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Carte scolaire : le point de vue de chercheurs : Eric Charbonnier (OCDE), Choukri Ben Ayed, Nathalie Mons, Julien Grenet, Laurent Husson, Pierre Merle

10 novembre 2015

Pour Eric Charbonnier, spécialiste de l’éducation à l’OCDE, le plan annoncé ce mardi 10 novembre par Najat Vallaud-Belkacem réussira s’il s’accompagne d’une meilleure formation des profs dans les zones défavorisées.

[...] Najat Vallaud-Belkacem compte aussi associer les parents d’élèves à la démarche, est-ce pertinent ?
La ministre a raison d’insister sur ce point. Comme les élus locaux, les parents d’élèves doivent être associés à l’élaboration des critères d’affectation. La réforme ne marchera pas si elle est appliquée de manière autoritaire et uniforme depuis Paris. Le raté de l’assouplissement de la carte scolaire sous Nicolas Sarkozy l’a montré. Nos études dans les différents pays du monde l’attestent : renforcer l’équité sociale à l’école exige la participation de tous !

Quid des enseignants ?
C’est le grand oubli du plan annoncé par la ministre. Un récent rapport du ministère révèle qu’à profil d’élèves équivalents, deux collèges situés à 300 mètres de distance peuvent avoir des résultats scolaires qui varient du tout au tout. Ce qui fait la différence : le dynamisme de l’équipe des profs et du proviseur. Il faut mettre le paquet sur la formation des enseignants des zones défavorisées et leur offrir des primes et des avancements de carrière plus avantageux. La ville de Shanghai a mené une politique ambitieuse pour attirer les meilleurs profs dans les établissements les plus défavorisés. Résultat, après quelques années, il y a des familles chinoises aisées qui déménagent pour se rapprocher de ces collèges !

La France accuse-t-elle du retard sur le terrain de la mixité sociale des écoles et collèges par rapport aux autres pays ?
La France est le pays qui a l’école la plus inégalitaire des 70 pays étudiés par l’OCDE, ex aequo avec la Nouvelle-Zélande. Et cela s’aggrave : un jeune issu d’un milieu défavorisé a moins de chance de réussir aujourd’hui qu’il y a dix ans ! Notre pays est l’un de ceux où les écarts de réussite entre les collèges et la ségrégation sociale est la plus forte. 1% des collèges accueillent plus de 82% de collégiens défavorisés et 1% des collèges accueillent moins de 3% d’élèves défavorisés. Or, toutes les études prouvent que la mixité sociale améliore la réussite des élèves en difficulté sans pénaliser l’élite.

Extrait de challenge.fr du 10.11.15 : Les enseignants sont les grandes absents du plan vallaud-Belkacem

 

[...] Quels sont les leviers ?

D’abord, le fait de penser la construction de l’offre scolaire de façon cohérente et non établissement par établissement. Par ailleurs, l’indice de mixité sociale proposé par la DEPP est une avancée notable. Et le fait que l’Etat s’engage à fournir ces données aux conseils départementaux, aussi.
Aujourd’hui, ces derniers font les périmètres de la carte scolaire, mais ce sont les inspections académiques qui affectent les élèves. Ce qui est nouveau, c’est de dire que l’affectation des élèves entre plusieurs établissements devrait pouvoir se faire en tenant compte de critères qualitatifs comme ceux notamment liés à l’origine sociale pour constituer de l’équilibre entre établissements. La circulaire de janvier 2015 sur la mixité affirme même que, localement, des acteurs locaux pourront ne plus utiliser Affelnet. Elle précise aussi que si un bon procédé d’affectation est trouvé localement, il sera généralisé nationalement. Ce qui fait reposer un poids considérable sur les expérimentations.

Extrait de lesechos.fr du 10.11.15 : Choukri Ben Ayed : on tend la perche aux parents pour qu’ils n’aillent pas dans le collège de secteur

 

[...] A-t-on déjà mesuré scientifiquement les effets de la mixité (ou de l’absence de mixité) à l’école ?

En France, il y a très peu d’études sur le sujet. En revanche, il existe une grande littérature scientifique internationale, autour de deux champs de recherches. Le premier porte sur les conséquences de la mixité sur les apprentissages scolaires. Un enfant réussit-il moins bien dans une classe hétérogène ? Le sujet a longtemps fait débat, les études récentes arrivent toutes à la même conclusion : la mixité a des effets positifs ou neutres sur les résultats scolaires de l’immense majorité des élèves. A l’exception d’une toute petite élite, qui réussit un peu moins bien scolairement quand elle se retrouve mélangée à des élèves différents.

Mais je ne parle là que de l’impact sur les résultats scolaires. Si l’on regarde les effets de la mixité en termes de cohésion sociale, là, tous les élèves sans exception y gagnent. Même le haut de l’échelle ! La petite élite a tout intérêt à être entourée d’élèves ne venant pas du même milieu, au risque, sinon, de porter un handicap social les pénalisant dans leur vie professionnelle future.

Extrait de liberation.fr du 18.10.11, mis à jour le 10.11.15 : Nathalie Mons : La mixité sociale est un avantage pour tous les élèves sans exception

 

Pour Julien Grenet, chercheur au CNRS et à l’Ecole d’économie de Paris, les logiques "coercitives" sont souvent vouées à l’échec. Il prône la création de "secteurs multi-établissements avec des choix des familles régulés" : les parents émettent des voeux d’affectation au sein des trois ou quatre collèges du secteur, le rectorat distribue les élèves en tenant compte des desiderata et de l’origine sociale des enfants.
D’autant que la mixité sera limitée par la composition sociale des quartiers. Mais dans les grandes villes, souligne M. Grenet, sont juxtaposés des quartiers dotés de populations très différentes. "On peut réfléchir aux manières de tirer avantage de ce maillage social sur le territoire".
Extrait de boursorama.com du 07.11.15 : Favoriser la mixité sociale à l’école : avancer à petits pas sur un sujet polémique

 

Laurent Husson
Maître de Conférences en philosophie , Université de Lorraine

À quels principes de justice et du service public peuvent correspondre la procédure de carte scolaire, son assouplissement ou sa suppression ? La manière dont cette procédure cristallise les débats témoigne des tensions entre le respect des droits fondamentaux et la mise en œuvre de principes de justice, ainsi que des interrogation sur le sens du service public d’éducation.

Extrait de theconversation.fr du 06.11.15 : Carte scolaire, formes de justice et principes du service publc

 

Interview de Pierre Merle Au sommaire de "Fenêtres sur Cours, 12 nov." : Interviews de Pierre Merle sur la carte scolaire, de Patrick Picard sur la formation aux nouveaux programmes, d’une enseignante en ZEP à l’université d’été...

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