’origine sociale mais pas forcément à celle migratoire.

« L’école française ne réduit pas les inégalités entre les catégories sociales. Un enseignement très académique, qui laisse peu de place à la pratique, une compétition exacerbée et un apprentissage précoce de la lecture favorisent les enfants de diplômés dès les petites classes » écrit l’observatoire des inégalités. « Depuis trente ans, les gouvernements successifs n’ont rien entrepris de majeur pour moderniser l’école et la rendre plus juste » déplore-t-il.

Dans ce rapport, Anne Brunner et Louis Maurin, se sont essayés à la définition d’un concept de « pauvreté scolaire ». « Ce n’est pas quelque chose d’arrêté, de scientifiquement posé » explique le directeur de l’Observatoire des inégalités. « On fait le parralelèle avec la pauvreté économique. Dans un pays où le capital culturel joue un rôle prépondérant dans les trajectoires scolaires, on peut évoquer un ‘’diplôme médian’’ – niveau fin de troisième. Si ce niveau n’était pas atteint, on serait dans une « pauvreté scolaire »… ». L’exercice a peu de sens reconnait Louis Maurin, mais « il permet de dire le poids du capital culturel et du diplôme dans la réussite, l’impact de ces patrimoines sur les positions sociales ».

Des parcours scolaires sous le sceau de l’origine sociale, du primaire à …

Le rapport souligne que les inégalités commencent dès l’école primaire, où les résultats scolaires sont étroitement liés au niveau social des familles. Par exemple, seulement 42 % des élèves scolarisés dans les écoles les plus défavorisées ont une compréhension satisfaisante des mots à l’oral en CP, contre 75 % dans les autres écoles publiques. Des écarts similaires sont observés en mathématiques. Entre le CP et le CM2, environ 70 % des élèves en difficulté améliorent leurs résultats s’ils viennent d’un milieu très favorisé, tandis que cette proportion chute à 42 % pour les élèves issus d’un milieu social très défavorisé. Lorsqu’on examine les parcours scolaires en fin de troisième, on constate également des divergences significatives notent les auteurs. Les enfants d’ouvriers représentent un tiers des élèves en CAP ou en baccalauréat professionnel, mais seulement 19 % des classes du lycée général ou technologique. En revanche, les enfants de cadres sont sous-représentés en CAP (4,5 %) et en bac pro (8 %), mais largement présents dans les lycées généraux ou technologiques, avec une part de 30 %.

… l’accès au supérieur, quand il y a lieu

Dans l’enseignement supérieur, les inégalités se poursuivent. Bien que les enfants d’ouvriers soient de plus en plus représentés en BTS, avec une proportion de 23 % des étudiants, ils ne représentent que 10 % des étudiants universitaires et 7 % des étudiants en classes préparatoires aux grandes écoles. En revanche, les enfants de cadres sont trois fois plus nombreux à l’université. Le rapport, s’appuyant sur différentes recherches mais aussi des études du ministère, met en évidence l’augmentation des inégalités d’accès à l’enseignement supérieur. Dans la génération née entre 1991 et 1995, 73 % des enfants de cadres ont accédé à l’enseignement supérieur, soit six points de plus que la génération précédente. En revanche, chez les enfants d’ouvriers et d’employés, seulement 41 % ont eu cette opportunité, avec une augmentation d’à peine un point par rapport à la génération précédente. L’enseignement supérieur s’est donc ouvert à un plus grand nombre d’élèves, mais cette évolution a principalement bénéficié aux enfants de cadres, accentuant ainsi les inégalités. Autre constat : la proportion de diplômés de niveau bac + 5 en fonction de l’origine sociale. En 2018-2020, 40 % des enfants de cadres et de professions intermédiaires âgés de 25 à 29 ans ont obtenu un master, un doctorat ou un diplôme d’une grande école, contre seulement 13 % des enfants d’employés et d’ouvriers. En dix ans, la proportion de jeunes diplômés de bac + 5 a doublé dans les deux catégories, mais les écarts entre milieux sociaux se sont creusés.

L’origine migratoire, un atout jusqu’au baccalauréat

« À milieu social équivalent, les enfants d’immigrés réussissent mieux au baccalauréat que les enfants dont les parents sont nés en France » relève le rapport. Les garçons de parents subsahariens ont 1,1 fois chance de plus qu’un garçon dont les parents sont nés en France d’avoir le baccalauréat, 1,4 fois pour ceux d’origine maghrébine, 5 fois pour ceux d’origine asiatique. « Les filles dont les parents sont nés en Afrique subsaharienne ont presque quatre fois plus de chances d’obtenir le baccalauréat que les garçons dont les parents sont nés en France ». Pour les rapporteurs, ce phénomène s’explique en partie par le projet migratoire et d’ascension des parents migrants. Mais aussi par l’expérience de l’échec scolaire pour certaines familles d’origine française qui ne « se font guère d’illusions sur les parcours de réussite de leurs enfants ». Pour autant, cette réussite ne se transforme pas dans les études supérieures. « En pratique, les enfants d’immigrés obtiennent des diplômes de niveau inférieur, alors même que leurs attentes, et celles de leurs parents sont grandes… Ce choc entre les idéaux de réussite et la réalité, qui conduit à des orientations et des métiers non choisis et qui nourrit des désillusions, constitue pour une partie de ces adolescents, une violence de grande ampleur ».

