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Au sommaire de l’US (Snes) : Education prioritaire : la grande supercherie - L’heure de vie de classe en REP - Dossier Manuels scolaires (entretien Stéphane Bonnery) - Discrimination (entretien Fabrice Dhumes)

7 avril 2015

Au sommaire de L’Université Syndicaliste MAG, supplément au n° 750 du 14 mars 2015

Revue de presse. L’Humanité 18 mars 2015
Éducation prioritaire, la grande supercherie
par Sylvie Ducatteau
Les collèges sont les premiers à prendre connaissance des moyens réels dont ils disposeront à la rentrée 2015.
Loin des promesses ministérielles, les établissements classés
en éducation prioritaires se sentent floués.

« Nous étions optimistes, car il apparaissait que les difficultés
du public et la nécessité du temps de concertation étaient
enfin prises en compte » se souviennent les enseignants du collège [Jean-Vilar de La Courneuve] très impliqués dans les assises de l’éducation prioritaire. Un an plus tard, le ton a changé : l’établissement classé en REP perd 56 heures, résultat d’un véritable tour de passe-passe. La dotation horaire globale (DHG) de l’établissement, soit 1 037,85 heures, apparaît, en valeur absolue, en augmentation. Mais disparaissent dans un même mouvement : onze indemnités pour missions particulières (MP), 90,35 heures de pondération sur les services enseignants, 28,5 heures absorbées par l’ouverture d’une classe de Troisième... « Dans ces conditions la mise en oeuvre de la réforme semble bien se faire au détriment des élèves les plus défavorisés », analysent-ils.

Confrontant les promesses ministérielles avec leur réalité, les
enseignants du collège Ikbal-Massih, à Saint-Denis, arrivent à la même conclusion. Maîtrise de la langue française ? L’heure d’aide aux élèves de Cinquième n’existera plus. Maîtrise des mathématiques ? Les groupes de soutien aux élèves de Sixième sont supprimés. La formation des « citoyens de demain » ? La classe d’initiation aux médias est supendue. Une incongruité au moment où l’éducation à l’image et au regard sur l’information n’a jamais été aussi évidente. [...]

 

- L’heure de vie de classe en REP au Havre (témoignage) p. 17
TÉMOIGNAGE
“Un temps d’échanges privilégié”
Rachel, APS (assistante chargée de prévention et de
sécurité) au collège (REP) Léo-Lagrange du Havre

Dans le cadre de mes différentes missions, je suis amenée à intervenir en heure de vie de classe, seule ou en binôme avec le professeur principal. Pour moi, ce cadre constitue un temps d’échanges privilégié avec le groupe classe, et permet alors de poser les choses avec les élèves, permettant ainsi d’apaiser le climat ou d’ouvrir le dialogue.
Je travaille notamment avec une classe de manière régulière, et je citerai deux exemples qui illustrent l’intérêt de cet échange :
• Un élève est passé en conseil de discipline, ce dernier a été exclu définitivement avec sursis. L’heure de vie de classe organisée a permis de revenir sur le motif du passage en CD, le verdict et de poser les choses avec la classe pour son retour.
• Un autre exemple montre l’intérêt de l’HVC. Celle-ci a permis de revenir sur les propos tenus par certains élèves, à savoir « la prof, elle est raciste ». Après avoir défini ce mot avec les élèves, ces derniers ont compris le sens exact du mot employé, et ainsi mesurer l’impact de leurs dires à l’égard de leur professeur, et que ces mots pouvaient la blesser.

- Dossier Les manuels scolaires : Entretien avec Stéphane Bonnery p. 26
Stéphane Bonnéry est maître de conférences en sciences de l’éducation, laboratoire CIRCEFT-ESCOL, université Paris 8
« Les écarts se sont aussi creusés “par le haut” avec des exigences plus élevées »


- Discrimination. Entretien avec Dhume
p.40
ENTRETIEN FABRICE DHUME
Fabrice Dhume est sociologue, chercheur-coopérant à l’ISCRA et enseignant-chercheur à l’université Paris Diderot. Il travaille dans une perspective de sociologie publique, dans l’action publique et avec des collectifs d’acteurs, afin de contribuer à l’émergence de publics critiques.
Il vient de publier Entre l’école et l’entreprise, la discrimination en stage. Une sociologie publique de l’ethnicisation des frontières scolaires (Presses universitaires de Provence, 2014).

