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Parentalité et éducation des enfants au sein des familles de quartiers populaires : une enquête de l’Afev

27 septembre 2024

ENQUÊTE
Parentalité et éducation des enfants au sein des familles de quartiers populaires

Enquête réalisée de mai à juillet 2024 auprès de 737 parents des quartiers populaires
Passation assurée par l’Afev, traitements et analyse réalisés par
TRAJECTOIRES-REFLEX

Septembre 2024

Consulter l’enquête (36 p.)

EXTRAIT (page 34)

Conclusion

En donnant la parole aux familles de quartiers populaires, notre enquête contribue à mettre concrètement en évidence les conditions de vie et les difficultés qui complexifient l’exercice de la parentalité, notamment pour les profils de familles les plus fragiles (familles monoparentales, issues de l’immigration, allophones...).
Ces familles sont globalement dans des situations financières difficiles. 38% des parents interrogés déclarent avoir un niveau de revenus inférieur ou égal au SMIC. Les familles monoparentales, avec un seul pourvoyeur de ressources, sont d’autant plus sujettes à la précarité financière. Les parents de quartiers populaires interrogés sont aussi davantage confrontés à la précarité de l’emploi, et travaillent souvent en horaires atypiques ou décalés : c’est le cas de 69% des répondants en emploi. Les parents de QPV ont aussi davantage d’enfants : 56% des familles interrogées ont 3 enfants ou plus. C’est bien le cumul de ces difficultés qui fragilise les conditions de vie des familles de quartiers prioritaires.
Dans ces conditions, les parents de quartiers d’habitat social sont souvent contraints de s’occuper seuls de leurs enfants.
C’est le cas d’une famille sur deux. Ils sont aussi limités dans la possibilité de passer du temps avec leurs enfants pour des loisirs, activités culturelles et sportives. Un tiers des parents aimeraient profiter plus souvent de ces moments partagés. Le manque de temps, les contraintes financières et de déplacements sont les principaux freins évoqués. Ils pèsent d’autant plus pour les plus fragiles (les plus bas revenus, les monoparents). Ces parents bénéficient encore moins souvent de moments de répit, seuls ou avec leur conjoint, sans les enfants.
La scolarité des enfants est une préoccupation de premierordre pour ces parents qui majoritairement, font confiance dans l’institution scolaire. C’est toutefois un très fort sujet d’inquiétude pour l’avenir de leurs enfants. Près de 4 familles interrogées sur 10 sont en difficulté pour aider leurs enfants à faire les devoirs. Parmi elles, 51% expriment la peur de se tromper, 21% ont été eux-mêmes en échec scolaire et 23% ne maîtrisent pas la langue.

Même si la majorité des parents participent aux temps organisés par l’école, une partie s’en tient néanmoins « à distance », du fait de la barrière de la langue pour certains, mais surtout d’un
sentiment d’illégitimité vis-à-vis de l’institution.

Au regard de ces difficultés, les parents sont en demande d’accompagnement, sans nécessairement trouver l’aide dont ils auraient besoin. La moitié n’ont pas de solution pour répondre à leurs inquiétudes dans l’éducation des enfants. 44% souhaiteraient être davantage aidés dans leur rôle de parent. Les thématiques sur lesquelles ils sont le plus en demande sont la scolarité, l’aide aux devoirs et l’orientation scolaire. Les parents de jeunes enfants sont aussi intéressés par les thématiques du bien-être, de la socialisation de l’enfant et de la gestion de ses émotions ; et les parents d’enfants d’adolescents par les usages des réseaux sociaux et l’exposition aux écrans.

C’est ainsi une tout autre réalité que donne à voir la parole des familles interrogées que celle que voulaient transmettre certaines réactions « à chaud » face aux émeutes de l’été dernier. Loin d’être démissionnaires, ces parents, comme tous les parents, sont très préoccupés par l’éducation de leurs enfants. Ils n’ont toutefois pas ni les conditions de vie, ni l’outillage socio-culturel qui leur permettraient d’exercer au mieux leur parentalité. Leur inquiétude et leur demande d’accompagnement en témoignent. Il est ainsi un enjeu fort à renforcer et adapter les politiques d’accompagnement à la parentalité pour mieux répondre à leurs besoins.

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La 17e édition de la journée du Refus de l’échec scolaire (25 septembre 2024)

17ème édition : La parentalité à l’épreuve des inégalités

Pour sa 17ème édition dédiée aux inégalités rencontrées dans l’exercice de la parentalité, Serge Hefez sera le parrain.

La parentalité est un enjeu central dans la lutte contre les inégalités éducatives. Alors que plus de deux parents sur cinq estiment aujourd’hui difficile l’exercice de leur rôle, les familles de milieux populaires, souvent stigmatisées, font particulièrement face à des défis multiples et complexes dans l’éducation de leurs enfants. La JRES explorera ces enjeux cruciaux et proposera des pistes de réflexion et d’action.

