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L’audition de Nathalie Elimas au Sénat le 2 décembre 2020 (Le Café, Tout Educ)

3 décembre 2020

Quels moyens pour la réforme de l’’éducation prioritaire ?
Interrogée par la commission de l’éducation du Sénat le 2 décembre, Nathalie Elimas, secrétaire d’Etat à l’éducation prioritaire, entretient le flou sur les moyens donnés à la réforme des Rep. Rien n’est clair : ni le critères d’entrée dans la nouvelle éducation prioritaire, ni l’existence même de moyens supplémentaires pour les expérimentations. L’hypothèse d’économies réalisées sur le dos de l’éducation prioritaire sort renforcée de cette audition.

N Elimas et le Sénat

Nathalie Elimas pouvait arriver confiante devant la commission de l’éducation du Sénat. Son président, Laurent Lafon, a rédigé en octobre 2019, avec Yves Roux, un rapport qui a inspiré, avec le rapport Mathiot-Azéma, la réforme ministérielle. Il a notamment inventé d’indice d’éloignement comme critère d’affectation des moyens afin de favoriser les écoles rurales face aux écoles des quartiers. Le rapport Lafon Roux est aussi pour conserver les Rep+ mais délabelliser les Rep et les remplacer par une affectation graduée de moyens dans le cadre de contrats locaux. Toutes idées qui fondent le projet ministériel.

Pourtant l’audition de la ministre a pointé de nombreuses zones de flou dans son projet. Bien qu’acquis à la délabellisation, Jacques Grosperrin (LR) a pointé que la réforme arrive trop tard ("en septembre ce sera votre première et dernière rentrée") et la question des moyens. Céline Brulin (PC) rappelle qu’une centaine de maires dénoncent le risque de décrochage des quartiers populaires. Elle souligne l’absence de la notion de réseaux dans le projet ministériel, chaque établissement passant un contrat d’accompagnement avec le rectorat. Marie Pierre Monnier (PS) rappelle la réaction négative de l’OZP, une association d’acteurs incontournable. "J’ai le sentiment que cette expérimentation met en concurrence les quartiers et le rural, alors que ce sont deux problématiques différentes", dit-elle. Pour Sylvie Robert (PS) sans moyens supplémentaires la réforme "va déshabiller Paul pour habiller Pierre". Paradoxalement ce sont deux élus de l’opposition, S Piednoir et M Brisson (LR) qui soutiennent l’expérimentation.

Désamorçage

La ministre a semblé vouloir gagner du temps. "A ce stade et même pour la rentrée 2021, nous ne toucherons pas à la carte des Rep et Rep+", dit-elle à plusieurs reprises. Elle promet le lancement de l’expérimentation dans trois académies en septembre 2021 et une évaluation au printemps 2021. ce qui repousserait une éventuelle généralisation à la rentrée 2022, autrement dit pour le ministre suivant. La liste des établissements concernés par l’expérimentation sera connue en janvier 2021.

Elle a justifié la réforme par la volonté d’introduire "plus de progressivité" avec "une analyse plus fine du terrain" et de faire entrer des établissements ruraux enclavés et des LP dans la nouvelle politique. Les contrats seraient liés à des objectifs "d’élévation du niveau général" des élèves.

Elle a présenté les critères pour faire partie de la nouvelle politique. Il y aura des critères spécifiques à l’établissement comme l’indice d’éloignement, des critères sociaux (pcs, bourses), des critères liés au personnel enseignant (% de titulaire, ancienneté) et des critères "propres aux académies" : climat scolaire, décrochage, équipement sportif.

On passe donc d’une politique de lutte contre les inégalités sociales à un ensemble très flou qui va permettre d’inclure dans cette politique des établissements qui ne sont pas des ghettos sociaux mais qui sont en zone rurale ou des établissements peu équipés ou ayant peu de titulaires. Ces dernières catégories concernent particulièrement des établissements catholiques. On se rappelle que le secrétaire général de l’enseignement catholique a déclaré que JM Blanquer lui a confirmé l’entrée d’établissements privés dans la nouvelle politique d’éducation prioritaire.

Enfumage

La secrétaire d’Etat n’avait pas grand chose à dire sur la disparition des réseaux si ce n’est dire que les nouveaux établissements entreront dans des réseaux. Mais sans politique nationale et avec des établissements choisi pour leur éloignement, on se demande ce que le mot réseau veut dire.

Sur le financement de la réforme, la ministre a tenu des propos contradictoires. "On fonctionne à moyens constants" a répété à deux reprises N Elimas. Tout en ajoutant : "il va y avoir des moyens spécifiques pour l’expérimentation" : formations, crédits pédagogiques, DHG.

