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Colloque CNESCO sur la mixité sociale et la ségrégation à l’école. Le dossier du Café pédagogique en plusieurs volets et de Tout Educ

9 juin 2015

EXTRAITS

"On a autre chose à faire que des rapports qui restent dans un tiroir". A l’issue de la seconde journée de la conférence internationale sur la mixité sociale à l’École, Nathalie Mons, présidente du Cnesco (Conseil national d’évaluation du système scolaire) marque ses objectifs. Le Cnesco et ses partenaires ont évalué des outils de lutte contre la ségrégation. Pas question pour eux de se limiter à ces évaluations. Il faut diffuser ce savoir pour le rendre utile pour faire bouger un "modèle français" qui entretient la cécité sur la ségrégation sociale et ethnique à l’école.

Qu’ont à dire les géographes sur la construction de la ségrégation, s’est demandé Michel Lussault en ouvrant la seconde journée de la conférence organisée par le Cnesco, le Conseil supérieur de l’éducation québécois et le CIEP. "On est de plus en plus confrontés à des choix rationnels d’acteurs qui tiennent le discours de la ségrégation volontaire", remarque-t-il. Il n’y a pas que les familles. "Les politiques sectorielles d’urbanisme ont tendance à accentuer les effets des choix rationnels des familles". Pour lui la solution ne peut donc être que locale. "L’intérêt général peut être produit localement

[...] [Expériences étrangères]

[...] Le Cnesco lance un réseau d’acteurs et de chercheurs
"Notre premier constat c’est la cécité collective en France sur la mixité sociale à l’école", affirme Nathalie Mons, présidente du Cnesco, en concluant le colloque. "Depuis 15 ans ailleurs on s’en soucie et nous on reste statique. On ne mesure pas la mixité et il n’y a pas de politique réellement ambitieuse sur ce point". Pour elle cette cécité vient à la fois de la conception française de l’intégration qui nie la différence culturelle et d’une construction scolaire en filières.

"Il faut faire bouger les représentations, diffuser les recherches, mettre à l’épreuve les outils de ma mixité", dit-elle. "Faire connaitre les effets négatifs de la ségrégation et les avantages de la mixité. Il est urgent d’agir". Elle appelle à une politique des petits pas misant sur le local pour dépasser le sentiment d’impuissance. Pour cela elle annonce la constitution d’un réseau réunissant chercheurs, acteurs, collectivités locales, associations, en lien avec le Conseil supérieur du Québec.

Des outils et de la conviction
"Il n’y a pas de recette magique", nous dit-elle à la fin de la journée. "Mais de grandes lignes directrices sont apparues. La première c’est qu’il n’y a pas de politique nationale universelle ou un seul outil à mobiliser. Il faut une véritable boite à outils associant ajustement de la carte scolaire et affectation informatisée, adaptation au contexte local. L’autre grande idée c’est qu’il faut réunir des conditions favorables pour que ça marche. Il faut convaincre les parents et former les enseignants à l’hétérogénéité, par exemple". Pour elle la lutte contre la ségrégation scolaire est une priorité de la loi de refondation. Chargé d’évaluer les politiques scolaires, le Cnesco est bien décidé à mettre les pieds dans la plat.

Extrait de cafepedagogique.net du 08.06.15 :Mixité sociale : Le Cnesco lance un réseau de recherche

 

Pour affronter la ségrégation sociale à l’école, il faut agir localement, nous dit le colloque réuni par le Cnesco. Le 6 juin, il consacrait un atelier à la question des politiques d’établissement en associant des acteurs et des chercheurs. Si ceux-ci ont bien montré que la ségrégation se construit aussi dans les établissements, que proposent ceux-là pour en diminuer la portée ?

Co-auteur du rapport sur la ségrégation scolaire publié par le Cnesco et d’une étude réalisée pour la région Ile de France, Arnaud Riegert a montré comment les établissements scolaires fabriquent de la ségrégation en construisant des classes homogènes et des filières homogènes scolairement, socialement ou culturellement. En mettant en place des classes de niveau, les chefs d’établissement pensent améliorer les chances des élèves, ce qui n’est pas le cas pour les plus faibles. Il sont aussi sensibles aux demandes des enseignants pour des classes moins hétérogènes.

Quand la ségrégation rend heureux..
Barbara Fouquet Chauprade a travaillé sur un sujet très neuf mais déjà présenté par le Café pédagogique : l’acquiescement à la ségrégation. Elle s’est attachée à observer le sentiment de bien-être des élèves dans des situations de ségrégation dans 6 collèges français (4 dans l’académie de Bordeaux et 2 sur Créteil) à travers plus de 1300 questionnaires.
Le premier enseignement c’est que la ségrégation ethnique a beaucoup plus d’effet sur le bien-être que la ségrégation sociale. La ségrégation ethnique est mal vécue sauf quand les minorités ethniques sont majoritaires dans une classe. Dans ce cas, cet entre soi forcé est vécu positivement par les élèves des minorités ethniques (mais négativement par les élèves de la majorité). D’où une nouvelle interrogation : cette stratégie de mise à l’écart n’est-elle pas positive pour les jeunes en question ? La question renvoie à un débat qui a lieu aussi en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis sur l’épanouissement des filles ou des minorités dans des établissements spécifiques. Elle interroge du coup la part des amitiés ou des démarches des parents dans la construction de la ségrégation. Mais si pour vivre heureux il faut vivre ségrégué, comment faire société ?

