B* Du partage des valeurs citoyennes vers une réelle coéducation famille/école à travers divers modes d’actions à la maternelle REP+ Emile Zola de Montluçon

23 avril 2018

Du partage des valeurs citoyennes vers une réelle coéducation famille/école

Ecole maternelle [REP+] Emile Zola
16 RUE MAZAGRAN , 03100 MONTLUCON
Site du PASI académique
Auteur : TRONCY Cécile
Mél : maternelle.ezola.montlucon.03@ac-cl...

Comment recréer du lien avec les familles dans toute leur diversité et développer des temps de partage avec une confiance réciproque ? Ces premières années d’école maternelle sont pour les familles une découverte peuplée de souvenirs … Les contraintes modernes et l’évolution de la société font appel à des adaptations.
Notre réponse : Proposer différentes actions aux familles en jouant sur des temps de RDV, des activités … allant d’une soirée où l’on prépare et partage une soupe, à une « causerie » entre adultes à l’heure du thé ou à des mercredis où petits et grands patouillent dans la peinture…

Plus-value de l’action
L’effet le plus intéressant est depuis cette année, une participation plus importante de familles qui n’étaient pas habituées à venir aux actions proposées par l’école et leur regard positif porté sur ces actions d’autant qu’ils nous le communiquent personnellement. Tout ceci participant grandement à une amélioration du climat scolaire.

Nombre d’élèves et niveau(x) concernés
3 classes d’une école maternelle de 67 élèves située en REP+. TPS : 22 MS : 25 GS : 20

A l’origine
Nous avons comme point de départ constaté une nécessité grandissante d’échanger avec les familles d’autant que les derniers programmes et le projet REP+ nous y ont encouragés. En 2013, la loi d’orientation et de programmation de la refondation de l’Ecole stipulait le renforcement de la coopération des parents avec l’école dans les territoires. Comme le démontrent G. Chauveau et E-R Chauveau (1992), la réussite des élèves est en partie conditionnée par les relations école famille. Une relation de qualité est un incontournable pour faire progresser les élèves, tous les élèves. Nous avions aussi remarqué des difficultés pour prendre contact avec certaines familles et cela pour de multiples raisons. D’autre part, l’investissement des familles dans la vie de l’école concerne seulement un petit nombre s’autoqualifiant de « toujours les mêmes », nous les appellerons les « habitués ». En outre, leur nombre tend à diminuer au fil des années.
Depuis quelques années, l’école a diversifié ses actions pour s’ouvrir aux familles. Cette action a pris naissance avec des temps de causeries (petites réunions d’une heure avec quelques familles et les enseignants), et des temps de jeux en familles à l’heure du goûter avec les GS. Tous ces moments ont reçu un bel accueil. Deux ans après, des soirées à thème ont eu aussi leur succès. Toutes ces actions se basaient et se basent toujours sur la recherche de moyens de donner l’occasion aux familles d’observer leur enfant à l’école, de reprendre contact avec le milieu scolaire, d’échanger avec des enseignants lors de temps moins formels… de créer, recréer un lien indispensable à une scolarité sereine et bienveillante. Toutefois l’impact sur l’ensemble des familles reste trop limité et réduit aux familles « habituées ».
Lors de ces premiers échanges, partages, une attente émanant de la part des familles et répondant à des constats de l’équipe s’est formulée. En effet, les parents sont, malgré des apparences parfois trompeuses, très en attente de réponses éducatives. Le rôle de l’école a tendance à évoluer vers une recherche voire la prise en compte de la co-éducation (Mackiewicz, 2010). En outre, nous observions un intérêt particulier des familles pour certaines actions qui se perpétuent de fait depuis un grand nombre d’années comme le goûter et la chorale de noël, le carnaval, la fête de l’école…
De ces actions, nous relevions que la convivialité, la présence de nourriture favorisent les échanges. Il nous est apparu essentiel de proposer des actions avec des thématiques et/ou des conditions attractives, rassurantes, motivantes pour les familles… Des actions au travers desquelles des messages de coéducation trouveraient leur place en donnant à voir des actions au sein de l’école. Elles différent de l’image que les parents peuvent avoir de l’école, ce qui peut parfois être un frein au partage et échanges recherchés.
Nous en déduisons qu’il est opportun de proposer plusieurs modules pour cette action afin d’offrir une variété d’actions pour développer une relation avec les familles qui ne font pas encore partie des « habituées » de l’école.

Objectifs poursuivis
• Maintenir le lien social créé avec les familles et l’ouvrir aux nouvelles.
• Développer et enrichir les liens de partage, la recherche de confiance mutuelle pour faciliter les échanges permettant la mise en place d’une coéducation école/famille en s’appuyant sur des aspects culturels.
• Diversifier les actions afin de répondre aux différentes contraintes rencontrées par les familles et donner des choix variés qui se veulent attractifs pour des familles plus réticentes pour « contrarier les représentations qu’elles pourraient avoir ».

