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Le rapport de Françoise Cartron (Sénat) dénonce l’assouplissement de la carte scolaire et propose la non prise en compte des options rares, une politique d’incitation pour l’affectation des enseignants, l’élargissement des secteurs scolaires sous le contrôle des CG et le rééquilibrage des dotations de fonctionnement

28 juin 2012

Ce matin, la mission d’information sénatoriale sur la carte scolaire a rendu ses conclusions. En ressort un bilan très critique de l’assouplissement de la sectorisation mise en place sous Nicolas Sarkozy : « une école à deux vitesses » selon Françoise Cartron, sénatrice socialiste, rapporteure de la mission.

« L’assouplissement de la carte scolaire a modifié la composition sociologique des établissements » déplore Françoise Cartron, « avec un effet de ghettoïsation des établissements les plus défavorisés, et des collèges et lycées d’élites qui cumulent jusqu’à 70% d’enfants issus de foyers de catégorie socioprofessionnelle supérieure. ». Une « situation insupportable » insiste-t-elle, favorisée notamment par « des stratégies d’évitement » mises en place par les parents d’élèves.

En finir avec le critère des options

La cible principale est le phénomène lié aux « options rares ». Pour éviter la sectorisation, les parents d’élèves n’hésitent pas à inscrire leurs enfants dans des établissements de meilleure renommée, prétextant un vif intérêt pour une option dispensée seulement dans le lycée espéré.

« Le russe et le japonais sont particulièrement à la mode » ironise la sénatrice de Gironde, estimant que ces choix éducatifs ne servent qu’à contourner la carte scolaire. « J’en veux pour preuve la déperdition des effectifs de l’option rare entre l’entrée dans l’établissement et la présentation au bac. On passe souvent de trente à 5 ».

Les propositions avancées par la mission sont donc sans appel : « les options ne doivent pas entrer en ligne de compte ». Seuls devraient être retenus la proximité de l’élève avec l’établissement, sa situation boursière le cas échéant, ou des motifs liés à une maladie ou un handicap.

Remodeler la carte scolaire

Le déficit de mixité sociale dans les établissements scolaires est criant. « Nous sommes dans une spirale qui entraine tout le monde vers le bas, avec une ségrégation scolaire parfois plus importante que la ségrégation sociale » déclare, effarée, la rapporteure.

Aggravé par les stratégies de contournement, ce problème tient d’abord à une mauvaise définition des secteurs. Il ne s’agit donc pas de retourner au système antérieur à l’assouplissement mais bien de modifier la carte scolaire actuelle, notamment en « élargissant les secteurs scolaires » afin d’y inclure des zones de résidences très diversifiées. « Plus ils sont larges, plus ils sont mixtes » explique la sénatrice. Ainsi, les parents auront plus de choix dans un secteur donné, mais la mixité scolaire sera effective.
Se concentrer sur les établissements les plus défavorisés

Le système des Zones d’Education Prioritaires (ZEP) n’est pas non plus en reste. Les membres de la mission pensent qu’il faut le « remettre complètement à plat », en agissant notamment sur l’affectation des enseignants. « Mettez dans un contexte difficile des professeurs inexpérimentés et mal formés, et vous avez un cocktail explosif » constate Françoise Cartron. Les sénateurs pensent donc permettre « par des systèmes d’incitations, comme l’avancement dans la carrière, à des professeurs compétents et expérimentés d’aller vers ces collèges et lycées défavorisés ».

Affectation des élèves, affectation des professeurs, mais également affectation des fonds. Actuellement, les dotations de fonctionnement que donne l’Etat pour chaque élève est le même quel que soit l’établissement, privé ou public, favorisé ou en difficulté. Le rapport recommande donc un rééquilibrage de ces dotations « pour accorder plus aux défavorisés » sans toutefois préciser dans quelle mesure.

De même, « il ne faut pas un prof absent plus de 48heures dans ces établissements. Ils ne doivent souffrir d’aucun défaut » avance la rapporteure, allant jusqu’à suggérer la mise en place « d’une équipe d’intervention pour établir des diagnostics dès qu’un problème surgit ».

Les représentants de professeurs et de parents d’élèves présents à la conférence semblaient dans l’ensemble satisfaits des propositions des sénateurs. Le gouvernement, qui a désormais le rapport entre les mains, doit à son tour rendre sa copie.

