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Claude Lelièvre : « Au XIXe, il s’agissait avant tout de “faire aimer la République” plutôt que de décliner les “valeurs républicaines” à respecter »
TRIBUNE
Claude Lelièvre
Historien
Répondant aux propos du ministre de l’éducation nationale, l’historien rappelle, dans une tribune au « Monde », que la valorisation de la figure de l’instituteur sous la IIIe République allait de pair avec sa mission de valorisation du régime. Une fonction difficilement transposable dans la France d’aujourd’hui.
[...] Pourtant, lors de ce même congrès, Jules Ferry stigmatise la formule du fonctionnaire disant « je ne fais pas de politique » : « Vous devez enseigner la politique. Pour deux raisons : d’abord, n’êtes-vous pas chargés, d’après les nouveaux programmes, de l’enseignement civique ? C’est une première raison. Il y en a une seconde, et plus haute, c’est que vous êtes tous les fils de 1789 ! Vous avez été affranchis comme citoyens par la Révolution française, vous allez être émancipés comme instituteurs par la République de 1880 : comment n’aimeriez-vous pas et ne feriez-vous pas aimer dans votre enseignement et la Révolution et la République ? »
C’est à l’époque une prise de parti encore plus résolue que ne le seraient actuellement des engagements forts contre le sexisme, le racisme ou la xénophobie. Au XIXe siècle, les enseignants du primaire doivent en effet non seulement expliquer la Révolution française et la République, mais les faire aimer. Et cela à un moment où la République est condamnée par l’Eglise ; à un moment où seule une courte majorité de Français vient d’être favorable au régime républicain. [...]