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Les inégalités scolaires en France vues par des chercheurs lors de la Journée sur les politiques de la Jeunesse

7 mai 2015

Colloque Jeunesse : La mécanique des inégalités scolaires mise à nu

De la maternelle à la terminale, l’école française a une constante : elle est inégalitaire. Les enfants de milieux défavorisés y réussissent en moyenne moins bien que les autres. Et cela se retrouve même après le bac : à même niveau scolaire, ils atterrissent dans des filières moins prestigieuses. Les experts réunis à la table ronde sur les inégalités à l’école, organisée hier dans le cadre de la Journée sur les politiques de la jeunesse, n’ont pu que répéter ce constat déprimant, sans vraiment dégager de motifs d’espoir.

[...] Le sociologue François Dubet a ouvert la danse. Partisan affiché de la réforme du collège, il a parsemé son intervention de pics à l’adresse des opposants. Sans crainte d’être polémique, il a déploré « le même axe de résistances » qui s’était déjà manifesté dans le passé pour bloquer d’autres réformes, ironisant sur « l’alliance entre le Figaro et le SNES, entre la défense des privilèges et le corporatisme enseignant ou la défense des intérêts professionnels. » Pour lui, si l’on veut atténuer les inégalités, il faut faire bouger le collège et la réforme proposée par Najat Vallaud-Belkacem est un pas dans la bonne direction. Mais face aux résistances, « ce sera extrêmement difficile ».

Un système élitiste
« Certains pays ont une grande amplitude d’inégalités sociales et des inégalités scolaires relativement faibles, a-t-il souligné en introduction, d’autres ont une amplitude d’inégalités sociales relativement faible et des inégalités scolaire fortes. La France est de ceux-là. Comment expliquer ce paradoxe ? » Pour le chercheur, derrière l’affichage selon lequel on donne la même chose à tous les élèves, il y a une offre très inégalitaire.

[...] Quand le lycée contribue au délit d’initié...
La sociologue Agnès van Zanten, directrice de recherches CNRS et professeure à Sciences Po, a enchaîné en évoquant la recherche qu’elle mène sur la transition entre le secondaire et le supérieur, et sur les inégalités dans l’orientation. Elle a enquêté dans 30 lycées de la Région parisienne, avec un suivi plus approfondi de 4 établissements des académies de Paris et de Créteil – 3 publics et 1 privé, aux profils sociaux variés.

Dans le lycée où les élèves sont largement issus de milieux favorisés, sur les deux heures que dure la réunion pour présenter les filières post-bac – « à l’aide de power points assez incompréhensibles », précise la chercheure -, près d’une heure et demie est consacrée aux classes préparatoires.
A l’opposé, dans le lycée où les élèves sont plutôt d’origine modeste, on parle essentiellement des STS (sections de technicien supérieur, en deux ans après le bac) et un peu de l’université … La même inégalité se retrouve dans l’accompagnement des élèves.

[...] Elise Huillery, du département d’économie de Sciences Po, a donné un éclairage original sur le lien entre « Origine sociale et autocensure scolaire ». Dans son étude, elle a voulu comprendre les mécanismes à l’oeuvre pour qu’à même niveau scolaire, les élèves d’origine modeste expriment des ambitions moindres. Ou encore : dans quelle mesure ces jeunes intériorisent-ils leur « handicap » social de départ, et participent-ils eux-mêmes à nourrir les inégalités d’orientation ?

[...] Gâchis et discrimination à l’école
Marie-Aleth Grard, vice-présidente d’ATD Quart Monde, a clôt le débat. Elle met actuellement la dernière main à un rapport du Conseil économique, social et environnemental (le CESE) sur « L’école de la réussite pour tous » qui sera présenté le 12 mai.

Se défendant d’être une experte, elle a évoqué, témoignage à l’appui, le sort réservé à l‘école aux familles les plus pauvres dont les enfants, plus que les autres, se retrouvent en échec dès le CP, puis sont orientés vers des filières spécialisées ou du handicap. Parmi les élèves chez qui on décèle des troubles intellectuels et cognitifs, a-t-elle souligné, 60% sont d’origine très défavorisée contre 6% de famille favorisée.

Elle a aussi dénoncé le fait que lorsque l’on oriente, au collège, un élève en Segpa (classes pour les enfants en très grandes difficultés, ndlr), on mène une enquête sociale au sein des familles, « alors qu’on ne fait rien de tel lorsqu’il s’agit d’orienter en classes musicales ou européennes »… « Un gâchis et une discrimination », a-t-elle déploré, auxquels le rapport du CESE va demander qu’on mette fin.

Extrait de cafepedagogique.net du 07.05.15 : Colloque Jeunesse : La mécanique des inégalités scolaires mise à nu

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