Description
Parvenir à un échange de valeurs citoyennes pour développer une réelle éducation, terreau nécessaire pour améliorer les chances de réussite des élèves, est le but de cette action qui s’appuie sur des moyens en tenant compte de nos possibilités. Une action évolutive.
Cette action a pris naissance, il y a quatre ans, juste après les attentats de Charlie Hebdo. Nous avons cherché à prendre en compte les observations menées année après année afin d’améliorer la relation école-famille et de tendre vers le développement de la co-éducation.
Les deux premières années, nous avons proposé les « causeries », et pour les GS des temps de jeux de société en famille décrits ci-dessous dans les deux premiers modules. Après deux années de fonctionnement, nous avons constaté que seules des familles les plus à l’aise et habituées venaient. Nous avons donc souhaité élargir notre action à de nouvelles familles.
Les grandes veillées ont alors complété le dispositif. Elles sont présentées dans le troisième module. Malgré cette ouverture, certaines familles restaient toujours à distance de l’école. Or, nous ne pouvons développer la coéducation sans les familles !
Cette année, nous orientons différemment l’action en la complétant par un nouveau module. Il a pour but de donner aux familles « à voir et à vivre » avec leur(s) enfant(s) une situation proche d’une situation scolaire. Nous avons par ailleurs choisi une thématique culturelle permettant une expression plus libérée. Ce module est intitulé : les mercredis matin culturels. C’est le quatrième et dernier module de cette action.
Enfin, une réorganisation spatiale de l’école nous a permis de créer un coin des familles afin de laisser des traces des actions, de créer des espaces d’échanges oraux et écrits…
La co-éducation dans le fond et non la forme. L’action propose d’une part des temps de partage avec des thèmes explicitement éducatifs, et d’une autre part et en plus grand nombre des activités « prétextes » au développement d’une co-éducation comme une soirée soupe avec sa préparation ou sa dégustation, des jeux de société…. Ces activités proches du quotidien de chacun, par l’action, par le vécu, par le concret permettent non seulement de diffuser des messages éducatifs mais aussi de les échanger, de les renforcer sans avoir recours à un discours injonctif.
Cette année, nous avons complété les propositions par des actions avec une connotation plus culturelle et plus participative afin de faire passer, toujours par le vécu et le concret, des messages à teneur éducative plus proches des attendus scolaires.
Le moyen de parvenir à une co-éducation est bien de ne pas employer la prescription et l’injonction mais de donner aux familles l’occasion d’observer d’autres comportements d’enfants, leur enfant dans d’autres situations où l’attente diffère de celle qu’ils peuvent développer.
Une variété de propositions : L’action proposée cette année se décompose en quatre modules : les grandes veillées de l’école, les mercredis culturels, les « causeries », les goûters : jeux de société. L’organisation de chaque module est différente au niveau du rythme, des périodes de l’année, des créneaux horaires, des jours et des modalités de participation.
Les modules : Ils sont présentés dans l’ordre chronologique d’apparition.
Au cours de la première période, le module « les goûters : jeux de société ». Il se déroule trois mardis soir successifs à la sortie scolaire pour une durée d’une heure et demie. Toutes les familles sont informées par le cahier de liaison et un affichage collectif à l’entrée de l’école. Les familles qui souhaitent participer se signalent auprès des enseignants. Les élèves à besoins spécifiques sont quant à eux, sollicités à venir même non accompagnés. Lors de ces temps, des jeux de société sont proposés aux enfants qui jouent entre eux ou avec un adulte. Les enseignants accompagnent selon les besoins à la mise en œuvre des jeux ou jouent avec les familles. Ce temps peut se clore par un prêt de jeux pour les familles qui le souhaitent. Ce module instaure une première communication facilitée par l’aspect ludique de la situation et engage les premiers messages éducatifs : apprentissage du respect des règles de jeu, de l’acceptation de perdre, d’aller jusqu’au bout d’un jeu quelle que soit l’issue, de jouer avec autrui et de le respecter, de prendre soin d’un jeu en utilisant les pièces du jeu pour un usage approprié, de participer au rangement du jeu… En outre, les parents pour certains découvrent ou redécouvrent le plaisir de jouer aux jeux de société avec leurs enfants.
Le deuxième module : « les causeries » donne lieu à trois rendez-vous répartis sur l’année. Les parents sont en priorité invités seuls mais ils peuvent toutefois être accompagnés de leurs enfants. L’ambiance lors de ces temps est « soignée » afin de créer une réelle convivialité au sein de l’école. Nous proposons une petite collation (petits gâteaux, infusions, jus de fruits…). Nous souhaitons créer ainsi une atmosphère propice aux échanges. Chaque membre de ces causeries parents comme enseignants sont assis autour d’une même table sans hiérarchie. Les thèmes portent sur l’éducation. Ils sont pour la plupart suggérés par les parents (le sommeil, ce qu’il faut dire ou pas dire à son enfant, jouer avec son enfant, les alternatives aux punitions et aux fessées, éduquer avec bienveillance, les écrans…). Ils ont lieu les mardis soir, après la classe à partir de 16h30 jusqu’à 18 heures. Auparavant, nous menions ces temps en parallèle des TAP facilitant ainsi la venue des parents. Le retour à la semaine de 4 jours ne nous laisse plus cette possibilité. De ce fait, le nombre de familles participantes a chuté.
Le troisième module est appelé les « Les grandes veillées en famille à Zola ». Il se présente sous la forme de trois soirées de 18h00 à 21h00, une par trimestre. L’horaire tardif permet à un nombre plus important de familles de participer. Les thèmes sont choisis en fonction de plusieurs critères : les attentes des familles, la recherche de la convivialité (cuisine, fête …), du partage culturel (culinaires, festifs…) mais aussi la possibilité de transmettre, de faire vivre un message éducatif de façon sous-tendue. Ces situations festives vont de la préparation et dégustation d’une soupe à la mise en place d’un coin « jardin de partage » … L’enjeu principal de ce module est de permettre un premier contact pour les « non habitués » dans une situation avec une dominante orientée plus fortement vers la festivité. En répartissant trois rdv sur l’année avec des thèmes très distincts, cela permet à ces familles de prendre le temps de connaître l’école, de se retrouver dans une de ces propositions. Le dernier module concerne les mercredis culturels. Il s’appuie sur un projet artistique qui permettra de décorer la cour de l’école. Les productions seront exposées lors de la dernière grande veillée et lors de la fête de l’école. Il est organisé selon deux sessions de 3 mercredis matin, 2 heures par session, 1 en janvier (période 3) et 1 en mars (période 4). Des groupes d’enfants multi-niveaux accompagnés de leurs parents participent volontairement ou sur proposition des enseignants. Pour chaque matinée, ils participeront à deux ateliers sur trois proposés. Ce module permet aux élèves et à leur famille d’accentuer leur sentiment d’appartenance à l’école en valorisant conjointement leurs productions.

