> Rencontres et Productions OZP > ENQUETE OZP "Evaluons l’éducation prioritaire" (2018-2020) > Enquête OZP. Les résultats définitifs (octobre/décembre 2020) > Enquête OZP. Evaluation de la refondation de l’EP (4). Deuxième partie. (...)

Voir à gauche les mots-clés liés à cet article

Enquête OZP. Evaluation de la refondation de l’EP (4). Deuxième partie. Analyse détaillée des réponses : L’axe 2 du référentiel (bienveillance et exigence)

1er octobre 2020

Axe 2 : Conjuguer bienveillance et exigence dans le REP/REP+

Q 2.1 Pouvez-vous décrire une évolution positive au regard de l’axe 2 dans les pratiques de classe et le travail collectif dans votre réseau ?
Q 2.2 Quels sont les obstacles à la mise en œuvre de l’axe 2 du référentiel qui vous semblent persistants ?
Q 2.3 Quels sont les leviers qui vous sembleraient efficaces pour améliorer la situation ?

1. Les évolutions positives

1.1 Regard d’ensemble sur les réponses

82 % des répondants ont renseigné la question Q. 2.1. Parmi eux, 91% s’expriment à propos d’une évolution positive, 9 % constatent une absence d’avancée.

On compte 40 occurrences du terme « bienveillance » et 35 du terme « exigence » ou vocables de même racine. C’est bien davantage l’une ou l’autre de ces deux notions qui sont évoquées, plus que leur association « bienveillance ET exigence ».

L’enseignement le plus évident de l’examen des réponses tient au nombre d’occurrences des termes « famille » (15 occurrences) et « parents » (17 occurrences), soit 32 occurrences au total, presque autant que le terme « exigence ». La première caractérisation d’une école bienveillante et exigeante est d’avoir une attention particulière aux familles des élèves. On note des remarques proches de celles qui apparaissent pour l’axe 3 : par exemple, conscience plus grande qu’il faut travailler avec les familles.

Dix répondants s’en tiennent à des réponses purement déclaratives : par exemple, « nous sommes bienveillants et exigeants » ; il est difficile dans ce cas d’analyser la nature des améliorations enregistrées. Treize autres répondent que le référentiel les a trouvés « déjà bienveillants et exigeants » ; toutefois ceux-ci notent que le référentiel a alors conforté leurs pratiques.

L’examen des 19 réponses constatant l’absence d’avancées positives est intéressant :
  huit réponses sont sèchement négatives : non ; la notion de bienveillance n’est pas encore acquise ; les changements apportés n’ont pas eu d’effet ;
  deux réponses disent qu’il est impossible ou compliqué d’être exigeant « quand les fondamentaux ne sont pas acquis » ou « quand les parents ne suivent pas ».
  huit autres réponses traduisent un regret à partir d’une même identification : la volonté de conforter une école bienveillante et exigeante se heurte au manque de dynamique collective.
  Une seule réponse se confronte au cœur de la réflexion, la « conjugaison » de la bienveillance et de l’exigence, pour dire que la bienveillance est un acquis mais que « les exigences sont souvent à redéfinir ».
La moitié des réponses dressant un constat négatif expriment donc une difficulté dans la mise en œuvre de l’axe 2 plutôt que sa non prise en compte.

A contrario, on note dans la masse des réponses exprimant une évolution positive une forte présence, plus marquée que pour les autres axes du questionnaire, de formulations qui sonnent comme autant de déclarations de principe : parler de la bienveillance et de l’exigence, c’est toucher un principe fondamental de l’enseignement en éducation prioritaire. Citons parmi ces formulations :
  nous sommes réellement engagés dans une école bienveillante et exigeante, c’est notre moteur ;
  bienveillance et exigence sont les maîtres mots de notre école depuis fort longtemps ;
  pour moi, comme pour l’équipe, conjuguer bienveillance et exigence va de soi ;
  bienveillance et exigence sont deux principes indispensables pour que l’école fonctionne en REP+. »

1.2 Des concepts mal cernés, le référentiel mal connu

Si le nombre des réponses exprimant une évolution positive au regard de l’axe 2 est impressionnant, il est cependant difficile de cerner exactement ce qui conduit les répondants à ce jugement, tant le détail des réponses est varié. Cela s’explique pour deux raisons.

D’une part, contrairement aux questions de l’axe 1 qui interrogent des actes professionnels définis (par exemple, travailler l’oral, multiplier les productions écrites), l’axe 2 vise deux concepts peu ou non définis, la bienveillance et l’exigence. Ainsi la notion d’exigence est inscrite dans trois perspectives :
  notion d’exigence associée à une offre culturelle exceptionnelle : ainsi la mise en place d’une section allemand au collège avec un début d’enseignement en CM1 dans les deux écoles du réseau ; des projets ambitieux avec l’INSA et le théâtre des Deux Rives ;
  notion d’exigence mise en relation avec les objectifs des programmes : « les problématiques des contenus des programmes sont régulièrement interrogées par les équipes à la lumière des erreurs relevées lors des évaluations afin de ne jamais revenir à des exigences au rabais » ;
  notion d’exigence participant à la réflexion pédagogique centrale de l’éducation prioritaire, bienveillance / adaptation aux élèves / exigence / risque de malveillance : « les groupes de recherche essaient de définir jusqu’où peut-on aller dans les classes dans l’adaptation pour ces élèves en difficulté, maintenir une exigence sans être malveillant par rapport à leurs compétences ».

