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Substitution du programme Clair à l’éducation prioritaire. L’éditorial de François Jarraud dans le Café pédagogique. "L’enterrement du social ?"

28 juin 2010

 

Editorial de François Jarraud

CLAIR : L’enterrement du social ?

Recadrée à la baisse en 2006, abandonné au libre jeu de la déréglementation de la carte scolaire, l’éducation prioritaire ne semble pas une priorité de l’action gouvernementale. Le dispositif CLAIR lancé par Luc Chatel, qui n’a pas été mis en débat, interroge. S’agit-il d’un soutien, d’un recadrage ou d’une mise à mal ?

Répondre aux critiques de la Cour des Comptes ? [...] Luc Chatel répondait ainsi aux vives critiques formulées par la Cour des comptes sur l’éducation prioritaire. La Cour estime que "la France est un des pays où les destins scolaires sont le plus fortement corrélés aux origines sociales". Elle recommande de "donner aux équipes des moyens dans le cadre de contrats d’objectifs pluriannuels" et de "systématiser les affectations sur profil des responsables et des enseignants". Elle dénonce l’éparpillement des moyens.

De fait où en est l’éducation prioritaire ? Un des grands moments de la présentation du rapport a sans doute été le commentaire de Jean Picq sur le coût de l’éducation prioritaire. Estimé à un milliard par le ministère, il précise que "ce chiffre n’est pas confirmé par la Cour". Compte tenu du profil des enseignants en zep, le coût pourrait aussi bien être inférieur de 10% à celui des autres établissements ! C’est dire que l’éducation prioritaire… ne l’est peut-être plus. [...] Aujourd’hui les RAR représentent 4% des collèges et 3% des écoles, les RRS 15% et 10%.

Une étude de la DEPP en 2009 montre que "trois quarts des élèves des collèges RAR sont issus des catégories sociales défavorisées et un tiers a un fort retard scolaire en début de sixième". [...] Aujourd’hui on estime que les classes RAR ont 2 élèves de moins que les autres. Un effort insuffisant si l’on en croit l’étude déjà ancienne de T Piketty. [...]

Plus récemment Anne Armand, IGEN, lors de la journée organisée à Paris par la DGESCO le 8 juin 2010 sur le bilan national des réseaux Ambition réussite, faisait le point sur les réussites et les échecs des RAR. Elle estimait qu’il y avait des améliorations sur la compréhension des difficultés des élèves ("réflexion sur la construction des apprentissages et non plus par le déterminisme social") mais ciblait aussi les échecs pédagogiques : implication différente des enseignants par exemple. La formation spécifique annoncée par le ministre saur-t-elle résoudre ces difficultés ?

Les postes à profil ont-ils raison de tout ? [...] A coup sûr le recrutement , même étalé, d’enseignants volontaires ne va pas être facile d’autant qu’on ignore tout des avantages qu’on peut leur faire miroiter.

Pourra-t-on à coup de "super profs" compenser la détérioration crée par la destruction de la carte scolaire ? [...]

Le ministère aura-t-il les moyens d’une éducation prioritaire ?
[...] Le ministre multiplie par 20 le coût de l’éducation prioritaire estimé par ses propres services et regardé avec un fort scepticisme par la Cour des Comptes. Comment alors faire confiance dans un réel effort financier ? La création des nouveaux réseaux CLAIR peut aussi bien permettre de diminuer fortement le nombre d’établissement prioritaires et de diminuer encore l’effort national.

Que deviennent les écoles ? Alors que la Cour des Comptes et de nombreux experts estiment qu’il faut mettre la priorité sur la maternelle et l’école, les réseaux CLAIR parlent des " collège et lycée pour l’ambition, l’innovation et la réussite". On ne sait pas trop dans cette perspective ce que deviennent les écoles mais on peut déjà dire qu’elles ne sont pas mises au cœur de l’effort.

Quelle conception de l’éducation prioritaire ? Mais la plus forte réserve tient à la genèse même de ce programme. Alors que l’éducation prioritaire était née d’une volonté de lutter contre les déterminismes sociaux, le programme CLAIR est le fruit des Etats généraux de la sécurité de l’Ecole. Il a été imaginé pour lutter contre l’absentéisme et la violence scolaire. D’où l’entrée des lycées dans le dispositif. D’où aussi des objectifs très différents des réseaux RAR et RRS. C’est bien là où il y a la rupture la plus profonde et la plus inquiétante avec le projet de l’Ecole républicaine. Luc Chatel voudra-t-il prendre en charge cette dimension ? La réponse à cette question concerne non seulement un jeune sur cinq mais aussi l’avenir social et économique de la France. "L’école ou la guerre civile" a écrit un bon auteur…

Extrait de cafepédagogique.net du 28.06.10 : Chatel réoriente l’éducation prioritaire

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