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"Devenir enseignant : la formation initiale et le recrutement des enseignants" (un nouveau rapport de la Cour des comptes)

2 février 2023

Métier enseignant : La Cour des Comptes opte pour les contractuels

« Au-delà des améliorations techniques de la réforme de 2019, une refonte plus globale des modes de formation et de recrutement des enseignants est nécessaire », estime la Cour des Comptes dans un nouveau rapport présenté le 1er février. « L’attractivité du métier enseignant ne peut se résumer à une question salariale ». Puisque ce n’est pas un problème de salaire et puisque les concours n’arrivent pas à faire le plein, la solution est vite trouvée : il suffit des les supprimer. Et pour assurer l’attractivité partout, de payer différemment les enseignants selon les académies. Pour les professeurs des écoles, sans aller jusqu’à la réouverture des écoles normales, la Cour des Comptes demande une formation spécifique basée sur une licence professionnelle. Quelques jours après un rapport qui demandait la mise sous contrat des établissements publics, la Cour est toujours dans l’optique d’une gestion privée du service éducatif public.

La masterisation « déstabilisante »

La Cour des Comptes ne l’ignore pas , il y a bien une baisse d’attractivité des concours de l’enseignement que la Cour évalue tout en restant curieusement sur les chiffres de 2021, alors que 2022 a vu près de 4000 postes laissés vacants. Or, pour la Cour, « la qualité du recrutement et de la formation des enseignants est cruciale pour la performance de l’école ». La crise du recrutement amène une baisse de cette qualité selon les académies et les disciplines. Ainsi dans le second degré le nombre de candidats par poste peut atteindre 6 en SVT mais moins de 1 en lettres classiques ou tout juste 1 en allemand. Dans le premier degré, ni Créteil ni Versailles n’arrivent à avoir assez de candidats.

Pour expliquer cette crise du recrutement, curieusement, la Cour ne s’appesantit pas sur la faiblesse des salaires, alors que sa mission première est bien de veiller aux deniers de l’Etat. Elle montre le brouillard entretenu par le ministère sur les flux de recrutement (brouillard qui s’est étendu jusqu’aux demandes de la Cour) et « la persistance d’une perception peu valorisante du métier par les étudiants ». Là dessus la Cour a fait réaliser un sondage auprès de 2000 étudiants qui montre par exemple que ceux ci sous estiment les salaires enseignants. Les dispositifs mis en place par le ministère (PPPE, pré-recrutements) apparaissent comme complexes, « difficiles à concilier ».

Surtout , la Cour s’attaque aux réformes de la formation des enseignants. Elle comprend que la masterisation ne peut plus être remise en cause même si elle est « déstabilisante ». Mais déplore « des logiques de formation imposées par les lois successives sans mise en cohérence satisfaisante ». « La décision de recruter des enseignants désormais titulaires d’un master pose avec une plus grande acuité la question de l’articulation entre le concours et la formation universitaire, puisqu’il n’est plus envisageable de consacrer une année particulière à la préparation des concours. À cet égard, la doctrine du ministère sur le positionnement du concours a changé à trois reprises : en fin de M2 lors de la réforme en 2010, en fin de M1 lors de la réforme de 2012/2013, puis à nouveau en fin de M2 avec la réforme de 2019 », relève la Cour. « La liberté de passer par des formations diverses et l’importance numérique des candidats non étudiants renforcent la fonction « couperet » des concours, qui vérifient alors les contenus disciplinaires et la capacité à les transmettre des futurs enseignants. Ceci conduit à penser des concours hybrides, jugés régulièrement encore trop « académiques » et peu « professionnels » ou à l’inverse trop peu disciplinaires ». La seconde année de master apparait comme « trop dense », ce qui est confirmé par les étudiants. De plus le ministère a donné « la priorité à la gestion des moyens plutôt qu’aux logiques de formation ». Cela se lit par exemple dans l’utilisation des professeurs stagiaires selon le type de master qu’ils détiennent. Les master MEEF par exemple vont directement en classe à temps complet.