D’autre part, les termes par lesquels les répondants s’expriment renvoient peu, pour certaines rubriques, aux termes précis du référentiel. C’est surtout le titre de l’axe 2 qui est connu avec les deux notions de bienveillance et d’exigence, sans que les recommandations déclinées dans cet axe soient toutes évoquées dans les réponses, loin s’en faut.

Dans la circulaire Refondation de l’éducation prioritaire (7) , l’axe 2, Conforter une école bienveillante et exigeante, est décliné en trois points : projets et organisations pédagogiques éducatives ; évaluation des élèves ; suivi des élèves.

L’intitulé du premier point n’est présent explicitement que dans une seule réponse, et les références aux six des sept items qui le déclinent sont rares : trois occurrences seulement du « principe de l’hétérogénéité », cinq du « travail personnel de l’élève », trois du « bien-être des élèves » et dix du « climat scolaire », sept de la « lutte contre l’absentéisme », aucune de la « politique d’orientation », et dix de « l’accueil des moins de trois ans ». Seule la continuité école – collège est largement citée.

Si les mots du référentiel ne viennent pas spontanément à l’esprit des répondants, il faut néanmoins remarquer que l’idée peut être exprimée de façon plus ou moins proche. Prenons le cas du « climat scolaire » : l’expression ne figure en tant que telle que dans dix réponses, mais on peut en compter huit autres qui tournent autour du concept sans le nommer. Par exemple, contractualisation qui favorise le climat de confiance, travail sur la citoyenneté et le vivre ensemble, ou encore des entrées plus étroites mais qui tendent sans doute à l’amélioration du climat scolaire comme prise en compte des émotions dans les apprentissages, pratiques coopératives pour développer l’empathie des élèves, « tutorat (amélioration du climat de classe et confiance en soi) » ou encore la mention de débats à visée philosophique qui aident à travailler l’expression du ressenti. Ce sont donc en fait vingt réponses qui évoquent une réflexion, une mise en œuvre, une action témoignant de la prise en compte de la question du climat scolaire liée aux apprentissages.

Les attentes du référentiel concernant le deuxième point de l’axe 2, l’évaluation des élèves, sont bien connues pour quatre items sur cinq, mais l’absence de ce cinquième item alerte : deux réponses seulement mentionnent le statut de l’erreur, alors que la rédaction du référentiel place en tête de cette entrée : « L’erreur est considérée comme source d’apprentissage. »

Le même constat s’impose à propos du troisième point de l’axe 2 concernant le suivi : l’idée de suivi est très largement présente dans les réponses, mais les termes précis qui déclinent cette idée sont absents : l’existence d’un groupe de prévention contre le décrochage (GPDS) n’apparaît qu’une seule fois, comme celle d’une commission de suivi ou du tutorat, et il n’y a que deux occurrences seulement d’un coordonnateur de niveau.

1.3 Pourtant, une transformation professionnelle bien réelle

Même s’il existe une très grande variété dans les termes par lesquels les répondants s’expriment à propos de la bienveillance et de l’exigence, la lecture des réponses permet de les rassembler en plusieurs ensembles caractérisant au final les deux concepts de bienveillance et d’exigence et de mesurer comment ils concourent aux évolutions positives et profondes de l’enseignement en éducation prioritaire.

• L’évaluation

27 % des réponses citent, à propos d’une évolution positive concernant la bienveillance, des formes d’évaluation, des outils d’évaluation, des réflexions sur l’évaluation.

Les pratiques s’appliquent à « valoriser les réussites ». Des répondants évoquent la mise en place d’une évaluation par compétences (14 mentions, plusieurs fois associées à l’abandon des notes) ou à tout le moins une réflexion et des formations sur cette évaluation. L’exploitation de cette évaluation sur l’ensemble du parcours des élèves semble avoir été favorisée par la réforme du collège et les formations attenantes. Les répondants pointent que cette évaluation par compétences peut peiner à se mettre en place au sein des cycles 3 et 4, mais les actions de continuité permettent néanmoins que cette évaluation soit assez souvent exploitée en classe de 6e. De nombreux répondants évoquent aussi des démarches d’évaluation positive (13 mentions, plusieurs fois avec la précision « dès la maternelle »), avec les outils correspondants (carnets de suivi, carnets et cahiers de progrès, classeur de réussite, mais aussi « prise en compte et notification des progrès des élèves en classe et dans les bulletins de notes »). Ce sont les enseignants de maternelle qui semblent avoir impulsé ces démarches d’évaluation positive.

On relève encore, associées à l’évaluation positive, les mentions des termes « auto-évaluation » (1), « évaluation diagnostique » (1), « évaluation formative » (1), « préparation et accompagnement des élèves aux évaluations » (1), organisation « d’évaluations communes », et l’expression « évaluation repensée » (4).

Enfin, liée aux questions d’évaluation, l’expression d’une dynamique collective est associée à la bienveillance dans 10 % des réponses. On mentionne ainsi le travail collectif sur l’évaluation ; l’organisation de devoirs communs ; des progressions par cycle ; le consensus sur les objectifs. C’est sous cet angle que sont mentionnés un « coordonnateur par niveau qui facilite la communication entre PLC » et « le travail en équipe et les nouvelles organisations pédagogiques avec l’appui des CPC ». Le fait de confronter les élèves à un enseignement cohérent est synonyme pour les répondants de bienveillance.