Extrait de publicsenat.fr du27.06.12 : Injustices sociales de la carte scolaire : ce que proposent les sénateurs

 

Consulter :

 

3 questions à Françoise Cartron :
1) Quels effets a provoqué la mesure d’assouplissement de la carte scolaire ?
2) Bordeaux, Créteil, Dijon, Lyon et Nancy-Metz : Que retenez-vous de vos nombreux déplacements dans ces différentes académies ?
3) Quelles sont les évolutions que vous proposez pour neutraliser les effets pervers de la carte scolaire et la faire évoluer vers plus de mixité sociale ?

Extrait du site du Sénat : L’assouplissement de la carte scolaire : 3 questions à Françoise Cartron

 

"L’assouplissement était fait pour remédier aux "stratégies de contournement" des classes supérieures, en particulier – ne nous en cachons-pas – d’enseignants. Quand vous observez l’évolution des effectifs des établissements, les conclusions qui s’imposent sont terribles : ce sont bien les milieux plus favorisés qui se sont emparés de la réforme, amplifiant l’"effet ségrégation" dans les collèges et lycées."

[...] Il faut donc concevoir des secteurs plus larges, où les parents pourront avoir le choix entre deux ou trois établissements, avec une affectation en fonction de critères transparents. Pour réguler, sur un secteur élargi, l’offre entre plusieurs établissements. Faut-il attribuer les mêmes dotations à un établissement qui attire toutes les classes supérieures d’un secteur et à celui qui accueille 90 % d’enfants de milieux défavorisés ? Cette question mérite d’être tranchée, car cette soi-disant égalité n’est pas source d’équité.

Lire la longue interview de Françoise Cartron par lemonde du 28.06.12 : Carte scolaire : "Il y a bien une discrimination sociale, territoriale mais aussi scolaire, ne le nions pas"

 

Enfin, F. Cartron recommande un redécoupage des zones de recrutement de collège afin de rendre « plus homogène la composition sociologique de chaque secteur », ce qui nécessite le renforcement des liens entre conseil général et DASEN, pour la mise en œuvre de politiques cohérentes. Dans ses déplacements, la commission sénatoriale dit avoir rencontré plusieurs exemples de ces nouvelles collaborations fructueuses qui se mettent en place. La lutte contre les dérogations de confort passe aussi, selon le rapport, par une utilisation renforcée du logiciel Affelnet pour l’affectation au collège comme en lycée pour limiter les « interventions discrétionnaires », mains aussi en redéfinissant les barèmes pour donner plus d’importance au critère de bourse.

Quelle politique prioritaire ?

En conclusion, ce rapport courageux synthétise les apports de la recherche de ces dernières années. La mise en œuvre de ses conclusions demanderait un courage politique exemplaire, au niveau des collectivités locales comme au niveau central, d’abord parce que les pauvres sont moins prompts à défendre leurs intérêts dans les urnes comme dans les lobbys actifs, à tous les niveaux.

La gauche en assumera-t-elle le projet, maintenant qu’elle détient pour la première fois les leviers de l’action publique à la tête de l’Etat comme dans les territoires ? Le 26 juin, à Asnières, Vincent Peillon expliquait qu’il ne fallait pas attendre de la révision de la carte scolaire la solution miracle à la réduction des inégalités sociales et scolaires. On attend avec impatience la nouvelle politique prioritaire qu’il entend mettre en place.

Lire le commentaire de L’Expresso

 

Le rapport suggère en outre un traitement particulier pour l’Ile-de-France, avec « un rapprochement des travaux des trois rectorats de Créteil, de Paris et de Versailles, et l’accroissement des échanges de données entre eux afin de limiter les infractions à la réglementation ».

Extrait de la gazette des communes.com du 28.06.12 : L’assouplissement de la carte scolaire a bien fait reculer la mixité sociale

 

Redécouper les secteurs des collèges sous le contrôle des CG

[...] "La contribution des collectivités territoriales est indispensable, des conseils généraux notamment puisque c’est à l’entrée en 6e que se situe le noeud gordien de la sectorisation", écrit-elle. Selon le rapport, les conseils généraux pourraient avoir la possibilité "de tailler des secteurs communs à plusieurs collèges". "Le but est de permettre une différenciation fine de la carte scolaire selon les territoires, sous le contrôle des collectivités." Ainsi dans ces nouveaux secteurs élargis, "on pourra avoir un, deux ou plusieurs collèges, selon les zones et les décisions du conseil général".

Extrait de localtis.info du 28.06.12 : Carte scolaire : objectif mixité sociale

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