Supprimer les concours

Puisque les concours sont mal ficelés et nuisent à la lisibilité de l’accès dans le métier, la Cour des Comptes invite à les supprimer là où la crise du recrutement sévit le plus. « Les difficultés de recrutement sont concentrées géographiquement sur des académies, Créteil et Versailles pour le premier degré, et, dans certaines disciplines dans le second degré… Aussi les étudiants pourraient-ils être recrutés, « directement » par la voie contractuelle, sur une durée comprise entre trois et cinq ans, accompagnés davantage dans leur prise de poste, avec pour contrepartie leur affectation dans les académies concernées sur un poste précis avec engagement d’y demeurer pour la durée du contrat. Les conditions de diplôme et dispense seraient identiques à celles requises pour les concours.. L’acte de recrutement pourrait se formaliser par un ou deux entretiens pilotés par les autorités rectorales ». C’est tout simplement le remplacement du recrutement sur concours par la contractualisation par job dating dans une grande partie des disciplines du 2d degré (lettres, maths, allemand, anglais par exemple) avec un contrat plus long que ceux des contractuels actuels et, souhaite la Cour, un meilleur accompagnement.

Une formation spécifique pour le premier degré

Pour le premier degré, la Cour n’ose pas remettre en question la masterisation mais change complètement la formation universitaire des futurs PE. Ils seraient recrutés (en dehors des académies déficitaires) après une licence professionnelle suivie d’un master MEEF et non plus après une licence ordinaire. En fait c’est le modèle des PPPE , imaginé par JM BLanquer, que la Cour veut généraliser. IL s’agit aussi de dissocier la formation des futurs PE de celle des enseignants du second degré, ce qui est encore une nouvelle rupture.

Différencier la paye plutôt que revaloriser

Troisième réforme demandée par la Cour, la différenciation de la paye en fonction des territoires plutôt que la revalorisation générale. » Une différenciation plus grande des rémunérations selon les territoires (qui existe déjà mais de façon très encadrée pour le recrutement des contractuels) doit ainsi pouvoir se développer, afin de compenser cette inégale attractivité (primes de stabilité comme cela a été instauré en Seine-Saint-Denis pour les fonctionnaires, primes spécifiques, avantages en termes de carrière, visibilité et garanties sur les perspectives de mobilité, etc.). Il conviendra de s’assurer surtout que de telles modalités ne produisent pas d’effet d’aubaine ni reconventionnel, ce qui suppose que les recteurs puissent cibler ces mesures, selon les besoins, sur les établissements les moins attractifs ».

Des propositions déjà reprises par le ministre

La Cour des Comptes poursuit donc sa pression sur l’Ecole. Les remèdes qu’elle propose sont ceux d’une gestion privée du service éducatif, ce qui explique que l’on parle de privatisation. C’est bien une rupture pour l’éducation nationale. La question c’est l’accueil que va avoir ce rapport. Rappelons que Pap Ndiaye a déjà évoqué le recrutement de professeurs des écoles après une licence. Les concours exceptionnels annoncés pour 2023 permettront même leur recrutement à bac 2. Le 25 janvier, le ministre évoquait devant l’Assemblée le recrutement » d’élèves professeurs titularisés à l’issue de 5 années de formation ». C4est exactement le schéma recommandé par la Cour des Comptes.

François Jarraud

Le rapport sur le site de la Cour

Extrait de cafepedagogique.net du 01.02.23

 

La Cour des comptes appelle à une « refonte » de la formation et du recrutement des enseignants
Elle propose de diversifier le recrutement au profit des publics en reconversion professionnelle, ou de compenser le manque d’attractivité de certains établissements en débloquant des « moyens financiers spécifiques ».