• La gestion des difficultés comportementales

D’autre part, des outils concernant le vivre ensemble sont cités en nombre comme ceinture de comportement, échelle de comportement, permis citoyen, brevet de civisme ; des conseils associent des élèves à la gestion du vivre ensemble : conseil de délégués, conseil de classe pour résoudre les conflits, conseil des élèves, conseil de recommandations intermédiaires, conseil de vie de classe, conseil coopératif. Sous cette rubrique les évolutions positives concernent essentiellement l’amélioration du climat scolaire. L’association des élèves aux projets culturels de cycle ou de classe est rangée sous cet objectif.
Des actions sont mises en œuvre pour éviter le recours aux sanctions ainsi que les exclusions (échelle de sanctions qui prend en compte la bienveillance, réponses plus adaptées et moins sources de décrochage que les exclusions, instauration d’un « médiateur). Quatre fois est mentionnée la rédaction de documents telles une charte des valeurs, une charte commune ATSEM / enseignants sur les gestes bienveillants, une mise en commun des règles de vie, une réécriture des règles communes dans des termes positifs adaptés à chaque lieu.
Au total, 13 % des réponses témoignent d’amélioration en termes de bienveillance dans le registre de l’évaluation et des règles du vivre ensemble. Ces évolutions de pratiques portent surtout sur le collège.

Par ailleurs, quinze réponses citent des formations ou groupes de recherches pour aider les équipes à cerner les concepts de bienveillance et d’exigence et à les mettre en œuvre, dont on retient plusieurs mentions de formation associant ATSEM et enseignants.

• Les changements d’attitudes professionnelles

Les réponses les plus nombreuses concernent le changement dans les attitudes professionnelles : le suivi et l’accompagnement des élèves, l’explicitation de l’univers scolaire, la pédagogie.

Le changement le plus évident évoqué dans les réponses concerne la relation école – famille. 17 % des répondants l’expriment, évoquant par exemple « l’accueil de chaque élève et de sa famille dans sa singularité » ou « la bienveillance envers les élèves mais aussi leur famille ». Il s’agit d’associer les parents à des moments conviviaux, à la vie de l’école ou du collège, en un mot de « valoriser les élèves et leur famille ». Plusieurs réponses concernent la fréquence des rencontres avec les parents, mais également les modalités de la communication des livrets ou des bulletins. On peut retenir comme illustration de cette attention nouvelle aux familles ces deux citations :
  « Au sein de notre circonscription, l’IEN a demandé à chaque école de réfléchir et de produire une charte des valeurs. Cette charte a été présentée en fin d’année à l’école aux parents d’élèves. La charte est affichée dans l’école, les nouveaux parents l’ont en début d’année. »
  « Communiquer régulièrement et accueillir, sans complexe, les familles y compris sans rendez-vous. Propager dans les familles un sentiment d’appartenance à une communauté éducative. »

Le changement touche également la relation à l’élève. La réponse concernant la charte commune ATSEM / enseignants se termine ainsi : « cette réflexion a permis de faire réfléchir chaque enseignant et ATSEM sur l’attitude de l’adulte vis à vis des enfants. » Presque 7 % des répondants évoquent une « prise de conscience », un « changement de posture », changeant la qualité du regard porté sur l’élève, par exemple : « ce terme de bienveillance a changé le regard et l’attitude des enseignants face à élèves. » Ce n’est donc pas par hasard que ce changement de regard induit un changement dans l’évaluation : « le regard des enseignants sur leurs élèves a été travaillé dans le premier degré (d’où) le développement de l’évaluation positive ». Ce changement dans la relation à l’élève se traduit par une « meilleure acceptation des différences de niveau et des difficultés de chacun », la « qualité de l’accueil offert à tous (les) élèves », la « participation active des élèves aux projets d’école ».

• Conséquences sur le suivi des élèves, la communication, l’adaptation aux élèves

La bienveillance est associée dans 17 % des réponses au suivi des apprentissages dans la classe et au passage d’un cycle à l’autre « avec une coordination premier second degré (…) et une coordination maternelle élémentaire pour suivre au mieux les élèves en difficulté ». Il est même précisé que ce suivi vise « toute la coordination entre l’identification des difficultés d’un élève et les dispositifs pour y remédier ». Ce suivi est caractérisé par des échanges d’informations ; ainsi un répondant écrit que, dans la continuité école – collège, « les professeurs ressources renforcent le lien, le transfert des informations et le suivi des élèves ». Sont mentionnés des « documents de suivi », le livret scolaire unique, plusieurs fois le conseil école – collège (CEC), ainsi que le PPRE. On retient en particulier l’association entre les petits effectifs et la possibilité d’accompagner l’élève à son rythme, d’organiser des ateliers, des îlots, de proposer le dispositif Devoirs faits.

Autre conséquence : les répondants mentionnent un effort d’explicitation et de communication. L’école manque de bienveillance quand elle n’a pas conscience que le « dit » de l’école n’est pas spontanément compris, et quand cette prise de conscience a lieu et qu’un effort de communication est fait vis à vis des élèves comme vis à vis des familles, la bienveillance se trouve confortée. Dans un peu plus de 8 % des réponses se trouvent mentionnés le travail sur les « messages clairs », par exemple pratiques des messages clairs dans toutes les écoles ; présentation des projets aux familles et explicitation des attendus aux élèves. La démarche d’enseignement explicite est référée à la bienveillance.

