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Faut-il brûler les ESPÉ ?
Ce billet, dont le titre peut sembler provocateur, concerne la formation initiale des enseignants français. La formation continue relève d’une histoire et d’une logique différentes, et les considérables problèmes qu’elle rencontre sont d’une autre nature.
[...] Dans ce contexte ubuesque, la réelle plus-value apportée par la « mastérisation » (selon l’expression employée) est indiscernable et sans doute très limitée ; de plus, tout dépend des différentes filières.
Cette erreur de positionnement des concours dans la loi Jospin (qui avait dû composer avec les rapports de force entre des syndicats opposés entre eux), fut donc répétée par la suite, par les lois de 2005 et 2013, qui ont chacune modifié la structure de formation des enseignants.
Dans la formule en préparation, encore mystérieuse, sommes-nous condamnés à voir reconduite, pour la quatrième fois, la même erreur justifiée par de classiques arguments corporatistes et bureaucratiques sans liens avec les métiers à exercer et l’intérêt des élèves, les habituels oubliés ?
[...] Après les évolutions de la structure de formation, puis son remplacement par les ESPÉ et l’exigence pour les étudiants d’obtenir un master, les formateurs restés les mêmes reconduisirent, en gros, les mêmes contenus, alors que le public, à juste titre, devenait exigeant sur la pertinence professionnelle de ce qui lui était proposé. Plus les étudiants sont formés à haut niveau, plus leur regard critique est acéré et c’est très bien.
Trente ans après la loi Jospin, la question de savoir comment favoriser l’émergence d’une culture professionnelle commune chez les futurs enseignants reste entière.
[...] Une forte résistance des formateurs à laisser le terrain jouer son rôle.
Dans les métiers de service contemporains - l’enseignement en est un -, que la formation soit assurée par des universités ou par des écoles, une importante présence des étudiants sur le terrain, au contact direct de professionnels expérimentés, joue un rôle essentiel qu’ils apprécient de plus en plus. Ces contacts peuvent être facilités et valorisés par diverses formes de pré recrutement.
Pourtant, ce temps accordé au terrain semble aux yeux de certains formateurs indument arraché à celui réservé aux contenus de formation plus théoriques (mes heures, mes heures !!!). Or, pour les étudiants, ce n’est pas l’urgence puisque le nouvel enseignant pourra ensuite, tout au long de sa carrière, continuer à acquérir des connaissances et des compétences en fréquentant l’université, en allant sur des sites, ou bien sûr en faisant les deux. Enfin, pour ceux qui le souhaitent, les possibilités de certifications de compétences se multiplient, (certes, beaucoup sont payantes). Pour ces éléments de formation professionnelle et leur validation, des outils sont là en termes de crédits ECTS, de certifications, de formations hybrides ou à distance, de validation d’acquis de l’expérience, d’individualisation des parcours et de développement professionnel. Quelques enseignants sont même engagés dans une thèse. Sans doute faudrait-il, aussi, que la formation continue soit obligatoire. Nous sommes donc sur des temps longs.
En revanche, l’enseignant qui débute sait qu’il a une impérieuse nécessité immédiate. Il ne peut pas rater sa première heure devant la classe qu’il a en totale responsabilité (ni les suivantes d’ailleurs). On comprend aisément la légitime et forte préoccupation des étudiants. L’implication dans leur formation d’acteurs de terrain expérimentés leur est donc indispensable, très précieuse et ne peut attendre.
Extrait de questionstabouessunotre systemeeducatif.com du 31.08.18 : Faut-il brûler les ESPE ?