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Commentaires et réactions après la publication des textes sur les "groupes de besoins"

20 mars

Les « groupes de besoin » de Gabriel Attal : un modèle inopérant qui relève de la pensée magique

Le Premier ministre a confirmé les groupes de niveau en français et en maths pour les 6e et 5e dès la rentrée prochaine. Pour Christophe Roiné, professeur des universités en sciences de l’éducation et de la formation, c’est refuser de considérer que le collectif par sa diversité est un vecteur essentiel de la réussite.

Extrait de liberation.fr du 20.03.20 (un article daté du 16 mars publié dans le quotidien
le 20 mars)

 

Groupes de niveau en français et en maths au collège : « ils n’auront pas de profs face à eux »

Suite à la publication des arrêtés sur les groupes au collège et la classe de préparation à la seconde, la communauté éducative réagit avec force.

[...] Comment la communauté éducative réagit-elle suite à la publication de ces arrêtés ?

« Sur le principe, les groupes, c’est efficace »
Une journée de grève est prévue mardi 19 mars 2024, à l’appel de l’intersyndicale enseignante, pour dire « non au choc des savoirs, oui au choc des salaires ». Du côté des enseignants, les avis sur ces mesures sont plutôt hostiles, et soulignent leur infaisabilité, en l‘absence d’effectifs suffisants :

Extrait de vousnousils.fr du 18.03.24

 

Des « groupes de niveau » aux « groupes de besoins » : un compromis politique, une incertitude pédagogique
Les textes officiels laissent finalement de la souplesse aux équipes des collèges pour organiser les cours de français et de mathématiques en 6ᵉ et en 5ᵉ en groupes, « selon les besoins des élèves ». Mais la communauté éducative dénonce des « ambiguïtés » et s’inquiète de la mise en œuvre de la réforme.

Extrait de lemonde.fr du 18.03.24

 

Français et maths au collège : les groupes seront finalement « constitués en fonction des besoins des élèves »

L’arrêté sur la mise en place de « groupes » en mathématiques et en français au collège a été publié ce dimanche au JO. L’appellation retenue est celle de Nicole Belloubet et non celle de Gabriel Attal qui évoquait des « groupes de niveaux ».

Extrait de lefigaro.fr du 17.03.24

 

Réactions
« Tout ça pour ça ? » : des syndicats déçus après l’arrêté sur les groupes de niveau au collège

Loin de répondre aux doutes de la profession, l’arrêté publié ce dimanche 17 mars n’enlève en rien le côté « usine à gaz » du dispositif dénoncé par les organisations syndicales et les fédérations de parents d’élèves.

Un compromis politique « clair » mais un « non-sens pédagogique ». Suite à la publication au Journal officiel ce dimanche 17 mars de l’arrêté sur la mise en place de groupes en mathématiques et en français au collège, les syndicats d’enseignants et de chefs d’établissements ainsi que les fédérations de parents d’élèves restent vent debout contre un dispositif qui n’a en rien perdu son côté « usine à gaz ». « On a envie de dire : tout ça pour ça ? casse Sophie Vénétitay, secrétaire générale du syndicat majoritaire Snes-FSU, il y a encore plein de questions, l’organisation concrète sur le terrain est nébuleuse. On est plus face à un jeu d’équilibre politique entre Attal et Belloubet que devant un texte qui prend en compte les enjeux pédagogiques des élèves et des professeurs ». Pour preuve : en ce qui concerne la dénomination exacte du dispositif, c’est balle au centre. Après avoir navigué entre « groupes de niveau », chers à Gabriel Attal, et « groupes de besoin » ainsi renommés par la

Extrait de liberation.fr du 17.03.24

 

Laurence De Cock : Qui va les arrêter ?

Laurence De Cock réagit à la publication du décret sur les groupes de niveau/besoin. Cette tribune, c’est le cri de colère, de désespoir de l’historienne qui s’est toujours battue pour la réussite de tous les élèves, pour une école qui les accueille et qui les accompagne tous. « L’école est à bout de souffle c’est vrai, mais que peuvent bien venir réparer des groupes de niveau ? » écrit-elle. « Ne nous trompons pas, ils sont une capitulation sur le principe de démocratisation scolaire. C’est-à-dire qu’ils prennent acte que, puisque l’école est à bout, elle ne peut pas donner la même chose à tous les enfants. Elle est donc obligée de choisir les chanceuses et chanceux ». « Je vous demande d’imaginer leurs visages, à tous ces enfants quand viendra l’annonce officielle du “groupe”, le couperet social. Le soulagement des uns, la colère et la souffrance des autres », ajoute-t-elle. Un appel poignant dans lequel se retrouveront les défenseur·es de la démocratisation scolaire.

“Je ne voulais pas être dans la classe des déchets“, c’est ainsi que Patrick, 14 ans, avait justifié d’avoir mis le feu à son collège du XIXe arrondissement. C’était le 6 février 1973, quelque temps avant l’instauration du collège unique. Tous les collèges avaient des classes de niveau. Aucun élève n’était dupe, il y avait les classes de nuls et celles des bons. On savait que les premiers ne rattraperaient jamais les seconds que le collège préparait doucement au monde du travail. Ces élèves que l’on disait “pas faits pour l’école” au lieu d’admettre que c’était plutôt l’inverse : une école pas faite pour eux.

L’histoire de la démocratisation scolaire, aussi chaotique soit-elle, a toujours fonctionné selon une double logique : d’abord réduire le nombre de voies scolaires parallèles pour scolariser les enfants ensemble le plus longtemps possible, ensuite donner plus à ceux qui ont moins.

Hier, le décret publié au Journal Officiel, comme une claque de plus aux enseignants, fait exactement le contraire : multiplier les voies parallèles et donner moins à ceux qui n’ont déjà pas beaucoup.