C’est au regard de cet effort d’explicitation qu’apparaît le plus nettement la notion d’exigence : « travail d’explicitation avec les familles sur les bénéfices pour l’élève du respect des règles et de la nécessité d’une relation de confiance entre l’école et la famille », « les programmes de la maternelle présentés en début d’année permettent de maintenir une exigence et de montrer aux parents cette exigence ». Dans tous les cas, rendre le « dit » de l’école clair se fait au bénéfice des élèves : on note une « meilleure compréhension du collège par les élèves », le fait qu’une fois les « exigences formulées, l’élève visualise son parcours », que « la description des rôles de l’école maternelle lors de rendez-vous avec chaque parent de PS ou du dispositif a permis la mise en place d’une assiduité régulière de tous les élèves. »

Enfin, répondant aux expressions relevées ci-dessus témoignant de la volonté de prendre en compte tous les élèves, de les accepter dans leurs différences et leur singularité, on relève dans presque 10 % des réponses des termes relevant de l’adaptation de la pédagogie aux élèves, qu’il s’agisse de « pédagogie différenciée » ou de « différenciation pédagogique » (11 occurrences), d’ « inclusion » (des élèves à besoin particuliers, des élèves pré-orientés en SEGPA en classe de 6ème – 5 occurrences), d’ « individualisation », de « remédiation en groupes de besoin » et autres formulations témoignant du désir de répondre au plus près et au mieux aux difficultés de chaque élève.

2. Les obstacles à la mise en œuvre de l’axe 2

Il n’est pas plus aisé de rendre compte des réponses à la question 2 qu’à la question 1 : on remarque les mêmes imprécisions et le même éparpillement dans le contenu des réponses.

2.1 Contresens sur les notions de bienveillance et d’exigence

La recommandation de bienveillance peut être interprétée comme une invitation à « mêler l’affectif » à ses pratiques d’enseignement : il en résulte que les postures « bienveillantes » adoptées « ne réussissent pas tous les ans avec tous les élèves ». Dans ce cas les acteurs entendent le mot de bienveillance avec une connotation psychologique, sentimentale en quelque sorte, un synonyme de « gentillesse ». Une confusion apparaît donc entre la bienveillance dans la sphère privée et la bienveillance dans la sphère professionnelle de l’école. Cette conception psychologisante de la bienveillance conduit des répondants à exprimer « leur épuisement à répéter les règles » par exemple ; ils comprennent bienveillance comme une incitation à répéter « gentiment » les règles et de fait s’y épuisent.

Les formes, les modalités, les objectifs de la bienveillance professionnelle à l’école, dans les apprentissages, semblent largement méconnus ; sans doute n’ont-ils pas été assez clairement explicitées lors de la refondation ni assez mis au cœur des formations depuis. Cette méconnaissance constitue un potentiel de conflit entre les acteurs de l’éducation prioritaire d’un même réseau, d’une même école, d’un même collège. Les acteurs semblent très arc-boutés sur leur compréhension de la bienveillance.

Les erreurs de représentations et de définitions de ces deux notions sont évidemment dommageables aux élèves les plus en difficulté puisqu’elles affectent notamment la cohérence des postures dans les journées, les parcours d’apprentissage, la continuité des pratiques (apprentissages et évaluations) tout au long des parcours d’élèves.

Il résulte de ces possibles contresens les constats suivants à propos de la bienveillance :
  Des résistances, qui au mieux semblent à ceux qui les engagent un refus de brader la qualité de l’enseignement dispensé en éducation prioritaire. L’affirmation légitime que l’école doit être un lieu où les différences sociales s’estompent aveugle et fait considérer la bienveillance comme un renoncement à l’exigence. Il y a donc bien à clarifier la conjugaison entre les deux termes, bienveillance ET exigence.
  Des résistances, qui au pire semblent une affirmation individuelle ou collective d’autoritarisme (confondu avec la nécessaire autorité). 10 % des réponses évoquent des « replis », des « refus » de bienveillance, de la part de « personnels réfractaires » ou « récalcitrants » à la bienveillance, ce qui est une posture inadmissible pour tout enseignant, en éducation prioritaire comme hors éducation prioritaire.
  À ces 10 % s’ajoutent des réponses qui font apparaître le refus de quelques acteurs de s’engager dans les actions collectives définies au titre de la bienveillance : 4 % des réponses citent notamment un refus de la part de collègues d’évaluer par compétences quand la décision en est validée dans le réseau. Ces personnels considèrent les décisions collectives d’évaluation comme « une perte de temps », « un leurre qui cache la vérité ». Leur posture, regrettée par les répondants, fragilise manifestement l’efficacité des actions entreprises. Il peut se produire par exemple que dans les carnets de suivi, ces personnels persistent à pointer les lacunes quand manifestement il a été décidé de mettre en évidence les progrès. Selon un répondant qui fait ce contresens, la bienveillance attendue se traduit dans le laxisme relatif aux passages dans les classes supérieures. On voit comment des demandes de redoublement émanant de personnels faisant ces contresens menacent plus que la bienveillance attendue de tout enseignant.

