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La carte des ZEP en débat à l’Assemblée nationale (suite 1)

7 février 2006

Extrait du site de l’Assemblée nationale, le 07.02.06 : Discussion du projet de loi sur l’égalité des chances

Séance du 2 février

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul, au nom du groupe communiste.

M. Daniel Paul. « Égalité des chances », quel titre ambitieux pour un projet de loi ! Ce texte aurait pour ambition de donner à tous les jeunes les mêmes chances de réussir leur scolarité, de sortir du système éducatif avec une qualification professionnelle, puis d’utiliser leurs diplômes et leurs qualifications pour une insertion professionnelle réussie, débouchant sur un parcours professionnel sécurisé. Ce texte aurait pour ambition de faire passer pour tous les mots dans la réalité. Mais l’on se rend vite compte, à la lecture du texte et en vous écoutant, que derrière la paille des mots, il y a le grain des choses.

Il y a eu le CNE, il y a à présent le CPE. L’objectif reste le même, celui que le MEDEF martèle depuis toujours : remettre en cause le droit du travail. Parce que vous savez que cela risque de susciter une levée de boucliers, vous précipitez les choses : vous procédez par ordonnances, vous décidez l’urgence , et il n’y a pas de discussion en commission.

Nous estimons au contraire qu’il faut faire connaître ce texte, comme nous l’avons fait pour le projet de Constitution européenne, ou pour la directive Bolkestein. Diffuser dans la population, parmi tous les jeunes, aux entrées des lycées, dans les facultés, ce que vous préparez, est porteur de responsabilité et de citoyenneté. D’ailleurs, les jeunes ne s’y trompent pas qui ont vite compris que le CPE « c’est pour exploiter ». L’un d’eux commente : « quand tu es à l’essai pour quelques mois, ou pour deux ans avec le CPE, tu fais profil bas pour tenter de garder ton emploi. »

Les salariés ne s’y trompent pas non plus : ils ont compris que votre objectif, celui du MEDEF, est de généraliser ce qui s’avère être effectivement des droits nouveaux, mais au bénéfice des patrons, et non des salariés.

Comme nous sommes loin de l’égalité des chances ! Votre texte suinte par tous ses articles la volonté de remettre en cause le résultat de décennies de luttes populaires : le droit, même quand on est un salarié, de mener une vie plus sûre et plus facile. Tout ce que vous voulez, vous, ce sont des salariés soumis.

C’est le sens du « contrat de responsabilité parentale », qui voudrait faire croire que la sanction financière est la solution universelle : il s’agit de « frapper au portefeuille », même vide. C’est le sens du « contrat d’apprentissage junior », qui rompt avec la volonté, au moins affichée, de favoriser la formation professionnelle. En effet la création de ce nouveau contrat ferait de l’apprentissage la sanction de l’échec, tant scolaire que personnel. C’est le sens de la suppression du Fonds d’action et de soutien pour l’intégration et la lutte contre les discriminations, le FASILD, institution dont l’action en matière de lutte contre les discriminations est pourtant reconnue, au profit d’une agence nationale aux finalités mal définies. Cette suppression s’accompagne d’une baisse continue des moyens budgétaires consacrés à cette action, qui rend de plus en plus difficile le combat quotidien contre les discriminations.

Tout indique que le Gouvernement est décidé à accélérer l’adaptation de notre pays et de notre peuple aux exigences d’une économie libérale. C’est la mise à mal des procédures collectives, des protections sociales, dans une fuite en avant dangereuse pour les droits sociaux et le code du travail. La présidente du MEDEF a toutes les raisons de se réjouir : nous sommes loin de l’idée républicaine d’égalité.

Il y a trois mois, la détresse et la colère explosaient dans nombre de quartiers de nos villes. Insultés, méprisés, oubliés, ceux-là disaient leur révolte, appelant ainsi notre société à ouvrir les yeux sur l’aggravation de ses fractures. Loin d’être à la hauteur des enjeux, votre texte nourrira au contraire cette crise.
Vous avez été contraint, monsieur de Robien, de renvoyer sine die votre projet de compression de la carte des ZEP tant il suscitait d’opposition.

(...)

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. Monsieur le ministre, un droit ne vaut que si l’on a les moyens de le faire respecter. En matière d’éducation nationale ou dans tout autre domaine, ce beau mot ne vaut rien sans moyen. La région havraise, que je connais très bien, souffre plus que d’autres de l’échec scolaire, des difficultés d’insertion professionnelle, du chômage - avec un taux supérieur de 3 points à celui de la moyenne - et de la précarité.

Or, sur les sept collèges - sept sur neuf ! - inscrits en ZEP de ma circonscription, il n’en subsistait plus que trois dans le premier projet du rectorat. On n’avait tenu aucun compte des réalités sociales et économiques des quatre autres collèges, l’objectif étant tout simplement de récupérer des moyens.

J’en viens à l’apprentissage. Dans une vie antérieure, monsieur le ministre, j’ai géré un centre d’apprentissage, un CFA municipal. Pour moi, l’apprentissage devait être normalisé, banalisé et devenir une voie normale de la réussite. Avec votre texte, faute de donner les moyens de réussir aux enfants en difficulté, vous allez en faire un chemin vers l’échec.

S’agissant enfin des classes d’intégration scolaire, ces classes qui accueillent des enfants dont les difficultés sont telles qu’ils ne peuvent rester dans des classes dites ordinaires, je suis de ceux qui pensent qu’il n’y a pas, en effet, d’alternative aux CLIS tout simplement par manque d’enseignants formés pour recevoir des enfants en grande difficulté. Là encore, monsieur le ministre, le droit n’est pas accompagné de moyens.

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