Modalité de mise en œuvre
Une partie des modalités de mise en œuvre étant une composante de l’action a été exposée dans sa description. A présent, nous l’abordons indépendamment des différents modules. Le calendrier proposé répartit les actions sur l’année avec une grande veillée par trimestre, une session de jeux collectifs de trois mardis soirs après la classe en novembre, deux sessions de trois mercredis matin « culturels » dont une en janvier et une en mars. Pour toutes ces actions les enfants viennent accompagnés de leur famille. Par ailleurs, une causerie par trimestre est organisée.
Chaque action est présentée aux familles sous différentes formes et par différents moyens afin de la rendre accessible au plus grand nombre compte tenu de notre situation en REP+. Différents moyens de communications sont employés certains à l’écrit d’autres à l‘oral. Ils se déclinent à l’écrit sous forme d’un mot dans le cahier de liaison distribuée à chaque famille. L’information est reprise par affichage à l’entrée dans la cour de l’école, seul point commun d’accès, et sur chaque porte d’entrée correspondant aux différentes classes. Parallèlement, les enseignantes expliquent à plusieurs reprises oralement l’action aux parents. En général, ils attendent que quelques parents soient regroupés à l’accueil, à la sortie ou individuellement lors de l’accueil pour les parents dont la maîtrise de la langue est la plus fragile afin de s’assurer de la compréhension du message transmis.
Dans un deuxième temps, après avoir analysé les réponses, nous revenons vers les familles ayant émis une réponse négative et proposons des adaptations, des facilitations ( venir avec le grand frère, pouvoir partir plus tôt en raison d’un RDV…), donnons des précisions, cherchons à comprendre la teneur du refus et cela notamment pour les familles dont l’enfant est repéré avec des besoins, incitons en rassurant les mamans les plus discrètes, n’osant pas entrer en contact parfois impressionnée par l’école et ses représentants.

Trois ressources ou points d’appui
L’échange entre collègues avec des projets similaires. Le partage d’actions avec l’association AGEEM, la rencontre avec des actions similaires lors des congrès de l’AGEEM. La formation MEEF avec notamment les interventions de Mme E. Bertrand et de M P. Cury évoquant les éducations à (ESPE Moulins) et les apports théoriques liés au sujet.

Difficultés rencontrées
• Les changements structurels et organisationnels comme les variations du rythme scolaire qui permettent ou empêchent des opportunités, le changement d’équipe qui demande un temps de prise de connaissance de l’action.
• Le renouvellement des familles turn-over sur trois ans seulement et un nombre grandissant de famille changeant d’école au cours de la scolarité en maternelle de leur enfant.
• L’information des actions aux familles qui malgré les différents canaux employés reste délicate.