Quant à l’exigence, on relève que :
  un répondant considère que, faute d’exigence, « on n’atteint pas le niveau attendu », « on brade l’évaluation du contrôle continu au DNB » dans son collège. Un autre répondant considère que l’on est trop exigeant dans l’évaluation du contrôle continu au DNB dans son réseau et que cela nuit aux élèves du collège par rapport à d’autres collèges du même secteur. Ce genre de réponses antithétiques montrent les dégâts occasionnés par la méconnaissance des concepts de bienveillance et d’exigence : insatisfaction des équipes et des pilotes, opacité des objectifs poursuivis ;
  on lit l’expression de reproches adressés aux élèves qui n’entrent pas dans des dynamiques d’ « efforts » qui permettraient à l’exigence d’être soutenue par les enseignants : c’est une autre interprétation psychologisante de l’exigence ;
  mais on lit également les inquiétudes d’une dizaine de répondants parmi les 189 réponses exprimées sur les excès d’exigence dans leur réseau ; la nécessité de « définir des exigences communes », « par paliers », est évoquée par trois répondants.
De plus, la mise en tension des deux notions est mal maîtrisée. Des réponses laissent penser que cette « tension » semble pouvoir être résorbée par une simple alternance des postures, dans un mouvement de balancier où se succèdent des phases, des temps de bienveillance (ou pas !) et des domaines et/ou temps d’exigence. Ainsi lit-on par exemple qu’on « réussit moins bien à être bienveillant en fin de journée ». Mais l’association bienveillance et exigence dans les apprentissages semble peu maîtrisée et ce manque de maîtrise et/ou la difficulté d’associer bienveillance ET exigence sont explicités par une douzaine de répondants.

2.2 Les obstacles imputés aux fonctionnements institutionnels

25 % des obstacles cités sont imputés à l’institution. Les demandes institutionnelles intervenues depuis la refondation accroissent l’impression de tension entre les deux notions de bienveillance et d’exigence : la refondation visait la réduction de 10 % des écarts de résultats au DNB entre EP et hors EP ; les évaluations du cycle 2 appellent à 100 % de réussite. Ce type d’injonctions, trop nombreuses et peu cohérentes à « évaluer », n’aident pas les équipes à construire les postures d’exigence attendues : les cibles sont brouillées. Ce brouillage tient sûrement un rôle dans les postures des « réfractaires » évoqués ci-dessus ; il désarme aussi les acteurs les plus convaincus de la nécessaire conjugaison de la bienveillance et de l’exigence en éducation prioritaire.

L’encadrement des personnels « réfractaires à la bienveillance » semble insuffisant à certains répondants qui pensent que « le seul accompagnement » de ces personnels ne rétablit pas bien les postures bienveillantes et exigeantes attendues.

Trois autres obstacles induits par l’institution sont mentionnés :
  les programmes et leur lourdeur, qui mettent en difficulté les postures bienveillantes ; ils feraient obstacle à la pédagogie différenciée ;
  le manque de pilotage cohérent d’un réseau ;
  le LSU souvent cité comme une contrainte très mal adaptée aux pratiques d’une évaluation positive, qui fait doublon avec les bulletins scolaires et fait finalement écran à la bonne compréhension par les familles du parcours d’apprentissage. Elles sont perdues selon plusieurs répondants entre des évaluations diverses ; les évaluations par compétences leur semblent même, selon un répondant, « les tromper » ; par voie de conséquence des familles ne comprennent pas l’absence de notes au collège.
Les autres obstacles institutionnels évoqués ne sont pas différents de ceux qui ont été mentionnés à propos de la mise en œuvre de l’axe 1. Chacun des items relevés est mentionné au moins cinq fois.
  Ils relèvent d’abord de questions de ressources humaines : affectations de personnels inexpérimentés en éducation prioritaire, et de personnels contractuels non formés ; personnels à mi-temps nombreux en EP, instabilité des affectations qui pèse sur la dynamique collective, absence de personnels enseignants chevronnés qui la fragilise également. À cela s’ajoutent les difficultés de remplacement, y compris sur des congés annoncés longtemps à l’avance ;
  ces obstacles sont aussi liés au manque de personnels spécialisés, RASED et personnels sociaux, au manque de structures capables de prendre en charge les élèves à besoins particuliers. Dans les cas de pilotage peu cohérent d’un réseau c’est la circulation des informations relatives aux élèves pris en charge sur le plan psychologique qui est interrompue ; un répondant évoque « le cloisonnement des informations de suivi des élèves » ;
  une troisième catégorie d’obstacles rassemble des questions d’organisation et de fonctionnement : rareté des échanges avec « la hiérarchie », manque de considération des enseignants, attente des dotations qui oblige à conduire les actions seulement après les congés de Toussaint, classes aux effectifs pléthoriques (un répondant cite des classes à 29 élèves), suppression du dispositif PDMQDC et suppression des maîtres+, dédoublements des CP et CE 1 qui augmentent les effectifs dans les classes de CM1 et CM2, difficulté à coordonner les équipes avec de seuls mi-temps de coordination, manque de clarté sur les paliers d’exigence possible.
Cette liste éparse renvoie à des réalités connues concernant les difficultés spécifiques de l’éducation prioritaire. Pour les illustrer, on peut retenir cette citation, isolée, mais révélatrice de l’usure des personnels et de leurs difficultés à conjuguer bienveillance et exigence : « il y a une forme de sélection naturelle qui opère : les enseignants qui n’acceptent pas la grande misère partent, ceux qui restent finissent par partir au bout de 10 ans et plus suite à un arrêt de travail important (accident du travail ou dépression) ». Ce sont donc les conditions trop difficiles de l’exercice du métier qui empêcheraient d’être bienveillant et exigeant.