Bien que l’accès à l’enseignement secondaire se soit généralisé et que l’enseignement supérieur se soit ouvert à un plus grand nombre d’élèves, le système éducatif conserve son caractère élitiste conclut le rapport. Les inégalités se sont simplement déplacées vers le haut, sans montrer de signes de réduction significative.

Lilia Ben Hamouda

Extrait de cafepedagogique.net du 09.006.23

 

L’école, “un élément structurel majeur des inégalités en France“ (Observatoire des inégalités, rapport 2023)

“À niveau social équivalent, les enfants d’immigrés réussissent mieux au baccalauréat que les enfants dont les parents sont nés en France“, indique l’Observatoire des inégalités dans son rapport annuel 2023. Les résultats scolaires sont donc “davantage liés au niveau social d’origine, et pas à autre chose“, explique Louis Maurin dans sa présentation à la presse des principaux éléments de ce 9ème opus, publié ce 8 juin.

Niveau social

Un résultat qui tient, documente d’ailleurs le rapport, “pour partie du fait même de la migration de leurs parents, un processus qui porte en lui-même un projet d’ascension sociale“, dès lors que “pour migrer, les parents ont consenti des sacrifices importants et attendent de leurs enfants qu’ils réussissent.“

Seulement en pratique, “les enfants d’immigrés obtiennent des diplômes de niveau inférieur, alors même que leurs attentes, et celles de leurs parents, sont grandes“ poursuit le document. Le directeur de l’observatoire précise que les données restent théoriques, mais qu’au niveau des chiffres bruts (sans les pondérer) la réussite apparaît comme moins bonne. Sauf qu’elle ne tient pas à l’origine migratoire, mais plutôt du fait de la discrimination, qui elle-même est prouvée, analyse Anne Brunner qui a dirigé les études évoquées.

L’école, considère Louis Maurin, “est un élément structurel majeur des inégalités en France“, avec dès la fin du primaire, de fortes inégalités : en sixième, 98 % des enfants des milieux les plus favorisés maitrisent bien ou très bien les compétences demandées en français, contre 76 % des enfants de milieux défavorisés.

Mais les observateurs restent nuancés. Si l’école française est plus inégalitaire que dans d’autres pays, si elle ne fait pas assez pour réduire les inégalités, cependant elle ne les augmente pas, précisent-ils. Et si il n’y avait pas le service public (une année coûtant entre 6 et 10 000 euros) il y aurait une explosion des inégalités.

On constate par exemple qu’en BTS il y “autant d’enfants d’ouvriers que dans la population totale“. Seulement, “les filières qui mènent aux positions sociales les plus favorisées demeurent ultra-élitistes“, avec 13 % des enfants d’ouvriers qui arrivent au niveau bac + 5, contre 40 % pour ceux de cadre supérieurs.

Elitisme social

Et selon le rapport 2023, “depuis trente ans, les gouvernements successifs n’ont rien entrepris de majeur pour moderniser l’école et la rendre plus juste.“ Car “ce qu’on mesure mal, ajoute Louis Maurin, c’est que le problème ne situe pas dans des dispositifs spécifiques (mis en œuvre pour faire diminuer les inégalités), mais dans la manière et le fonctionnement dans lequel est construit le système“. Celui-ci est extrêmement compétitif, avec derrière l’idée d’élitisme scolaire celui d’un élitisme social.

Est également proposé par l’observatoire des inégalités un “taux de pauvreté scolaire“. Un exercice inédit qui vise à “rappeler“ les niveaux de diplôme dans la société française, car comme le dit Louis Maurin, “tout le monde n’a pas bac+5, on en est extrêmement loin“. Le niveau de diplôme médian se situerait environ au niveau du CAP ou du BEP en 2021, qui seraient “le diplôme maximum pour 49 % des Français“.

Si la part de décrocheurs a fortement diminué, et si le niveau de diplôme progresse, le but est d’amener le sujet dans le débat public, “de se poser la question de savoir quel est le niveau de diplôme ou de non diplôme excluant“.

Dans la pratique, il se situerait à la sortie du collège, et ce qui étonne Louis Maurin, c’est la croyance en cette valeur “diplôme“, que les entreprises et le secteur privé “valident autant“ par rapport à d’autres formes de compétences.

Extrait de touteduc.fr du 08.06.23

 

Voir les MC :
Etude. Observatoire des inégalités (gr 2)/
Concepts et labels : Educ. prior, Discrimin. positive, Egalité des chances...

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