Des politiques d’établissement
Proviseure du nouveau lycée du Bourget, Aïcha Amghar explique comment elle constitue les classes sur des critères de mixité de genre, de collèges et de niveau. Mais l’établissement s’est adapté à cette situation en généralisant des études encadrées et des travaux interdisciplinaires en lieu et place des enseignements d’exploration. Des ateliers permettent aussi le brassage des élèves.

Proviseur adjoint du lycée professionnel Charles Baudelaire d’Evry, Eric Dogo revient sur son expérience de l’apartheid ethnique en lycée. Dans son lycée, les filières sont socialement et ethniquement séparées, une réalité banale dans l’enseignement professionnel. Alors qu’en bac accueil ou en cap coiffure les élèves sont noires, en esthétique elles sont blanches, remarque -t-il. Ce qu’il remarque c’est la demande des élèves noires , même orientées en lycée générale, à rejoindre ces filières noires. Et sa remarque rejoint le travail de B Fouquet-Chauprade.

Pour lutter contre cela il a mis en place des secondes professionnelle indifférenciées. Il envisage le décloisonnement en première pour les cours d’enseignement général mais est conscient des problèmes avec des enseignants qui se sont spécialisés sur des filières précises. Un professeur de l’enseignement agricole témoigne des moyens utilisés dans son établissement pour dépasser ces ségrégations. Cela passe par des enseignements donnés en commun mais cela repose aussi sur la vie collective de l’internat, u atout pour ces lycées agricoles.

Comment agir seul dans un système ségrégé ?
Barbara Fouquet Chauprade explique que dans l’éducation prioritaire on a souvent un enseignement qui s’adapte au niveau supposé des élèves. De la même façon, "on va organiser les activités autour de la diversité culturelle supposée des élèves". Pour elle, la recherche montre que la mixité sociale permet une meilleure régulation de l’enseignement, évite la stigmatisation et améliore les résultats scolaires. Mais pour être efficace localement, il faut qu’elle participe d’une politique générale de déségrégation. "Inutile de reprocher aux acteurs la ségrégation si l’Etat ne met pas à son calendrier une politique volontaire de lutte contre la ségrégation".

Xavier Nau, Cese, intervient pour monter que des pratiques pédagogiques peuvent faciliter la mixité comme l’application du référentiel Education prioritaire, la coopération entre les élèves ou le travail avec les parents. Ce travail pédagogique doit-il être posé en premier ?

Extrait de cafepedagogique.net du 08.06.15 : Cnesco : Comment lutter contre la ségrégation dans son établissement ?

 

Qu’est ce qui marche en matière de mixité sociale ? La première journée du colloque organisé par le Cnesco, le Conseil supérieur de l’éducation du Québec et le CIEP met d’amblée les participants dans le monde réel. Nathalie Mons l’ouvre sur un happening : la visite surprise des mères de Montpellier qui se battent pour que leurs enfants soient scolarisés dans des établissements mixtes socialement et ethniquement. Ce sont elles qui donnent la tonalité d’un colloque international qui veut déboucher sur l’action, même si les chercheurs montrent la complexité des politiques et souvent la maigreur des résultats.

[...] Françoise Cartron : Pour une nouvelle sectorisation
Cette volonté, Françoise Cartron, vice présidente du Sénat et membre du Cnesco, la porte. Elle rappelle comment l’assouplissement de la carte scolaire mis en place par N. Sarkozy a augmenté la ghettoisation. "Les jeunes ne sont pas dupes", explique-t-elle. "Il faut que la République soit porteuse d’une vraie fraternité". Elle avance des propositions. Faire des collèges prioritaires de s établissements "zero défaut" par exemple assurant le remplacement des enseignants. Dessiner de nouveaux secteurs pour les collèges avec 3 établissements par secteur , l’autorité académique assurant de la mixité dans les affectations. Le décret sur ce dispositif est paru mais il suppose la volonté des conseils départementaux...

Felouzis : la ségrégation est systémique dans l’Education nationale
Georges Felouzis porte un discours qui rompt avec une sociologie traditionnelle qui renvoie la ségrégation aux choix des familles. "Dans les processus de ségrégation, il n’y a pas que la causalité liée aux stratégies des parents. IL y a aussi la qualité de l’éducation offerte". Il développe sa thèse d’une ségrégation systémique, nourrie par le système scolaire y compris dans la composition des classes. Pour lui la politique d’éducation prioritaire est peu efficace voire renforce la ségrégation."Il faut une politique de déségrégation", explique -t-il.