Cette 17eme édition sera construite, comme les précédentes, à partir d’une enquête exclusive menée auprès des familles des quartiers prioritaires qui leur permettra de s’exprimer sur leurs vécus et besoins en tant que parents.
Un grand débat national sera organisé à Paris permettant à des parents, des spécialistes, des acteurs institutionnels et de terrain de partager leurs constats, leurs expériences, les solutions existantes et celles à mettre en œuvre.

3 questions à Serge Hefez, psychiatre et psychanalyste, parrain de la JRES
De nombreuses voix politiques se sont fait entendre sur les défaillances des parents des quartiers au moment des émeutes de l’été 2023. Pourquoi avoir accepté de présider la commission « Pour nos enfants et nos adolescents : soutenir la parentalité « réinstallée en avril 2024 par Sarah El Haïry, ministre déléguée chargée de l’Enfance, de la Jeunesse et des Familles ?

S.H : Précisément pour aller à l’encontre de ces accusations formulées injustement à l’encontre des parents. Il existe bien sûr des familles défaillantes qui maltraitent leurs enfants et sont incapables de leur transmettre des valeurs. Mais la plupart des familles sont des familles aimantes qui cherchent à être soutenantes. Certaines peuvent se trouver en situation de défaillance pour des motifs divers : deuils, traumatismes, séparations, exil, cumul de difficultés sociales et économiques etc. Face à cela, c’est à notre société d’éviter la défaillance, en multipliant les offres de soutien à la parentalité, les dispositifs de médiation, avant que les familles n’aient besoin d’avoir recours à la psychiatrie ou à l’aide sociale à l’enfance. Il s’agit de trouver dans la société, dans la communauté, des actions aptes à calmer un début de situation de crise. C’est l’idée du village autour d’un enfant, de l’entraide communautaire, des médiateurs locaux.

Pensez vous aujourd’hui que les parents sont suffisamment « soutenus » dans l’exercice de leur parentalité ?

S.H : Non, car il existe aujourd’hui un véritable malaise dans la parentalité lié à un climat d’angoisse générée par la succession de crises que nous traversons depuis quelques années (attentats, crise sanitaire, recrudescence des conflits armés, catastrophe écologique), auquel s’ajoute une violence systémique que connaissent tous les jeunes à travers les réseaux sociaux (harcèlement, diffamation, chantage…). Les parents sont un peu débordés par toutes ces situations nouvelles. On voit aussi surgir dans l’espace public des débats sur comment faire avec nos enfants, les uns prônant la punition dans la chambre, les autres la bienveillance. Cela montre bien qu’il y a un malaise par rapport à des questions de bon sens auxquelles les parents sont confrontés depuis toujours : comment éduque-t-on les enfants ? On observe aussi une vision moins pyramidale de la famille, plus démocratique, dans laquelle l’enfant est toujours sollicité pour donner son avis ou faire des choix le concernant.

Considérez-vous que les jeunes engagés de l’Afev qui tissent un lien de confiance tout au long de l’année avec les parents des enfants qu’ils mentorent en les rencontrant toutes les semaines à leur domicile, exercent en quelque sorte une fonction informelle de soutien à la parentalité ?

S.H : Bien sûr ! Soutenir signifie tout simplement servir de support, d’appui, pour aider quelqu’un à se maintenir en place. L’entraide, le soutien communautaire sont le socle du lien social et sont tout aussi précieux que les soutiens spécialisés sanitaires ou sociaux. Ils se fondent sur une relation horizontale, non hiérarchisée : les enfants sont soutenus dans leur scolarité, les parents sont soulagés d’un fardeau. Qu’est-ce que ces jeunes engagés dans l’AFEV vont eux-mêmes tirer de cette expérience au contact de toutes ces trajectoires de vie, de toutes ces cultures peut-être éloignées de la leur ? Il est certainement intéressant d’explorer cela !

L’engagement de l’Afev auprès des familles
L’Afev s’engage pleinement aux côtés des familles en mettant l’accent sur l’appui à la parentalité au sein nos programmes avec une attention particulière portée dans le cadre du mentorat. En généralisant l’intervention au domicile des mentorés, les étudiants engagés développent une relation privilégiée avec les familles, renforçant ainsi le lien crucial entre les familles et l’école. Chaque année nos programmes touchent près de 20 000 familles, avec une attention particulière portée aux familles monoparentales, primo-arrivantes, allophones, ainsi qu’à celles en situation d’illettrisme ou d’illectronisme ; autant de défis spécifiques qui s’ajoutent à un exercice de la parentalité déjà complexe.

Extrait de afev.org

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