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Le volet éducation du plan "Marseille en grand" éreinté par la Cour des comptes
La Cour des comptes vient de publier un "premier bilan" de la mise en oeuvre du plan "Marseille en grand", particulièrement sévère en ce qui concerne le volet éducation. Alors qu’ont été annoncés, pour la réhabilitation des écoles plus de 1 milliard (400 M de subventions et 650 M de garantie d’emprunt), seuls 17,4 millions ont été décaissés (1,6 %). Les mesures prévues "sont insuffisantes pour atteindre l’objectif d’amélioration des conditions de la réussite scolaire des élèves. Le plan Marseille en Grand n’intègre aucune mesure spécifique visant à améliorer le climat scolaire, renforcer la santé des élèves ou accroître la mixité sociale des établissements. L’opportunité que représente le caractère multithématique du plan n’est pas mise à profit pour proposer une politique intégrée adaptée au caractère multifactoriel de la réussite scolaire (...). De nombreux facteurs pesant sur la réussite scolaire ne sont pas pris en compte."
Le volet éducation du plan Marseille en grand intervient dans trois domaines, la réhabilitation des écoles publiques, l’expérimentation des écoles innovantes et la création de 10 micro-collèges et 10 micro-lycées réservés aux élèves en décrochage scolaire.
La situation sociale
La situation justifiait un tel plan. "Les lacunes de l’action publique à Marseille ont placé le territoire en situation d’urgence, notamment dans les domaines du logement, de la santé, de la sécurité et des écoles." Le rapport de la chambre régionale des compte publié en 2020 "faisait état d’un patrimoine scolaire très dégradé, principalement dans les 3ème, 13ème, 14ème et 15ème arrondissements (...). Les faits de violences liés au trafic de produits stupéfiants concernent également les abords d’établissements scolaires."
La Cour s’inquiète aussi de la situation sociale. La ville compte 73 000 enfants pauvres, "soit 39% des personnes de moins de 18 ans" contre 21 % au niveau national. La part des enfants pauvres s’élève à 16% dans le 8ème arrondissement, contre 66% dans le 3ème arrondissement (...). Dans ce contexte, la santé scolaire revêt une importance particulière" mais 40 % des postes de médecins scolaires du département ne sont pas pourvus et aucune action spécifique en la matière n’est prévue.
La Cour note aussi que l’IPS moyen dans les écoles publiques est "sensiblement inférieur à l’indice moyen des écoles du département", de la Région ou au niveau national, tandis que l’IPS des écoles privées sous contrat est supérieur aux moyennes académique et nationale. Mais aucune mesure destinée à accroître la mixité scolaire n’est prévue, alors que le plan "aborde des thématiques structurantes" comme l’implantation des établissements, le logement et les transports urbains.
Absence de liens entre architecture et pédagogie, absence d’informations sur la pérennisation des mesures
"Le plan Marseille en Grand ne développe pas d’action particulière en matière de climat scolaire (...). Des opérations de construction, reconstruction ou réhabilitation sont prévues dans 188 écoles de la ville" tandis que 82 écoles ont adhéré au dispositif "écoles innovantes" mais "la conduite des opérations bâtimentaires et l’expérimentation de nouvelles modalités d’organisation pédagogique ne sont pas suffisamment mises en lien, alors même que l’ampleur du programme de travaux représente une occasion de prendre en compte les nécessités pédagogiques dans la conception du bâti scolaire."
La Cour note aussi que 2,5 M€ sont prévus pour les écoles innovantes mais que le ministère "n’a pas informé le rectorat "de la période de temps que cette enveloppe doit couvrir, ni des modalités de son renouvellement". Quant aux micro-collèges et micro-lycées, ils "font également l’objet d’incertitudes quant au caractère durable de leur financement", ce qui fait que "les affectations sur les postes de coordonnateurs sont annuelles" et que les professeurs qui y enseignent effectuent par ailleurs leur service à temps complet dans les classes de droit commun de l’établissement et sont rémunérés en heures supplémentaires.
Absence de réflexion partenariale
Plus globalement, le "premier bilan" souligne que la relation entre la Ville et l’Education nationale "s’est construite progressivement" et que "des désaccords persistent". "Un volet éducation davantage coconstruit aurait pu permettre de formaliser une doctrine en matière de prise en compte des enjeux pédagogiques dans les opérations bâtimentaires prenant en considération les préoccupation financières et opérationnelles de la ville, mais également celles de l’Education nationale. À défaut de réflexion partenariale dès la conception du plan, l’État a pris le risque de faire reposer la réussite du volet éducation sur la capacité des acteurs à collaborer dans un domaine où leurs intérêts sont pour partie divergents."
Il n’a pas non plus prévu d’ "ajustement réglementaire" permettant de déroger au droit commun, obligeant parfois les acteurs à composer avec un cadre réglementaire inadapté" ni de distinguer les mesures de remédiation aux principales urgences des projets de développement à long terme du territoire.
A noter que le rapport, téléchargeable ici (PDF), porte sur tous les aspects du plan "Marseille en grand" et que les éléments portant plus spécificiquement sur le volet éducation ont été ici isolés.