Moyens mobilisés
• Les moyens humains résident dans la participation des trois enseignantes de l’école.
• Sur le plan matériel, nous utilisons les locaux de l’école suivant les besoins comme, par exemple, la salle d’arts plastiques pour les ateliers artistiques du mercredi matin, la salle polyvalente pour les grands regroupements…
• Une participation financière a été accordée par notre municipalité et par le REP+ pour la mise en place des mercredis culturels ou du jardin de partage. Les temps des différents modules sont pris sur les créneaux d’APC.

Partenariat et contenu du partenariat
L’équipe est accompagnée pour la création du projet artistique par la C.P.C. du département en arts visuels : Mme S Mosnier.

Liens éventuels avec la Recherche
Par sa fonction de formatrice, un des membres de l’équipe a commencé de mener une investigation pour regrouper des références théoriques en rapport avec l’action dont en voici une bibliographie non exhaustive.
Feyfant, A. (2011). Les effets de l’éducation familiale sur la réussite scolaire. Dossier d’actualité Veille et analyses de l’IFE, n° 63, juin. LYON : ENS de LYON. Feyfant, A. (2015). Coéducation : Quelle place pour les parents ? Dossier veille de l’IFE, n° 98, janvier. LYON : ENS de LYON. Mackiewicz, M. (2010). Coéducation à l’école maternelle et engagement parental en Réseau d’Éducation Prioritaire. La revue internationale de l’éducation familiale, 28, (2), 73-91. Doi :10.3917/rief.028.0073. Nanhou, V., Desrosiers, H., Belleau, L. (2013). La collaboration parent-école au primaire : le point de vue des parents. Je suis serai, Source : Institut statistique Québec ; vol. 7, Fascicule 3.

Evaluation
Indicateurs d’ordre qualitatif : baisse des incivilités (des élèves et des adultes), baisse de l’absentéisme, augmentation de l’intérêt pour l’école, augmentation de la confiance accordée à l’équipe

Modalités du suivi et de l’évaluation de l’action
Sur un plan quantitatif, nous menons une évaluation interne en relevant pour chaque situation les personnes participantes. De ces relevés, nous distinguons les familles dites « habituées » de celles que nous qualifieront de « non habituées ». Nous les analysons au regard des quatre modules proposés. Parallèlement, nous observons lors des échanges avec la famille l’évolution au cours de l’année, à l’aide des critères suivants : type de contenu, qualité de l’échange, acceptation du discours de l’enseignant et types de comportements adoptés.

Effets constatés

- Sur les acquis des élèves : Pour l’instant, les effets sur les élèves sont multiples mais ils portent essentiellement sur la communication avec leurs pairs ou avec les adultes. Ils marquent une volonté de partager et de transmettre les règles de jeux apprises lors des goûters jeux de société, de raconter ce qu’il s’est passé lors de ces modules favorisant pleinement l’entrée dans la communication pour les plus jeunes. Suite aux mercredis matin, nous constatons que les élèves de MS vont plus facilement vers les autres adultes de l’école.
- Sur les pratiques des enseignants :
Climat relationnel : collaboration, coopération, enrichissement par le partage d’idées entre collègues pour construire les modules. Meilleure compréhension de certaines réactions, attitudes, comportements grâce à l’observation des élèves dans des contextes différents et au dialogue plus libéré avec les familles qui peut permettre de trouver d’autres manières plus appropriées d’agir avec eux dans le quotidien de la classe.
Qualité de l’enseignement : Travail de conception et de préparation qui éveille la curiosité et ouvre l’esprit ce qui nourrit la pratique de classe quotidienne, comme par exemple : préparation de l’atelier des mercredis culturels en commun qui apporte des idées, des outils nouveaux pour travailler sur les couleurs de manière différente.
- Sur le leadership et les relations professionnelles : Cette action a permis un renforcement du travail en équipe, de développer une réflexion sur les gestes professionnels, les attitudes à adopter afin d’améliorer la communication avec les familles, de créer une relation établie sur la confiance et non sur la défiance.
- Sur l’école / l’établissement : Au fur et à mesure de la mise en œuvre des modules, nous observons un changement progressif sur plusieurs aspects : Certains parents présents lors de ces actions osent davantage s’adresser à l’enseignant de manière spontanée, sans barrière. Instauration d’un climat de confiance et de compréhension entre école/famille.
- Plus généralement, sur l’environnement : Les relations entre les différentes familles de l’école semblent s’améliorer, les parents se découvrent lors des différentes actions puis échangent plus facilement.

Extrait du site Expérithèque : Du partage des valeurs citoyennes vers une réelle coéducation famille/école

Répondre à cet article