Il faut ajouter, spécifiquement au regard de l’axe 2, les obstacles relevant des insuffisances dans le domaine de la formation continue (8 % des obstacles cités) : manque de formation sur les enjeux de la bienveillance ; sur la gestion de l’hétérogénéité ; rareté des formations dédiées à la psychologie des adolescents et des formations sur la différenciation pédagogique.

Enfin, un répondant avance comme obstacle la politique d’enseignement elle-même : les objectifs de l’école (faire réussir tous les élèves) et ceux du collège (tri social) ne sont pas favorables à la mise en place de pratiques continues et communes sur la bienveillance et l’exigence.

2.3 Les obstacles relevant des personnels

Le premier tient à la difficulté de faire réseau (12 % des réponses) : un répondant parle du conseil école – collège (CEC) comme d’une « usine à gaz » où la question de la bienveillance et de l’exigence n’est pas abordée ; un autre d’un CEC qui ne fonctionne pas ; un autre encore d’un CEC qui ne joue pas son rôle sur le plan pédagogique Un autre répondant pointe l’irrégularité des réunions de la commission de suivi.

Il résulte de cette discontinuité au sein des réseaux une rupture des mesures mises en place pour suivre les élèves, voire « une perte des informations essentielles » relatives à leur suivi. Les acteurs d’un réseau ne connaissent pas les projets de tous les lieux d’apprentissage du réseau ; d’autres « campent sur leurs positions ». Or le suivi des élèves tout au long de leurs parcours, le repérage et l’analyse de leurs progrès, l’attention portée aux solutions de continuité sont des postures professionnelles bienveillantes par excellence : elles sont donc très fragilisées par cette difficulté, qui peut être une difficulté de personnes, à faire réseau.

Les écarts de culture et de représentations professionnelles entre le premier et le second degré, les écarts de culture entre les écoles d’un réseau qui n’ont pas d’échanges suffisants pour mettre en cohérence leurs projets, y compris entre cycle 1 et cycle 2, concourent également à la difficulté de faire réseau. Le manque de temps dédié à la concertation, aux échanges, est souvent cité comme un facteur d’accroissement de cette difficulté.

Le deuxième obstacle tient à des difficultés didactiques et pédagogiques (8 % des obstacles cités) : les répondants évoquent les difficultés à « penser le sens de l’école », « le sens et la nature du travail demandé aux élèves en classe et hors de la classe » ; ils citent leur difficulté à gérer l’hétérogénéité ; des réponses déplorent « une mauvaise représentation des enjeux du climat scolaire trop seulement conçu comme relevant de la vie scolaire » comme si les pratiques pédagogiques ne concouraient pas à la qualité de ce climat. Quand les dynamiques collectives sont rompues par des positions trop personnelles, les dispositifs les mieux bienveillants et exigeants sont remis en cause : on renonce alors aux cahiers d’essai, de brouillon, et on perd de vue leur valeur et leur sens en termes de bienveillance et d’exigence conjuguées. Un répondant évoque que de telles postures professionnelles « récalcitrantes » peuvent être influencées par le regard actuel de la société sur l’erreur et la réussite. D’autres répondants regrettent que le turnover des projets ne permette pas de voir les résultats des actions actées : un répondant en appelle ainsi à la pérennité des actions.

Le troisième obstacle concerne la façon de s’investir dans le métier en éducation prioritaire : une petite dizaine de réponses fait état de la méconnaissance par certains personnels des véritables conditions de vie des élèves, d’une tendance à externaliser la prise en charge des difficultés des élèves ; ils dénoncent les motivations trop exclusivement financières de certains personnels affectés en éducation prioritaire : un répondant propose un entretien préalable systématique lors des affectations ; à ses yeux les échanges permettraient de mesurer la bonne connaissance et bonne compréhension du référentiel et des projets de réseau ; cette proposition rejoint la question des affectations en éducation prioritaire, mais elle a aussi le mérite de souligner combien les dynamiques collectives sont le terreau de la réussite en éducation prioritaire, comme évoqué ci-dessus.

2.4 Les obstacles imputés aux familles

8 % des réponses réfèrent les obstacles aux familles. L’éloignement de certains parents, leur difficulté à comprendre les évaluations positives ou les évaluations par compétences, sont cités parmi les obstacles. Des reproches leur sont parfois adressés : des familles acceptent les absences de leurs enfants. Dans ce cas, c’est donc le manque d’exigence des familles qui empêcherait de « conforter une école bienveillante et exigeante ».

En conclusion, il convient de noter que sur 268 répondants, 189 réponses (71 %) traitent la question des obstacles relatifs à la mise en œuvre de la bienveillance et de l’exigence en éducation prioritaire : le temps pris à les définir éclaire sur la belle et majoritaire détermination des acteurs à mettre en œuvre l’axe 2 du référentiel, à poursuivre les améliorations déjà enregistrées. Ce taux très encourageant mérite d’être pris en considération et, surtout, il appelle à la mutualisation des pratiques qui pourraient conduire une mise en œuvre aisée de la bienveillance et de l’exigence en éducation prioritaire.

La liste des obstacles qui surgissent des difficultés à coopérer avec les familles coïncide avec les réponses propres à l’axe 3 du référentiel. Elle révèle en négatif une bonne compréhension de ce que peut être la bienveillance attendue en EP, qui ne saurait s’en tenir aux seules relations avec les élèves ni au seul face à face pédagogique : la bienveillance, les répondants le font lire, passe aussi par la bienveillance avec les familles.