Par Le Parisien avec AFP

Comment attirer les futurs enseignants ? Face à la forte crise que traverse le métier, la Cour des comptes juge « nécessaire » une « refonte » des modes de formation et de recrutement des enseignants, dans un rapport publié mercredi. Dans cette note portant sur « la formation initiale et le recrutement des enseignants des premier et second degrés », la Cour rappelle qu’ont eu lieu « plusieurs réformes au cours des dernières décennies. » Elle estime toutefois que ce nouveau cadre « demeure instable » depuis 2010, date de l’élévation du diplôme exigé, désormais un master contre un bac + 3 auparavant.

[...] Sur le recrutement, elle propose de diversifier les viviers au profit des publics en reconversion professionnelle, ou de compenser le manque d’attractivité de certains établissements des académies de Créteil et Versailles en permettant « aux recteurs de mettre en œuvre de façon ciblée des mesures et moyens financiers spécifiques .

Une difficulté à recruter dans certains territoires
Car pour elle, « les inégalités territoriales d’attractivité du métier » doivent être compensées « par une différenciation plus forte » au profit de ces deux académies. Elle estime aussi que, dans les académies en difficulté et disciplines en tension, « les rectorats pourraient recruter sur diplômes, via un contrat d’une durée pluriannuelle (trois à cinq ans), pendant laquelle les candidats s’engageraient à rester en poste ».

Sur la formation, elle suggère d’« instaurer pour les enseignants contractuels une formation obligatoire d’au moins une semaine », ou encore d’ « inscrire l’accueil » des nouveaux enseignants « dans les projets d’école et d’établissement ». Elle estime encore que pour le premier degré, « la construction de véritables licences professionnalisantes conduisant à l’enseignement, et de façon privilégiée au master MEEF (Métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation), devrait être fortement encouragée ».

Extrait de leparisien.fr du 01.02.23

 

Éducation : la dégradation du métier d’enseignant soulignée par la Cour des comptes
Niveau en baisse, difficultés de recrutement : l’Éducation nationale n’est pas au mieux de sa forme. Dans un rapport publié mercredi 1er février, la Cour des comptes invite à expérimenter de nouvelles solutions dans les académies où la situation est la plus critique.

Extrait de ouest-france.fr du 01.02.23

 

Cour des comptes : un rapport sur fond de renoncement pour le SE-UNSA

Dans un communiqué, le SE-UNSA accuse la cour des comptes de de « renoncement pour le recrutement et la formation des enseignants » dans son rapport « Devenir enseignant : La formation initiale et le recrutement des enseignants des premier et second degrés ».

« La Cour des comptes porte un regard assez lucide sur les défauts cumulatifs des multiples réformes de la formation. Elle note un important défaut d’articulation entre politique du recrutement et politique de la formation, avec un décrochage important induit par la réforme de la masterisation en 2010. On se souvient qu’à l’époque, Nicolas Sarkozy alors Président de la République, a détruit le système de formation pour récupérer les moyens qui lui étaient alloués.

Néanmoins, plutôt qu’une refonte profonde accompagnée d’un investissement massif, la Cour des comptes propose des rustines en forme de renoncements. Le premier d’entre eux étant d’envisager une différenciation entre le recrutement des enseignants du premier et du second degrés.

L’exemple du recrutement par voie contractuelle dans les territoires et disciplines déficitaires, assortie de contreparties financières, va ainsi à rebours d’une « politique de recrutement volontariste et rigoureuse » qu’elle juge pourtant nécessaire. Ces mesures ciblées à l’échelle de l’école ou de l’établissement pour s’éviter des réponses globales et donc coûteuses, seraient inefficaces et dangereuses : elles ne feraient qu’accroître l’illisibilité des voies de recrutement et des rémunérations.

Il est urgent que l’exécutif et le ministre s’engagent résolument à construire un système lisible et sécurisant de recrutement et de formation. En complément, et de façon obligatoire, ils doivent s’interroger non seulement sur les moyens de donner envie d’être enseignant, mais également sur ceux qui donnent envie de le rester ».

Extrait de cafepedagogique.net du 02.02.23

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