C’est suffisamment vague pour que le Snalc publie un communiqué où il considère que les moyens constants "disqualifient l’ensemble du projet" et demander "l’abandon immédiat de cette expérimentation".

Le projet ministériel amènera bien un transfert des moyens éducatifs des ghettos sociaux vers des établissements qui n’ont pas les mêmes urgences mais qui auront un poids politique local plus important. N Elimas a du visiblement du mal à défendre une politique qui est en rupture avec l’Etat social depuis 40 ans.

François Jarraud

 

Education prioritaire, la "feuille de route" de Nathalie Elimas présentée au Sénat

Hier 2 décembre, Nathalie Elimas se présente à la Commission des affaires culturelles du Sénat comme la première Secrétaire d’Etat dédiée à l’éducation prioritaire de la Vème République et parle de "feuille de route" quant à l’expérimentation inscrite dans un cadre national qui sera mise en place dans trois académies (Lille, Marseille, Nantes) en septembre 2021. Sa feuille de route s’appuie, selon elle, sur les rapports de la Cour des comptes, des sénateurs Lafon et Roux et celui d’Azéma-Mathiot. Cette feuille repose sur trois piliers : "la refonte de la carte REP et REP+ selon les résultats de l’expérimentation, refonte non envisagée pour 2021, la prise en compte des autres dispositifs tels que les cités éducatives (80 à ce jour, 40 prévues) ou l’aide aux devoirs avec des ajustements distanciels pour les zones rurales et aussi la lutte contre la pauvreté." Pour cette thématique, Nathalie Elimas évoque les fonds sociaux, le recours aux bourses et les aides aux repas (petits déjeuners, cantine à 1 euro).

A la rentrée de 2021, l’expérimentation se fonde sur un panel significatif d’académies du fait de la diversité géographique et leurs caractéristiques propres. Elle précise qu’un comité de pilotage a été créé pour poser les bases de l’évaluation. L’idée serait de prévoir plus de progressivité et de prise en compte des contextes locaux. Constatant que 70% des élèves défavorisés n’entrent pas dans le dispositif REP/REP+, cette expérimentation doit prendre en compte de nouveaux publics et de nouveaux territoires : les lycées professionnels, les établissements ruraux et enclavés, les "écoles orphelines" (écoles qui connaissent les mêmes difficultés que leurs homologues en éducation prioritaire mais qui ne sont pas dans le réseau d’un collège en EP), mais aussi les établissements situés dans les territoires en difficulté en raison de la fermeture d’une grosse entreprise. Au stade de l’expérimentation, les moyens sont constants. La présentation des résultats de cette évaluation est prévue en 2022. En 2023, en cas d’échec, l’expérimentation serait abandonnée.

Également, elle rappelle que se tient, en ce moment, le Grenelle de l’éducation où, sur dix ateliers, trois prennent en compte l’éducation prioritaire.

Les inquiétudes des sénateurs portent sur la suppression des REP, les moyens, l’articulation ministère et académie, le risque de mise en concurrence de la ruralité et de la ville, le choix des académies, les critères d’évaluation de l’expérimentation, l’urgence des décisions à prendre compte-tenu du contexte sanitaire et de la crise sociale. Ils s’inquiètent également les difficultés plus récurrentes, le problème de la formation des enseignants, la stigmatisation voire la ghettoïsation des établissements, les "territoires perdus" de la République… Ils s’interrogent également sur la fin possible d’un réseau considéré comme un élément fondateur de l’éducation prioritaire et sur les risques qu’un tel éclatement générerait. Les sénateurs mettent en avant la nécessité d’accroître le rôle des élus locaux et des collectivités territoriales. Sur ce dernier point, la secrétaire d’Etat précise qu’il est inscrit sur sa "feuille de route" et elle évoque les outremers dont "les besoins sont spécifiques".

Extrait de touteduc.fr du 02.12.20

 

Commission de la culture, de l’éducation et de la communication
Mercredi 2 décembre 2020
Audition de Mme Nathalie Élimas

Instance(s) : Commission de la culture, de l’éducation et de la communication
Intervenant(s) : ELIMAS Nathalie (Secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale et des sports, chargée de l’éducation prioritaire.)

Sénateur(s) : BARGETON Julien,BILLON Annick, BRISSON Max, BRULIN Céline de LA PROVÔTÉ Sonia, DREXLER Sabine, FIALAIRE Bernard, GROSPERRIN Jacques, LAFON Laurent, MONIER Marie-Pierre, OUZOULIAS Pierre, PIEDNOIR Stéphane, ROBERT Sylvie
Thème(s) : CultureÉducationSports

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de 08.46.59 à 10.02.31

 

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