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Tribune. Essor de l’enseignement privé, asphyxie des universités : l’Etat joue contre son camp
Mathis d’Aquino, doctorant à Sciences Po Bordeaux, estime que les pouvoirs publics doivent cesser de financer l’offre d’enseignement supérieur privée et de placer les universités dans une situation financière intenable.
La chronique de fin d’année 2024 sur les aides à l’embauche d’apprentis1 soulève des interrogations quant au financement de l’enseignement supérieur privé. Depuis la réforme de 2018 sur l’apprentissage, le secteur privé lucratif du supérieur connaît une croissance exponentielle, portée par la création massive de centres de formation d’apprentis (CFA), captant les fonds publics de l’apprentissage.
Soutenues par un cadre législatif aussi libéral qu’obsolète, ces écoles jouissent d’une agilité déconcertante, là où les universités publiques subissent une rigidité structurelle. Le privé se déploie très vite, sur des niches sectorielles qui s’étendent du design jusqu’au droit.
Mais ce « succès » repose sur une demande artificielle créée par des dispositifs marchands, et sur un soutien de l’État dont il est difficile de comprendre les justifications.
Les écoles privées s’insèrent en effet dans un maquis informationnel, où l’opacité devient une stratégie. La recherche empirique que j’ai menée à Bordeaux entre 2023 et 2024 révèle que familles et étudiants peinent à distinguer les degrés de reconnaissance d’une formation.
Certaines écoles vendent comme « diplôme d’Etat » de simples titres RNCP [Répertoire national des certifications professionnelles, NDLR.], alors que ces derniers ne sont qu’une certification par le ministère du Travail de l’adéquation entre la formation et les besoins économiques à un instant T, sans contrôle de la qualité des enseignements délivrés.
De même, les établissements privés jouent du halo terminologique qui entoure les noms des diplômes, comme « Bachelor » (terme non réglementé) ou « Mastère », jouant clairement sur l’ambiguïté avec le « Master » délivré par les universités publiques et reconnu, lui, par l’État. Malheureusement pour les étudiants qui peinent – légitimement – à s’y retrouver, un petit « e » en plus, ce sont de grandes opportunités en moins.
La DGCCRF a mis en lumière l’usage illégal de mentions telles que « licence » ou « master », observable dans les salons d’orientation et sur Internet [...]
Extrait de alternatives-economiques.fr du 08.01.25
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