L’US : Qu’est-ce qui vous a amené à vous intéresser plus particulièrement à la discrimination des élèves en stage ?

Fabrice Dhume : Cet ouvrage trouve son origine dans une commande du rectorat de l’académie de Nancy-Metz, mais ma recherche a été prolongée sur d’autres terrains. Il s’agissait, pour l’institution, de mieux saisir les phénomènes de discrimination auxquels pouvaient être confrontés les élèves de la voie professionnelle lorsqu’ils se trouvaient en stage. Depuis le milieu des années 90 j’avais, de mon côté, travaillé sur les discriminations dans l’insertion et l’emploi, notamment.
Ayant travaillé avec des intermédiaires de l’emploi comme
l’ANPE, j’avais montré que les personnels participaient de la
production des discriminations, en raison d’abord des contraintes de leur travail. Lorsque j’ai commencé à étudier les discriminations en stage, je suis parti de l’hypothèse que les
enseignants pouvaient être eux aussi pris dans une logique de
coproduction. L’objectif était de vérifier cela, et donc de montrer que la discrimination n’était pas seulement un processus exogène, extérieur à l’école, mais également un problème intérieur. À l’interface de l’école et de l’entreprise, les stages
pouvaient être un moyen de montrer que la discrimination était organisée de façon systémique. Cette recherche était pour moi un point de départ pour poser plus largement le problème des
discriminations à l’école.

L’US : Qu’entendez-vous par discrimination ?

F. D. : La discrimination est un concept au carrefour du droit, de la psychosociologie et de la sociologie. La psychosociologie,
se concentrant sur la face cognitive du problème, a montré que nous avions tendance à privilégier notre groupe et juger
négativement les autres. Le droit, lui, se position subalterne ou ségréguée.
Dans ce travail, j’ai mis la focale sur la dimension ethnico-raciale, qui fait l’objet d’un tabou en France. C’est en partie un héritage de l’action de l’UNESCO, après la Seconde Guerre mondiale, visant à éliminer « les races » comme catégories et à
promouvoir plutôt l’idée de « culture ». Cela n’a rien réglé, car
si l’on veut se persuader que « les races n’existent pas », cela n’a pas empêché cette croyance de perdurer.

L’US : À plusieurs reprises dans votre ouvrage vous dites qu’il y a un « déni » de la discrimination au sein de l’école. Pouvez-vous nous expliquer cela ?

F. D. : Lorsqu’on aborde ouvertement la question de la
discrimination avec les acteurs de la communauté éducative, leur première réaction est souvent de dire qu’il n’y a pas de problème. Soit on minimise les cas de discrimination, soit on « externalise » le problème en disant que ça n’existe pas à l’école, que celle-ci a des « valeurs », etc. Il y a dénégation
dans le sens où, si l’on convient en général que de la discrimination peut exister, on ne la reconnaît pas quand elle se produit. Pour rendre visibles les logiques discriminatoires, je suis parti des pratiques professionnelles, des modes de placement en stage. Je me suis par exemple livré à une petite enquête statistique, sur deux établissements, à partir des fiches de suivi des élèves. En m’appuyant sur les patronymes, j’ai pu montrer que ce suivi obéissait en partie à des logiques ethniques. Les élèves avec des patronymes à consonance étrangère sont plus souvent confiés à des enseignants supposés « leur ressembler », sous prétexte qu’ils les « comprennent mieux » ou qu’ils sauraient mieux faire face à la discrimination. Ces résultats ont permis de soulever la question
« La violence de la discrimination demeure, et le délit finit par être couvert par l’institution »

Extrait de snes.edu : Université syndicaliste

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