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Education : la fracture française (entretien du magazine "Elle" avec Agnès Van Zanten)

14 janvier 2020

Education : la fracture française

La France championne des inégalités scolaires ? C’est ce que dévoile le classement Pisa évaluant les résultats des élèves de 15 ans des pays de l’OCDE. Un constat effarant qui confirme les travaux de la sociologue Agnès Van Zanten, directrice de recherche au CNRS-Sciences Po et spécialiste de l’éducation. Interview.

La France championne des inégalités scolaires ? C’est ce que dévoile le classement Pisa évaluant les résultats des élèves de 15 ans des pays de l’OCDE. Un constat effarant qui confirme les travaux de la sociologue Agnès Van Zanten, directrice de recherche au CNRS-Sciences Po et spécialiste de l’éducation. Interview.

ELLE. Comment expliquer cette panne persistante de l’ascenseur social en France ?

Agnès Van Zanten. Sur le plan idéologique, le système français est très centré sur l’excellence. On dit toujours qu’il faut que les élèves puissent aller aussi loin que possible, ce qui n’est permis qu’à un petit nombre. On a beaucoup de mal à fixer ce qui devrait être un niveau acceptable pour permettre à tous les élèves, à terme, de s’insérer convenablement sur le marché du travail, d’être des citoyens éclairés, de mener une vie bonne dans ses différents aspects.

ELLE. C’est cette course à l’excellence qui crée une école à deux vitesses ?

Agnès Van Zanten. Il existe une forte ségrégation des populations scolaires entre les établissements. Les enseignants, selon qu’ils sont confrontés à des élèves d’origine favorisée ou défavorisée, adaptent leurs pratiques, sans même parfois s’en rendre compte. Cela a un effet sur l’acquisition des connaissances et les trajectoires scolaires. Cette ségrégation résulte de plusieurs facteurs : l’arbitrage entre public et privé qui dépend du choix des familles, elles-mêmes influencées par les orientations politiques. L’enseignement privé joue de facto un rôle ségrégatif dans le sens où il attire très peu d’enfants issus de l’immigration et des milieux populaires, surtout dans les grandes métropoles. Il faut aussi mentionner le lien très fort entre la dynamique scolaire et la dynamique résidentielle. Les classes les plus favorisées ont davantage les moyens de résider à côté des meilleurs établissements.

ELLE. L’enquête Pisa révèle aussi que les jeunes issus des milieux populaires, même quand ils sont bons élèves, « ont des ambitions post-bac moins élevées »...

Agnès Van Zanten. Dans les lycées favorisés, on commence l’orientation beaucoup plus tôt. On donne beaucoup plus de conseils personnalisés aux élèves et on ne parle quasiment que des classes préparatoires et des filières d’excellences. Dans les lycées moins favorisés, les équipes sont davantage mobilisées sur la réussite au baccalauréat, contre le décrochage et donc moins focalisées sur l’après. Et si on l’évoque, c’est davantage des cursus courts comme le BTS ou l’université, même si celle-ci commence aussi à devenir sélective.

Extrait de elle.fr du 19.12.19

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