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Temps de l’enfant : des citoyens bien mal informés (tribune de l’OZP au Café)

3 juillet

Temps de l’enfant : des citoyens bien mal informés

« Il y aurait beaucoup à dire sur la façon dont sont explicitées les inégalités sociales. Pour le moins on peut dire que la représentation des choses proposée est bien éloignée de tout ce que l’on sait depuis Bourdieu (soit les années 1960) sur les effets des inégalités sociales sur les pratiques sociales et sur l’éducation ». L’OZP exprime une crainte : « que le seul objectif de cette convention soit de réduire encore en France le temps consacré aux apprentissages scolaires alors même que pour les enfants des milieux populaires il faudrait le conforter ». Il réagit à la convention citoyenne sur le temps de l’enfant et signe cette tribune.

Le premier ministre a décidé de mettre en place une convention citoyenne sur les temps de l’enfant alors même que c’est un gouvernement qu’il soutenait en 2017 qui a donné le coup de grâce à la réforme des rythmes scolaires et des projets éducatifs de territoire mise en place par Vincent Peillon.

L’OZP a toujours considéré que cette réforme, quelles que soient ses imperfections, allait dans le bon sens pour les élèves des milieux populaires. Son principe était d’ailleurs recommandé dès 2011 par un autre gouvernement. En outre le projet éducatif territorial avait beaucoup à voir avec le travail conduit dans les réseaux d’éducation prioritaire où les acteurs ont l’habitude de longue date de travailler en partenariat.

C’est pourquoi nous ne pouvons laisser dire ce qui figure dans le document fourni par la convention citoyenne aux citoyens qui la composent comme « socle documentaire ».

Dans la première partie de ce document la question des rythmes de l’enfant n’est référée qu’aux neurosciences et à la chronobiologie. C’est un contresens qui oublie deux composantes très importantes de la vie des enfants/élèves : celle des conditions sociales de vie et celle des pédagogies pratiquées. En effet on ne peut imaginer qu’il existerait une nature humaine indépendante des conditions effectives d’existence. Penser la question des rythmes comme toute autre question éducative sans penser en même temps les conditions réelles d’existence des enfants et de leurs parents est parfaitement illusoire. D’autre part, les travaux conduits dans l’éducation prioritaire nous ont appris qu’en ce qui concerne les capacités d’attention des élèves, la question de la qualité de l’enseignement est centrale. Elle dépasse de loin la seule question biologique dans l’explication de la capacité des enfants à s’engager dans des tâches scolaires à n’importe quelle heure. Si les tâches sont intéressantes et que l’enseignement est suffisamment explicite pour que les enfants comprennent bien ce qu’elles leur permettront d’apprendre, on est surpris de leur capacité d’attention et de concentration.

Mais le plus inquiétant est que le socle documentaire fourni aux citoyens est tout à fait orienté politiquement et ne présente absolument pas les garanties de neutralité qui sont pourtant affichées. Nous invitons nos lecteurs à regarder les pages 53 à 60 consacrées aux inégalités sociales et à la manière dont l’État contribue à lutter contre ces inégalités.

Tout d’abord il y aurait beaucoup à dire sur la façon dont sont explicitées les inégalités sociales. Pour le moins on peut dire que la représentation des choses proposée est bien éloignée de tout ce que l’on sait depuis Bourdieu (soit les années 1960) sur les effets des inégalités sociales sur les pratiques sociales et sur l’éducation. D’autres que nous mieux informés pourront approfondir ces questions.

Mais le plus surprenant est dans la manière de présenter ce que fait l’État pour lutter contre ces inégalités : une liste de mesures très partielles mises en place pour l’essentiel depuis 2017. En revanche toutes les mesures mises en place avant cette date et pourtant essentielles sont oubliées : L’existence d’un réseau d’assistantes sociales scolaires, les bourses nationales, les fonds sociaux (que l’on a dernièrement encore réduits), l’Education prioritaire, la politique de mixité sociale.

On ne peut que s’interroger sur le sens de ces « oublis » au moment où la ministre de l’éducation demande un rapport sur l’éducation prioritaire à l’inspection générale. On peut craindre que cette très mauvaise information des citoyens membres de cette convention les amène à envisager de bien mauvaises décisions faute de disposer des informations solides sur le fonctionnement du système et l’écoute des premières auditions n’est pas très encourageante à cet égard.

On peut craindre aussi que le seul objectif de cette convention soit de réduire encore en France le temps consacré aux apprentissages scolaires alors même que pour les enfants des milieux populaires il faudrait le conforter. Mais il nous apparaît que, de longue date, les gouvernements qui ont réduit le temps scolaire considéraient qu’ils répondaient ainsi aux demandes de revalorisation des enseignants en réduisant leur temps de travail. Plutôt que de proposer de meilleurs salaires, un recrutement plus exigeant et des formations de qualité, le risque existe une fois de plus de voir simplement réduit le temps scolaire. Nous devons collectivement être vigilants.

L’OZP demande donc à ce que les informations du socle documentaire soient rectifiées dans le sens de la bonne information des citoyens membres de la convention. L’absence de rectifications serait considérée comme un déni de démocratie.

L’OZP

Extrait de cafepedagogique.net du 03.07.25

 

Le socle documentaire (88 p.)

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