Les obstacles à l’axe 2 imputés à la décision centrale occupent une place majeure dans les réponses ; ils ne sont pas particulièrement différents des obstacles relatifs à d’autres axes du référentiel et méritent donc à ce titre d’être tout particulièrement entendus : l’instabilité des objectifs nationaux, la question des moyens en personnels spécifiques et des politiques d’affectation en éducation prioritaire occupent le devant de la scène pour l’axe 2 aussi.

Toutefois un obstacle spécifique surgit qui en vérité relève lui aussi du niveau institutionnel. On ne peut que regretter des décisions personnelles des acteurs qui font volontairement sécession par rapport aux actions entreprises en faveur de la bienveillance et de l’exigence dans leur réseau, qui surtout se libèrent de l’obligation d’adopter l’éthique responsable attendue de tous les professeurs et personnels d’éducation, en tous lieux d’éducation, telle qu’elle est définie par le BO du 25 juillet 2013. Mais on peut aussi s’interroger sur l’échec du pilotage, à tous les niveaux, qui ne parvient peut-être pas à détecter de telles défaillances, et qui ne parvient manifestement pas mieux à rétablir d’autres postures plus professionnelles, plus conformes aux attendus nationaux, et essentielles en éducation prioritaire au point d’avoir été nommément convoquées par l’axe 2 du référentiel.

Les formations initiales et continues, qui pourraient construire et conforter des pratiques pédagogiques et didactiques bien adaptées à cet axe 2, qui pourraient installer l’éthique responsable attendue en matière de bienveillance et d’exigence, ne sont pas suffisantes. Elles sont pourtant clairement explicitées par les répondants comme leurs besoins réels de formation et comme les moyens qui permettraient de parvenir à mieux conjuguer bienveillance et exigence. Certes un répondant déclare que de telles formations peuvent être très déstabilisantes pour les personnels dans la mesure où elles appellent à réviser des pratiques coutumières : sa remarque donne à penser que le manque de temps souvent cité comme un empêchement à suivre des formations peut aussi dissimuler cette crainte de quelques personnels à devoir remettre en cause leurs pratiques. Les dispositifs de formation doivent tenir compte de ce ressenti, qui touche sans doute à la peur de commettre des erreurs ; il serait pour le moins habile de faire de ces craintes professionnelles un point de départ pour une réflexion sur l’erreur chez les élèves. Au-delà de ces inquiétudes qui peuvent atteindre des personnels, les répondants font très majoritairement état d’une rareté ou d’une absence de formations dédiées aux pratiques dont ils pensent, à juste titre selon le point de vue de l’OZP, qu’elles favorisent la conjugaison de la bienveillance et de l’exigence : ainsi souhaitent-ils davantage de formations sur la gestion de l’hétérogénéité, la différenciation pédagogique, les enjeux de la bienveillance, la définition commune et partagée des concepts de bienveillance et d’exigence. Ces répondants font à nouveau apparaître que la participation des acteurs eux-mêmes à la définition des plans de formation n’est pas suffisante.

3. Les leviers

63 % des répondants ont renseigné la question portant sur les leviers, mais on note que le lien entre certaines réponses et la thématique bienveillance / exigence n’est pas toujours clair.

3.1 Les leviers relevant de décisions aux niveaux supérieurs

Dans un peu plus de 32 % des réponses exprimées (54 mentions), ce sont des moyens qui sont envisagés : 30 mentions de moyens accrus ou d’effectifs réduits, 14 mentions de personnels spécialisés (RASED, psychologues) ou d’interventions accrues (et efficaces) de leur part ; 4 mentions d’ATSEM, souvent assorties de demande de formation pour ces personnels ; 2 demandes de retour au dispositif PDMQDC ; 3 demandes de personnels de santé et une d’assistante sociale.

21 % des réponses exprimées citent la formation comme levier (36 mentions) ; souvent un souhait d’accompagnement est mentionné. Dans le détail, on note que 15 mentions ne précisent ni contenus ni objectifs, que 3 concernent les questions d’évaluation, 2 les neurosciences ou le fonctionnement du cerveau, 2 la gestion de classe. Chacun des thèmes suivants est évoqué une fois : formation des nouveaux enseignants, auto-confrontation, entretien d’explicitation, grande difficulté scolaire, gestion des élèves perturbateurs, climat scolaire, compétences émotionnelles, apprentissage et motivation, communication non violente et pédagogie institutionnelle, nouvelles pédagogies, gestion des malentendus, communication, réalités du quartier, apports supplémentaires sur les conséquences d’un enseignement bienveillant ou non. Deux réponses souhaitent un accompagnement ou une plus forte présence de l’équipe de circonscription (sans demande de formation). Quelques réponses insistent sur le fait que ces formations doivent avoir lieu en présentiel, ce qu’on peut sans doute lire comme critique implicite des formations en ligne.

Quatre réponses portent sur le recrutement, l’accueil et la motivation des enseignants du réseau, ce qui favoriserait la bienveillance et l’exigence si le référentiel et le projet de réseau étaient présentés, si les enseignants qui postulent étaient réellement motivés et recrutés avec un entretien professionnel (une motivation réelle compte plus que le nombre de points au barème).

La stabilité des équipes est mentionnée cinq fois, autant de fois que le travail avec les partenaires (PMI, CAF, mairie …).