Le travail de décryptage des effets de l’instauration des groupes de niveau a déjà été amplement fait. Mais on sait bien que le gouvernement confond les enseignants avec son paillasson depuis de nombreuses années désormais et qu’il n’a que faire de leur avis, pire, de l’expertise qu’il leur confisque et dénie. Le gouvernement s’adresse à l’”opinion publique”, la chair à sondages, le vivier électoral. C’est ainsi que va notre monde : donner du grain à moudre aux lieux communs et nourrir l’information continue sur le dos de celles et ceux dont on ne cherche plus les votes. En l’occurrence, les lieux communs disent ceci : “Ce n’est pas plus mal que mon fils ne soit plus avec des élèves qui le freinent dans sa progression”, ou encore “C’est une très bonne chose que l’on aide les enfants en difficulté en les mettant tous ensemble pour qu’ils rattrapent leur retard” et enfin “De toute façon il y a déjà des groupes de niveau dans les collèges et de la sélection donc autant l’officialiser”. On opine du chef, on espère secrètement que sa propre progéniture passera entre les mailles du filet de la classe des nuls et on passe à la suite du flux continu de l’information.

Peu importe que la science montre que les groupes de niveau ne peuvent qu’accentuer les inégalités scolaires ; qu’ils activent chez les uns la prétention de leur supériorité intellectuelle et sociale, chez les autres l’injustice et l’autodisqualification qui sont des freins majeurs aux apprentissages. Peu importe que les chefs d’établissements et les enseignants affirment qu’on fonce droit dans le mur et nos enfants avec ( ils se plaignent tout le temps non ?). Le gouvernement n’est mû que par le niveau d’affichage de sa fermeté et son faux semblant d’intérêt pour l’école et la jeunesse. Et il arrive trop souvent que l’opinion publique paresseuse s’en tienne là, tant elle a bien d’autres chats à fouetter.

Aussi faut-il peut-être parler à la morale et aux cœurs des gens qui sont légitimement en colère contre une école publique souvent défaillante. Oui l’école est épuisée. Depuis des décennies elle tente de résister au rouleau compresseur de la néo-libéralisation qui brise le travail (et parfois la vie) de celles et ceux qui y travaillent. Qui vide le travail d’enseignant de son sens en imposant des méthodes, des rythmes et une quête de résultats impossible à assouvir. Depuis des décennies, à moyens constants, on demande plus aux enseignants en les privant de tout ce qui faisait la saveur du métier : le plaisir de travailler avec des enfants, des adolescents, de les voir sourire, pleurer puis sourire à nouveau ; de calmer la colère de ceux qui ne comprennent pas, d’apporter un peu de réconfort à ceux qui n’en ont pas chez eux. Bref, la saveur de la relation humaine et pédagogique. Ce rouleau compresseur n’attaque pas que les adultes. C’est aussi lui qui prive les enfants du droit à l’enseignement surtout dans les quartiers dits “difficiles” comme le montre le mouvement actuel du “93” où un enfant perd en moyenne l’équivalent de 18 mois de scolarité sur son parcours. C’est lui, ce rouleau compresseur, qui vide les fonds sociaux des établissements et prive les élèves de sorties scolaires ou, pour les plus pauvres, de l’opportunité d’un repas équilibré à la cantine. L’école est à bout de souffle c’est vrai, mais que peuvent bien venir réparer des groupes de niveaux ?

Ne nous trompons pas, ils sont une capitulation sur le principe de démocratisation scolaire. C’est-à-dire qu’ils prennent acte que, puisque l’école est à bout, elle ne peut pas donner la même chose à tous les enfants. Elle est donc obligée de choisir les chanceuses et chanceux.

Mais ce ne sont pas des mains anonymes qui effectueront ce tri, ce sont les “instit’s” de CM2. Que tout le monde mesure alors la main qui tremble au moment de poser un livret scolaire sur le tas des “nuls”. Car dans ce tas, il y a l’enfant qui est arrivé en France récemment et ne maîtrise pas encore bien le français ; il y a celui qui a perdu son père ou sa mère et qui tente de surmonter son chagrin ; il y a celui qui a été malade ou bien encore celui qui nous dit “je veux devenir docteur pour les animaux” et qui ne le sera jamais. Le tas sur lequel on demande aux enseignants de poser un dossier signe la suite de la scolarité et le devenir social d’un enfant. Qui est entré dans le métier pour ça ? Personne.

En outre, soit le ministère s’illusionne, soit il nous ment, car il n’y aura pas de “changements de groupes”, c’est techniquement infaisable, sauf à la marge, pour les quelques “exceptions consolantes” (l’expression est de Ferdinand Buisson) ; les autres resteront dans leur couloir d’assignation. Aux parents je veux dire ceci : Ces “autres”, ce sont les petits auxquels vous donnez des cartons d’anniversaire, c’est l’enfant de la voisine que vous prenez chez vous pour la dépanner, celui que vous grondez au square parce que c’est un peu votre rôle après tout. C’est le “meilleur ami pour la vie” de votre fils ou fille, celui dont vous dites “c’est un peu mon enfant”. Je vous demande d’imaginer leurs visages, à tous ces enfants quand viendra l’annonce officielle du “groupe”, le couperet social. Le soulagement des uns, la colère et la souffrance des autres.

Je propose enfin que nous imaginions le modèle social que cela dessine : la concurrence, la frustration, les destins qui se dessinent et se décident dès la naissance.

Qui veut de cela ? Qu’attendons-nous pour, ensemble, les arrêter ?

Laurence De Cock

Extrait de cafepedagogique.net du 18.03.24

 

Voir la sous-rubrique Groupes de besoin avec son nouvel intitulé
et le MC Groupes de besoin (gr 5)/

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