La question des statistiques ethniques
La première table ronde va réussir à rester dans le débat actif à partir d’une question pourtant bien technique celle de la mesure de la mixité sociale aux Etats-Unis, Suède et Angleterre. Gabriel Rompré et Anne West montrent comment est apparue la question de la déségrégation ethnique en Angleterre et aux Etats-Unis. Pour la permettre, dans ces deux pays ont été mises en place des statistiques ethniques. La question fait frémir en France. Mais dans ces deux pays, ces statistiques sont nées du mouvement de déségrégation. Aux Etats Unis le mouvement est maintenant en train de s’inverser. Mais seules ces statistiques semblent en situation de rendre visible la question ethnique.

Peut-on apprendre des politiques des autres ?

Extrait de cafepedagogique.net du 05.05.15 : Mixité sociale : Le colloque du Cnesco au pied du mur des possibles

 

Mixités à l’école : "Par quoi on commence ?" (N. Mons)

Paru dans Scolaire, Périscolaire, Orientation le samedi 06 juin 2015.

Un collectif se crée dans la foulée de la "conférence de comparaisons internationales lancée par le CNESO et par le CSE (le Conseil supérieur de l’éducation du Québec) sur les "mixités sociale, scolaire et ethnoculturelle à l’école" ; il réunit des individus et des institutions, en France, au Québec et en Belgique. Doté d’un comité d’organisation, il devra, d’ici un an, faire des propositions concrètes pour agir, pour développer la recherche, concevoir des outils de mesure des ségrégations et une base de données des pratiques de terrain. C’est sans doute la principale conclusion de ce colloque de deux jours sur une question dont la complexité a été soulignée dans tous les ateliers. Elle ne peut être pensée sans envisager celle des mixités résidentielles, alors que les migrations internationales s’accompagnent d’une communautarisation des quartiers, et qu’on ne peut penser les mobilités géographiques sans penser leur gouvernance au niveau local, sachant qu’elle ne seront pas efficaces en l’absence d’objectifs clairement affichés, et d’un cadrage national fort... Elle suppose de penser la formation des personnels pour une culture commune des enseignants, des agents communaux, les ATSEM notamment, des animateurs des activités péri et extrascolaires... Ces activités elles-mêmes sont le lieux de ségrégations territoriales, mais aussi de genre... D’où l’interrogation de Nathalie Mons, quand elle conclut ces deux journées de débats : "par quoi on commence ?".

Aucun des partici

pants ne croit en effet à "un grand soir" qui résoudrait d’un coup toutes ces questions et la salle semble adhérer à l’idée des "petits pas". Mais la présidente du CNESCO va plus loin. Pour Nathalie Mons, "la France doit accepter de reconnaître son retard" en matière de mixités, et doit s’interroger sur les raisons de sa "cécité". La question reste en effet taboue, occultée par la formule, "une République une et indivisible" qui suppose que les nouveaux venus abandonnent toute référence à leur culture d’origine, tandis que le "collège unique" n’évite pas de nouvelles formes de ségrégation, plus occultes. Ce sont donc, au premier chef, "les représentations sociales, les croyances, les valeurs" qu’il faut "faire bouger". Or les réactions aux politiques de déségrégation vont de l’ "hostilité nette" à "l’indifférence".

Des dilemmes éthiques

Il faut aussi tenir compte des dilemmes éthiques. Le principal d’un collège doit-il privilégier la mixité scolaire au sein de son établissement, mais accepter de voir certaines familles contourner la carte scolaire pour l’éviter, ou faire des classes de niveau à options pour les attirer et les maintenir ? Comment dès lors "vendre cette mixité" aux personnels de l’Education nationale, aux parents et aux élus ? Et comment faire pour les toucher en même temps ? Cela suppose à tout le moins de disposer de connaissances scientifiques sur les effets des mixités, donc d’un appareil statistique qui ose mettre des mots sur les réalités.

Il faut aussi "oser expérimenter", sachant qu’à chaque terrain correspond "une boîte à outils", selon qu’on est en milieu rural ou urbain, dans un territoire en croissance ou en décroissance démographique... Et cela suppose un "diagnostic partagé" qui permette de dépasser le sentiment d’impuissance.

Prendre au sérieux les opposants

En effet, souligne Claude Lessard, la transformation des représentations suppose "de prendre aux sérieux la parole de tous les acteurs, y compris ceux qui refusent la mixité". On se condamne sinon "à tenir des discours moralisateurs qui ne mènent pas loin". Et, ajoute-t-il, c’est d’autant plus important mais d’autant plus difficile que cette question des mixités est de celles par lesquelles "on attrape tout", et qui "révèle beaucoup de choses" sur les politiques migratoire, urbaine, de logement, de formation, sur la place des parents, sur l’information des publics scolaires. C’est un enjeu qui touche tous les acteurs sociaux..

Et le président du CSE québécois a bien l’intention de participer au réseau qui se met en place. Il est venu à Paris convaincu de participer à une conférence de plus, qui soulignerait la complexité de la question, et donc la difficulté, pour ne pas dire l’impossibilité d’agir. Il se réjouit donc de voir le CNESCO sortir de son rôle de simple évaluateur, "être beaucoup plus que ça" et s’engager dans cette entreprise de transformation des représentations.

Extrait de touteduc.fr du : Mixités à l’école. Par quoi on commence. N. Mons

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