Enfin, on relève des leviers mentionnés une seule fois : pas de classe à plusieurs niveaux en REP ; des maîtres à temps plein sur les écoles ; un coordonnateur REP avec CAFIPEMF ; sans doute sont-ils liés à des situations locales particulières.

3.2 Les leviers dépendant de l’initiative des réseaux

Le troisième levier envisagé (20 mentions) concerne l’utilisation de temps mis à disposition pour travailler ensemble. Les réponses évoquent comme sujets abordés la cohésion des équipes, le travail inter-cycles, le co-enseignement, l’observation et l’harmonisation des pratiques, les échanges, la pérennité des objets de travail. On retiendra cette réponse comme emblématique de ce que permettrait ce temps partagé :
  « Définir des priorités par année de travail dans le réseau et avoir une réflexion plus régulière avec des temps d’échange plus fréquents. »

Le travail sur l’évaluation des élèves (auto-évaluation, classes sans notes, LSU, évaluation par compétences, travail sur le ressenti de l’élève) est mentionné 14 fois comme levier. On relève 4 mentions des carnets de suivi des élèves, auxquelles on peut sans doute ajouter une réponse mentionnant les PPRE, une autre évoquant la différenciation (sans autre précision).

La relation aux familles (information et formation des parents, ouverture de l’école aux parents, café-parents) est mentionnée 11 fois, dont cette réponse insistant sur « la responsabilisation des parents » pour lutter contre l’absentéisme et une autre demandant des politiques locales sur la parentalité et l’alphabétisation.

Les liaisons inter-degrés sont mentionnées 5 fois (dont une fois à propos de la liaison collège – lycée).

D’autres leviers ne sont évoqués qu’une seule fois : échanges de classes avec des écoles hors EP ; différenciation, groupes de besoins ; plus de travail à l’oral ; approche pluridisciplinaire de l’enfant ; travail de l’élève et devoirs faits ; que les enseignants connaissent mieux les conditions de vie des enfants ; des actions concrètes.

On note enfin cinq expressions de leviers très généraux (améliorer la situation sociale des familles, redorer le blason de l’école auprès des parents…) dont le lien avec la thématique bienveillance / exigence n’est pas toujours clair et dont l’interprétation est difficile.

3.3 Des leviers comme autant de critiques implicites

Certaines réponses semblent avoir une dimension critique, locale ou nationale : soutien de la hiérarchie (réponse sous-entendant un manque de soutien) ; laisser les enseignants évaluer (contre-pied des évaluations nationales ?) ; faire confiance aux enseignants ; faire réellement porter les moyens sur l’EP ; harmoniser au niveau politique au sens noble du terme les objectifs de l’école ; laisser les enseignants libres de travailler en réseau ou pas ; arrêter les projets qui consistent à faire une représentation, un spectacle ; etc.

Conclusion

On retiendra comme témoignage de la dynamique ressentie globalement à la lecture des réponses, mais aussi peut-être du manque de perspectives clairement dessinées, ces quatre citations :

  « La situation est bonne, les leviers utilisés fonctionnent. » On entend là que le choix par les réseaux de leurs propres leviers, dans le cadre du référentiel, est une autonomie efficace.

  « Faire feu de tout bois : faire participer les élèves à la vie du territoire, et en tirer des enseignements (acquisition de compétences non académiques, mais participant à l’adhésion à l’école ». Par exemple, faire intervenir les entreprises qui travaillent pour et dans le collège avec les professeurs et les élèves, montrer que l’action publique est facilitatrice et encourageante. Apparaissent ici la détermination, l’inventivité et la créativité des équipes pour permettre la réussite des élèves de l’éducation prioritaire dans l’acquisition de toutes les compétences définies par le Socle commun de connaissances et de compétences.

  « Poursuivre la communication avec les parents et leurs engagements dans certains projets (projets de classe, de cycles, d’école). Faciliter les échanges au sein du cycle 3. Développer la liaison cycle 1 et 2 (projet commun à poursuivre, échanger sur le profil des élèves). Favoriser les jeux coopératifs (carte, ballon) durant la récréation, développer un système de surveillance à visée éducative durant la récréation avec harmonisation des règles dans la cour. » La qualité de la réflexion professionnelle de cette citation témoigne de la bonne maîtrise des spécificités de l’exercice professionnel en éducation prioritaire : la continuité, la cohérence des parcours d’apprentissage, le développement des valeurs en toutes occasions, la coopération avec les familles sont des actes incontournables et déterminants de la réussite des élèves.

  « Prendre vraiment des journées entières pour se poser tous ensemble, partager les difficultés, les réalités (…). Relancer une dynamique commune avec des balises claires sur les lignes à ne pas franchir pour sécuriser chacun. Et en même temps, partager toutes nos expériences positives de gestion de classe, de valorisation. » Partager, créer, décider et soutenir des dynamiques collectives en faveur de projets bien compris et mis en œuvre conjointement demande effectivement une entente entre les personnes que sont les personnels ; un pilotage clair, à l’écoute de chacun et de tous, est bien un facteur favorable à la pérennité de telles dynamiques.

 

NOTE
7. Circulaire n° 2014-077 du 4-6-2014 (NORMENE1412775C).

 

Demain, mise en ligne de la Deuxième partie. Analyse détaillée des réponses : L’axe 3 du référentiel

Voir les extraits précédents :
Enquête OZP. Les résultats définitifs (octobre/décembre 2020)

Voir le mot-clé
Eval. Enquête OZP 2018-2020 (gr 5)/

Répondre à cet article